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le pouvoir de la multitude, s'il n'était contenu et balancé par la représentation de la sagesse et de l'expérience, par l'intelligence des traditions légitimes, par la considération de la science, par le respect des caractères et des services, ferait reculer un grand peuple, au lieu de lui ouvrir ces voies de sage progrès dans lesquelles nous désirons voir marcher notre patrie.

Sous des influences purement et exclusivement démocratiques, nos institutions judiciaires, militaires, religieuses, administratives, cette grande armature nécessaire à une nation centralisée, seraient bientôt menacées.

Il y a longtemps qu'on a dit : « La démocratie coule à pleins bords. » Mais encore lui faut-il des bords solides. La limitation du courant démocratique est la question capitale de tous les régimes politiques depuis 1848, et, jusqu'à certain point, depuis 1830, en France. Les matériaux mis en œuvre ont changé; mais on a toujours senti et on n'oublierait pas sans désastre que des barrières sérieuses sont nécessaires.

Les ouvriers des digues diverses que le torrent a renversées sont plus solidaires, en réalité, que leurs rancunes, leurs rivalités, leurs passions ne leur permettant de le constater d'habitude. Ils expient cette solidarité dans la défaite, quand ils ne l'ont pas sentie pendant le combat.

Une sorte d'honneur féodal est souvent appelé chez nous au renfort de l'esprit de parti, même sous l'influence de la démocratie moderne. Respectons ou excusons ces tendances, pourvu que dans tout homme de parti il se trouve aussi, à l'heure donnée, un patriote.

L'histoire présente peu de réapparitions politiques qui ne soient pas au moins accompagnées de modifications ou d'épurations profondes. Il faut donc savoir concilier avec l'amour-propre et les souvenirs de chaque existence passée certaine soumission civique aux décrets de l'avenir! Fata viam invenient!

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