5 IO 15 20 25 30 Les blés d'alentour mûrs avant que la nitée Pour voler et prendre l'essor, De mille soins divers l'alouette agitée Vient avecque son fils, comme il viendra, dit-elle, Chacun de nous décampera." Sitôt que l'alouette eut quitté sa famille, Le possesseur du champ vient avecque son fils. Trouve en alarme sa couvée. L'un commence: "Il a dit que l'aurore levée, Rien ne nous presse encor de changer de retraite ; "Ces blés ne devraient pas, dit-il, être debout. Mon fils, allez chez nos parents Les prier de la même chose." L'épouvante est au nid plus forte que jamais. "Il a dit ses parents, mère ! c'est à cette heure L'alouette eut raison; car personne ne vint. Notre moisson quand nous pourrons." Dès lors que ce dessein fut su de l'alouette: Voletants, se culebutants, 99. Le Loup et le Chien maigre Autrefois carpillon fretin Eut beau prêcher, il eut beau dire, Je fis voir que lâcher ce qu'on a dans la main, Sous espoir de grosse aventure, Est imprudence toute pure. Le pêcheur eut raison; carpillon n'eut pas tort. Ce que j'avançai lors, de quelque trait encor. Certain loup, aussi sot que le pêcheur fut sage, Trouvant un chien hors du village, 5 IO " 15 20 25 30 5 ΙΟ 15 20 25 30 S'en allait l'emporter. Le chien représenta De me prendre en cet état-là; Sa fille unique; et vous jugez Qu'étant de noce, il faut, malgré moi, que j'engraisse." Le loup, quelques jours écoulés, Revient voir si son chien n'est point meilleur à prendre. Il dit au loup par un treillis : "Ami, je vais sortir; et, si tu veux attendre, Nous serons tout à l'heure à toi." Le portier du logis était un chien énorme, Celui-ci s'en douta. "Serviteur au portier," Dit-il; et de courir. Il était fort agile; Mais il n'était pas fort habile : Ce loup ne savait pas encor bien son métier. 100. Les deux Pigeons Deux pigeons s'aimaient d'amour tendre: L'un d'eux, s'ennuyant au logis, Fut assez fou pour entreprendre Un voyage en lointain pays. L'autre lui dit: "Qu'allez-vous faire? Voulez-vouz quitter votre frère ? L'absence est le plus grand des maux; Non pas pour vous, cruel! Au moins, que les travaux, Les dangers, les soins du voyage, Changent un peu votre courage. Encor si la saison s'avançait davantage ! Attendez les zéphyrs: qui vous presse? un corbeau Je ne songerai plus que rencontre funeste, Que faucons, que réseaux. "Hélas! dirai-je, il pleut : Bon soupé, bon gîte, et le reste?" Ce discours ébranla le cœur De notre imprudent voyageur; Mais le désir de voir et l'humeur inquiète Je le désennuierai: quiconque ne voit guère Je dirai: "J'étais là; telle chose m'avint; : Dans un champ à l'écart voit du blé répandu, Le lacs était usé: si bien que, de son aile, De ses pieds, de son bec, l'oiseau le rompt enfin ; 5 IO 15 20 25 330 5 1Ο 15 20 25 30 Fut qu'un certain vautour, à la serre cruelle, Le vautour s'en allait le lier, quand des nues S'envola, s'abattit auprès d'une masure, Crut, pour ce coup, que ses malheurs Mais un fripon d'enfant (cet âge est sans pitié) Qui, maudissant sa curiosité, Traînant l'aile, et tirant le pied, Sans autre aventure fâcheuse. Voilà nos gens rejoints; et je laisse à juger Amants, heureux amants, voulez-vous voyager? Honorés Contre le Louvre et ses trésors, Contre le firmament et sa voûte céleste |