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la sagesse de Dieu, et rabaisser les hauteurs des cieux au niveau de sa raison? C'est un dépôt qui appartient à Dieu, osera-t-il y toucher ? C'est la miséricorde du Sauveur, c'est sa puissance, c'est sa gloire. S'il altère ces mystères, il retranche à la gloire de Christ. C'est ce que Christ a fait pour le salut éternel des hommes, c'est la nourriture qu'il leur a préparée lui-même, aussi nécessaire à leur vie éternelle que le pain l'est pour leur vie terrestre. Que leur manquera-t-il s'ils la reçoivent, cette nourriture? que leur manquera-t-il s'il leur dispense véritablement ces mystères dont la conuaissance les rendra éternellement heureux? Son Maître lui demandera-t-il sous quelle forme, dans quel langage il les a dispensés? Non, il ne demande qu'une chose, c'est qu'ils soient dispensés ; c'est que ces hommes, pour lesquels il a donné sa vie, apprennent à le connaître pour être sauvés; il ne demande pas dans quel style nous prescrivons les remèdes aux malades qu'il veut guérir, mais si nous prescrivons les seuls remèdes qui puissent les guérir; il ne demande pas si les eaux vives leur arrivent par un canal d'or ou d'argent ou de plomb, pourvu qu'elles arrivent et les désaltèrent en vie éternelle. Au contraire, M. F., il nous prescrit de ne pas annoncer ces choses avec les discours de la sagesse humaine, afin que sa sagesse seule paraisse dans nos enseignemens. Dieu avait commandé aux Israélites, quand ils lui consacraient un autel, de n'y point passer le ciseau, de peur de le souiller. Voilà ce que nous devons faire avec la croix de Christ; nous ne devons pas l'orner de peur de la souiller; nous ne sommes chargés que de vous montrer l'amour et la sainteté de Celui qui est mort sur la croix. Nous ne sommes que des voix pour vous annoncer sa présence et sa miséricorde, son secours, sa puissance, son tribunal où nous devons tous être jugés; plus nous disparaî~ trons nous-mêmes, plus il paraîtra; et plus il paraîtra, plus il sera glorifié; et plus il sera glorifié, plus il attirera les hommes vers lui....... Et ne pensez pas qu'il soit possible que je vous plaise toujours, si je vous dispense la parole de vérité. Sans doute cette parole est une parole de miséricorde, mais d'une miséricorde sainte qui veut nous rendre heureux en nous sauvant, c'està-dire en arrachant le péché de notre cœur. C'est une parole de paix pour le pécheur; mais c'est une parole de guerre ponr le péché. Elle sonde jusqu'au fond la plaie de notre âme; elle nous dit que cette plaie est mortelle ; elle attaque l'orgueil, l'avarice, l'impureté, la gourmandise, l'égoïsme, tous nos mauvais penchans;

1828. — 11° année.

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par conséquent elle ne peut plaire qu'à ceux qui renoncent à ces penchans et s'appliquent à pratiquer la volonté de Dieu. Elle nous enseigne des mystères, des choses que l'homme ne peut croire que s'il renonce à lui-même et met plus de confiance dans les déclarations de Dieu que dans ses jugemens. Avant de réjouir, elle attriste; avant de guérir, elle blesse. Celui qui veut la prêcher doit s'attendre à produire le même effet.....

Nous aurions désiré pouvoir donner des extraits plus étendus des deux discours dont nous venons de mettre un ou deux passages sous les yeux de nos lecteurs; mais nous sommes forcés de nous borner. Nous ajouterons seulement que cette belle journée se termina par une réunion religieuse dans la maison d'un des membres les plus considérés de l'Église de SaintQuentin, et qui, entre les mains de Dieu, a le plus contri- bué à la fondation de cette Église.

LIBERTÉ DES CULTES.

Jugement rendu par la Cour royale de Rennes.

