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lant; l'année suivante, 1504, Simon Portugalois, dont le nom ou plutôt le surnom, indique assez l'origine sinon le lieu de naissance, et atteste ainsi indirectement la haute réputation de la branche anversoise de l'École flamande et du maître qui y brillait; en 1507, c'est Aerdt van der Vekene; en 1512, Neelken van Berghem et Frans Dreyselere; en 1513, Inghels Ingelssone, c'est-à-dire Anglais fils d'Anglais, nom à propos duquel nous pourrions répéter nos observations faites à l'égard de Simon Portugalois; enfin en 1517, il reçoit encore, toujours suivant le même registre, Hennen Simons. C'est encore lui qui nous apprend que Goswin fut promu deux fois à la dignité honorifique et hautement honorable de doyen de la corporation ; en 1514 avec Cornille Markeseel, et en 1530 avec Gérard Bufken, batteur d'or. Il est fâcheux que jusqu'à présent toutes les recherches de M. Van Hasselt aient été impuissantes à compléter le peu de renseignements positifs qu'on lui doit déjà en grande partie sur notre Goswin.

Depuis l'année 1555, pendant laquelle Goswin peignait, âgé de 70 ans, le triptyque du maître-autel de Tongerloo, sa trace est entièrement perdue. On ne sait s'il habitait encore Anvers à cette époque, ce qui est d'ailleurs assez probable, et s'il continua d'y séjourner jusqu'à sa mort. On ne sait pas davantage l'année de celle-ci.

Sa biographie complète reste donc encore à faire, mais quand le pourra-ton? Espérons que de nouvelles investigations aussi sagaces, aussi heureuses que celles de M. Van Hasselt, le permettront bientôt.

En terminant cette rapide et incomplète analyse de la notice de notre savant ami, nous nous permettrons de lui exprimer ici nos regrets de ce qu'il n'ait pas cru devoir y discuter, autant que possible, ou au moins y mentionner les ouvrages connus des trois maîtres dont il nous fournit la plus exacte et la plus complète monographie encore existante. A nos yeux, c'est une lacune qu'il n'aurait pas dû laisser dans un travail de cette importance. Pourquoi, alors qu'on en a les moyens et ce ne sont pas eux qui font défaut à la vaste érudition de M. Van Hasselt pourquoi ne pas présenter une œuvre complète ? Il est vrai qu'il semble lui-même pressentir cette observation et vouloir la refuter d'avance, en abandonnant, comme il le dit expressément, à l'illustre Allemand auquel sa lettre est adressée, le soin de former lui-même la liste des ouvrages des trois Van der Weyden. Cette liste, les nombreuses recherches du Dr Hotho, dans tous les pays de l'Europe, pour la révision de son histoire de la peinture flamande et allemande, lui permettront sans doute de la présenter plus complète que personne. Mais franchement, cet abandon volontaire, qui sera si l'on veut une marque de déférence pour l'une des sommités scientifiques de l'Allemagne contemporaine, est-il une excuse suffisante? « La Belgique, dit M. Van Hasselt, en finissant, est » un des pays les plus arriérés dans la connaissance de l'histoire de ses » propres artistes et dans la critique scientifique des productions de l'art. »

Nous le reconnaissons volontiers avec lui, quoiqu'à regret, mais en mème temps il nous permettra de lui demander sans détour, s'ils n'ont pas quelque reproche à se faire, ceux qui, ayant le moyen d'atténuer cette triste vérité, ne le font pas aussi complétement que leurs connaissances et leur sagacité le leur permettent? Est-on à l'abri de toute espèce de blâme quand on abandonne à des étrangers une partie du champ paternel et de la moisson qu'on aurait pu récolter soi-même ?

JOSSE-B.-J. CELS JUNIOR, peintre.

Mai 1849.

LE PAPILLON.

Voyez ce papillon, volage amant de Flore,
Voltiger sur les fleurs que vit croître l'Aurore
Et qu'un léger Zéphir

De sa tiède haleine a fait épanouir.

L'azur, la pourpre et l'or qui diaprent ses ailes
Éclatent à l'envi comme des étincelles;

Jaloux de sa beauté

Il se dérobe à l'œil qui le suit attristé.

Il caresse les fleurs, s'abreuve à leurs calices;
Il vit pour le plaisir au milieu des délices
Et parcourt la fois

Les plaines, les vergers, les jardins et les bois.

Il quitte le bluet pour voler à la rose;
Tantôt sur le jasmin s'abat et se repose;
Tantôt près des ruisseaux,

Il se joue et serpente au milieu des roseaux.

Ou bien sur un vieux mur, quand les lézards agiles Pour jouer au soleil sortent de leurs aziles,

Il s'étale un moment

Comme luit sur l'ébène un superbe diamant.

Mais lorsque Philomèle au merveilleux ramage,
Prélude à son concert dans le fond du bocage,
La brise de la nuit

Qui vient en murmurant le glace et le détruit!

Engourdi dans son vol, il s'efforce, il chancelle;
Traversant la rivière il y mouille son aile,

Va, s'arrête en chemin,

Pour languir sur les fleurs qu'il vit naître au matin!

