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est joint avec le quatrième, et n'est compté que pour un; le livre d'Esdras est joint avec celui de Néhémie, et n'est compté que pour un. » Ensuite, nommant la Sapience et tous les autres apocryphes, il déclare positivement qu'ils ne sont point mis au nombre des livres reçus dans l'arche du Vieux-Testament. (Saint Epiphane répète la même chose dans son livre des Hérésies, tome 1; Hérés., 6.) Saint Cyrille de Jérusalem parle ainsi à ses catéchumènes, dans sa quatrième Catéchèse : « Vous saurez que les Ecritures du Vieux-Testament contiennent vingtdeux livres. Donnez-vous bien de garde de les comparer avec les apocryphes: ne méditez avec attention que ceux que nous lisons sûrement et avec certitude dans l'Eglise. » Il donne immédiatement après la note des Livres saints, et n'y met pas les apocryphes, si on excepte Baruc, que les autres Pères omettent. · Saint Grégoire de Naziance, dans les poésies qui sont à la fin de ses œuvres, cite les vingt-deux livres hébreux, sans parler des livres non canoniques. Saint Hilaire, évêque de Poitiers, en son Prologue sur les psaumes, dit : « La loi du Vieux-Testament est réduite à vingt-deux livres, conformément au nombre des lettres hébraïques, selon les traditions des anciens; » après quoi il fait le dénombrement de ces livres, sans y mentionner aucun de ceux contestés entre nous et nos adversaires. Nous pourrions encore faire d'autres citations non moins importantes; mais venons au grand témoignage du fameux saint Jérôme, dont la version a été canonisée par le concile de Trente. « Nous avons, dit-il (dans sa préface sur les livres de Salomon), trois livres de Salomon, les Proverbes, l'Ecclésiaste et le Cantique des Cantiques; mais pour le livre intitulé l'Ecclésiastique, et cet autre qui est faussement appelé la Sapience de Salomon, il en est d'eux comme des livres de Judith, de Tobie et des Maccabées; l'Eglise les lit à la vérité, mais elle ne les reçoit pas entre les canoniques; c'est seulement pour l'édification du peuple, et non point pour prouver et autoriser aucun article de foi. » L'opinion de ce grand docteur, qui doit être très-importante pour nous, vu qu'il ne peut être récusé par nos adversaires, se trouve fortement exprimée dans plusieurs préfaces des livres canoniques, et surtout dans ses

prologues sur chacun des livres contestés. Mais si le témoignage des plus célèbres docteurs de l'Eglise primitive ne suffit pas, nous alléguerons l'autorité de plusieurs conciles que l'Eglise romaine reçoit, puisque nous les voyons insérés aux codes des conciles qu'elle vénère. La conciliation de ces conciles avec la quatrième session du concile de Trente, pour maintenir l'infaillibilité de l'Eglise du Pape, n'est pas notre affaire.-Vers le milieu du quatrième siècle se tint un concile en la ville de Laodicée en Phrygie, composé des plus respectables évêques d'Asie. (Voy. Baronius, à la fin du quatrième tome de ses Annales. Les canons de ce concile, au nombre de 59, s'y trouvent en grec, avec la traduction latine de Gentien Hervet). Le cinquanteneuvième canon est ainsi conçu: « On ne doit point lire dans les églises les livres qui ne sont pas dans le canon, mais seulement les livres canoniques du Vieux et du Nouveau-Testament (1).

