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homme d'épée. Ce qui se passe aujourd'hui prouve trop que maître Cléauroux était bien décidé.

JACQUES LAURENCE.

Il faut vous consoler, jeune homme: à vingt-cinq ans tout est possible.

JEAN ROSMAR.

Tout, excepté le bonheur !

SCÈNE IX.

RAOUL, CLEAUROUX, JACQUES LAURENCE, JEAN ROSMAR.

RAOUL CLEAUROUX.

Je suis un homme perdu! On ne me verra plus dans la rue sans me montrer au doigt, et sans éclater de rire!

JACQUES LAURENCE.

Qu'est-il donc advenu?

RAOUL CLEAUROUX.

Quand on voulait autrefois parler d'un homme prudent, habile, fin, réussissant en toutes choses, on disait : c'est comme maître Cléauroux ; quand on voudra parler d'un niais, d'un étourdi, d'une dupe, d'un homme à plumer, on dira désormais c'est comme maître Cléauroux ; je n'ai plus qu'à m'enterrer tout vif!

JEAN ROSMAR.

Mais encore une fois, cher maître, quel malheur vous survient? RAOUL CLEAUROUX.

La plus sotte, la plus bête, et, hélas! la plus méritée des mésa

ventures!

JACQUES LAURENCE

De grâce, tirez-nous d'inquiétude!

RAOUL CLEAUROUX.

Je suis sorti d'ici et j'ai trouvé dans la prochaine rue deux notaires et quatre procureurs.

JEAN ROSMAR.

Vous auraient-ils manqué de respect?

JACQUES LAURENCE.

Laissez-moi vous embrasser, vous êtes le type de l'homme d'hon

neur!

RAOUL CLEAUROUX.

Que disiez-vous tout à l'heure, que Rosmar aimait ma fille?

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J'étais ballotté entre la crainte et l'espérance; quand je vous entendais parfois maudire le jour qui nous priva de notre nationalité, vanter les Bretons qui restaient fidèles au pays, quand je vous voyais tressaillir en recevant une lettre de M. d'Argentré, le grand patriote, je me disais que, par quelques points au moins, j'étais digne de vous. Quand, après cela, je calculais votre immense fortune, quand je vous entendais maudire la jurisprudence et les lettres, je me renfermais dans le silence et dans le secret de mes larmes.

RAOUL CLEAUROUX.

Ah! je suis trop puni d'avoir cédé à des pensées de vanité et de vengeance contre ma sœur! J'avais perdu le sens. Je le retrouve. Je comprends de nouveau que rien n'est plus noble que le droit et la liberté. Me pardonnerez-vous, Rosmar, mon fils, et chanteronsnous encore en buvant le cidre de mes vergers :

Nizo bepred
Bretoned?

S. ROPARTZ.

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QUESTIONS DE DROIT HISTORIQUE.

LES VIGNES A COMPLANT

EN POITOU & EN BRETAGNE.

Les vignes à complant ont encore une grande importance dans la portion du Poitou qui forme aujourd'hui le département de la Vendée, et dans la partie méridionale de l'ancien comté Nantais sur la rive gauche de la Loire. Elles se sont conservées dans ces contrées où fut autrefois leur berceau, elles y ont traversé les iècles et sont arrivées jusqu'à nous en gardant le principe de la éserve de la propriété, et le caractère qui dès leur origine les a stinguées des autres concessions du moyen âge et a empêché de t cette situation excep

nelle qui les a protégées à l'époque de la Révolution de 1789, i est encore maintenant leur garantie. Les complants de la ée et de la Loire-Inférieure méritent une étude sérieuse, et on net les bien apprécier qu'en interrogeant leurs plus vieilles char e concessions, les textes mêmes de la coutume qui les régissa trefois, les conditions sur lesquelles ils ont reposé dans tous les emps, et les décisions qui depuis la Révolution ont assuré leur maintien.

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JACQUES LAURENCE.

Laissez-moi vous embrasser, vous êtes le type de l'homme d'hon

neur!

RAOUL CLEAUROUX.

Que disiez-vous tout à l'heure, que Rosmar aimait ma fille?

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J'étais ballotté entre la crainte et l'espérance; quand je vous entendais parfois maudire le jour qui nous priva de notre nationalité, vanter les Bretons qui restaient fidèles au pays, quand je vous voyais tressaillir en recevant une lettre de M. d'Argentré, le grand patriote, je me disais que, par quelques points au moins, j'étais digne de vous. Quand, après cela, je calculais votre immense fortune, quand je vous entendais maudire la jurisprudence et les lettres, je me renfermais dans le silence et dans le secret de mes larmes.

RAOUL CLEAUROUX.

Ah! je suis trop puni d'avoir cédé à des pensées de vanité et de vengeance contre ma sœur! J'avais perdu le sens. Je le retrouve. Je comprends de nouveau que rien n'est plus noble que le droit et la liberté. Me pardonnerez-vous, Rosmar, mon fils, et chanteronsnous encore en buvant le cidre de mes vergers :

Nizo bepred
Bretoned?

S. ROPARTZ.

QUESTIONS DE DROIT HISTORIQUE.

LES VIGNES A COMPLANT

EN POITOU & EN BRETAGNE.

I.

Les vignes à complant ont encore une grande importance dans la portion du Poitou qui forme aujourd'hui le département de la Vendée, et dans la partie méridionale de l'ancien comté Nantais sur la rive gauche de la Loire. Elles se sont conservées dans ces contrées où fut autrefois leur berceau, elles y ont traversé les siècles et sont arrivées jusqu'à nous en gardant le principe de la réserve de la propriété, et le caractère qui dès leur origine les a distinguées des autres concessions du moyen âge et a empêché de les confondre avec les rentes foncières. C'est cette situation exceptionnelle qui les a protégées à l'époque de la Révolution de 1789, et qui est encore maintenant leur garantie. Les complants de la Vendée et de la Loire-Inférieure méritent une étude sérieuse, et on ne peut les bien apprécier qu'en interrogeant leurs plus vieilles chartes de concessions, les textes mêmes de la coutume qui les régissait autrefois, les conditions sur lesquelles ils ont reposé dans tous les temps, et les décisions qui depuis la Révolution ont assuré leur maintien.

TOME V. 2e SÉRIE.

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