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que celui des vitesses aux racines carrées des rayons : on aurait plutôt pris des puissances des rayons que des racines; et pourquoi ja raison renversée plutôt que la directe? Mais enfin ce rapport était possible, et la vitesse en général peut faire parcourir en même temps une infinité, et même une infinité d'infinités d'espaces différens qui auront tous différens rapports à une certaine ligne donnée. Plus un certain rapport déterminé paraîtra recherché dans cette infinité d'infinités, plus on aura lieu de le croire choisi par une intelligence qui aura eu quelque dessein; et on en sera absolument sûr, quand on verra absolument le dessein. Ici c'était de causer un équilibre, état unique entré une infinité d'autres états possibles d'une matière fluide en mouvement.

u2

36. Puisque r2, expression de la grandeur des couches concentriques, est tout ce qu'il faut mettre de plus dans expression générale de la force centrifuge, pour avoir les rapports des différentes forces centrifuges de ces couches (29), il s'ensuit qu'elles 'n'ont rien de plus qui puisse contribuer à ces forces, nulle différence de rareté ou de densité, et qu'enfin elles sont parfaitement homogènes, ou elles-mêmes, ou du moins les unes par rapport 'aux autres; c'est-à-dire, que si elles sont hétérogènes en ellesmêmes, elles ont toutes précisément la même hétérogénéité. : L'une ou l'autre manière existe, et il ne peut entrer rien de plus dans la considération des forces.

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37. Sur cela il pourrait venir une pensée; c'est qu'en cherchant l'équilibre des couches, si on avait eu égard, non pas simplement à leurs grandeurs, mais aussi à leurs différentes densités possibles, on aurait pu trouver tel rapport entre ces densités, qu'il aurait produit un équilibre, non-seulement dans la circulation fluide, mais dans la solide. J'en conviens; mais cet équilibre quelconque n'eût certainement pas donné la vitesse en raison renversée des racines carrées des distances. Or, c'est là un fait bien constant et bien avéré (32 et 33), et tout ce qui y sera contraire sera faux.

38. Des deux homogénéités que peut avoir la matière céleste ou éthérée, dont est formé le tourbillon (36), l'homogénéité absolue est la plus vraisemblable; car il est beaucoup plus difficile qu'une matière hétérogène d'une certaine façon déterminée, se conserve toujours hétérogène de cette même façon dans un espace sphérique de trois cent millions de lieues de rayon, et pendant quatre mille ans, qu'il n'est difficile qu'une matière absolument homogène le soit toujours, et dans tout cet espace, et pendant tout ce temps. Je prends donc le parti de supposer désormais l'homogénéité parfaite de la matière éthérée.

39. Il faut nécessairement la concevoir très-subtile, très-fine, très-mobile; et tous les phénomènes me forcent à prendre cette idée, ou du moins la permettent. Donc, deux couches sphériques contigues ne peuvent avoir entre elles dans leur mouvement différent qu'un frottement très-léger.

40. De plus, ce mouvement différent est très-peu différent; il ne l'est que selon la suite des racines carrées des nombres naturels (21). Or, on sait que les termes de cette suite ne different que très-peu d'un quelconque d'entre eux au suivant, et toujours d'autant moins qu'ils sont plus éloignés de l'origine de la suite. On le verra par la seule inspection; la voici : √ 1 = 1. 1. +. Je sous-entendrai toujours après ce + une grandeur inconnue, croissante et moindre que 1.

1 +. (2). 2 +. 2 +. 2 +. 2 +. (2) 3 +. 3 +. 3 +. 3 +. 3 +. 3+. (4), etc.

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D'où l'on voit qu'entre deux nombres qui sont contigus dans la suite des nombres naturels, il y a dans celle des racines carrées d'autres nombres intermédiaires, et qu'ils sont toujours en nombre d'autant plus grand, qu'ils sont plus éloignés de l'origine de leur suite. Donc, si l'on divise les couches concentriques du tourbillon selon l'ordre de leurs rayons 1, 2, 3, 4, etc., la différence de vitesse de deux couches contiguës, comme 1 et 2, 3 et 4, etc. sera d'autant moindre, que ces couches seront plus éloignées de l'origine de la suite, parce que chacune des deux vitesses contigues aura été formée d'un plus grand nombre de vitesses intermédiaires, qui ne contribueront pas tant à la force du choc de la dernière. Or, ce choc est à considérer pour le frottement dont il s'agit ici. Donc, plus les couches sont éloignées de l'origine de leur suite,moins il y aura de frottement.

