Page images
PDF
EPUB

auteurs d'ouvrages dits élémentaires,

avec un désir ardent de produire une œuvre utile, M. Deyrolle ne pouvait faire un travail médiocre et sans valeur. Notre conviction est qu'il a réussi à condenser, dans ses tableaux d'histoire naturelle, les faits les plus importants de cette science; les exemples donnés sont bien choisis, bien dessinés et les explications qui les accompagnent sont claires, précises et parfaitement appropriées à l'intelligence des enfants auxquels elles s'adressent. Nous souhaitons aux tableaux de M. Deyrolle tout le succès qu'ils méritent et c'est avec plaisir que nous demandons :

1° De remercier l'auteur de son envoi;

2o D'accorder à son important ouvrage une place honorable dans votre bibliothèque.

Dr L. HÉBERT.

L'instruction républicaine,
par M. Amédée GUILLEMIN.

Obligation. Gratuité. Laïcité.

(Paris.-Armand Le Chevalier, éditeur.)

Le nouveau livre de M. Guillemin est certainement un des plus remarquables qui aient été publiés sur la question fondamentale de l'instruction publique. Cette question y est traitée avec beaucoup de compétence et de talent, sous tous ses aspects. Les programmes, la méthode, l'éducation des filles, ces bases sur lesquelles doit porter toute la réforme, y occupent une place en rapport avec leur importance.

Après de judicieuses considérations générales et politiques, après la discussion étendue de l'instruction primaire et des problèmes les plus intéressants qui s'y rattachent, l'auteur consacre un chapitre spécial à l'instruction secondaire, un autre, le XIXe et dernier, à l'instruction supérieure.

Le XVIII porte tout entier sur la question si controversée de l'internat et renferme une excellente étude de physiopsychologie comparée, empruntée à M. Henri Sainte-Claire Deville, de laquelle M. Guillemin conclut : 1° à la plus grande liberté possible des élèves; 2° à la réunion des deux Sexes dans certaines conditions déterminées. Quant à ce dernier point, il s'appuie, en outre, sur l'expérience des Etats-Unis, où les écoles mixtes donnent les meilleurs résultats.

En ce qui concerne la laïcité, M. Guillemin s'exprime de la manière suivante, pages 119 et 120: « L'instruction religieuse faite par un instituteur public, dans une école éta<< blie et entretenue par le budget de l'État, celui d'un département ou celui d'une commune, est nécessairement « donnée selon les croyances particulières d'une religion positive; c'est un enseignement catholique ou protestant, «ou israélite, et c'est l'un d'eux à l'exclusion des deux au« tres. Bien plus, c'est l'un de ces enseignements à l'exclu«sion de toute autre croyance n'ayant pas un culte public • reconnu par l'État, à l'exclusion des croyances philosophi« ques qui ont droit, comme toute religion positive, au res«pect et à la liberté. Or, un tel enseignement ne peut avoir « lieu dans une école publique, sans froisser, cela est de « toute évidence, la liberté de conscience dans la personne « des enfants qui ne professent point la religion enseignée << ainsi que dans la personne des parents des enfants.

« Si l'on répond que l'enfant peut être dispensé, à l'école, « de suivre les leçons religieuses opposées à ses croyances, « et qu'ainsi sa liberté est sauvegardée, je répondrai que, << dans cette hypothèse, c'est son temps qui est perdu, un temps précieux dont personne n'a le droit de disposer ainsi. N'est-il pas d'ailleurs étrange et contraire à toute justice, que les parents payent des leçons qui ont pour objet un service contraire à toutes leurs sympathies...?

«

«

«

«

Non, ce n'est pas dans les écoles publiques, c'est dans

les familles, c'est dans les églises ou les temples que l'in<< struction religieuse doit être donnée; là seulement, elle << peut l'être sans froisser les consciences. Les parents ⚫ peuvent déléguer ce soin aux ministres des diverses religions positives, aux professeurs des diverses écoles philosophiques, ou bien ils peuvent le partager avec eux, où << enfin, s'ils le préfèrent, se le réserver à eux-mêmes, en ins<truisant leurs enfants selon leurs propres croyances. Quoi << de plus naturel, quoi de plus conforme aux ¡principes de « la liberté de conscience? »

M. Guillemin dit encore, page 123 : « Si nous voulons res«ter fidèles au principe de la liberté de conscience, il est « évident que les leçons de morale donnés dans les écoles

publiques devront éviter d'une manière absolue TOUT ce « qui les rattacherait à une religion positive, reconnue ou ‹ non, à une école philosophique particulière. La morale « peut et doit être traitée ici comme une science, dégagée «par suite de tout esprit de secte.» Son enseignement doit être tel qu'il puisse ne rencontrer aucun contradicteur, qu'il ne puisse blesser aucune conscience.