(1) On reliait jadis les livres apocryphes avec les canoniques, par une espèce de complaisance pour le peuple, à qui on ne voulait pas les soustraire, ponr ne pas donner lieu aux ennemis de l'Evangile d'accuser les chrétiens d'avoir mutilé les saintes Ecritures. Dans la suite, on les a mêlés les uns avec les autres, sous prétexte de joindre toutes les histoires ensemble; et peu à peu s'introduisit l'usage de lire ces livres dans les assemblées publiques, à cause de quelques traits d'histoire, ou de quelque beau précepte de morale qu'ils renferment, ainsi que nous le voyons dans les auteurs que nous avons cités. C'est pourquoi on leur donna le nom de livres ecclésiastiques ou hagiographes, pour les distinguer des canoniques. Mais comme cet usage dégénéra en abus très-pernicieux à cause qu'il semblait confondre l'autorité de livres humains avec le respect dû aux écrits sacrés, le concile de Laodicée jugea très-sagement qu'il était de la plus urgente nécessité de défendre la lecture publique des livres qui n'étaient pas dans le canon apostolique. Quoique cette défense ait été confirmée par les conciles suivans, elle n'a pas toujours eu le bon effet qu'on devait en attendre, tant il a toujours été difficile de combattre un préjugé, lorsqu'on l'a laissé vieillir. « La vieille coutume, dit saint Jé-" rôme (Præfat. in Job), a une telle force, que les vices, quoique avoués et reconnus, ne déplaisent point. On aima mieux avoir de beaux livres que des livres bons et bien corrects. »—Saint Augustin (liv. XVIII, ch. 36, de Civit. Dei) appelle canoniques quelques-uns des apocryphes, mais il ne donne pas à ce mot le même sens qu'aux Livres divins; il veut seulement dire qu'à divers égards ces livres devaient être considérés comme

Or, voici les livres qu'on doit lire et qui doivent avoir autorité : la Genèse, ou la génération du monde, l'Exode, ou la sortie d'Egypte, le Lévitique, les Nombres, le Deuteronome, Josué, les Juges, Ruth, les quatre livres des Rois, les deux livres des Chroniques, Esdras, le livre des Psaumes, qui sont au nombre de cent cinquante, les Proverbes de Salomon, l'Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, Job, Ester, les livres des douze prophètes (Osée, Amos, Joel, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Zacharie, Aggée, Malachie), Esaïe, Jérémie. Ezéchiel, Daniel.» (Suivent ensuite les livres canoniques du Nouveau-Testament, tels que nous les recevons. )

Que diront ici nos adversaires? Toutes les autorités que nous venons de rapporter ne sont-elles pas plus que suffisantes pour faire voir, clair comme le jour, que l'Eglise chrétienne des quatre premiers siècles n'a jamais eu la pensée de considérer comme divinement inspirés les livres que nous tenons pour apocryphes? Nous pourrions continuer nos recherches dans les siècles suivans, rapporter le deuxième canon du concile de Trulle, tenu en 680 (troisième concile général de Constantinople, et le sixième œcuménique), qui dit expressément : Nous ratifions les canons de Laodicée et de Phrygie; ainsi que le concile suivant, tenu en 707, appelé Quini-Sexte, qui confirme l'autorité des cinquième et sixième conciles universels. Nous pourrions citer plusieurs docteurs, considérés

canoniques, comme devant nous servir de règle de conduite; comme il le montre par ses propres expressions, lorsqu'il fait mention de la supputation des temps depuis Esdras jusqu'à Antiochus : « Elle ne se trouve pas, dit-il, dans les Ecritures-Saintes qui sont appelées canoniques; mais dans d'autres, parmi lesquelles sont les Maccabées, lesquels les Juifs ne reçoivent pas, mais que l'Eglise tient pour canoniques à cause des passions véhémentes et admirables de quelques martyrs. » Et dans son Epître au Donatiste Gaudentius (liv. II, chap. 23), qui lui alléguait la louange du suicide de Razias, il déclare que ces livres n'ont été reçus que pour être lus sobrement. Au reste, du temps même de saint Augustin, les Eglises des Gaules trouvaient très-mauvais qu'il se servît quelquefois du témoignage des livres apocryphes. Hilaire, évêque d'Arles, lui écrivit qu'on trouvait mauvais qu'il eût allégué un passage de la Sapience, parce que, disait-il, ce livre n'est pas canonique.