Nous avons plus d'une fois émis dans les Archives, et un jurisconsulte, aussi éclairé qu'indépendant, Me Isambert, y a soutenu et développé l'opinion que les articles 291 et 294 du code pénal ont été, quant à ce qui concerne les cultes, abrogés de fait par l'article 5 de la Charte (1). La doctrine, erronée et affligeante, à notre avis, professée, à cet égard, par la cour royale de Metz dans l'affaire des piétistes (2), avait été renouvelée dans un jugement rendu naguère par le tribunal correctionnel de Fougères (Ille-et-Vilaine), dans la cause des Louisets ou anti-concordatistes de la petite Eglise (3). Le

(1) Voyez les lettres pleines de force et de clarté que nous a adressées sur ce sujet Me Isambert, et le plaidoyer de ce même jurisconsulte pour les piétistes (Archives, septembre et novembre 1826, p. 405 et 486, et février 1827, p. 86). Voyez aussi notre discussion avec M. le pasteur Lafite, de Metz, à l'occasion du jugement de la cour royale de cette ville qui a condamné les piétistes (mai 1827, p. 221).

(2) Archives, février 1827, p. 84.

(3) Nos lecteurs savent que ces Louisets sont des CATHOLIQUES détestés

sieur de Juvigny, prêtre, convaincu de s'être livré, sans la permission de l'autorité municipale, à l'exercice du culte de cette secté particulière, avait été condamné, aux termes de l'art. 294 du code pénal, en 200 fr. d'amende et aux dépens. - La cour royale de Rennes vient de faire justice de cette doctrine selon laquelle, comme le disait Me Isambert, « les Français seraient distraits de leurs juges naturels, et quarantequatre mille maires seraient les maîtres de supprimer l'exercice d'un culte quelconque.» (10° année, p. 87.)-Nous nous empressons de consigner dans nos Archives le jugement trèsremarquable et très-rassurant, rendu par la cour de Rennes, sur l'appel de M. de Juvigny, et contre les conclusions de M. Nadaud, avocat général.

«Considérant que, quelque déplorable que soit, dans l'intérêt de la religion catholique, la dissidence des sectes qui, en se séparant de la société générale des fidèles, s'efforcent d'en troubler l'harmonie ou d'en détruire l'unité, les tribunaux, chargés d'appliquer les lois protectrices de la liberté des cultes, ne peuvent, dans ces sortes de contestations, que rechercher s'il a été commis quelque infrac tion à ces mêmes lois ;

<«<Considérant, sous ce rapport, que l'art. 5 de la Charte dispose que chacun professe librement sa religion avec une égale liberté; que cette liberté ne peut s'entendre de la simple pensée d'un dogme renfermé dans le cœur de celui qui l'adopte, et qui, par-là même, échappant nécessairement à toute investigation humaine, n'aurait pu être l'objet d'une loi, soit permissive, soit prohibitive; d'où il suit que professer une religion, dans le sens de la Charte, c'est la pratiquer en faisant les actes qui constituent l'exercice d'un culte, pourvu que ces actes n'offrent rien de contraire à l'ordre public;

« Considérant que la même liberté est accordée également à tous, et n'a pas été restreinte par la Charte à des particuliers isolés, ni subordonnée à une autorisation préalable, lorsqu'ils voudront se réunir pour exercer leur culte au-delà d'un nombre déterminé,

des catholiques de la grande Eglise, et les détestant à leur tour; car, hélas! il y a des sectes ennemies jusqu'au sein de la prétendue unité dont se vante l'Eglise romaine.

ainsi que l'avaient antérieurement prescrit les art. 291 et suivans du code pénal de 1810; d'où il est naturel de conclure que ces dispositions ont été tacitement abrogées par la Charte;

«Que le contraire ne pourrait s'induire de ces autres expressions de l'art. 5: obtient pour son culte la même protection, ce qui est la même chose que si le législateur eût dit: La même protection est acquise ou assurée à tous; qu'en tout cas, si l'on y peut voir l'idée d'une impétration, ce serait seulement dans l'espèce où l'exercice du culte éprouvant un obstacle, celui qui le professe invoquerait, pour le faire cesser, la protection du gouvernement;

