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ton plus bas; c'est ordinairement lorsque la force du cri est modérée.

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CRI PLAINTIF, GÉMISSEMENT, SANGLOT, SOUPIR. Ces mots peignent les accens de la douleur de l'ame. En voici la différence selon l'explication physiologique donnée par Buffon.

CLAMEUR.

CRIS. V. ACCLAMATION,
CRITIQUE. V. Aristarque.
CRITIQUE. V. Censure.

CRITIQUE, SATIRE. Il semble que dan le cœur du satirique il y ait un certain germe de cruauté enveloppé qui se couvre de l'inté rêt de la vertu pour avoir le plaisir de dé chirer au moins le vice. Il entre dans ce sentiment de la vertu et de la méchanceté, de la du désir de se venger, et une sorte de dépit haine pour le vice, et au moins du mépris, de ne pouvoir le faire que par des paroles.

C'est cet esprit qui est une des principales Lorsqu'on vient à penser tout à différences entre la satire et la critique. Cellecoup à quelque chose qu'on désire ardemment, ou idées du bon et du vrai dans les ouvrages ci n'a pour objet que de conserver pures les qu'on regrette vivement, on ressent un tressaillement ou serrement intérieur; ce mou-l'auteur, sans toucher ni à ses talens, ni à rien d'esprit et de goût, sans aucun rapport vement du diaphragme agit sur les poumons, les élève, et y occasione une inspiration vive et prompte qui forme le soupir. Lorsque l'ame a réfléchi sur la cause de son émotion et qu'elle ne voit aucun moyen de remplir son désir ou de faire cesser ses regrets, les soupirs se répètent; la tristesse, qui est la douleur de l'ame, succède à ces premiers mouvemens.

par une

de ce qui lui est personnel. La satire, au conelle enveloppe le trait dans un tour ingénieux, traire, cherche à piquer l'homme même; et si c'est pour procurer au lecteur le plaisir de n'approuver que l'esprit.

CROIRE QUELQUE CHOSE, CROIRE À QUELQUE CHOSE, CROIRE EN QUELQUE CHOSE, CROIRE QUELQU'UN, CROIRE À QUELQU'UN, CROIRE EN QUELQU'UN. Croire en quelque chose c'est l'estimer véri table. Je crois ce que vous me dites; je crois

Lorsque cette douleur de l'ame est profonde et subite, elle fait couler les pleurs; si l'air entre dans la poitrine par secousses, il se fait plusieurs inspirations réitérées espèce de secousse involontaire. Chaque in-l'immortalité de l'ame. Cr ire à quelque chose spiration fait un bruit plus fort que celui du c'est y ajouter foi, y avoir confiance, s'y fier. soupir, c'est ce qu'on appelle sanglots. Les san- Je crois en la miséricorde divine,j e ne crois glots se succèdent plus rapidement que les pas à l'efficacité de ce remède. Croire quel soupirs, et le son de la voix se fait entendre qu'un c'est ajouter foi à ce qu'il dit. Il ne un peu dans le sanglot. faut pas croire les menteurs. Croire à quelqu'un c'est croire à son existence. Croire aux sorciers, c'est croire ce qu'ils disent. sorciers, c'est croire qu'il y en a; croire les

Les accens en sont encore plus marqués dans le gémissement. C'est une espèce de sanglot

Croire en quelqu'un ou en quelque chose c'est croire à son existence ou à ses paroles par un pur motif de religion ou de foi. Croire en Dieu, croire en Jésus-Christ.

CROIRE. V. ACCROIRE.

continué dont le son lent se fait entendre dans l'inspiration. Son expression consiste dans la continuation et la durée d'un ton plaintif formé par des sons inarticulés. Ces sons du gémissement sont plus ou moins longs, suivant le degré de tristesse, d'affliction et d'abattement qui les cause, mais ils sont toujours CROIRE, ESTIMER, JUGER, PENSER. répétés plusieurs fois; le temps de l'inspiration On emploie ces quatre mots pour manifester est celui de l'intervalle du silence qui est entre son opinion sur les hommes ou sur les choses. les gémissemens, et ordinairement ces inter-On croit ce qui regarde les hommes d'après valles sont égaux pour la durée et pour la la honne ou la mauvaise opinion qu'on s'en distance. est formée. Je crois que cet homme est sincère; je crois que cet homme est un fourbe.

Le cri plaintif est un gémissement exprimé avec force et à haute voix. Quelquefois ce cri se soutient dans toute son étendue sur le même ton; c'est sur-tout lorsqu'il est fort élevé et très aigu. Quelquefois aussi il finit par un

On estime d'après des connaissances posi tives qu'on a des hommes, leurs qualités bonnes ou mauvaises. Je connais la probité de cet homme, j'estime qu'il remplira bien cette place.

