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D'un loup écorché vif appliquez-vous la

Toute chaude et toute fumante :

Le secret sans doute en est beau
Pour la nature défaillante.

Messire loup vous servira,

S'il vous plaît, de robe de chambre.
Le roi goûte cet avis-là :

peau

On écorche, on taille, on démembre Messire loup. Le monarque en soupa, Et de sa peau s'enveloppa.

Messieurs les courtisans, cessez de vous détruire;
Faites, si vous pouvez, votre cour sans vous nuire :
Le mal se rend chez vous au quadruple du bien.
Les daubeurs ont leur tour, d'une ou d'autre manière:
Vous êtes dans une carrière

Où l'on ne se pardonne rien.

GRECS. Es.-Cor., 72.

LATINS. Fab. extrav. 9; Faern, 96; Harlm. Sch., l. 3, c. 13; Carolus Pererius (Charles du Perrier.)

FRANÇAIS. Rom. du Ren. ( B. R. Cangé, 68), fol. 132; Mar. de Fr., 59; Jul. Mach.-Extrav., 9'; Guill. Haud., 55; Bours., Ésop. à la Cour, act. 4, sc. 3.

ITALIENS. Ces. Pav., 105; Guicc., p. 67; Verdizz., 100.

ESPAGNOLS. Ysopo-Extrav., 9; Seb. Mey, 50.

ALLEMANDS. H. Steinh.-Extrav., 9.

HOLLANDAIS. Esopus-Extrav., 9.

FABLE. IV. — (146.)

Le Pouvoir des Fables.

A M. DE BARILLON.

La qualité d'ambassadeur Peut-elle s'abaisser à des contes vulgaires? Vous puis-je offrir mes vers et leurs graces légères? S'ils osent quelquefois prendre un air de grandeur, Seront-ils point traités par vous de téméraires? Vous avez bien d'autres affaires

A démêler, que les débats
Du lapin et de la belette.

Lisez-les; ne les lisez pas :

Mais empêchez qu'on ne nous mette

Toute l'Europe sur les bras.

Que de mille endroits de la terre

Il nous vienne des ennemis,

J'y consens mais que l'Angleterre

:

Veuille que nos deux rois se lassent d'être amis,
J'ai peine à digérer la chose.

N'est-il point encor temps que Louis se repose?
Quel autre Hercule enfin ne se trouveroit las
De combattre cette hydre? et faut-il qu'elle oppose
Une nouvelle tête aux efforts de son bras?

Si votre esprit plein de souplesse,

Par éloquence et par adresse,

Peut adoucir les cœurs, et détourner ce coup, Je vous sacrifierai cent moutons : c'est beaucoup Pour un habitant du Parnasse.

Cependant faites moi la grâce

De prendre en don ce peu

d'encens :

Prenez en gré mes vœux ardents,

Et le récit en vers qu'ici je vous dédie.
Son sujet vous convient; je n'en dirai pas plus :
Sur les éloges que l'envie

Doit avouer qui vous sont dus,
Vous ne voulez pas qu'on appuie.

Dans Athène autrefois, peuple vain et léger,
Un orateur, voyant sa patrie en danger,
Courut à la tribune; et, d'un art tyrannique,
Voulant forcer les cœurs dans une république,
Il parla fortement sur le commun salut.
On ne l'écoutait pas. L'orateur recourut
A ces figures violentes

Qui savent exciter les âmes les plus lentes :
Il fit parler les morts, tonna, dit ce qu'il put.
Le vent emporta tout; personne ne s'émut.
L'animal aux têtes frivoles,

Étant fait à ces traits, ne daignoit l'écouter;
Tous regardoient ailleurs : il en vit s'arrêter
A des combats d'enfants, et point à ses paroles.
Que fit le harangueur? Il prit un autre tour.
Cérès, commença-t-il, faisoit voyage un jour
Avec l'anguille et l'hirondelle :

Un fleuve les arrête; et l'anguille, en nageant,

Comme l'hirondelle en volant,

Le traversa bientôt. L'assemblée à l'instant

Cria tout d'une voix : Et Cérès! que fit-elle ?
Ce qu'elle fit! un prompt courroux

L'anima d'abord contre vous.

Quoi! de contes d'enfants son peuple s'embarrasse;
Et du péril qui le menace

Lui seul entre les Grecs il néglige l'effet!
Que ne demandez-vous ce que Philippe fait?

A ce reproche l'assemblée,

Par l'apologue réveillée,

Se donne entière à l'orateur.

Un trait de fable en eut l'honneur.

Nous sommes tous d'Athène en ce point; et moi-même, Au moment que je fais cette moralité,

Si peau-d'âne m'étoit conté,

J'y prendrois un plaisir extrême.

Le monde est vieux, dit-on : je le crois; cependant Il le faut amuser encor comme un enfant.

GRECS. ES.-Cor., 178; II 178.

LATINS. Abst., proem.; Gilb. Cogn. (Gilb. Cous.), 23; Grat. a Sto Elid, 3.Hor., l. 1, ep. 1, v. 76 :

Bellua multorum capitum.

FRANÇAIS. Guill. Bouch., ser. 33; Desm., 2; Bours., prol. de la com. des Fables.

ITALIENS. Verdizz., 100.

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Par des vœux importuns nous fatiguons les dieux,
Souvent pour des sujets même indignes des hommes:
Il semble que le ciel sur tous tant que nous sommes
Soit obligé d'avoir incessamment les yeux,
Et que le plus petit de la race mortelle,
A chaque pas qu'il fait, à chaque bagatelle,
Doive intriguer l'Olympe et tous ses citoyens,
Comme s'il s'agissoit des Grecs et des Troyens.

Un sot par une puce eut l'épaule mordue.
Dans les plis de ses draps elle alla se loger.
Hercule, ce dit-il, tu devois bien purger
La terre de cette hydre au printemps revenue!
Que fais-tu, Jupiter, que du haut de la nue
Tu n'en perdes la race afin de me venger!

Pour tuer une puce, il vouloit obliger

Ces dieux à lui prêter leur foudre et leur massue.

GRECS. ES.-Cor., 62; П 62.

LATINS. Gilb. Cogn. (Gilb. Cous.), 56.

FRANCAIS. Guill. Haud., 253; G. Corr., 101.

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