«< Considérant, au surplus, qu'en supposant que les art. 291 et 294 du code pénal n'aient pas été abrogés par l'art. 5 de la Charte, il ne serait pas justifié que le prévenu eût contrevenu à leurs dis positions; qu'en effet le dernier de ces articles, qui est évidemment la suite de l'autre, n'exige l'autorisation du gouvernement pour les réunions ou associations s'occupant d'objets religieux, politiques ou littéraires, que lorsque le nombre des personnes dont elles sont formées excède celui de vingt; or, il est constaté par un grand nombre de procès-verbaux rapportés par un commissaire de police, qui, aux fins d'autorisation expresse du juge d'instruction de Fougères, a fait chez le prévenu plusieurs visites domiciliaires à différens jours et différentes heures, au moyen d'une clef de la porte d'entrée de la maison, qu'il s'était fait remettre; que les personnes qu'il y a trouvées, pendant que le sieur de Juvigny exerçait ou se disposait à exercer le culte, n'ont jamais excédé le nombre de quinze et étaient souvent au-dessous;

« Qu'il est impossible de supposer, avec le premier tribunal, que l'art. 294 exige l'autorisation pour toute réunion, même audessous de vingt personnes, lorsqu'il s'agit de l'exercice d'un culte, tandis qu'elle ne serait pas nécessaire si la réunion s'occupait d'objets politiques ou littéraires, parce que cette distinction n'est pas dans l'article qui met sur la même ligne les réunions qui ont lieu pour l'un ou l'autre des trois objets y exprimés; conséquemment, ce qui serait permis dans l'un des cas ne peut être défendu dans l'autre ;

«Q'u'on ne peut pas dire aussi que, relativement à celui qui a consenti l'usage de sa maison pour une réunion, l'autorisation est exigée par l'art. 294, quel que soit le nombre des personnes qui s'y assemblent; car alors il faudrait dire qu'un propriétaire ou locataire, qui aurait chez lui deux ou trois personnes pour s'occuper

d'objets ou d'exercices religieux, devrait être puni d'une amende ; ce qui, sans doute, n'a pu être dans l'intention du législateur;

Qu'il s'ensuivrait une autre conséquence plus étrange encore, savoir que dix-neuf personnes, qui se seraient réunies dans une maison, sans autorisation, pour exercer leur culte, seraient, suivant l'art. 291, à l'abri de toutes poursuites, tandis que celui qui aurait prêté sa maison pour cette réunion innocente devrait être condamné à une amende, en vertu de l'art. 294, résultat qui suffirait pour démontrer l'impossibilité d'admettre une interprétation qui conduirait à une telle inconséquence;

<< Par ces motifs, la cour, faisant droit sur l'appel interjeté pár de Juvigny, prêtre, du jugement rendu par le tribunal correctionnel de Fougères, le 25 juin dernier, dit qu'il a été mal jugé; corrigeant et réformant, faisant ce que les premiers juges auraient dû faire, renvoie ledit de Juvigny hors de prévention, le décharge des condamnations prononcées contre lui, sans dépens. »

On annonce que M. le procureur général s'est pourvu en cassation contre cet arrêt. Espérons que la décision de la cour régulatrice sera confirmative de la liberté des cultes, si solennellement proclamée dans la Charte.

Bulletin des Eglises. — Vocations confirmées.

1. M. Hermann, pour l'église d'Arvieux, section de la consisteriale d'Orpierre (Hautes-Alpes).

2. M. Monod (Guillaume), pour l'église de Saint-Quentin (Aisne), section de la consistoriale de Monneaux (Aisne et Seine-et-Marne),

3. M. Faysse, pour l'église de Menglon, section de la consistoriale de Die (Drôme )..

4. M. Martin, ci-devant pasteur à Luneray (Seine-Inférieure), pour l'église de Lyon (Rhône), en remplacement de M. Claparède, retourné à Genève.

5. M. de Félice, pour l'église de Bolbec, chef-lieu de la consistoriale de ce nom (Seine Inférieure), en remplacement de M. Alègre père, décédé.

Une ordonnance royale autorise le Consistoire de Monneaux (Aisne et Seine-et-Marne) à accepter la donation qui lui

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