On juge d'après des faits précédens. Il s'est si bien conduit dans toutes les circonstances où il s'est trouvé, que je juge qu'on aura lieu d'être content de lui dans celle-ci. On pense d'après les connaissances que l'on a acquises. Dans l'état de détresse où il se trouve, je pense qu'il sera bien aise qu'on lui offre une occasion de s'occuper utilement,

En parlant des choses, on les croit bonnes ou mauvaises sur les rapports des autres; on estime leurs qualités bonnes ou mauvaises sur la connaissance qu'on en a ou qu'on croit en avoir. On en juge d'après l'expérience. On en pense favorablement ou défavorablement d'après les lumières de la raison ou les égaremens de l'erreur et des préjugés.

FAIRE CROIRE. V. FAIRE ACCROIRE. CROÎTRE. V. AUGMENTER. CROQUIS, ESQUISSE, PENSÉE. Termes de peinture. La pensée est une légère esquisse de ce qui s'est présenté à l'imagination sur un sujet qu'on se propose d'exécuter. Ce terme diffère de celui d'esquisse en ce que la pensée n'est jamais une chose digérée, au lieu qu'une esquisse, quoique projet d'ouvrage, ne diffère quelquefois de la perfection de l'ouvrage même que parce qu'elle est en plus petit volume. Pensée n'a pas la même signification que cr›quis. On dit j'ai fait un croquis de la pensée d'un tel; mais on ne dit point j'ai fait une pensée de la pensée d'un tel.

CROIX. V. AFFLICTIONS.

CROTTE. V. BOUE.

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CROYANCE. V. CRÉANCE.

CROYANCE, FOI. Ces deux mots ont rapport à la persuasion où l'on est de la vérité des choses.

Le mot croyance indique une persuasion déterminée par quelque motif que ce puisse être, évident ou non évident. Croyance fondée sur les sens, sur l'évidence, sur l'autorité.

La foi est une croyance déterminée par la seule autorité de celui qui a parlé. C'est en ce sens qu'on dit avoir foi en quelqu'un, pour dire être persuadé de la vérité de ce qu'il dit. De là vient que l'on peut dire que le peuple ajoute foi à mille fables dont il a la tête rem plie, parce qu'il n'en est persuadé que sur la parole de ceux qui les ont contées; mais on ne peut pas dire qu'un païen qui, déterminé par les raisons naturelles, est persuadé de l'existence de Dieu, ait la foi de cette existence, parce que sa persuasion n'est pas déterminée par l'autorité de la révélation.

le mot croyance on désigne ces opinions avec abstraction du motif sur lequel elles sont appuyées, et par le mot foi on les désigne comme appuyées sur la certitude de la révélation. Un chrétien dira, telle est la croyance des juifs, et non pas telle est la foi des juifs; un catholique, telle est la croyance des protestans, et non pas telle est la foi des protestans. Mais un chrétien dira telle est la foi des chrétiens, s'il veut indiquer les dogmes fondés sur la révélation, et telle est la croyance des chrétiens, s'il veut faire abstraction de ce fondement.

CROYEZ-VOUS QU'IL LE FERA? CROYEZ-VOUS QU'IL LE FASSE? Ces deux expressions, selon l'exactitude de notre langue, dit Andri de Boisregard, sont très différentes, quoique le peuple ait coutume de les confondre.

Quand je dis croyez-vous qu'il le fera? je témoigne par là que je suis persuadé qu'il ne le fera pas; c'est comme si je disais est-il possible que vous soyez assez bon pour croire qu'il le fera? Êtes-vous assez simple pour vous persuader qu'il le fera?

Quand je dis au contraire, croyez-vous qu'il le fasse ? je marque par là que je doute véritablement s'il le fera; et c'est comme si je disais je ne sais s'il le fera, qu'en pensez

vous? Dites-moi ce que vous en croyez

Voilà en quoi consiste la différence de ces deux expressions. Il est inutile d'avertir que ce que j'ai dit du verbe faire, se doit entendre de tous les autres.

Roubaud a critiqué avec raison cette explication. M. Andri, dit-il, a grand tort de reprocher au peuple de confondre ces deux phrases, et on serait peut-être bien trompé si on l'en croyait.

En premier, lieu le sens de ces propositions dépend de la manière dont elles sont prononcées.

