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ont-elles été reconnues personnes civiles par des arrêtés royaux? Oui. M. De Haussy a-t-il soumis au Roi d'autres arrêtés royaux pour rapporter ceux que S. M. avait signés? - Non. Un arret par lequel la cour refuse d'appliquer un arrêté royal, a-t-il pour conséquence d'annuler cet arrêté? - Non.

Comment done M. le ministre de la justice trouve-t-il qu'un semblable arrêt annule même des arrêtés royaux sur lesquels la cour n'a pas eu à se prononcer? M. De Haussy, aidé des nombreux jurisconsultes qu'il a consultés, voudra bien avoir l'obligeance de répondre lui-mème à cette question.

Les legs ont été faits sur la foi d'arrêtés non rapportés, sur la foi d'actes émanant du Gouvernement; et c'est le Gouvernement lui-même qui vient dénier à ses propres actes leur force et leur autorité et dire ainsi aux particuliers qu'ils ont eu tort d'y avoir confiance!!

Il fallait donc pour deux motifs faire rapporter les arrêtés royaux qui avaient donné aux établissements le caractère d'institution publique : 1° pour ne pas induire les particuliers en erreur; 2 pour faire détruire par le pouvoir royal ce que le pouvoir royal avait créé.

L'on dira peut-être que le pouvoir royal s'est indirectement associé aux abrogations décrétées dans le Moniteur par l'omnipotence ministérielle, en signant les arrêtés qui ont autorisé le bureau de bienfaisance de Ruddervoorde et la commission des hospices de Thielt à accepter les libéralités faites dans ces deux communes aux sœurs hospitalières; mais cette justification fournirait plutôt un nouveau grief contre le ministre de la justice: d'abord, parce que les arrêtés ne se rapportent pas d'une manière indirecte, et que la volonté de les révoquer doit être aussi clairement exprimée que la volonté de les porter; en second lieu, parce que cette manière indirecte de s'adresser au Roi pour obtenir que S. M. modifie un état de choses sanctionné par Elle depuis dix-sept ans, pourrait sembler peu d'accord avec une politique qui a la prétention d'être TROIS FOIS SINCÈRE.

7° Violation du décret de 1809 relatif aux sœurs hospitalières, en prétendant qu'il permet aux sœurs de desservir, mais non de tenir un hospice.

8° Fausse interprétation du même décret, en soutenant que les statuts ne peuvent pas autoriser les sœurs à donner gratuitement l'instruction aux pauvres enfants.

Les arrêts dont on a fait tant de bruit, ont-ils décidé ces points? En aucune façon. Il sera facile de l'établir; ensuite,

sans traiter à fond ces questions, nous verrons en peu de mots les conséquences du système ministériel.

Quant à la distinction entre tenir et desservir un hospice, comment aurait-elle pu être faite être faite par les arrêts cités, puisqu'aucune des deux associations auxquelles ils s'appliquent, ne devaient, aux termes de leurs statuts, s'occuper ni de tenir, ni même de desservir un hospice?

« Les sœurs de Marie à Braine-Lalleud (art. 4 des statuts) > se consacrent à l'instruction de la jeunesse et au service des » malades A DOMICILE; elles tiennent un pensionnat, etc. »

Quant aux dames du Sacré-Coeur à Mons, « elles se consa> crent à venir, autant qu'il est en elles, au secours des indi» gents dans les différents besoins qu'ils peuvent avoir;

» Elles se dévouent principalement et avant tout à subvenir > aux besoins particuliers des enfants, des personnes indigentes, > en leur donnant une éducation qui les forme aux vertus » chrétiennes, etc.;

> Elles se livrent encore à l'éducation des enfants nés de pa› rents plus avantageusement partagés du côté des biens de la > fortune, en les tenant en pension, etc.;

» Elles s'appliquent en outre à pourvoir, autant que possible, > et à distribuer aux pauvres QUI NE PEUVENT PAS ENTRER A L'HOPITAL, les divers secours dont ils ont besoin dans leurs mala› dies. »

La question, en ce qui concerne les hospices, n'a donc pas été soumise à la Cour. Voyons si celle-ci a décidé la question qui concerne l'instruction gratuite.

Quant aux sœurs de Braine-Lalleud, la Cour déclare « que » l'instruction de la jeunesse, la tenue d'un pensionnat et celle > d'un externat, constituent au moins l'une des principales occu>pations des sœurs de Marie; que dans l'art. 4 de leurs statuts, › il ne s'agit même pas D'UNE INSTRUCTION A DONNER GRATUITEMENT

» AUX PAUVRES. »

Quant aux dames du Sacré-Coeur, la Cour décide: « qu'il est > et demeure certain que les dames du Sacré-Coeur à Mons > forment une congrégation essentiellement enseignante. La Cour déclare aussi que « si les sœurs du Sacré-Cœur peuvent » prendre la qualité d'hospitalières, pour les secours qu'elles dis» tribuent éventuellement aux pauvres, cette qualité, au lieu » d'être principale, mériterait à peine le nom d'accessoire; » d'où la Cour conclut que le décret de 1809 n'est pas applicable à cette institution.