comme très-catholiques, tels que Rabanus Maurus (de Institut. clericor.), Richard de Saint-Victor (liv. II, chap. 9), Hugues de Saint-Victor (en son Prologue du premier livre de la sainte Ecriture), Dionysius Carthesianus Abulensis (sur la Genèse), et plusieurs autres. Nous pourrions enfin ajouter que l'Eglise grecque rejette comme nous les livres apocryphes (chap. VII de la Confession de foi des Eglises orientales, par Métrophane Crytopule. Voy. Jean Damascène, de la foi orthodoxe, chap. 204). Mais nous nous bornerons à remarquer que, dans toutes les Bibles latines, manuscrites ou imprimées avant le concile de Trente, on avait conservé les Prologues de saint Jérôme, où ce savant père montre franchement son opinion sur les livres apocryphes, qu'il considère toujours comme des ouvrages humains, sans que jamais personne se soit avisé d'y mettre la moindre note pour le contredire. La première préface, mise en tête de ces Bibles, ne parle, au contraire, de saint Jérôme, qu'avec honneur et respect, ce qui nous montre quelle était l'opinion générale des docteurs et des Eglises d'Occident sur cette matière. Nous voyons encore que, dans le 1er canon de leur 4o session, les pères de Trente ne s'appuient de l'autorité d'aucun concile antérieur, ce qu'ils n'auraient pas oublié de faire s'ils avaient connu quelque décret ecclésiastique favorable à leurs prétentions.

Si donc l'Eglise réformée rejette les livres apocryphes, elle a pour elle l'autorité de Jésus-Christ et de ses apôtres, la croyance des quatre premiers siècles de l'Eglise, et le témoignage des plus célèbres docteurs des siècles suivans. Ne sont-ce pas là de bonnes raisons? On nous appelle cependant une Eglise nouvelle et hérétique.

III Mais ce qui a surtout lieu de nous surprendre, c'est que le concile de Trente a voulu donner les honneurs de. la canonisation aux apocryphes, malgré eux. La plupart des auteurs de ces livres se donnent tout simplement pour des hommes ordinaires; et il n'y a pas de doute que si les morts pouvaient prendre la moindre part à ce qui se passe sous le soleil (Ecclés., IX, 6), ils seraient très-offensés de l'espèce d'apothéose que les prélats de Trente ont donnée à leurs

écrits.-1 D'abord, ces auteurs reconnaissent que de leur. temps il n'y avait point de prophètes (1 Maccab., IX, 27; et IV, 46. Préface du livre de l'Ecclésiastique, v. 2), ce qu'ils n'auraient pas dit s'ils s'étaient crus inspirés de l'Esprit de Dieu. L'auteur du deuxième livre des Maccabées ne s'annonce que pour l'abréviateur des livres de Jason le Cyrénien (chap. II, 20), et s'excuse sur son peu de talent: si je me suis exprimé en style bas et médiocre, dit-il, c'est tout ce que j'ai pu fairc (ib. XV, 39). L'auteur de la première préface de l'Ecclésiastique nous prévient que Jésus, fils de Sirach, n'est que le traducteur d'une compilation de sentences faites par son père et son grand-père, qu'il a mise en un volume, auquel il a donné le nom de Sapience, voulant, par ce nom et par ce titre de Sapience, attirer le lecteur à lire ce livre avec un plus grand désir. Ce Jésus, fils de Sirach, implore aussi l'indulgence de ses lecteurs, dans les termes les plus humbles: Pardonnezmoi, leur dit-il, s'il semble que, dans les interprétations, je n'ai pas pu bien exprimer certaines façons de parler (2o Préf., v. 5). Dieu sait en quel langage il veut parler aux hommes ; et ceux qui ont parlé par les mouvemens extraordinaires de son Saint-Esprit, n'ont jamais demandé pardon des incorrections et des défauts de leur style.-2° Ensuite ces livres portent si bien le cachet de la faiblesse et de la corruption de l'esprit et du cœur de l'homme, qu'il est impossible de les recevoir comme l'ouvrage du Dieu parfait en science et en sainteté. Nous y trouvons des erreurs de calcul, des contradictions manifestes, des fables absurdes qui répugnent au simple bon

des exemples pernicieux de mensonge et de mauvaise foi, des éloges du crime et des principes opposés aux Ecritures canoniques. Seraient-ce là les caractères de cette Parole de Dieu vivante et efficace, et plus pénétrante que nulle épée à deux tranchans? ( Hébr., IV, 12.) Non, sans doute, Dieu est véritable, et tout homme est menteur (Rom., III, 4).

IV° Rien ne prouvera mieux que les Apocryphes sont des ouvrages tout humains que l'examen particulier de chacun de ces livres. Nous abrégerons, pour ne pas dépasser les limites d'un article de journal.-TOBIE, ou TOBITH. Saint Jérôme, dans sa

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