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Berger. Le Loup l'apprit, & voulut lui en témoigner ses regrets.

Ah! Berger, est-il bien vrai qu'il vous soit arrivé un si grand malheur ? Quoi! vous avez perdu tout votre troupeau, tous ces moutons si beaux, si doux, si gras! J'en suis pénétré; j'en verserois volontiers des larmes de sang. Que je te suis obligé, répondit le Berger ! Je vois que tu as un cœur très-compatissant, lorsque le malheur d'autrui est la source du tien.

XX. Self Reproach a sufficient Reproach.

LOUIS XIV., se nettoyant les pieds, un valet-de-chambre qui tenait la bougie, lui laissa tomber sur le pied de la cire toute brûlante. "Vous auriez aussi bien fait de la laisser tomber à terre," lui dit le roi sans s'émouvoir.

Un portier du parc; qui avait été averti que ce prince devait sortir par la porte qu'il gardait, ne s'y trouva pas, et se fit long-temps chercher. Il vint tout en courant. C'était à qui l'accablerait d'injures. "Pourquoi le grondezvous? dit le monarque avec bonté ; croyez-vous qu'il ne soit pas assez affligé de m'avoir fait attendre ?"

XXI. To prevent Evil is to do Good.

UN chimiste romain, nommé Poli, avait découvert une composition terrible, dix fois plus destructive que la poudre à canon. Il vint en France en 1702, et fit homage de son secret à Louis XIV. Ce prince voulut juger par lui-même de la composition et de l'effet de cette découverte chimique. Il en fit faire l'expérience sous ses yeux.

"Votre procédé est ingénieux, dit-il ensuite à Poli: l'expérience en est terrible et surprenante; mais les moyens de destruction employés à la guerre, sont suffisans: je vous défends de publier celui-là. Contribucz plutôt à en perdre la memoire ; c'est un service à rendre à l'humanité.' Ce fut sous cette condition que ce grand monarque accorda une récompense au chimiste.

True Hospitality is never Impiety.

XXII. Les habitans de Cumes envoyèrent demander à l'oracle d'Apollon, s'ils devaient livrer au roi de Perse un certain Pactyas qui s'était mis sous leur protection. L'oracle répondit qu'il fallait le livrer. Aristodicus, un des premiers de la ville, soutint que l'oracle n'avait pu faire une réponse aussi horrible, et accusa les députés de fausseté. La ville, sur cette représentation, chargea Aristodicus d'y aller lui-même avec de nouveaux députés; l'oracle fit la même réponse. Aristodicus, se promenant mécontent autour du temple, aperçut un nid d'oiseaux qu'il détruisit à coups de pierres. Alors il sortit du sanctuaire une voix qui lui cria: “Détestable mortel! qui te donne la hardiesse de chasser d'ici ceux qui sont sous ma protection ?"

Eh quoi! grand Dieu! répondit aussitôt Aristodicus, ne nous avez-vous pas ordonné vous-même cette action si injuste, en nous commandant de livrer Pactyas qui s'est mis sous notre protection ?-Impies que vous êtes, reprit le dieu, puisque vous savez que c'est un crime d'abandonner ceux qui se jettent entre vos bras, pourquoi venezvous me consulter ?

XXIII. Gout the Touchstone of Courtesy.

Le grand Condé étant allé saluer Louis XIV. après le gain de la bataille de Sénef, le roi se trouva sur le haut du grand escalier à Versailles. Le prince, qui avait de la peine à monter à cause de sa goutte, s'écria: " Sire, je demande pardon à votre majesté, si je la fais attendre." "Mon cousin," lui répondit Louis XIV., "ne vous pressez pas: on ne saurait marcher bien vite, quand on est aussi chargé de lauriers que vous l'êtes."

XXIV. Prayer a cure for Revenge.

UN jeune homme, qui avoit de grands sujets de plaintes contre un autre, alla trouver un vieil hermite, et lui dit qu'il étoit résolu de se venger. tout ce qu'il put pour l'en dissuader;

Le bon vieillard fit

mais, voyant que

ses exhortations étoient inutiles, et que le jeune homme persistoit toujours dans le dessein de sa vengeance, il lui dit: Au moins, mon ami, prions Dieu ensemble avant que vous exécutiez votre résolution.

En même temps il commença sa prière de cette sorte: "Il n'est plus nécessaire, mon Dieu, que vous preniez notre défense, et que vous vous déclariez notre protecteur, s'il est vrai, comme le prétend ce jeune homme, que nous puissions et que nous devions nous venger nousmêmes." Le jeune homme fut si frappé et si effrayé de ce début, qu'il se jeta aux pieds de l'hermite, demanda pardon à Dieu, et protesta de ne vouloir jamais de mal à celui contre lequel il avoit été irrité.

XXV. Whatever is, is right.

Un homme, se promenant un jour dans la campagne, regardoit les chênes, qui sont de grands arbres, qui portent un petit fruit qu'on nomme gland, et qui n'est pas plus gros que le pouce : il remarqua, en même temps, une petite plante, qui touchoit à la terre, et qui portoit des citrouilles quatre fois grosses comme sa tète. Cet homme dit en lui-même : "Il me semble que si j'avois été en la place du Créateur, j'aurois mieux arrangé les choses: la citrouille auroit dû venir sur ce grand arbre, et le gland sur cette petite plante."