En second lieu, il existe entre elles une différence grammaticale. Croyez-vous qu'il le fera? marque déterminément et exclusivement une chose future ou d'un futur contingent. Croyez-vous qu'il le fasse ? peut annoncer ou une chose future ou une chose présente; car le subjonctif qu'il fasse répond également au futur et au présent de l'indicatif, d'où il se forme.

En troisième lieu, ces deux phrases diffèrent par les sentimens particuliers qu'elles indiquent dans celui qui questionne. Dans l'une et dans l'autre il y a un doute supposé; mais Foi et croyance se disent aussi de la collec- ce doute n'est pas le même dans les deux cas. tion des opinions religieuses fondamentales, | Quand vous me demandez si je crois qu'il le d'une personne, d'une secte, etc.; mais par fera, vous doutez s'il le fera, c'est-à-dire

que vous n'osez croire qu'il le fera, que vous craignez qu'il ne le fasse pas. Quand vous me demandez si je crois qu'il le fasse, vous doutez qu'il le fasse, c'est-à-dire vous ne croyez pas ou vous ne pouvez pas croire qu'il le fasse.

Dans le premier cas vous me demandez si je crois qu'il le fera, pour vous former une opinion sur la mienne; dans le second vous me demandez si je crois qu'il le fasse, pour comparer mon opinion avec la vôtre. Cette différence parait très sensible et très bien

fondée.

CRUAUTÉ. V. BARBARIE.

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Ces deux espèces de termes ne sont syno nymes que dans certains cas, car curieux de signe proprement l'envie de savoir, de de couvrir, de voir, de posséder, tandis que soigneux désigue la manière de traiter les choses. On dit curieux et soigneux de sa parure; garder soigneusement ou curieusement quelque chose; conserver soigneusement ou curieusement sa santé, etc. La manière curieuse est plus recherchée, plus avide, plus minutieuse, plus difficile que la manière pu

CRUAUTÉ, FEROCITÉ. Il y a, ce semble, entre la férocité et la cruauté, cette différement soigneuse. rence que la cruauté étant d'un être qui raisonne, elle est particulière à l'homme; au lieu que la férocité étant d'un être qui sent, elle peut être commune à l'homme et à l'a

nimal.

CRUEL. V. ATROCE.

CULTIVATEUR. V. AGRICUlteur.
CUPIDITÉ. V. Avidité.

CURE, GUÉRISON. Ces deux mots ont rapport aux succès que l'on obtient dans le traitement des maladies.

Cure se dit des grandes maladies suivies de la guérison qu'on n'avait pas lieu d'espérer ou qui semblait difficile à opérer.

Guérison signifie en général succès dans le traitement d'une maladie telle qu'elle soit.

Il semble que la cure n'ait pour objet que les maux opiniâtres et incurables, au lieu que la guérison regarde aussi les maladies légères et de peu de durée. Plus le mal est invétéré, plus la cure est difficile. On fait une cure, on procure une guérison.

On dit une belle cure et une guérison prompte et parfaite; mais je ne crois pas qu'on puisse dire, comme le prétend Girard, une cure facile; car la cure n'ayant, selon lui,

L'homme curieux de sa parure y met de la recherche, de l'importance, une envie de se faire distinguer ou remarquer; l'homme soigneux de sa parure y met un soin convenable ou qu'on ne saurait blâmer, une attention soutenue, une envie de ne pas s'exposer à la critique ou au blâme. Vous prendrez pour un petit esprit celui qui est curieux dans ses ajustemens; vous prendrez pour un homme décent ou propre celui qui est soigneux dans son habillement. Des soins trop curieux annoncent un dessein particulier ou une faiblesse d'esprit.

On garde soigneusement ce qui est utile; on garde plutôt curieusement ce qui est rare. faire; on est curieux dans les choses qu'on se On est soigneux dans les choses qu'on doit plaît à faire. La raison ou l'attachement nous rend soigneux; le goût ou la passion nous rend curieux.

Soyez plus soigneux de votre honneur, et moins curieux de votre réputation.

Le plus heureux naturel a besoin d'être soigneusement cultivé. Les inclinations des enfans doivent être curieusement observées.

Celui qui est soigneux de sa santé, la conserve; celui qui en est curieux la perd. (RouBAUD.)

D'AILLEURS. V. AILLEURS.

DAM, DOMMAGE, PERTE. Le premier de ces mots n'est plus guère en usage que parmi les théologiens pour signifier les peines que les damnés souffriront par la privation de la vue de Dieu, ce qu'on appelle la peine du dam; il signifiait autrefois tort, dommage, dégât, action de nuire, condamnation, perte. Dommage, diminution de biens causée à quelqu'un par un autre, soit à dessein de nuire, soit par négligence ou impéritie.

