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des torrens de lumière. Le plus âgé des deux hommes qu'il avait rencontrés, lui répondit : « Le trône de ce pays était occupé, il y a très-long-temps, par un roi dont la sagesse et la bonté surpassaient de beaucoup celles des meilleurs et des plus sages d'entre les hommes. Ce roi avait un ministre auquel il donna un surnom, qui, dans la langue de nos ancêtres, signifiait YEUX. Or il arriva un jour que le roi, siégeant dans son conseil avec son ministre YEUX et ses autres ministres, au nombre de douze en tout, proposa une question à laquelle furent faites plusieurs réponses, mais aucune satisfaisante. YEUX, qui était un homme de beaucoup de pénétration et d'habileté, voyant l'embarras de ses collègues, fit au roi une réponse si remarquable par sa briéveté et sa clarté, que le roi, pour lui exprimer sa satisfaction, s'écria: YEUX, tu mérites bien le nom que tu portes; car tu es Yeux, et par tes yeux tout mon peuple verra. Ces paroles du roi sont devenues la loi fondamentale de ce royaume ; et nous en avons conclu qu'il est du devoir de tous ceux qui l'habitent de renoncer à l'usage de leurs yeux, et de ne voir que par les yeux que notre grand roi a substitués aux leurs. »

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Surpris à ce récit, et voyant les deux étrangers disposés à prolonger encore un peu la conversation, le voyageur leur demanda, si ce grand homme, le ministre YEUX, vivait encore? « Non, non,» répliqua l'homme en gris, en souriant, << il y a près de deux mille ans qu'il est mort. » — « Vraiment, › s'écria le voyageur; comment donc peut-il encore voir pour tous les habitans de ce pays ?»-« Vous avez tout l'air, mon ami, » reprit l'homme en noir, « d'avoir l'intelligence un peu bornée. Ne comprenez-vous pas que, puisque YEUX devait voir pour tous les autres hommes, il faut qu'il ait eu sans interruption des successeurs dans cette fonction? »-« Votre roi l'a-t-il déclaré ainsi ? dit le voyageur. « Notre roi n'a pas dit un mot là-dessus,» répondit l'homme en gris, en commençant à se fâcher; « mais il est impossible que ce ne fût pas là sa pensée. »>« Permettez-moi encore une question, » reprit le voyageur, «comment faites-vous pour trouver toujours ces successeurs du ministre YEUX ?»-« Nous croyons connaître

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à peu près,» répondit un des étrangers, « le lieu où l'on assure que le ministre YEUX est mort: en conséquence, nous choisissons l'un d'entre nous pour être son successeur; et quand nous avons placé l'individu, qui a été ainsi élu, dans une chaise, et qu'il est assis précisément à cet endroit, nous le regardons à tous égards comme aussi capable de voir pour les autres que le ministre YEUX lui-même. »

<< La patience échappa alors tout-à-fait au malheureux voyageur. « Ainsi, s'écria-t-il, il faut que je perde l'usage de mes yeux, parce qu'il vous plaît de prendre à la lettre une expression figurée, sur le sens de laquelle un enfant ne pourrait pas se méprendre ! Et quelle énorme montagne de suppositions et de conséquences vous bâtissez sur ce méprisable fondement! Parce que votre vieux ministre avait l'esprit vif et pénétrant, et pouvait durant sa vie être, comme le roi l'appela, les YEUX, c'est-à-dire le guide, le conducteur de son peuple, vous vous arrogez le droit d'établir une succession d'hommes qui, fussent-ils stupides et hébêtés, doivent être reconnus pour être les YEUX de tout le monde, et pour avoir le droit de nous aveugler tous ? Mais d'où vient que vous ne portez ni l'un ni l'autre de bandeau sur les yeux ?»-« Votre impudénce mériterait une réponse d'un autre genre; mais je veux encore user d'indulgence, répondit l'homme en noir : il y a plusieurs milliers d'hommes sans bandeau, comme nous, dans le royaume. Nous sommes les YEUX du ministre YEUX, et tous les hommes doivent voir par nous tout ce que le ministre YEUX verrait pour eux s'il vivait encore. Mais, si vous faites cas de votre vie, ajouta-t-il d'un ton très-solennel, laissez-vous mettre le bandeau, et ne contestez pas une vérité mise hors de toute espèce de doute par cette parole de notre grand roi : YEUX, TU ES YEUX, etc., etc. »