Pendant que cet homme raisonnoit ainsi, il se trouva très-disposé à dormir, et, comme il faisoit fort chaud, il se coucha à l'ombre sous un grand chêne. Lorsqu'il dormoit, il vint du vent, qui fit tomber un gland sur le bout de son nez, ce qui le réveilla. Alors cet homme s'écria: "J'avoue que je ne suis qu'un sot, et que Dieu a raison d'avoir arrangé les choses telles qu'elles sont ; que serois-je devenu si la citrouille eût été sur le chêne? elle m'eût écrasé la tête en tombant.'

XXVI. A Friend in need.

M. FRIEND, premier médecin de la reine d'Angleterre,

avoit assisté au parlement en 1772, comme député du bourg de Launceston, et s'étoit élevé avec force contre le ministère. Cette conduite ayant indisposé la cour, on suscita à Friend un crime de haute trahison, et il fut enfermé, au mois de Mars, dans la Tour de Londres.

Environ six mois après, le ministre tomba malade, et envoya chercher Richard Mead, autre médecin, et intime ami de Friend. Après s'être instruit à fond de la maladie du ministre, il lui dit qu'il lui répondoit de sa guérison, mais qu'il ne lui donneroit pas seulement un verre d'eau, que Friend, son ami, ne fût sorti de la Tour.

Le ministre, quelques jours après, voyant sa maladie augmentée, fit supplier le roi d'accorder la liberté au prisonnier. L'ordre expédié, le malade crut que Mead alloit ordonner ce qui convenoit à son état; mais ce médecin persista dans sa résolution jusqu'à ce que son ami fût rendu à sa famille.

Après cet élargissement, Mead traita le ministre, et lui procura en peu de temps une guérison parfaite. Le soir même, il porta à Friend environ trois mille guinées, qu'il avoit reçues, pour ses honoraires, en traitant les malades de son ami pendant sa détention, et l'obligea à recevoir cette somme, quoiqu'il eût pu la retenir légitimement, puisqu'elle étoit le fruit de ses peines.

XXVII. Filial Love the Charm of Youth.

FREDERIC II, étant un jour très-affairé dans son appartement, sonna à plusieurs reprises, et personne ne vint. Il ouvrit sa porte, et trouva son page endormi dans un fauteuil. Il avança vers lui, et alloit le réveiller, lorsqu'il aperçut un bout de billet qui sortoit de sa poche. Il fut curieux de savoir ce que c'étoit ; il le prit, et le lut.

C'étoit une lettre de la mère du jeune homme, qui le remercioit de ce qu'il lui envoyoit une partie de ses gages pour la soulager dans sa misère. Elle finissoit par lui dire, Dieu le béniroit pour cette bonne conduite. Le roi, après avoir lu, rentra doucement dans sa chambre, prit une bourse de ducats, et la glissa avec la lettre dans la poche du page.

que

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Rentré dans sa chambre, il sonna si fort, que le page se réveilla, et entra. "Tu as bien dormi!" lui dit le roi. Le page voulut s'excuser. Dans son embarras il mit par hasard la main dans sa poche, et sentit avec étonnement la bourse. Il la tire, pâlit, et regarde le roi, en versant un torrent de larmes, sans pouvoir prononcer une seule parole. 66 Qu'est-ce ?" dit le roi; "qu'as-tu ?”

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"Ah ! sire," dit le jeune homme, en se précipitant à genoux, on veut me perdre ; je ne sais ce que c'est que cet argent que je trouve dans ma poche." "Mon ami,' dit Frédéric, "Dieu nous envoie souvent le bien en dormant; envoie cela à ta mère, salue-la de ma part, et assure-la que j'aurai soin d'elle et de toi.

XXVIII. Malice answered by Silence.

UN paysan chargé de fagots, criait par les rues : "Gare! gare!" afin qu'on se rangeât de son passage. Un petit-maître, vêtu de soie, n'ayant point obéi à l'avertissement, eut son habit déchiré. Il courut aussitôt faire sa plainte au commissaire. Le rustique est interrogé ; mais il ouvre la bouche sans proférer une seule parole.

Etes-vous muet, mon ami? lui dit le commissaire. Non, non, monsieur, interrompit le plaignant, c'est belle malice: parce qu'il ne peut se défendre, il fait le muet; mais quand je l'ai trouvé en mon chemin, il criait comme un possédé, Gare! gare!-Eh bien, dit le commissaire, que ne vous rangiez-vous ?

XXIX. A Teacher should be free.

ARISTIPPE demandait cent drachmes pour élever le fils d'un citoyen très-riche. Cet homme, qui était avare, se récria beaucoup sur cette somme: Je pourrais, dit-il, à moins de frais, avoir un esclave habile dans les lettres, qui instruirait mon fils.-Eh bien, répondit le philosophe, achetez cet esclave: il fera bientôt de votre fils un autre lui-même, par le cœur et par les sentimens voyez quel profit! Au lieu d'un esclave, vous en aurez deux.

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