On pourrait trancher toute la question en un mot. Les rapports des carrés entre eux diminuent toujours, et ceux des racines aussi. Donc, etc.

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41. Mais il faut prendre garde à la raison renversée qui se trouve ici. Les plus grandes vitesses répondront aux plus petits rayons, et au contraire la suite des rayons a certainement son origine au centre du tourbillon, et par conséquent celle des vitesses a la sienne à l'extrémité. C'est donc du centre du tourbillon qu'il faut compter les plus grandes vitesses; et s'il y avait des frottemens à craindre, ce serait dans cette région. C'est peutêtre par cette raison que Mercure, si proche du soleil en est pourtant, dans sa moyenne distance, éloignée de 8514 demidiamètres de la terre, c'est-à-dire, de près de treize millions de lieues. Peut-être entre Mercure et le soleil les frottemens eussentils empêché la matière éthérée d'avoir un cours assez égal et assez

tranquille; et le souverain architecte n'a voulu placer les planètes que plus loin. On ne peut jamais trop présumer de ses vues et de sa sagesse.

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42. Mais il y a aussi beaucoup d'apparence qu'une masse énorme de matière, toute conspirante à un même mouvement, aurait bientôt vaincu, et vaincu pour toujours les frottemens s'il s'en était trouvé d'abord quelques-uns.

43. Le tourbillon étant supposé exactement sphérique, et le soleil placé à son centre, il faudrait, s'il était fluide, examiner sa circulation; mais il est certainement solide, du moins en grande partie. Ainsi, il faut jusqu'à présent le concevoir absolument immobile, et la circulation du tourbillon ne commençant tout au plus qu'où sa circonférence finit.

44. Je ne puis m'empêcher de regarder les orbites, ou cercles concentriques de nos six planètes (26), comme de grandes pièces visibles de tout l'édifice céleste, et qui nous représentent ce que nous n'en voyons pas. Ces six cercles appartiennent à six couches différentes de la sphère, dont, quoique inégaux, ils font chacun un grand cercle. Considérons-en un quelconque dans sa couche. Il en a à ses deux côtés une infinité d'autres égaux à lui, et tous différemment inclinés à lui. C'est la même chose que si nous imaginions notre globe terrestre tout couvert de cercles concentriques au globe, et posés de manière, par rapport à l'équateur, que l'écliptique devînt un de ces cercles. Îls se couperaient tous en deux points diamétralement opposés, comme font l'équateur et l'écliptique. Voilà la formation exacte d'une couche sphérique quelconque, et par conséquent de toutes celles de notre tourbillon. Venons maintenant à leurs forces centrifuges.

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45. Tout corps ou point qui décrit un cercle, tend incessamment, par sa force centrifuge, à s'échapper en ligne droite, et à décrire la tangente du point où il se trouvait lorsqu'il s'est échappé. Supposons qu'il s'échappe pour un instant infiniment petit, il décrira une tangente infiniment petite, dont le bout sera infiniment peu plus éloigné du centre du cercle que n'était son origine, et il se trouvera à ce bout. Supposons que tous les autres points qui décriraient la même circonférence que le premier qu'on a supposé, en aient fait autant, que sera-t-il arrivé? Ils se trouveront tous plus éloignés du centre qu'ils n'étaient auparavant, quoique infiniment peu, et le cercle sera agrandi de même. Chacune des petites tangentes décrites sera devenue pour lui un nouveau côté infiniment petit, et plus grand qu'il n'était.

46. Il est à remarquer que de tous les efforts différens que fai

saient les points d'une même circonférence pour l'agrandir, en suivant toutes les directions de différentes tangentes, opposées même les unes aux autres, aucun effort n'en a contrarié un autre par rapport à l'effet général d'agrandir le cercle, et que tous y conspiraient également et uniquement.

47. Il est évident que tout ce qui s'est dit ici d'un cercle, se doit dire aussi d'une couche entière quelconque, et enfin de toute la sphère. Donc, toute la sphère tend à s'agrandir. La direction de cette tendance ne peut être que du centre à la circonférence, et la tendance est égale partout. Cette force qui n'était que centrifuge dans les parties, peut s'appeler dans le tout force expansive, formée de plusieurs forces centrifuges qui concourent au même effet; elle est aussi centrifuge à sa manière.

