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bien, si elles ne peuvent être ainsi ajustées, elle les sépare entièrement de ces autres et en fait un corps différent du leur. Ainsi il y a plusieurs impuretés dans le vin nouveau, qui en sont séparées par cette action de la matière subtile: car elles ne vont pas seulement au-dessus ou au-dessous du vin, ce que l'on pourroit attribuer à leur légèreté ou pesanteur, mais il y en a aussi qui s'attachent aux côtés du tonneau; et, bien que ce vin demeure encore composé de plusieurs parties de diverses grosseurs et figures, elles y sont tellement agencées après qu'il est clarifié par l'action de cette matière subtile, que celui qui est au haut du tonneau n'est pas différent de celui qui est au milieu ou vers le bas au-dessus de la lie et on voit arriver le semblable en quantité d'autres liqueurs.

19.

Le troisième

d'arrondir les gouttes de ces

liqueurs.

Le troisième effet de cette matière céleste est qu'elle fait devenir rondes les gouttes de toutes les effet, qui est liqueurs, lorsqu'elles sont entièrement environnées d'air ou d'une autre liqueur dont la nature est si différente de la leur qu'elles ne se mêlent point avec elle, ainsi que j'ai déjà expliqué dans les Météores. Car, d'autant que cette matière subtile trouve des pores autrement disposés en une goutte d'eau, par exemple, que dans l'air qui l'environne, et qu'elle tend toujours à se mouvoir suivant des lignes droites, ou le moins différentes

de la droite qu'il est possible, il est évident que la superficie de cette goutte d'eau empêche moins non seulement les parties de la matière subtile qui est en ses pores, mais aussi les parties de celle qui est en l'air qui l'environne, de continuer ainsi leur mouvement suivant des lignes les plus droites qu'elles peuvent être sans passer d'un corps en l'autre, lorsque cette superficie est toute ronde, que si elle avoit quelque autre figure; et que lorsqu'elle ne l'est pas, les mouvements de la matière subtile qui est en l'air d'alentour sont plus détournés par les parties de sa superficie qui sont les plus éloignées du centre que par les autres, ce qui est cause qu'elle les pousse davantage vers ce centre; et, au contraire, les mouvements de celle qui est dans la goutte d'eau sont plus détournés par les parties de sa superficie qui sont les plus proches du centre, ce qui est cause qu'elle fait effort pour les en éloigner. Et ainsi la matière subtile qui est au dedans de cette goutte, aussi bien que celle qui est au dehors, contribue à faire que toutes les parties de sa superficie soient également distantes de son centre, c'est-à-dire à la rendre ronde ou sphérique. Pour mieux entendre ceci, on doit remarquer que l'angle que fait une ligne droite avec une courbe qu'elle touche est plus petit qu'aucun angle qui puisse être fait par deux lignes droites, et que de toutes les lignes

courbes il n'y a que la circulaire en toutes les parties de laquelle cet angle d'attouchement soit égal; d'où il suit que les mouvements qui sont empêchés d'être droits par quelque cause qui les détourne également en toutes leurs parties doivent être circulaires lorsqu'ils se font en une seule ligne, et sphériques lorsqu'ils se font vers tous. les côtés de quelque superficie.

20.

L'explication

action, en la

quelle consiste la pesan

teur.

La seconde action dont j'ai entrepris ici de parler est celle qui rend les corps pesants, laquelle de la seconde a beaucoup de rapport avec celle qui fait que les gouttes d'eau deviennent rondes; car c'est la même matière subtile qui, par cela seul qu'elle se meut indifféremment de tous côtés autour d'une goutte d'eau, pousse également toutes les parties de sa superficie vers son centre, et qui, par cela seul qu'elle se meut autour de la terre, pousse aussi vers elle tous les corps qu'on nomme pesants, lesquels en sont les parties.

21.

Que chaque

partie de la terre, étant

considérée toute seule, est plutôt lé

Mais, afin d'entendre plus parfaitement en quoi consiste la nature de cette pesanteur, il faut remarquer que si tout l'espace qui est autour de la terre, et qui n'est rempli par aucune de ses parties, étoit vide, c'est-à-dire s'il n'étoit rempli que gère que ped'un corps qui ne pût aider ni empêcher les mouvements des autres corps (car c'est ce qu'on doit proprement entendre par le nom de vide), et que cependant elle ne laissât pas de tourner en vingt

sante.

22.

En quoi con

reté de la ma

quatre heures sur son essieu, ainsi qu'elle fait à présent, toutes celles de ses parties qui ne seroient point fort étroitement jointes à elle, s'en sépareroient, et s'écarteroient de tous côtés vers le ciel, en même façon que la poussière qu'on jette sur une pirouette pendant qu'elle tourne n'y peut demeurer, mais est rejetée par elle vers l'air de tous côtés ; et, si cela étoit, tous les corps terrestres pourroient être appelés légers plutôt que pesants.

Mais à cause qu'il n'y a point de vide autour siste la légè- de la terre, et qu'elle n'a pas de soi-même la force tière du ciel. qui fait qu'elle tourne en vingt-quatre heures sur son essieu, mais qu'elle est emportée par le cours de la matière du ciel qui l'environne, et qui pénètre partout en ses pores, on la doit considérer comme un corps qui n'a aucun mouvement, et penser aussi que la matière du ciel ne seroit ni légère ni pesante à son regard, si elle n'avoit point d'autre agitation que celle qui la fait tourner en vingt-quatre heures avec la terre; mais que, d'autant qu'elle en a beaucoup plus qu'il ne lui en faut pour cet effet, elle emploie ce qu'elle a de plus, tant à tourner plus vite que la terre en même sens, qu'à faire divers autres mouvements de tous côtés, lesquels ne pouvant être continués en lignes si droites qu'ils seroient si la terre ne se rencontroit point en leur chemin, non seulement ils font

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effort pour la rendre ronde ou sphérique, ainsi qu'il a été dit des gouttes d'eau, mais aussi cette matière du ciel a plus de force à s'éloigner du centre autour duquel elle tourne que n'ont aucunes des parties de la terre, ce qui fait qu'elle est légère à leur égard.

23.

cette matière du ciel qui

terrestres pe

sants.

Et il faut remarquer que la force dont la maQue c'est la tière du ciel tend à s'éloigner du centre de la terre, légèreté de ne peut avoir son effet, si ce n'est que celles de ses parties qui s'en éloignent montent en la place rend les corps de quelques parties terrestres qui descendent au même temps en la leur : car, d'autant qu'il n'y a aucun espace autour de la terre qui ne soit rempli de sa matière, ou bien de celle du ciel, et que toutes les parties du second élément qui composent celles du ciel ont pareille force, elles ne se chassent point l'une l'autre hors de leurs places; mais, parceque la même force n'est pas en la terre, lorsqu'il se trouve quelqu'une de ses parties plus éloignée de son centre que ne sont des parties du ciel qui peuvent monter en sa place, il est certain qu'elles y doivent monter, et par conséquent la faire descendre en la leur. Ainsi chacun des corps qu'on nomme pesants n'est pas poussé vers le centre de la terre par toute la matière du ciel qui l'environne, mais seulement par les parties de cette matière qui montent en sa place lorsqu'il descend, et qui par conséquent sont toutes en

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