Est-il nécessaire, continue M. Blanco-White, de faire en détail l'application de cette parabole ? Si Christ avait appelé Pierre les YEUX de son Eglise, serait-il plus absurde de forcer tout chrétien à renoncer à l'usage de ses yeux, et à se laisser conduire par la main par un prêtre de l'Eglise romaine, qu'il ne l'est d'exiger de lui le sacrifice de son intelligence et de son bon

sens, parce que le nom de Pierre signifiant la même chose que céphas, et céphas signifiant une pierre, un rocher, Christ a prédit la naissance de son Eglise, par la prédication de Pierre, le jour de la Pentecôte, et, en faisant allusion au nom que portait Pierre, a exprimé cette prédiction dans le style figuré des nations de l'Orient? Pierre était un rocher, et sa foi en Christ devint le fondement de l'Eglise, lorsqu'il la proclama au milieu de Jérusalem, et qu'il convertit trois mille âmes. Mais n'est-ce pas une veritable moquerie, que d'établir une succession de rochers ou de fondemens, comme si l'Eglise de Christ devait être rebâtie, l'un dans l'autre, tous les neuf ans? Que l'Eglise ait été fondée sur la foi de Pierre, nous sommes loin de rejeter ce fondement; mais nous ne sommes pas disposés à être renvoyés d'Innocent à Innocent, et de Léon à Léon, par une succession sans fin. Que saint Pierre ait été évêque de Rome, c'est un fait qui n'est rien moins qu'assuré. Quoi qu'il en soit, où sont les promesses faites par Christ aux successeurs de Pierre, supposé que Pierre ait eu des successeurs, etc., etc.?

Réponse à un autre argument catholique romain. - Nous tirons encore de la même lettre de M. Blanco-White le morceau suivant :

« Les catholiques romains, en général, mais plus spécialement ceux qui, doutant de la vérité de leur croyance, cherchent cependant à échapper à la pénible nécessité de changer de religion, se rassurent par la pensée qu'après tout, les catholiques romains sont du BON côté. Si les protestans peuvent être sauvés, disent-ils, eux ont encore une plus grande assurance; car, si le protestantisme est le christianisme, les catholiques possèdent ce christianisme, et encore beaucoup de choses avec.

« Je connais peu d'absurdités comparables à celle que je viens de rappeler. Permettez-moi de vous éclaircir ma pensée par une comparaison familière. Supposez un homme atteint d'une maladie terrible et mortelle : un habile médecin vient le voir, et lui prépare lui-même une médecine qu'il lui ordonne de prendre, en lui recommandant fortement de se fier à elle seule 1828.—11° année.

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pour lui sauver la vie. Le médecin sort, le malade commence à faire des réflexions sur le remède qui lui est prescrit, et, comme il lui paraît beaucoup trop simple, il le mêle avec toutes les drogues dont lui ont parlé ses voisins; et après avoir avalé ce mélange, il se rassure par la pensée qu'il est du bon côté. Pourquoi? parce qu'il s'est méfié de son médecin, et qu'il a partagé sa confiance entre le seul homme qui pût lui sauver la vie et toutes les vieilles femmes du village.

