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la puissance, à mesure qu'elle y voyait un autre intérêt que celui d'un grand devoir et d'un sacrifice. Il lui semblait que sa tâche finissait au moment où elle aurait pu flatter l'orgueil et l'ambition.

Je n'essaierai pas de pénétrer plus avant dans le secret de ce noble cœur. Ce droit n'appartenait qu'à l'amitié éloquente qui s'est fait entendre à la Chambre des Pairs, avec une si grande autorité de douleur et de talent. Pour nous, il nous suffit de rappeler ce qui frappait tous les yeux, ce qui formait le caractère public de M. de Richelieu, cette probité imposante et simple, qui, dans les plus hautes affaires, devient une puissance, ce mépris de la richesse, si naturel en lui qu'il ne semblait pas même une vertu, ce zèle actif pour la France, ce dévouement si pur, si désintéressé pour l'auguste dynastie de nos rois, ce respect religieux pour le roi fondateur de la Charte, cet empressement à montrer que l'immortel auteur de nos libertés en était le sage et constant défenseur, et qu'il les protégeait comme le monument de sa gloire, et l'héritage immuable de son peuple.

Il nous suffit surtout, messieurs, de rappeler ce mouvement de consternation publique, ce deuil profond qui suivit la mort si soudaine de M. de Richelieu, et honora ses funérailles. Dans

cette vie de notre siècle, où l'intérêt et l'ambition occupent tant de place, dans nos jours agités et distraits par tant d'évènements, parmi tant d'émotions qui passent si vite, ce n'est pas un faible titre d'honneur, que ces témoignages public d'intérêt sur la perte d'un homme, et ces regrets unanimes autour d'un tombeau. Le pouvoir n'était plus là; il avait cessé même avant la mort; les engagements de la politique n'avaient plus où se prendre : il n'y avait plus ni calculs ni espérances: il n'y avait que des souvenirs, de la justice et de la douleur. C'était l'honnête homme que l'on pleurait; c'était l'ami loyal de son prince et de son pays, le Français fidèle, l'homme juste, éclairé, généreux, à qui l'on rendait un tardif, mais universel hommage.

ESSAI

SUR

འ་འའ་

L'ORAISON FUNEBRE.

MALGRÉ les travaux et la gloire de tant de grands écrivains, la littérature française, formée presque entièrement sur l'antiquité, n'a pas encore reproduit toutes les perfections et toutes les variétés de cet admirable modèle; mais elle a du moins remplacé ce qu'elle ne pouvait égaler; et partout elle présente, ou d'heureuses imitations, ou d'illustres dédommagements. On regrette l'éloquence des républiques anciennes : et cet art puissant et redoutable, qui ne se renouvelle qu'avec moins d'éclat et d'empire dans les institutions les plus libres des peuples modernes, semble manquer encore au domaine du génie. Mais, la religion a fait naître parmi nous un autre genre d'éloquence, qui, considéré seulement sous le rapport du goût,

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