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FABLE XVIII.—(187.)

Le Milan et le Rossignol.

Après que le milan, manifeste voleur,
Eut répandu l'alarme en tout le voisinage,
Et fait crier sur lui les enfants du village,
Un rossignol tomba dans ses mains par malheur.
Le héraut du printemps lui demande la vie.
Aussi-bien, que manger en qui n'a que le son?
Écoutez plutôt ma chanson :

Je vous raconterai Térée et son envie.

-Qui Térée? est-ce un mets propre pour les milans? -Non pas; c'étoit un roi dont les feux violents Me firent ressentir leur ardeur criminelle.

Je m'en vais vous en dire une chanson si belle

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Qu'elle vous ravira mon chant plaît à chacun.

Le milan alors lui réplique :

Vraiment, nous voici bien ! lorsque je suis à jeun,
Tu me viens parler de musique!

-J'en parle bien aux rois.- Quand un roi te prendra,
Tu peux lui conter ces merveilles :
Pour un milan, il s'en rira.

Ventre affamé n'a point d'oreilles.

GRECS. ES.-Cor., 3; II 3; Hes., Epya xai nuspa:, v. 202 et s.

Νῦν δ' αἶνον βασιλεὺς ἔρέω, φρονέουσι καὶ ἀυσοῖς.

ἡ δ ̓ ἴρηξ προσέειπεν ἀηδόνα ποικιλόδειρον
ἥψι μάλ' ἐν νεφέεσσι φέρων, ἀνύχεσσι μεμαρπώς.

Η δ' ἑλέον, γναμπτοῖσι πεπαρμένη ἄμφ ̓ ὀνύχεσσι,
Μύρετο· τὴν δ ̓ ὅν ἐπικρατέως πρὸς μῦθον έειπεν.

Δαιμονίη, τί λέλακας ; ἔχειν ύ σε πολλὸν ἀρείων.
Τῇ δ' εἷς, ᾗ σ' ἄν ἐγώ περ ̓ ἄγω, καὶ ἀοιδὸν ἔουσαν.
Δ' εἶπνον δ' αἴκ' ἐθέλπ ποιήσομαι, ἠέμεθήσω.
ἄφρων δ' ὅσκ ̓ ἐθέλω πρὸς κρείσσονας ἀντιφηρίζειν.
Νίκης τε φέρεται, πρός τ' ἄιχεσσιν ἄλγεα παχει.
Ως ἔωατ ̓ ὠκυπένης ἴρηξ, τανυσίπτερος ὄρνις.

LATINS. Abst., 89, 92; P. Cand., 133, 134, 135; J. Posth., Als., 28.

3;

FRANÇAIS. Mar. de Fr., 49; Guill. Haud., 209, 355; P. Despr., 48; Bens., 136; Mor. de Maut., 22.

FABLE XIX. - (188.)

Le Berger et son Troupeau.

Quoi! toujours il me manquera Quelqu'un de ce peuple imbécile ! Toujours le loup m'en gobera! J'aurai beau les compter! ils étoient plus de mille, Et m'ont laissé ravir notre pauvre Robin! Robin mouton, qui par la ville

Me suivoit pour un peu de pain,

Et qui m'auroit suivi jusques au bout du monde!
Hélas! de ma musette il entendoit le son:
Il me sentoit venir de cent pas à la ronde.
Ah! le pauvre Robin mouton!

Quand Guillot eut fini cette oraison funèbre,
Et rendu de Robin la mémoire célèbre,

Il harangua tout le troupeau,

Les chefs, la multitude, et jusqu'au moindre agneau,
Les conjurant de tenir ferme :
Cela seul suffiroit pour écarter les loups.
Foi de peuple d'honneur ils lui promirent tous
De ne bouger non plus qu'un terme.
Nous voulons, dirent-ils, étouffer le glouton
Qui nous a pris Robin mouton.
Chacun en répond sur sa tête.
Guillot les crut, et leur fit fête.

Cependant, devant qu'il fût nuit,

Il arriva nouvel encombre :

Un loup parut, tout le troupeau s'enfuit. Ce n'étoit pas un loup, ce n'en étoit que l'ombre.

Haranguez de méchants soldats,

Ils promettront de faire rage:

Mais, au moindre danger, adieu tout leur courage; Votre exemple et vos cris ne les retiendront pas.

LATINS. Abst., 127.

FRANCAIS. Trés, des recréat.

ITALIENS. Guicc., Hor. de recr., p. 124.

FIN DU NEUVIÈME LIVRE.

LIVRE DIXIÈME.

FABLE PREMIÈRE. (189.)

Les deux Rats, le Renard et l'OEuf.

DISCOURS A MADAME DE LA SABLIÈRE.

IRIS, je vous louerois; il n'est que trop aisé :
Mais vous avez cent fois notre encens refusé;
En cela peu semblable au reste des mortelles,
Qui veulent tous les jours des louanges nouvelles.
Pas une ne s'endort à ce bruit si flatteur.

Je ne les blâme point; je souffre cette humeur :
Elle est commune aux dieux, aux monarques, aux belles.
Ce breuvage vanté par le peuple rimeur,

Le nectar, que l'on sert au maître du tonnerre,
Et dont nous enivrons tous les dieux de la terre,

C'est la louange, Iris. Vous ne la goûtez point;
chez vous récompensent ce point:

D'autres propos

Propos, agréables commerces,

Où le hasard fournit cent matières diverses;

Jusques-là qu'en votre entretien

La bagatelle a part: le monde n'en croit rien.

Laissons le monde et sa croyance.

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