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donner asile aux Muses dans les arsenaux de la science; s'il est vrai que le plus souvent l'érudition tue la poésie, il est beau de voir le vrai savant apprendre aux autres comment il faut sacrifier aux Grâces pour charmer les courts loisirs d'une vie toute consacrée aux labeurs de l'intelligence. Abondance de documents, nouveauté des aperçus, variété d'expositions, digressions spirituelles, souvenirs poétiques, tout cela est donné avec profusion par M. de Reiffenberg à ses lecteurs rien n'est épargné pour solliciter sous l'un ou l'autre point de vue la sympathie des hommes instruits, pour éveiller en toute occasion le sentiment de sa force dans la Belgique littéraire. Serait-il permis de faire ici une demande nouvelle au bibliophile consommé qui a déjà tant prodigué de recherches et d'études au public, qu'il attire complaisamment dans les voies de la science? La riche érudition déposée dans les pages des dix années de l'Annuaire gagnerait beaucoup à être présentée à la masse des lecteurs avec le modeste appareil d'une classification méthodique quelques tables suffiraient pour les orienter dans l'usage de ce précieux répertoire qui complète les livres les plus vantés de bibliographie. Grâce à un tel secours, il acquerrait une grande valeur pratique et demeurerait un des fondements de notre bibliographie nationale, comme une des sources de notre histoire littéraire.

De l'Académie royale, de l'Observatoire et de la Bibliothèque de Belgique, notre revue nous conduit tout naturellement aux Universités. Mais, de fait, nous sommes dépourvus des mêmes moyens de juger leur état présent à l'aide d'une statistique officielle. L'Université de Bruxelles a cessé depuis 1840 la publication de son Annuaire, dont le premier volume, rédigé par une société d'étudiants, a eu la bonne fortune d'avoir été l'occasion d'une polémique assez rude dans la presse : elle n'a pas jugé bon, depuis lors, de rendre compte de sa situation à d'autres autorités qu'à l'administration communale de la ville de Bruxelles. Quant aux deux Universités de l'État, le ministère présente aux Chambres dans chaque session un rapport détaillé sur leur personnel, leur état scientifique, leur population d'étudiants, comme appendice au budget qu'il s'agit de voter en leur faveur; de plus, les recteurs des Universités de Gand et de Liége, en remettant leur charge à l'un de leurs confrères au commencement de l'année académique, consacrent une partie de leur discours d'usage à une revue de tous les faits qui ont signalé l'année précédente et des publications qu'ont entreprises des membres du corps enseignant. Ces discours-rapports sont insérés assez longtemps après dans les Annales des Universités de Belgique, dont la collection, consacrée surtout à l'impression des mémoires couronnés dans le concours universisitaire, est parvenue déjà au tome cinquième (1). Nous ne pouvons manquer

(1) Bruxelles, libr. encyclop. de Périchon, 5 volumes gr. in 8, 1842-46.

de dire ici que cette collection est un des documents les plus importants à consulter pour connaître le résultat des examens dans nos établissements d'instruction et le fruit des études spéciales de quelques-uns de leurs élèves : les tableaux statistiques qu'elle contient paraissent avoir été dressés avec la plus grande exactitude.

De son côté, l'Université de Louvain a poursuivi la publication de son Annuaire, qui est une sorte de rapport officiel adressé à ses membres et à la partie du public qui la soutient (1). Nous trouvons, dans le dernier volume de ce recueil, comme dans les précédents, des renseignements précis sur l'état de l'Université catholique, qui n'a pas cessé d'être florissant depuis les premières années de son établissement à Louvain (2). Nous y remarquons une statistique exacte des examens subis pendant l'année 1848 pour l'obtention des grades académiques, soit devant une faculté de l'Université de Louvain, soit devant le jury national: la réputation des étudiants de cette Université s'est bien soutenue sous le rapport des distinctions que les divers jurys leur ont accordées. Le zèle n'a pas non plus fait défaut aux membres des deux sociétés qui se sont formées, il y a une dizaine d'années, au sein de l'Université c'est ce qu'attestent les rapports de la Société littéraire qui comprend dans ses travaux toutes les branches des études académiques, ainsi que de la Société de littérature flamande qui persévère suivant sa devise: Met tyd en vlyt. Nous remarquons encore, en tête de l'Annuaire, des documents destinés à des études détaillées d'histoire et de chronologie, et faisant suite à des pièces du même genre publiées précédemment. Nous devons signaler également deux notices nécrologiques, l'une sur feu Mgr. Boussen, évêque de Bruges, l'un des six évêques fondateurs de l'Université; l'autre sur François-Eugène Andries, de Malines, lauréat du concours universitaire en 1846, professeur agrégé à l'Université de Louvain pour les hautes mathématiques, mort à Paris, en avril 1848, à l'âge de 24 ans. Les Analectes, qui terminent comme de coutume l'Annuaire, contiennent toutes les pièces relatives à l'établissement du collége ecclésiastique belge à Rome et aux avantages que les institutions scientifiques de Rome offrent pour les études, et ils reproduisent un mémoire de M. Faider, présenté à la classe des lettres de l'Académie sous le titre de: Particularités sur les anciennes fondations de bourses de l'Université de Louvain.