« O Galates insensés! suis-je irrésistiblement forcé de m'écrier avec saint Paul: Qui est-ce qui vous a ensorcelés pour faire que vous n'obéissiez point à la vérité? (Gal., III, 1.) O gens aveugles et abusés! comment pouvez-vous vous persuader que la vie éternelle, promise à la foi en Christ, vous sera doublement assurée parce que vous montrez et que vous prouvez que vous manquez de confiance en lui, en mettant en pratique toutes les vaines manières de plaire à Dieu, inventées et préconisées par l'Eglise romaine?»

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La Commission consistoriale de Montauban, relative à la Faculté de Théologie, vient de publier son 7o Rapport. Nous en extrayons ce qui suit, comme étant d'un intérêt général pour toutes nos Eglises, et important à porter à leur connaissance :

« Déjà l'arrêté de M. le baron Cuvier, du 24 mai de cette année, a été notifié par lui à MM. les présidens de tous les Consistoires, et fait connaître les conditions qui seront désormais exigées pour être admis à étudier dans notre Faculté. Nous reproduisons ici les trois premiers articles de cet arrêté, dont la connaissance est essentielle à tous MM. les pasteurs, vu qu'ils sont fréquemment appelés à donner des informations précises aux parens qui veulent faire étudier leurs fils pour le ministère sacré, et à aider ces jeunes gens de leurs conseils et bonnes directions.

« Article 1or. La durée des études théologiques est fixée à trois années, dans les Facultés de Montauban et de Strasbourg. Après ces trois années, les étudians pourront se présenter à l'examen du baccalauréat en théologie.

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« Il n'est dérogé en rien aux diverses épreuves auxquelles les étudians sont assujettis par les réglemens respectifs des deux Facultés, ni aux intervalles prescrits par l'article 28 du décret du 27 mars 1808, pour ceux qui aspirent aux grades supérieurs au baccalauréat.

« Article 2. A partir du 1er novembre prochain, nul ne pourra être admis dans la Faculté de Montauban, pour en suivre les cours préparatoires (1), s'il ne justifie du baccalauréat ès-lettres, ou tout au moins des connaissances exigées pour ce grade, et constatées par un examen subi devant la Faculté.

« Article 3. A partir du 1er novembre 1829, la connaissance de l'hébreu sera préalablement exigée pour l'admission aux cours de théologie proprement dite, dans la faculté de Montauban (2); et le grade de bachelier ès-lettres sera rigoureusement demandė à tous ceux qui voudront suivre un cours quelconque dans ladite Faculté. »

« On voit, par l'article 2 ci-dessus, qu'à la rentrée prochaine seulement, et pour la dernière fois, la Faculté pourra recevoir encore des élèves non pourvus du baccalauréat ès-lettres, mais qui, après examen subi devant elle, seront trouvés avoir déjà l'assortiment des connaissances requises pour ce grade. C'est pourquoi nous croyons devoir bien avertir de ne point exposer aux désagrémens d'un refus d'immatriculation, et aux frais d'un voyage infructueux,des élèves qui seraient trop faibles pour être admissibles aux cours de haute-latinité, de grec et de philosophie; des élèves dont on ne saurait raisonnablement espérer qu'ils deviendront bacheliers l'année prochaine au mois d'août. Que leur servirait-il, en effet, d'entrer dans notre Faculté en novembre prochain, s'ils se trouvent dans le cas d'en être exclus en novembre 1829, d'après l'article 3, pour n'avoir pu obtenir le baccalauréat ? Ceux qui sont exposés à en courir le risque, doivent bien redoubler d'ardeur et d'efforts pour mettre soigneusement le temps à profit.

« Nous rappelons ici que tout élève nouveau qui se présente à la Faculté, doit produire, 1o son acte de naissance; 2o un extrait des registres du Consistoire auquel il est censé appartenir, conte

(1) Il est ici question des cours de l'auditoire de philosophie donnés par MM. les professeurs, et non de nos anciennes classes préparatoires à ces cours tenues par des répétiteurs.

(2) On ne commençait l'hébreu qu'après l'admission en théologie, lorsqu'on demeurait quatre années dans cet auditoire.

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