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commençant par ces mots : Qui n'aime pas Cottin, n'estime point son Roi, etc.

Et doit en conséquence ledit Paul, ci-devant canonnier à cheval, aujourd'hui vigneron, laboureur, bûcheron, etc., etc., comparoir en personne aux assises de Paris, le 27 du présent mois, pour s'ouïr condamner à faire aux courtisans, fainéants, intrigants, réparation publique et amende honorable, déclarant qu'il les tient pour valets aussi bons, aussi bas, aussi vils, aussi rampants que furent oncques leurs pères et prédécesseurs; qu'à tort et méchamment il a dit le contraire; et en même temps confesser, la hart au cou, la torche au poing, que le passé seul est bon, que le présent ne vaut rien, n'a jamais rien valu, ne vaudra jamais rien; qu'autrefois il y eut d'honnêtes gens et des moeurs; mais qu'aujourd'hui les femmes sont toutes débauchées, les enfans tous fils de coquettes, garnements tous nos jeunes gens, et nous marauds à pendre tous, si Bellart faisait son devoir.

Après quoi ledit Paul sera détenu et conduit ès-prisons de Paris, pour y apprendre à vivre et faire pénitence, sous la garde d'un geôlier gentilhomme de nom et d'armes, qui répondra de sa personne aussi long-temps qu'il conviendra pour l'entière satisfaction desdits courtisans, gens de cour, flatteurs, flagorneurs, flagornant partout le royaume, etc., etc.

Voilà, mes chers amis, en quelle extrémité se trouve réduit le bonhomme Paul, que nous avons vu faire tant et de si bons fagots dans son bois ‹le Larçai, tant de beau sainfoin dans son champ de la Chavonnière; sage s'il n'eût fait autre chose! On l'avait maintes fois averti que sa langue lui attirerait quelque méchante affaire; mais il n'en a tenu compte, Dieu sans doute le voulant châtier, afin d'instruire ses pareils, qui ne se peuvent empêcher de crier quand on les écorche. Le voilà mis en jugement et condamné, ou autant vaut. Car vous savez tous comme il est chanceux en procès. Chaque fois qu'on le volait ici, c'était lui qui payait l'amende. Et, de fait', se peut-il autrement? Il ne va pas même voir les juges! Prions Dieu pour lui, mes amis, et que son exemple nous apprenne à ne jamais dire ce que nous pensons des gens qui vivent à nos dépens,

PROCES

DE PAUL-LOUIS COURIER.

(1821.)

Assez de gens connaissent la brochure intitulée: Simple Discours. Lorsqu'elle parut, on la lut; et déjà on n'y pensait plus, quand le gouvernement s'avisa de réveiller l'attention publique sur cette bagatelle oubliée, en persécutant son auteur qui vivait aux champs, loin de Paris. Le pauvre homme, étant à labourer un jour, reçut un long papier, signé Jacquinot Pampelune, dans lequel on l'accusait d'avoir offensé la morale publique, en disant que la cour autrefois ne vivait pas exemplairement; d'avoir en même temps offensé la personne du roi, et, de ce non content, provoqué à offenser ladite personne. A raison de quoi Jacquinot proposait de le mettre en prison et l'y retenir douze années, savoir: deux ans pour la morale, cinq ans pour la personne du roi, et cinq pour la provocation. Si jamais homme tomba des

nues, ce fut Paul-Louis, à la lecture de ce papier timbré. Il quitte ses bœufs, sa charrue, et s'en vient courant à Paris, où il trouva tous ses amis non moins surpris de la colère de ce monsieur de Pampelune, et en grand émoi la plupart. Il n'alla point voir Jacquinot, comme lui conseillaient quelques-uns, ni le substitut de Jacquinot, qu'on lui recommandait de voir aussi, ni le président, ni les juges, ni leurs suppléants, ni leurs clercs, non qu'il ne les crût honnêtes gens et de fort bonne compagnie, mais c'est qu'il n'avait point envie de nouvelles connaissances. Il se tint coi; il attendit, et bientôt il sut que Jacquinot, ayant dû premièrement faire approuver son accusation par un tribunal, ne sais quel, les juges lui avaient rayé l'offense à la personne du roi et la provocation d'offense. C'était le meilleur et le plus beau de son papier réquisitoire; chose fâcheuse pour Pampelune; bonne affaire pour Paul-Louis, qui en eut la joie qu'on peut croire, se voyant acquitté par-là de dix ans de prison sur douze, et néanmoins encore inquiet de ces deux qui restaient, se fût accommodé à un an avec Jacquinot, pour n'en entendre plus parler, s'il n'eût trouvé Mc Berville, jeune avocat déjà célèbre, qui lui défendit de transiger, se faisant fort de le tirer de là. Votre cause, lui disait-il, est imperdable de tout point; il n'y en eut jamais de pareille, et je défie M. Régley de faire un jury qui vous con

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