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RÉGOIRE XIII, voulant respirer l'air pur sur le mont Quirinal, y fit construire un palais d'été, auquel d'autres papes ont ajouté des annexes et qui est aujourd'hui, comme le Vatican, une agrégation de palais. Indépendamment de la chapelle principale, il y en a une entièrement peinte à fresque par le Guide. Au maître-autel est une peinture à l'huile de cet artiste, l'Annonciation, morceau d'une beauté célèbre, dont nous reproduisons une gravure.

Il y a une certaine relation secrète entre ce tableau et sa destination le faire en est soigné, comme il convient. aux œuvres intimes; les types en sont délicats, tels qu'on s'attend à les trouver dans un oratoire. Assurément lorsqu'on remonte par la pensée jusqu'à Raphaël ou à fra Bartholomeo, on voit bien tout ce que l'art a perdu dans

l'intervalle d'un siècle. Opposée à l'expression profonde de ces maîtres émus et originaux, à leur sentiment sérieux et recueilli, la grâce du Guide peut paraître efféminée, sa douceur ressemble à de la fadeur; son génie, quand on l'observe dans les ouvrages de sa seconde manière (et celui-ci en est un), n'a plus le caractère, la saveur et la signification des peintures de sa jeunesse, et l'on croit s'apercevoir qu'il n'y a qu'un pas de cette facilité aimable aux stérilités de la décadence. Mais encore y a-t-il dans l'Annonciation du Guide, malgré le relâchement du style, des beautés qui répondent à certaines dispositions de l'âme, aux tendresses de la dévotion, à la modestie de l'amour divin; et il faut convenir que cette ronde de petits anges est une image charmante.

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VERS LE POLE

FRIDTJOF NANSEN (1)

I

A race des Vikings n'est pas éteinte; les pays scandinaves prouvent glorieusement que sur leur sol glacé naissent toujours des héros, arrièrepetits-fils de ceux dont les sages chantèrent les exploits contre une nature impitoyable et mystérieuse qui semblait vouloir réduire à néant la force, l'intelligence et l'intrépidité de l'homme.

La tâche de l'explorateur est toujours plus ou moins dramatique ; celle de l'explorateur arctique est la plus

(1) Le 10 mars dernier, l'excellente revue catholique de Paris, le CORRESPON DANT, publiait un bel et saisissant article intitulé: Vers le pôle: Fridtjof Nansen. Cet article eut un tel retentissement, par toute l'Europe, que le directeur de l'Illustration, qui venait d'acheter de Nansen, pour 5590 francs, le droit exclusif de traduire en français et de publier son récit de voyage d'exploration dans les mers du Nord et les dessins et photographies destinés à illustrer ce récit, se crut lésé dans ses droits et intenta une action au Correspondant, réclamant 5000 francs de dommage. Inutile d'ajouter que la demande de l'Illustration fut déboutée avec dépens. L'avocat du Correspondant, Me Poincaré, avec cette parole claire et précise, forte et sobre à la fois, qui distingue l'éloquence de ce membre éminent du barreau de Paris, n'eut pas de peine à montrer qu'il n'y avait ni contrefaçon ni plagiat dans l'article de Mme Dronsart, qui d'ailleurs était antérieur à l'enregistrement des droits de l'Illustration et embrassait la vie toute entière du célèbre explorateur, qui entre tout vivant dans le domaine de l'histoire. Un moment, Me Poincaré a fait passer un véritable frisson sur l'auditoire en lisant d'une voix vibrante, et au milieu d'un silence recueilli, une belle page de Mme Dronsart sur les combats engagés par l'âme humaine contre la matière brutale, sur la grandeur de ces luttes de géants qui donnent à certaines créatures, dans l'imagination populaire, des proportions quasi surhumaines; puis, se tournant vers son adversaire, il lui a demandé brusquement sous le coup de l'émotion générale: "Est-ce dans Nansen, tout cela ?... Non, ce n'est pas une contrefaçon; non, ce n'est pas un plagiat; c'est l'œuvre personnelle d'une Française jugeant un étranger et mettant son âme dans l'apppréciation des faits qu'elle raconte..."

Nous avons cru être agréable à nos lecteurs en reproduisant cet article remarquable, en ce moment où le souvenir de la visite que nous a faite Nansen, au mois de novembre dernier, est encore frais dans toutes les mémoires. (N. de la D.)

tragique de toutes. Il n'est pas, dans l'histoire des combats incessants engagés par l'âme humaine contre la matière brutale, de chapitre plus émouvant que celui où l'on voit le courage et la volonté, l'esprit de découverte et d'aventure aux prises avec le Sphinx des glaces, immuable, ironique et cruel dans ses ténèbres opaques. L'homme prend alors des proportions surhumaines, et l'on conçoit que l'imagination populaire le transforme en compagnon ou même en égal des dieux.

A l'origine, ces luttes de géants eurent pour principal objectif l'intérêt commercial, peut-être aussi le besoin de trouver des terres nouvelles pour une population à l'étroit; néanmoins le désir de savoir, de mieux comprendre le monde terrestre s'éveilla chez quelques-uns dans des temps très reculés. Othar, qui vint vers 890 à la cour d'Alfred le Grand en Angleterre, "sentit, dit-il, une inspiration, une soif d'apprendre, de démontrer jusqu'où la Terre s'étendait vers le nord, de savoir s'il y avait des régions habitées au delà de l'étendue déserte ". Il partit pour un voyage d'investigation géographique, doubla le cap Nord et navigua jusque dans la mer Blanche, sur des barques ouvertes. Harold, roi des Normands, suivit son exemple; puis la grandeur de son peuple diminua. Le souvenir des découvertes s'effaça presque entièrement, et il fallut attendre les expéditions des Hollandais et des Anglais au seizième et au dix-septième siècle, pour qu'elles fussent renouvelées, on sait avec quel succès. Toutefois, il était réservé au dix-neuvième siècle de poursuivre le but le plus noble, de pratiquer le pur dévouement à la science, sans arrière-pensée de gain, de pêcheries, d'or ou de fourrures précieuses. Sur ce nouveau champ de bataille, il y a de la gloire pour tous, et les nations qu'on appelle petites peuvent y égaler les plus grandes. La Norvège s'est fait un beau renom dans l'héroïque phalange qui a suivi les traces de Pythéas, le contemporain

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