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48. S'il était important, pour la conservation de l'intérieur du tourbillon, que tout y fût en équilibre, il ne l'était pas moins que tout le tourbillon pût se défendre, et se défendre également partout des attaques du dehors ; et c'est ce que l'intelligence infinie a parfaitement exécuté par le moyen de la force expansive, qui repoussera tout ce qui viendrait attaquer le tourbillon. Mais ce n'est pas encore ici le lieu d'en parler.

49. Si la force centrifuge générale du tourbillon avait son effet, le tourbillon n'en serait point détruit ni défiguré, il deviendrait seulement une plus grande sphère, ce qui est infiniment différent de ce qui arriverait, si le tourbillon avait la circulation solide (28); et on le verra sans peine, en y supposant le cas présent. Le préjugé doit être grand pour tout ce qui assure une plus longue et plus constante durée.

50. Il reste peut-être une objection en faveur de la circulation solide. Tout le monde convient que la direction générale et unique de notre tourbillon est d'occident en orient; et c'est ce que la circulation solide exécute parfaitement par le parallélisme des plans dont on conçoit alors que le tourbillon est formé; au lieu que la circulation fluide ne le peut, du moins que trèsimparfaitement, par les couches concentriques; car, que selon l'idée de l'article 27, on imagine dans une couche un cercle tel que serait l'équateur sur notre globe terrestre, on concevra bien que ce cercle se meuve exactement d'occident en orient : mais un autre quelconque, tel que serait notre écliptique, n'aura plus cette direction exacte de mouvement, mais en aura une qui déclinera d'abord au nord, ensuite au sud, etc.; et comme ces déclinaisons seront toujours d'autant plus grandes que ces cercles seront pris plus éloignés de l'équateur, il en viendra enfin un dernier qui passera par ses pôles, n'aura plus

d'autre direction de mouvement que du nord au sud ou du sud au nord; et tout ce qui pourra lui rester de la direction générale, ce sera d'avoir commencé son mouvement plutôt à droite qu'à gauche, plutôt vers l'orient que vers l'occident, ce qui est extrêmement faible.

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Tout cela est vrai; mais il l'est aussi que tout le monde convient que nos six planètes ont la direction de leur mouvement d'occident en orient, malgré leurs déclinaisons bien connues car au fond ces déclinaisons, quelles qu'elles soient, n'empêchent pas les planètes d'arriver toujours à un point du ciel plus oriental que celui d'où elles étaient parties.

51. Nous n'avons encore vu que la force centrifuge générale du tourbillon, ou celle des couches comparées entre elles : mais s'il s'agissait de celles de deux points pris chacun dans une couche differente, ce ne serait plus la même chose, puisque la grandeur des couches n'entrerait plus dans l'expression de la force, comme elle y entrait dans l'article 29. Donc, de deux points appartenans, l'un, à la couche qui a R pour rayon, et l'autre à celle qui a r, la force centrifuge du premier sera simplement, et celle du second. Or, .::r2. R2; c'est-àdire, que la force centrifuge du premier sera à celle du second en raison renversée des carrés des rayons de leurs couches.

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r R

R

52. Si on était étonné de la grande inégalité des forces centrifuges de deux points pris dans deux couches différentes malgré l'égalité des forces centrifuges des couches mêmes, il serait aisé de se rassurer, en remettant dans les expresssions et forces centrifuges des points, R2 et r2, grandeurs des couches, car on aurait aussitôt r R = Rr.

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R

R

53. Les astronomes ne font leurs calculs que pour le centre des planètes, dont ils n'ont pas besoin alors de considérer les grandeurs. Ainsi, les forces centrifuges de deux planètes, dont les rayons ou distances au soleil sont R et r, sont entre elles :: r2. R2. Si les distances de la terre et de Jupiter au soleil sont comme i et 5, la terre a vingt-cinq fois plus de force centrifuge que Jupiter.

54. Dans tout mouvement uniforme, tel que celui du tourbillon, l'espace étant appelé e, la vitesse u, et le temps t, on =t. Or, ici, les circonférences décrites par deux planètes

a

e

étant :: Retr, et leurs vitesses ret R, on a donc pour le

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