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justice et de sa bonté, il ne leur prescrira rien qui répugne à cette justice, à cette bonté : s'il veut qu'ils croient uniformément, qu'ils exécutent parfaitement ce qu'il leur prescrit, ses ordres ne contiendront aucune contradiction réelle ou apparente et les Écritures sont remplies de choses inintelligibles, contradictoires, injurieuses à la justice, à la bonté, à la toute-puissance et à la majesté de Dieu.

Quels sont donc les livres où Dieu a parlé aux hommes? C'est, premièrement, celui que les hommes ont sans cesse devant les yeux, et dans lequel ils ne lisent pas; c'est ce grand livre de la nature qui nous environne de toutes parts; ce livre clair, expressif, inaltérable, conçu par l'Être suprême, et formé par sa main adorable. 2 Ce sont ces sens internes et communs à tous les mortels, cette raison (1),

(1) « Est quidem vera lex, recta ratio, Naturæ congruens, diffusa in omnes, constans, sempiterna, quæ vocet ad officium jubendo, vetando à fraude deterreat; quæ tamen nequè probos frustra jubet, aut vetat; nec improbos jubendo aut vetando movet. Huic legi nec abrogari fas est ; neque derogari ex hâc aliquid licet; neque tota abrogari potest. Nec verò aut per Senatum, aut per Populum, solvi hâc lege possumus; neque est quærendus explanator, aut interpres ejus alius. Nec erit alia Lex Romæ, alia Athenis, alia nunc alia posthac; sed omnes gentes, et omni tempore, una lex, et sempiterna, et immutabilis continebit; unusque erit communis quasi magister et imperator omnium Deus, ille legis hujus inventor, disceptator, lator; cui qui non parebit; ipse se fugiet, ac naturam hominis aspernabitur; atque hoc ipso luet maximas pœnas, etiam

cette conscience (1), ce désir constant d'être heureux qui les agite. Voilà les livres qui contiennent les vérités les plus subli mes, les règles de notre devoir, et le chemin de la félicité.

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si cætera supplicia, quæ putantur, effugerit. « CICER., de Republ., lib. I, apud. Lactant. Inst. divin., lib. vi, cap. vIII.

«La droite raison est certainement une véritable loi, conforme « à la nature, commune à tous les hommes, constante, immuable, « éternelle, qui porte les hommes à leur devoir par ses comman«dements, et les détourne du mal par ses défenses: qui, comme «elle, ne commande ni ne défend pas inutilement aux gens de « bien, ne force pas non plus les méchants par ses commandements << ou par ses défenses. Il n'est permis ni de retrancher quelque « chose de cette loi, ni d'y rien changer, ni de l'abolir entière«ment. Le sénat, ni le peuple, ne sauraient en dispenser. Elle n'a « besoin d'autre interprète que de notre propre conscience. Elle << n'est point autre à Rome, et autre à Athènes, autre aujourd'hui, «et autre demain. Seule éternelle et invariable, elle obligera tou «tes les nations, en tout temps et en tout lieu; parce que Dieu, «< qui en est l'auteur et l'interprète, et qui l'a lui-même publiée, «sera toujours le seul maître, le seul souverain de tous les hom«mes. Quiconque violera cette loi, renoncera à sa propre nature, « se dépouillera de l'humanité, et sera, par cela seul, rigoureuse«ment puni de sa désobéissance, quand il éviterait d'ailleurs tout « ce qu'on appelle ordinairement supplice. »>

(1) « Conscientiam à Diis Immortalibus accepimus, quæ divelli à nobis non potest. » CICER., prs Cluent.

(

«La conscience nous a été donnée par les Dieux; rien ne peut << nous l'ôter. »>

Corrector affectuum et animæ pædagogus.. ORIGEN.

«La conscience est le correcteur des affections et le pédagogue de l'ame. >>

"C'est dans ces livres aussi, ô Dieu! s'écria ici « le vieillard, que je veux lire toute ma vie. Je veux « admirer ta puissance dans la création de l'univers; « ta sagesse, dans l'ordre et l'harmonie qui y rè<< gnent; ta bonté dans la fin de ton ouvrage, dans « les moyens qui tendent à cette fin; c'est-à-dire, << dans le bonheur des êtres sentants et intelligents, «<et dans les rapports que ces êtres ont entr'eux, « ainsi qu'aux objets qui les environnent.

« C'est à la lueur de ce divin flambeau que tu « m'as donné pour m'éclairer dans ma croyance et << ma conduite, c'est à l'aide de cette raison, dont « tu m'as doué, que je veux marcher dans le sen<«tier de la vertu. Tout autre guide m'égarerait. « C'est aux avertissements seuls, à la voix secrète <«< de ma conscience, que je veux me rendre, pour << fuir le mal que tu hais; et si cet instinct si natu«rel à chercher le bonheur, me fait former des dé<< sirs, ils n'auront pour but que ta gloire, ton hon<<< neur, et l'exécution de ta volonté.

« J'ai marché long-temps dans une voie étroite « et ténébreuse, parsemée d'obstacles et environ« née de précipices; je suis parvenu à connaître le << chemin lumineux de la vérité... Grand Dieu! je << mériterais ton courroux éternel, si j'abandonnais «< ce chemin pour rentrer dans les ténèbres d'où je « suis sorti. »

Voilà mon enfant, poursuivit le vieillard, de quelle manière je suis parvenu à être tel que vous me

voyez. J'ai été élevé dans la religion de mes pères; j'ai examiné, j'ai réfléchi; un trait de lumière a pénétré dans mon cœur; il a dissipé mes doutes ; il a borné mes recherches, mes réflexions; et l'erreur et le préjugé y ont fait place à la vérité.

Si je me trompe, ô mon fils! c'est que de deux problêmes donnés, je me suis décidé pour celui où j'ai trouvé l'évidence. Dieu serait injuste, s'il me condamnait pour avoir fait l'usage le plus naturel de ma raison. Mais mon Dieu est le Dieu de Socrate; mon Dieu est le Dieu du Rabbin dont je vous ai parlé : il ne sera pas plus injuste envers moi qu'en

vers eux.

CHAPITRE IX.

Réflexions que je fis sur le discours du Vieillard.

COMME il était tard lorsque le vieillard eut fini de parler, je retournai dans ma chambre, et je me mis à faire les plus sérieuses réflexions sur tout ce qu'il

m'avait dit.

J'examinai d'abord son opinion sur le péché originel; et tout ignorant que je suis, je vis clairement que ce péché ne peut avoir lieu; et que le mal moral, que l'on dit être la cause du mal physique, a une toute autre origine que la désobéissance du premier homme.

Voici comme je raisonnai sur ce point:

<< Il est certain, qu'à considérer le monde en gé« néral, l'on y remarque un dessin, un ordre, une <«< harmonie, une perfection, qui annoncent la sa

gesse et la puissance de son auteur; mais qu'à le << considérer en détail, l'on y découvre un désordre' « si grand, que l'on ne peut s'empêcher de penser « d'abord qu'un être injuste ou impuissant a formé « l'univers, ou qu'un principe malfaisant se plaît à troubler, autant qu'il est en lui, l'ordre établi par « un principe bienfaisant.

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