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Il eft toûjours chagrin & ne dit pas un mot, Depuis qu'il a pris femme il eft devenu fot, Auffi quand on en prend on court rifque de l'être; L'Epoux en ce cas là n'est pas toûjours le maître. Son pouvoir ne fçauroit éviter ce malheur; Si l'on ne m'en croit pas, qu'on voye le Vaffeur, Je le puis bien citer, la chofe eft fort publique, On fçait qu'il eft cocu par arrêt authentique. Damis eft comme lui, Colin l'eft en fecret, Si je les contois tous, je n'aurois jamais fait; Il faudroit remonter jufques au premier homme, Sçavoir fi le ferpent ne le trompa qu'en pomme, Peut-être le fut-il, du moins s'il ne le fut, Il étoit très-facile, & fort peu s'en falut, Ce n'est pas toutefois que j'en veüille connoître, Car s'il ne le fut pas, il pouvoit du moins l'être, Et moi qui ne veux pas me mettre en ce danger, Je fuis le mariage & n'y veux pas fonger.

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SATIRE XIV.

Uel eft donc ce Cahos & quelle extravagance,

QAgite maintenant l'Esprit de notre France:

Quel Démon infernal a mis des changemens,
Et tant de nouveautez dans tous nos réglemens.
On fait & l'on défait, on rétablit, on casse;
Rien ne demeure entier, quelque chofe qu'on faffe;
On retranche les Saints, on les refait après :
On plaide au Châtelet quand on fête au Palais,
On trouve à réformer même fur la réforme:
L'ancien droit à prefent eft un droit tout difforme.

On ne le connoît plus tant on le voit changé.
Si de même on vouloit réformer le Clergé,
Si l'on vouloit ôter la moitié de leurs dixmes,
La réforme pourroit bien réformer des crimes.
Ces trop grands revenus perdent beaucoup de gens,
Et ces riches Pasteurs font toûjours indigens.
Pourquoi ceux qui devroient imiter les Apôtres,
Ont-ils feuls plus de bien qu'il n'en faut pour dix
autres ?

On devroit bien régler un tel déréglement,
Et montrer aux Pasteurs à vivre sobrement.
On ne voit que de gens de mîtres & croffes,
Faire aujourd'hui rouler de fuperbes Caroffes;
Sans fe reffouvenir qu'autrefois l'Eternel,
Ne monta qu'une âneffe en un jour folemnel.
On parle des impôts dont la France eft remplie,
Tout le monde en murmure & tout le monde en
crie.

Qu'eft-cé en comparaifon de tant d'injuftes droits, Qu'aujourd'hui les Pasteurs levent en tous endroits.

Tout le monde en naiffant doit à la Sacristie,
Il faut payer l'entrée, & payer la fortie.
Enfin tous les Pasteurs par un fatal accord,
Trouvent dequoi gagner en la vie, en la mort,
Bonne condition qui donne de quoi vivre ;
En lifant feulement quatre feüillets d'un livre;
Recitant tous les jours trois ou quatre Oraifons,
Trouvent de quoi fournir aux frais de leurs mai-
fons!

Que le Breviaire eft bon dans le fiècle où nous
fommes,
[mes :
Un Pasteur eft toûjours le plus heureux des hom-

Veut-on fe marier? faut acheter un banc,
On en achette deux, le Pasteur vous les vend:
Vous ne les auriez pas s'il manquoit une Obole :
Comment nommer cela fi ce n'est Monopole,
Qu'un facré Partifan a mis injuftement,
Aux yeux de tout Paris fur ce grand Sacrement?
Voulez-vous, vous dit-on, la groffe fonnerie ?
C'est ainsi que vous dit une de ses Harpies.
Monopole jamais monta-t'elle à tel point?
Hé Meffieurs les fonneurs, n'en rougiffez-vous
point?

Ah! que tous ces impôts vous coutent de reproches :

En nous faisant payer le fon d'une cloche.
On fonne donc enfin, & pour vos cinq écus,
L'on vous donne du fon & du fon tant & plus.
Un infame Crieur de qui l'ame inhumaine,
Ne voit aucun vivant qu'avec beaucoup de peine,
Ce funeste Corbeau qui ne vit que de morts,
Marchande infolemment pour enterrer les corps.
Choififfez-vous, dit-il, l'endroit de votre foffe;
Plus elle eft près du Chœur, & plus la fomme eft
groffe.

Il faut tant pour le fond, & pour le maître-Autel;
Entre tous les impôts en voyons-nous un tel?
Et qui peut plus choquer les droits de la Nature,
Que de vendre à des morts le droit de fépulture.
Je paffe volontiers fur le tour du bâton,
Dont un Pasteur avare attrape le teston,
Je fuis fort Catholique, & je n'ai point envie,
De cenfurer ici les Cenfeurs de ma vie.
Je croi que ce qu'ils fonta de bonnes raisons,

Et que tous leurs Patrons font bien leurs guérifons.

Qu'on guérit de tout maux en leur offrant un cierge,
Qu'on en guérit plûtôt s'il eft de cire vierge,
Que qui ne guérit pas n'a pas affez de foi;
Et je croi tout cela parce que je le voi.
Pour moi je ne veux point pénétrer le mystére,
Mon Pasteur me l'a dit, c'eft à moi de me taire.
Je croi tout ce qu'il dit, s'il fait mal, à fon dam:
Mais je fouffre à regret que l'on achète un ban,
Et que les ornemens qui fervent à l'Eglife,
Soient de différens prix comme la Marchandise.
Si vous voulez les beaux en un enterrement,
Il faut tant, vous dit-on, pour un tel parement.
Et pour l'argenterie un crieur vous demande,
Si vous voulez avoir la petite ou la grande.
Le prix eft différent, if vous coûtera tant;
Ainfi l'on ne fait rien, fi l'argent n'eft comptant,
Jamais aucun crédit ne fe fait à l'Eglife; [mife.
N'avez-vous point d'argent, la croix de bois eft
Taifons nous toutefois, car il eft dangereux
De parler des Pasteurs, & de parler mal d'eux,
Tels hommes ne font pas des fujets de Satire,
Mufe, va prendre ailleurs quelque fujet pour rire.

Fin des Satires.

EPISTRES.

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