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« répondit le maréchal; » et il part. Senac. partit aussi, c'est-à-dire, qu'il n'eut rien de plus pressé que de quitter la voiture et de s'enfuir à la queue de la tranchée.

MADAME la marquise de Fleury à longtemps étonné la cour par la franchise et la hardiesse de ses réparties. Louis XV parlant devant elle du roi de Danemarck, qui était venu faire un voyage en France, elle demanda à Sa Majesté si ce monarque était bien riche. Le roi lui répondit que les finances de ce royaume avaient été long-temps dérangées, mais que ce prince avait à présent un excellent ministre qui avait bien reglé ses affaires et les avait remises en parfait état. « Ah! sire, répartit cette dame, vous devriez << bien lui débaucher ce ministre-là. >>

Etant à souper chez M. le duc de Choiseul, on servit un superbe globe en sucre, représentant l'Europe, avec la désignation de tous les royaumes. Le ministre demanda à madame de Fleury quelle partie elle voulait? « Don<< nez-moi la France, M. le duc, répondit. «elle; autant vaut que ce soit moi qui la « mange qu'un autre. »

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Philippe, duc d'Orléans, avait fait une liste des dames de la cour, qu'il avait désignées sous, les différents titres de jolies, laides, abominables. Il affecta, au cercle de la reine, de la montrer à plusieurs personnes, de manière à exciter la curiosité de la marquise de Fleury, qu'il avait envie de mortifier, et qui, en effet, demanda ce que c'était? Le prince lui présenta hardiment cette liste, sur laquelle elle se trouva au nombre des dernières. «On sait heureu«sement, monseigneur, lui dit-elle hautement << en la lui rendant, que vous ne vous con« naissez pas mieux en signalements qu'en «signaux ». (Allusion piquante au combat d'Ouessant, où le duc d'Orléans avait joué un rôle indigne de sa naissance).

IL s'est passé auprès de Paris un événement qu'on serait tenté de prendre pour un çonte fait à plaisir, s'il n'était constaté authentiqueinent et même juridiquement.

(*) Un Frère quêteur du couvent des Capucins de Meudon, revenant à son monastère avec sa besace bien garnie, et ayant pris un sentier écarté dans le bois pour abréger son

chemin, est rencontré par un voleur qui, le pistolet sur la gorge, lui demande la bourse ou la vie. Le pauvre Frère représente inutilement que son état annonçant un dénûment absolu, doit le mettre à l'abri de pareilles atteintes : il est forcé de céder, de mettre bas sa besace remplie de provisions, de vider ses poches, et de donner trente-six francs qu'il avait recueillis d'aumônes. Le voleur s'en allait content de sa capture, lorsque le moine le rappelle. « Monsieur, lui dit-il, vous avez été << assez bon pour me laisser la vie ; mais en << rentrant à mon couvent j'essuierai des trai<< tements pires que la mort, parce qu'on ne <<< voudra pas croire à ce qui m'est arrivé, si <<< vous ne me fournissez une excuse en tirant <<< votre pistolet dans ma robe, pour prouver « que j'ai été attaqué par des armes à feu, et << que je n'ai eu d'autre ressource que d'aban<< donner le fruit de ma quête.-Volontiers, « dit le voleur, étendez votre manteau............». Le voleur tire, le Capucin regarde. «< Mais il « n'y paraît presque pas. C'est que mon pistolet n'était chargé qu'à poudre; je vou«lais vous faire plus de peur que peur que de mal.

« Eh! monsieur, n'en auriez-vous pas un

« autre? Non, en vérité.... ». A ce mot, le moine, grand et vigoureux, lui saute au collet. « Ah! coquin, nous sommes donc à << armes égales ». Il terrasse le voleur, le roue de coups, le laisse le laisse pour mort sur la place, reprend sa besace, ses trente-six francs, et un louis en outre, et revient triomphant à son couvent. La déposition du Capucin, et l'aveu du voleur qu'on trouva à la place indiquée, et qui, se croyant près d'expirer, confessa son aventure, ne peuvent laisser aucun doute sur ce fait, quelque extraordinaire qu'il soit. (*)

UN jeune Français, élève de l'Académie de Peinture, étant allé en Italie pour s'y perfectionner, rencontra à Naples un Espagnol couvert de haillons et d'une malpropreté excessive, vice dont, en général, ce peuple est accusé. Le jeune peintre remarque que l'Espagnol a les mains fort bien faites, quoique fort sales, il lui propose de les dessiner. L'Espagnol accepte, moyennant quelque argent qui lui est promis. Le Français le conduit chez lui, et lui dit de se laver les mains. Soit, il passe au vestibule; puis revenant comme par

réflexion : « Laquelle, monsieur, dit-il, vou «<lez-vous dessiner >>?

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M. ANGRAND-D'ALLERAY, lieutenant civil au Châtelet de Paris, jouissait de l'estime blique, et la méritait également par ses qualités intérieures, par ses longs services dans la magistrature, et par la dignité et l'exactitude avec lesquelles il remplissait les importantes fonctions de sa place, qui l'asservissaient au point de n'avoir pas un seul moment dont il pût disposer.

(*) A dix heures du soir, au milieu de l'hiver, on lui annonça un malheureux marchand, qui, arrêté en vertu d'une sentence consulaire, pour laquelle il n'avait pu fournir caution, prétendait que la procédure n'était pas en règle, et avait demandé un référé pardevant le lieutenant civil. Le malheureux détenu était accompagné de sa femme et de ses, enfants dans la plus extrême désolation. Mais le magistrat, impassible comme la loi, sut contenir sa sensibilité en présence de ce nombreux auditoire, et trouvant la procédure exacte, ordonna l'exécution du jugement. Cependant à peine l'infortuné père de famille

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