Il retourne à la rose et sur elle succombe,
Elle fut son berceau, maintenant c'est sa tombe :
Il est mort sans retour

Après avoir vécu l'espace d'un beau jour !.....

PIRARD FRANÇOIS.

QUELQUES RÉFLEXIONS

SUR

LE LIBÉRALISME ET SUR L'INTERVENTION DU CLERGÉ DANS LES AFFAIRES ÉLECTORALES,

A l'occasion de l'élection d'un sénateur à Thielt.

On nous demande dans la Revue de la Flandre une place pour la lettre qu'on va lire. En l'accordant, nous voulons fournir une nouvelle preuve de l'impartialité qui a constamment dirigé la rédaction de ce recueil; mais nous laissons à notre honorable correspondant la responsabilité des vues qu'il émet. La Revue de la Flandre a planté sa bannière en dehors des camps de tous les partis, et elle croit devoir la maintenir sur ce terrain.

A M. le Directeur de la REVUE DE LA FLANDRE.

Les journaux d'une certaine couleur ont beaucoup blâmé l'intervention du clergé dans l'élection d'un sénateur à Thielt; à cette occasion, ils ont déversé à pleines mains l'insulte et la calomnie sur une classe de citoyens qui, après tout, n'ont fait qu'user d'un droit constitutionnel. A entendre ces vertueux journaux, on dirait qu'ils prennent un vif intérêt à tout ce qui touche à la religion. Qu'un prêtre dépose en silence son vote dans l'urne électorale, qu'il cache au fond de son cœur la préférence qu'il a pour tel ou tel candidat, le faux libéralisme ne trouve rien à y redire; mais dès qu'il tâche de faire passer sa conviction dans l'esprit d'un autre, non seulement il devient réfractaire à la cause libérale, ce qui est déjà un grand mal, mais il déshonore en outre son caractère, il souille sa soutane, il déconsidère la religion, toutes

choses qui arrachent au libéralisme, trois fois sincère, un cri de douleur et d'indignation.

L'Indépendance soutient la thèse de la non-intervention du clergé dans les élections avec un talent qui lui appartient en propre. Selon l'organe ministériel, c'est comme prêtre et non comme citoyen que l'ecclésiastique doit s'éloigner de toute lutte électorale. Un prêtre peut-il s'occuper des affaires de ce monde ? Il y a bien des choses à dire sur cette distinction qu'on veut établir entre le prêtre et le citoyen. On pourrait demander: Que fera le curé si un électeur vient le consulter sur le vote qu'il est appelé à émettre? Lui dira-t-il Je veux bien vous donner des conseils, pourvu que vous me promettiez de les recevoir comme venant non de votre pasteur, mais de votre concitoyen? Et si l'électeur lui répond: C'est précisément parce que vous êtes mon pasteur que je m'adresse à vous; par votre caractère, par vos études, par l'amour que vous portez à vos paroissiens, vous êtes à même plus que tout autre de m'éclairer sur le vote que je dois émettre; que répliquera le curé à ce consciencieux électeur ?

Si un prêtre, précisément parce qu'il est prêtre, devait s'abstenir de prendre part aux affaires électorales, il faudrait dire que sa position est beaucoup au-dessous de celle de tout autre citoyen. Quoi! il sera permis à tout laïc, n'importe le rang auquel il appartient, de parler aux électeurs ; et un prêtre ne pourra rien faire de semblable! Je dirai moi, laïc, aux électeurs Prenez garde, un certain parti qui s'intitule à tort le parti libéral, cherche à engager le Gouvernement dans une fausse route; ce parti révèle aux yeux les moins clairvoyants des tendances irréligieuses; son antipathie contre les catholiques se manifeste en toute rencontre; à Ypres, l'élection d'un sénateur lui a fait jeter de hauts cris, parce que l'élu est père d'un évêque; à Thielt, ce parti a fait des efforts inouis pour repousser M. le baron d'Anethan, parce que ce candidat avait pris la défense de la charité, contre les doctrines pernicieuses de M. De Haussy. Dans d'autres circonstances, ce même parti a éliminé des Chambres les personnes les plus honorables, les plus capables, les plus indépendantes par leur caractère et leur position, uniquement parce qu'elles appartenaient à l'opinion catholique; ce parti ne veut pas le bien du pays; il n'invoque la liberté qu'afin d'en user largement pour lui seul; gardez-vous d'accepter le candidat qu'il vous propose; il ne peut vouloir le bien, car l'instinct du mal est infaillible; ce qu'il ne veut pas est bon, ce qu'il veut est mauvais. Si je suis laïc, dis-je, il me sera permis de tenir ce langage; mais si je suis prêtre, je ne peux rien dire de semblable, à moins de m'attirer à l'instant les malédictions du libéralisme exclusif et intolérant.

L'Indépendance professe sur ce point une doctrine un peu moins rigoureuse; elle permet aux prêtres d'user de leur influence individuellement, mais elle leur défend d'agir en corps et à titre d'autorité. Avant d'examiner si, et jus

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