Les défenseurs du privilége soutiennent que les consciences ne sont point violées, attendu qu'il y a des écoles pour toutes les religions et que chaque famille est libre d'envoyer ses enfants dans celle qui lui convient. Pour faire justice de cette affirmation, qui est en contradiction si flagrante avec la vérité, il suffit de remarquer l'impossibilité absolue d'avoir, dans une commune, autant d'écoles publiques qu'il peut y avoir de croyances.

Il faut en prendre son parti: la liberté dé conscience ne peut être sincèrement et complétement observée, dans l'école publique, qu'en établissant et maintenant toujours les programmes et la méthode dans le domaine infini des faits, c'est-à-dire de la science.

La question de l'enseignement laïque a trop souvent été mal posée et mal défendue.

Il est urgent d'insister sur la vérité de son principe simple, qui est exclusivement la liberté de conscience assurée également à tous, et non une pensée d'antagonisme contre une religion quelconque, ou contre les congrégations enseignantes. Il est même nécessaire d'ajouter que les écoles publiques appelées laïques, par opposition à celles dites congréganistes, sont soumises, comme celles-ci, aux mêmes pratiques et formules religieuses, à la même iniquité légale. Se borner à attaquer, dans l'instruction publique, les congrégations enseignantes, à propos de laïcité, au lieu de se renfermer exclusivement dans le principe de la liberté de conscience avec TOUTES ses conséquences, c'est dénaturer et rabaisser la question; c'est méconnaître le principe et tomber dans l'esprit de parti; c'est ne voir guère en cause, ici, que le costume de l'instituteur.

Reconnaissons-le, la conscience est violée, menacée, dans les écoles communales, par le fait de la loi. C'est donc la loi qu'il est nécessaire de réformer tout d'abord. Par cette réforme seulement, il sera possible de garantir la liberté de conscience, comme elle doit l'être, également à tous.

M. Guillemin a parfaitement compris la question. C'est pourquoi, au seul nom de la liberté de conscience, qui doit être une réalité et non une étiquette menteuse, il demande, avec des catholiques, des protestants, des israélites, avec les libéraux véritables de toutes croyances, avec plusieurs sociétés au nombre desquels il est juste de compter la Société pour l'instruction élémentaire, avec de nombreux corps constitués, conseils municipaux, conseils d'arrondissement et conseils généraux, il demande, dis-je, la suppression, dans les établissements publics, de TOUT ce qui peut blesser la conscience d'élèves ou de parents, ainsi que l'abrogation des dispositions légales et réglementaires qui placent les écoles publiques sous la surveillance, on peut dire sous la domination des divers clergés. Il est temps, en effet, d'abandonner cette tradition odieuse qui fait mettre

autrui hors la loi, à raison de sa croyance; qui porte à dénaturer et à calomnier, sans mesure, les opinions des minorités, pour aboutir aux plus cruelles persécutions, même légales. Cette tradition, qu'ont subie les premiers chrétiens, les premiers protestants, les premiers adeptes de toute croyance, cette tradition que méconnaissent tous les sectaires, quand de minorité ils sont devenus majorité, cette tradition ne sera jamais celle de la science vraie; car son principe ne fait qu'un avec son but, et il est l'inviolabilité, le respect, l'autonomie de la personne humaine.

Lorsque la violence et le mensonge seront proscrits de l'éducation, ils ne tarderont pas à disparaître des mœurs et des lois.

M. Guillemin se montre partisan de l'obligation. Cependant, tout en approuvant le principe au point de vue du droit de l'enfant, il sent très-bien qu'il est d'abord essentiel d'améliorer les programmes, les méthodes, les écoles et la position des instituteurs; car, dans cette question particulièrement, ce qui importe avant tout, par-dessus tout, c'est la qualité avant la quantité. Il dit, en effet, page 246 : « Je pré«< fère cent fois une œuvre excellente, qui peut servir de ⚫ modèle à cent écoles pareilles, que l'extension des écoles << existantes avec la nullité de leur enseignement et avec leur « vieille routine.» Plus il y aura d'écoles dans les conditions vicieuses où elles sont généralement aujourd'hui, sous tous les rapports, plus la réforme radicale qu'elles exigent sera difficile.

La laïcité, c'est-à-dire la liberté de conscience avec toutes ses conséquences de réforme des programmes et de la méthode, voilà, en réalité, « le remède qui se présente le plus immédiatement à l'esprit. »

«Voilà le Carthago delenda est de quiconque veut la réforme vraie de l'instruction publique en France. » (Page 188.) La place me manque pour les observations critiques que j'aurais à faire. Aussi je me borne à dire que M. Guille

« PreviousContinue »