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portant, il faudroit avoir sous les yeux les coquilles fossiles d'Araya1, et les examiner de nouveau avec cette scrupuleuse exactitude qu'ont mise récemment dans ce genre de recherches MM. Lamarck, Cuvier et Brongniart.

Nous venons de nommer les schistes micacés de Maniquarez et de Chuparipari, la formation de calcaire alpin de Punta Delgada et du Cocollar, et celle de grès, de brèches calcaires et de calcaire compacte très-récent, que l'on trouve réunis à l'extrémité occidentale de la Punta Araya, comme au château Saint-Antoine de Cumana. Il nous reste à parler d'une quatrième formation qui repose probablement * au-dessous du grès calcaire

1 Des échantillons du grès ou brèche coquillière d'Araya se trouvent parmi les suites géologiques que j'ai envoyées, en 1800, au cabinet du roi d'Espagne à Madrid. Nous n'en possédons pas dans les collections que nous avons déposées à Berlin et à Paris.

2 J'invite les voyageurs minéralogistes à examiner plus particulièrement le Cerro de la Vela. La pierre calcaire des Peñas negras repose sur une argile schisteuse, mêlée de sables quartzeux; mais rien ne s'oppose à admettre que l'argile muriatifère des salines

d'Araya, je veux dire de l'argile muria tifere.

Cette argile, endurcie, imprégnée de pétrole et mêlée de gypse lamelleux et lenticulaire, est analogue au salzthon qui accompagne en Europe le sel gemme de Berchtesgaden, et dans l'Amérique méridionale celui de Zipaquira. Elle est généralement gris de fumée, terreuse et friable; mais elle enchâsse des masses plus solides d'un brun-noirâtre, à cassure schisteuse et quel

soit d'une formation plus neuve que cette argile schisteuse, ou qu'elle alterne avec des bancs de grès. Aucun puits n'ayant été creusé dans ces contrées, rien ne peut nous instruire sur la superposition des couches. Les bancs de grès calcaire que l'on trouve au nord du lac salé et près des cabanes de pêcheurs, sur la côte opposée au cap Macanao, m'out paru sortir au-dessous. de l'argile muriatifère.

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Près de Santa-Fe de Bogota. Cette formation d'argile muriatifère, long-temps négligée dans les systèmes de géognosie, caractérise le sel gemme plus que le gypse secondaire ancien (âlterer Flözgyps) qui repose sur le zechstein ou calcaire alpin, comme je l'ai fait voir en 1798, dans mon ouvrage sur les moffettes des mines (Ueber die unterisdirchen Gasarten, p. 143.)

quefois conchoïde. Ces fragmens, de six à huit pouces de long, ont une forme anguleuse. Lorsqu'ils sont très-petits, ils donnent à cette argile un aspect porphyroïde. On y trouve disséminés, comme nous l'avons indiqué plus haut, soit en nids, soit en petits filons, de la sélénite', et plus rarement du gypse fibreux. Il est assez remarquable que cette couche d'argile, de même que les bancs de sel gemine pur et le salzthon en Europe, ne renferme presque jamais de coquilles, tandis que les roches circonvoisines en offrent en grande abondance.

Quoique le muriate de soude ne se trouve pas en parties visibles dans l'argile d'Araya, on ne peut douter de son existence. Il se montre en grands cristaux, si l'on humecte la masse avec de l'eau de pluie, et qu'on l'expose au soleil. La Lagune, à l'est du château de Santiago, offre tous les phénomènes qui ont été observés dans les lacs salés de la Sibérie, décrits par Lepechin, Gmelin et Pallas. Elle ne reçoit cependant que les eaux pluviales qui s'infiltrent à travers les

'En lentilles réunies deux à deux.

bancs d'argile, et qui se réunissent au point le plus bas de la péninsule. Tandis que la Lagune servoit de saline aux Espagnols et aux Hollandois, elle ne communiquoit pas avec la mer; aujourd'hui, on a de nouveau interrompu cette communication, en plaçant des fascines à l'endroit où les eaux de l'Océan avoient fait une irruption en 1726. Après de grandes sécheresses on retire encore, de temps en temps, du fond de la Lagune, des masses de muriate de soude cristalisé et trèspur, d'un volume de trois ou quatre pieds cubiques. Les eaux salées du lac, exposées à l'ardeur du soleil, s'évaporent à leur surface; des croûtes de sel, formées dans une solution saturée, tombent au fond, et, par l'attraction entre des cristaux d'une même nature et d'une même forme, les masses cristallisées s'aggrandissent de jour en jour. On observe en général que l'eau est salée partout où il s'est formé des mares dans le terrain argilleux. Il est vrai que, pour exploiter la nouvelle saline, près de la batterie d'Araya, on reçoit les eaux de la mer dans des vasets, comme aux marais salans du midi de la France; mais, à l'île de la Marguerite, près de Pampatar,

on fabrique le sel en n'employant que les eaux douces, qui ont lessivé l'argile muriatifère. Il ne faut pas confondre le sel disséminé dans ces terrains argilleux, avec celui que renferment les sables des plages, et que l'on bonifie sur les côtes de Normandie'. Ces phénomènes, considérés sous le rapport géognostique, n'ont presque rien de commun. J'ai vu de l'argile muriatifère au niveau de l'Océan, à la Punta Araya, et à deux milles toises de hauteur dans les Cordillères de la Nouvelle-Grenade. Si dans le premier de ces endroits elle se trouve placée au-dessous d'une brèche coquillière très-récente, elle forme au contraire en Autriche, près d'Ischel, une couche' puissante dans le calcaire alpin qui, quoique également postérieur à l'existence des êtres organisés sur le globe, est cependant d'une haute antiquité, comme le prouve le grand nombre de roches qui lui sont superposées. Nous ne révoquerons pas en doute

Dans la baie d'Avranches et dans beaucoup d'autres parties de l'Europe. Chaptal, Chimie appliquée aux arts, T. IV, p. 161.

2 Buch, Geognost. Beobachtungen, T.I, p. 133.

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