Comme on le voit, cette conclusion est uniquement fondée sur la tenue du pensionnat établi par les sœurs; quant à l'instruction gratuite, loin de décider qu'elle est incompatible avec la qualité d'hospitalière, la Cour cite elle-même la lettre du comte Bigot de Préameneu, du 3 mars 1809, aux évêques, dans laquelle il dit : « A l'égard des congrégations qui sont à la fois hospitalières et enseignantes, celles qui ne donnent qu'un enseignement gratuit sans pensionnat, ne doivent pas être assimilées à celles qui, pour soutenir leurs établissements, ont besoin de pensionnaires, etc. »

Les deux décisions que nous venons de citer, ne s'appliquent donc aucunement à l'instruction gratuite. Voyons si la Cour de Cassation vient davantage en aide au système ministériel.

Il est loin d'en être ainsi : car la Cour de Cassation a soin de consigner, dans un de ses considérants que les statuts des sœurs de Marie ne font nulle mention d'instruction gratuite; et la Cour se fonde uniquement sur ce que la tenue d'un pensionnat suffit pour écarter dans le chef de sœurs la qualité d'hospitalière dans le sens du décret de 1809; surtout quand la tenue d'un pensionnat constitue au moins l'une des obligations principales de la congrégation. Ainsi la seule chose décidée et par la cour d'appel et par la Cour de Cassation, c'est que le décret de 1809 ne peut pas être appliqué à des congrégations principalement enseignantes.

D'après cela, que M. De Haussy cesse donc de s'abriter derrière des décisions judiciaires pour justifier ses arrêtés en ce qui concerne Thielt et Ruddervoorde; ces décisions judiciaires lui font complétement défaut.

Un mot maintenant sur le fond de la question.

que

le

S'il était permis, en présence de la politique nouvelle, d'invoquer les anciennes règles d'interprétation, on lui dirait décret de 1809 n'ayant jamais reçu l'interprétation restreinte qu'il plait à M. le ministre de la justice de lui donner, on peut en conclure que tous les jurisconsultes avant M. De Haussy ne se sont pas trompés; on ajouterait que l'esprit du décret est clairement manifesté par les rapports qui l'ont précédé, par ceux qui l'ont suivi et par l'exécution qu'il a constamment reçue; on dirait aussi que l'institution des sœurs hospitalières ayant notamment pour but de servir les enfants abandonnés (termes du décret), ce service serait incomplet s'il était borné à des soins purement matériels. Mais ces raisons qui pourraient paraître bonnes à quelques esprits rétrogrades, feront sourire de pitié les grands

hommes du 12 août, qui ayant proclamé que l'État est laïc, et l'ayant ainsi soustrait à l'influence occulte, si effrayante comme chacun sait, veulent sans doute aussi soustraire l'instruction primaire à l'influence pernicieuse des sœurs de la charité.

En ce qui concerne la distinction récemment inventée que les sœurs peuvent desservir, mais non pas tenir un hospice, l'exécution constante du décret la repousse également; mais en outre cette distinction a-t-elle quelque chose de sérieux ?

L'on admet que les sœurs hospitalières peuvent être reconnues personnes civiles; qu'à ce titre, elles sont capables de recevoir et d'acquérir. Mais pourquoi ce privilége leur est-il accordé?

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Apparemment, parce que les biens possédés par elles tournent au profit des pauvres, des malades et des infirmes. Si elles doivent se borner à desservir les hôpitaux créés en vertu de la loi, pourquoi leur donner le droit de posséder des biens qui leur sont inutiles? La charité légale doit se suffire à elle-même. Dès que les sœurs ne peuvent pas fonder et tenir des hospices, il faut, pour être conséquent, leur refuser la faculté d'acquérir ou de recevoir des biens qui ne peuvent, en général, avoir bienfaisante destination.

que cette Soutiendra-t-on par hasard que les sœurs sont tenues de desservir les hospices communaux et de contribuer, à l'aide de leurs propres biens, à l'entretien de ces hospices? Mais ce serait leur enlever toute liberté, consacrer une spoliation, et empêcher par la suite toute création et toute libéralité nouvelle. Est-ce là qu'on veut en venir? Qu'on le dise du moins franchement.

Si, au contraire, on leur laisse la liberté de desservir ou de ne pas desservir les hospices légaux, qu'arrivera-t-il si l'administration communale et les sœurs ne s'entendent pas sur les relations à établir entre elles? Les sœurs s'abstiendront, et continueront à jouir de leurs biens; mais les pauvres en seront privés; je me trompe les sœurs pourront donner des secours à domicile; elles pourront soigner un malade dans un bouge infect et malsain; mais elles ne pourront pas recueillir ce malade et le soigner chez elles. Leurs maisons continueront à l'appeler, mais cesseront en réalité d'être hospitalières. Quel système, quelle logique, quelle humanité !

NOUVEL

ENSEIGNEMENT PHILOSOPHIQUE,

par Auguste Siguier. (1)

ÉCOLE CRITIQUE,

Connais toi toi-même.

SIXIÈME PARTIE.

Faites rayonner au contraire la notion de l'homme et du divin, telle qu'elle s'accorde avec le Catholicisme, car sur cette double question la véritable philosophie et le Catholicisme sont parfaitement d'accord; il y aura sur-le-champ et partout dans la société une force logique, et par suite, une puissance de vitalité tout exceptionnelle.

Prenons en effet les mots qui ont aujourd'hui le plus de prestige, ceux qui n'ont aucune explication, aucune solution possible avec la minorité lettrée, ceux dont la série appelle une étude, une science nouvelle dans le domaine philosophique. Ces mots vont se transfigurer aussitôt.

PRINCIPES.

Dans la minorité lettrée qui regarde l'homme comme parfaitement harmonieux, il n'est personne qui ne parle de ses principes; et la vérité est qu'ici

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