Perte, privation de quelque chose d'avantageux, d'agréable ou de commode qu'on avait. La perte des biens, la perte de la vue, de la santé, etc.

Dommage diffère de perte, en ce qu'il désigne une privation qui n'est pas totale. Ainsi l'on dit la perte de la moitié de mon revenu me causerait un dommage considérable.

La perte se remplace, un dommage peut se réparer.

DAMNATION, REPROBATION. La damnation est la condamnation aux peines éternelles de l'enfer; la réprobation est l'exclusion de la vie éternelle et la destination aux supplices de l'enfer.

D.

Danger regarde le mal qui peut arriver. Péril et risque regardent le bien qu'on peut perdre, avec cette différence, que péril dit quelque chose de plus grand et de plus prochain, et que risque indique d'une façon plus éloignée la possibilité de l'évènement. De là ces expressions, er danger de mort, au péril de la vie, sauf à en courir les risques. Le soldat qui a l'honneur en recommandation ne craint point le danger, s'expose au péril, et court tranquillement tous les risques du métier. Danger s'emploie quelquefois au figuré, pour signifier un inconvénient. Je ne vois aucun danger à sonder ses intentions avant de lui proposer cette affaire.

DANS, EN. Ces deux prépositions peuvent marquer ou un rapport de lieu, ou un rapport de temps, ou indiquer l'état et la qualification.

Girard, et après lui tous les autres grammairiens ont dit que dans emporte avec soi une idée accessoire ou de singularité ou de détermination individuelle; et voilà pourquoi, ajoutent-ils, dans est toujours suivi de Particle devant les noms appellatifs, au lieu que en présente un sens qui n'est point resLa damnation livre actuellement les réprou- serré à une idée singulière; c'est ainsi qu'on vés aux peines de l'enfer, et les damnés, dit d'un domestique, qu'il est en maison, c'estdisent les théologiens, les subissent du mo-à-dire dans une maison quelconque; au lieu ment où ils sont condamnés.

que si l'on disait, il est dans la maison, on indiquerait une maison individuelle déterminée par les circonstances. On dit il est en France, c'est-à-dire en quelque lieu de la France; il est en ville veut dire qu'il est hors de la maison, mais qu'on ne sait pas en quel endroit particulier de la ville il est allé. On dit il est en prison, ce qui ne désigne aucune prison quel onque; mais on dit il est dans

La réprobation, qui exclut les réprouvés des récompenses éternelles, ne les livre pas pour cela aux peines éternelles : elle ne fait que les y destiner; de sorte qu'il y a cette différence entre les damnés et les réprouvés, que les premiers sont actuellement en enfer, et que les réprouvés sont destinés à y être précipités après leur mort. Les damnés ne vivent plus parmi nous; les réprouvés y vivent jusqu'à cela prison de la Force, ce qui donne une idée qu'ils sortent de cette vie.

LES DAMNÉS, LES RÉPROUVÉS. V. DAMNATION, REPROBATION.

DANGER, PÉRIL, RISQUE. Ces trois mots désignent la situation de quelqu'un qui est menacé de quelque malheur, avec cette différence, que péril s'applique principalement au cas où la vie est intéressée; et risque aux cas où l'on a lien de craindre un mal comme d'espérer un bien. Un général conrt le risque d'une bataille pour se tirer d'un mauvais pas, et il est en danger de la perdre si les soldats l'abandonnent dans le péril.

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plus précise. Quand on dit, il est dans les cachots, on ajoute une idée plus particulière à l'idée d'être en prison, aussi met-on l'article dans ces occasions. Il est en liberté, il est en fureur, il est en apoplexie; toutes ces expressions marquent un état, mais bien moins déterminé, que lorsqu'on dit, il est dans une entière liberté, il est dans une extrême fureur. On dit il est en Espagne, et on dit il est dans le royaume d'Espagne ; il est en Languedoc, et il est dans la province de Languedoc.

Une multitude d'exemples prouvent que cette règle n'est point tirée de la nature de

ces deux prépositions et n'en marque pas | clairement la différence.

En n'emporte pas toujours un sens qui n'est point resserré à une idée singulière; car quand on dit en ce moment, en cette circonstance, en mon particulier, en ce lieu-ci, en cet endroit-là, en ce temps-là, dans chacune de ces phrases, en a rapport à une idée précise et déterminée; et comme on dit également dans ce moment, dans cette circonstance, dans mon particulier, dans ce lieu-ci, dans cet endroit-là, la règle n'enseigne rien sur la différence des deux prépositions.