X.

(1) Annuaire de l'Université catholique de Louvain, treizième année, 1849. Louvain, 1 vol. in-18°, p, CXXV-276.

(2) Plus de cinq cents étudiants se sont présentés en octobre dernier à la réouverture des cours.

FRAGMENT BIBLIQUE.

(Imité de quelques versets du Cantique de Moïse après le passage de la Mer Rouge.)

Oui, chantons, Israël, un cantique au Seigneur !
Il s'est levé pour nous revêtu de sa gloire,
Il a lancé ses traits de mort et de terreur,
Il a vaincu l'impie au sein de sa victoire :
Oui, chantons, Israël, un cantique au Seigneur !

Il s'est montré soudain armé de sa puissance
Dont Il est recouvert comme d'un bouclier,
Et brandissant sur eux son glaive de vengeance
Il a brisé d'un coup le char et le guerrier!

Toujours juste et fidèle en toutes ses promesses
Il sut armer mon bras de sa protection;

Il a rempli mon cœur de saintes allégresses :

A Vous, Seigneur, à Vous, gloire, adoration!

C'est Lui qui m'a sauvé, c'est le Dieu de mes pères,

Mes louanges toujours s'élèveront vers lui;

Il est le Dieu puissant qui dissipe les guerres,

Il est le Roi des rois, Il sera mon appui.

Le Ciel est son palais, l'univers son ouvrage,
Il foule sous ses pieds tous les astres des cieux;
La Terre est son autel, l'Éternité son âge;
D'un mot il sait calmer l'Océan furieux;
D'un seul de ses regards Il réduit en poussière
Tous les mondes émus, interdits de frayeur;

Il sème dans l'espace et l'ombre et la lumière :

Tout n'est qu'un jeu pour Lui..... son nom est le Seigneur!
JossE-B.-J. CELS JUNIOR, peintre.

Décembre 1842.

HISTOIRE DE MADAME DE MAINTENON

ET DES PRINCIPAUX ÉVÉNEMENTS DU RÈGNE DE LOUIS XIV,

par M. le duc de Noailles. (1)

Nous venons bien tard pour appeler l'attention et la sympathie de nos lecteurs sur ce bel ouvrage, et ce retard nous ôte l'avantage de la priorité, le seul que nous pussions disputer à l'écrivain érudit et spirituel qui en a rendu compte dans un autre recueil. M. Ampère a trouvé, pour définir la nature et le succès du livre de M. le duc de Noailles une expression si juste et si vraie, que tout lecteur se figure volontiers l'avoir trouvée d'avance dans sa pensée. Il ne nous reste plus qu'à répéter, après lui, que l'ouvrage de M. de Noailles, à force de contraste avec les circonstances, est presque un ouvrage de cir

constance.

Il faut donc remercier M. le duc de Noailles non seulement d'un bon livre, mais d'une bonne action; car c'en est une que de nous avoir donné, à nous pauvres citoyens de la république, au milieu de cette triste et fatale année 1848, deux magnifiques volumes dont la lecture repose en même temps qu'elle instruit. Grâces soient rendues à l'élégant et solide historien qui nous a retirés, pendant cette lecture, de l'atmosphère sordide et orageuse où nous avons eu tant de peine à respirer depuis dix mois, pour nous transporter dans une région sereine et élevée, où les meilleurs souvenirs de notre

(1) Cet article, dû à la plume élégante de M. le comte de Montalembert, est emprunté au Correspondant.

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