Quand on dit qu'un domestique est en maison, cela ne veut pas dire qu'il est dans une maison quelconque, mais cela signifie qu'il n'est plus sans condition, qu'il n'est plus sur le pavé. Cela est si vrai que, pour obtenir cette réponse, est-il en maison, on ne demanderait pas, est-il dans une maison quelconque? mais est-il toujours sans place? est-il toujours sur le pavé? et c'est à ces dernières questions et non à la première qu'on, répondrait il est en maison. En maison, dans ce cas, exprime un état fixe distingué de l'état où le domestique était auparavant, et, en ce sens, l'idée n'est ni vague, ni indéterminée. Il ne s'agit point de savoir s'il est dans telle ou telle maison, mais s'il est en service ou s'il n'y est pas; et quand on dit il est en maison, on exprime d'une manière déterminée le premier de ces

états.

Il est en France ne signifie pas il est en quelque lieu de la France, mais il n'est pas en Italie, en Espagne, en Hollande, etc., mais seulement en France. C'est une idée finie, un lieu déterminé, relativement aux autres pays où il pourrait être. C'est la réponse à dans quel pays est-il? et non pas à est-il dans quelque lieu de la France. Il est en ville veut dire il est hors de sa maison, mais il ne signifie pas qu'on ne sait dans quel endroit de la ville il est allé. On dit à quelqu'un que je dîne en ville, et cela veut dire que je ne dine pas chez moi. Mais en disant cela, on peut fort bien savoir en quel endroit je dine. Toutes ces explications sont donc fausses, et par conséquent la règle aussi.

Le père Bonhours dit qu'il faut mettre toujours en devant les noms lorsqu'on ne leur donne point d'article. Mais que signifie cette règle, si l'on ne m'enseigne pas en même temps quand il faut ne pas donner d'article aux noms ? D'ailleurs, il n'est pas vrai que en ne soit jamais suivi de l'article. On dit en l'absence de mon père, en l'état où je suis, mettons-nous en la présence de Dieu,

Tâchons de trouver des règles plus claires et plus sûres.

En et dans indiquent un rapport de lieu ; un lieu peut être considéré comme un espace circonscrit par des bornes dans lesquelles il est contenu : c'est la préposition dans qui sert toujours à marquer le rapport d'un lieu considéré sous ce point de vue. Je suis dans Paris, je vis dans Paris, etc.

Un lieu peut être considéré comme une étendue distincte d'une autre étendue, et la préposition en indique toujours ce rapport. Quand je dis il est en France, j'indique le lieu où il est par distinction des autres royaumes ou pays où il pourrait être et où il n'est pas. En marque donc ici distinction, opposition, exclusion, et ne rappelle aucune idée de bornes ou de limites. En quel pays est-il ? Non, il

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En France. est en France.

- Est-il en Italie ?

On peut remarquer par ces exemples, combien est fausse la règle des grammairiens qui dit que en emporte un sens qui n'est point resserré à une idée singulière; car ici, on se sert de cette préposition, précisément quand l'idée est singulière, en Italie, en Espagne ; et l'on ne peut plus s'en servir quand elle est suivie d'un mot qui présente l'idée d'une manière générique : c'est alors au contraire qu'il faut employer dans. On ne dit pas il est en royaume de France, en royaume d'Espagne; il faut nécessairement dire, il est dans le royaume de France, d'Espagne.

D'après cette règle des grammairiens, qui met toujours en avec un sens indéfini ou indéterminé, et dans avec un sens défini ou déterminé, un étranger doit dire il est dans l'Espagne, au lieu de il est en Espagne ; et il est en royaume, au lieu de il est dans un royaume; car le mot Espagne présente une idée déterminée, et le mot royaume une idée indéterminée.

Un lieu considéré sous les deux points de vue que nous venons d'indiquer, offre toujours une idée déterminée. Sous le premier, le lieu est déterminé, puisqu'il est considéré comme contenu dans des bornes, dans des limites. Nons entrons dans l'Espagne; nous serrons des hardes dans une armoire. Sous le second, 'il est déterminé, puisqu'il est considéré comme distingué, séparé d'un autre lieu ou de plusieurs autres lieux. Il est en ville, il est en France; ville est déterminé par rapport à la maison de celui dont on parle; France, par rapport aux autres pays. On ne dit pas en Paris, en Lyon, en Bordeaux, parce que les noms propres Paris, Lyon, Bordeaux, indiquent des lieux qui ne sont considérés que

l'est

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