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14.

Qu'on peut démontrer qu'il y a un

Dien de cela

seul que la

de leur vérité: mais, comme elle ne sauroit y penser toujours avec tant d'attention, lorsqu'il arrive qu'elle se souvient de quelque conclusion sans prendre garde à l'ordre dont elle peut être démontrée, et que cependant elle pense que l'auteur de son être auroit pu la créer de telle nature qu'elle se méprît en tout ce qui lui semble très évident, elle voit bien qu'elle a un juste sujet de se défier de la vérité de tout ce qu'elle n'aperçoit pas distinctement, et qu'elle ne sauroit avoir aucune science certaine jusques à ce qu'elle ait connu celui qui l'a

créée.

Lorsque par aprés elle fait une revue sur les diverses idées ou notions qui sont en soi, et qu'elle y trouve celle d'un être tout-connoissant, tout-puissant, et extrêmement parfait, elle juge tre ou d'exis- facilement, parcequ'elle aperçoit en cette idée prise en la no- que Dieu, qui est cet être tout parfait, est ou avons de lui. existe : car encore qu'elle ait des idées distinctes

nécessité d'ê

ter est com

tion que nous

de plusieurs autres choses, elle n'y remarque rien qui l'assure de l'existence de leur objet; au lieu qu'elle aperçoit en celle-ci, non pas seulement une existence possible, comme dans les autres, mais une existence absolument nécessaire et éternelle. Et comme de ce qu'elle voit qu'il est nécessairement compris dans l'idée qu'elle a du triangle que ses trois angles soient égaux à deux droits, elle se persuade absolument que le triangle a les trois angles

égaux à deux droits; de même, de cela seul qu'elle
aperçoit que l'existence nécessaire et éternelle est
comprise dans l'idée qu'elle a d'un être tout parfait,
elle doit conclure que cet être tout parfait est ou
existe.
Elle
s'assurer encore mieux de la vérité
pourra
de cette conclusion, si elle prend garde qu'elle n'a
point en soi l'idée ou la notion d'aucune autre
chose où elle puisse reconnoître une existence qui
soit ainsi absolument nécessaire; car de cela seul
elle saura que l'idée d'un être tout parfait n'est point
en elle par une fiction, comme celle qui représente
une chimère, mais qu'au contraire elle y est em-
preinte par une nature immuable et vraie, et qui
doit nécessairement exister, parcequ'elle ne peut
être conçue qu'avec une existence nécessaire.

de

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16. Que les pré

jugés empêchent que plusieurs ne con

rement cette

tre qui est en

Dieu.

Notre âme ou notre pensée n'auroit pas peine à se persuader cette vérité si elle étoit libre de ses préjugés: mais, d'autant que nous sommes accoutumés à distinguer en toutes les autres cho- noissent claises l'essence de l'existence, et que nous pouvons nécessité d'èfeindre à plaisir plusieurs idées de choses qui peut-être n'ont jamais été et qui ne seront peutêtre jamais, lorsque nous n'élevons pas comme il faut notre esprit à la contemplation de cet être tout parfait, il se peut faire que nous doutions si l'idée que nous avons de lui n'est pas l'une de celles que nous feignons quand bon nous semble,

17.

Que d'autant

ou qui sont possibles encore que l'existence ne soit pas nécessairement comprise en leur nature.

De plus, lorsque nous faisons réflexion sur les diverses idées qui sont en nous, il est aisé d'apercevons plus cevoir qu'il n'y a pas beaucoup de différence en

que nous con

de perfection

d'autant de

vons-nous

en une chose, tre elles, en tant que nous les considérons simplement comme les dépendances de notre âme ou croire que sa de notre pensée, mais qu'il y en a beaucoup en tant aussi être plus que l'une représente une chose, et l'autre une

cause doit

parfaite.

18.

autre ; et même que leur cause doit être d'autant plus parfaite que ce qu'elles représentent de leur objet a plus de perfection. Car tout ainsi que, lorsqu'on nous dit que quelqu'un a l'idée d'une machine où il y a beaucoup d'artifice, nous avons raison de nous enquérir comment il a pu avoir cette idée, à savoir s'il a vu quelque part une telle machine faite par un autre, ou s'il a appris la science des mécaniques, ou s'il est avantagé d'une telle vivacité d'esprit que de lui-même il ait pu l'inventer sans avoir rien vu de semblable ailleurs, cause que tout l'artifice qui est représenté dans l'idée qu'a cet homme, ainsi que dans un tableau, doit être en sa première et principale cause, non pas seulement par imitation, mais en effet de la même sorte ou d'une façon encore plus éminente qu'il n'est représenté.

De même, parceque nous trouvons en nous l'iderechef dé- dée d'un Dieu, ou d'un être tout parfait, nous

Qu'on peut

cela qu'il y a

un Dieu.

pouvons rechercher la cause qui fait que cette idée montrer par est en nous; mais, après avoir considéré avec attention combien sont immenses les perfections qu'elle nous représente, nous sommes contraints d'avouer que nous ne saurions la tenir que d'un être très parfait, c'est-à-dire d'un Dieu, qui est véritablement ou qui existe, parcequ'il est non seulement manifeste par la lumière naturelle que le néant ne peut être auteur de quoi que ce soit, et que le plus parfait ne sauroit être une suite et une dépendance du moins parfait, mais aussi parceque nous voyons, par le moyen de cette même lumière, qu'il est impossible que nous ayons l'idée ou l'image de quoi que ce soit, s'il n'y a en nous ou ailleurs un original qui comprenne en effet toutes les perfections qui nous sont ainsi représentées: mais comme nous savons que nous sommes sujets à beaucoup de défauts; et que nous ne possédons pas ces extrêmes perfections dont nous avons l'idée, nous devons conclure qu'elles sont en quelque nature qui est différente de la nôtre, et en effet très parfaite, c'est-à-dire qui est Dieu, ou du moins qu'elles ont été autrefois en cette chose, et il suit de ce qu'elles étoient infinies qu'elles y sont encore.

pour ceux

Je ne vois point en cela de difficulté qui ont accoutumé leur esprit à la contemplation de la Divinité, et qui ont pris garde à ses perfections

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qui est en

Dieu, il n'y a

que nous con

infinies: car encore que nous ne les comprenions rien toutefois pas, parceque la nature de l'infini est telle que des pensées finies ne le sauroient comprendre, clairement nous les concevons néanmoins plus clairement et perfections. plus distinctement que les choses matérielles, à

noissions si

comme ses

20.

Que nous ne

cause de nousmême, mais que c'est

Dieu, et que par conséquent il y a un Dieu.

cause qu'étant plus simples et n'étant point limitées, ce que nous en concevons est beaucoup moins confus. Aussi il n'y a point de spéculation, qui puisse plus aider à perfectionner notre entendement, et qui soit plus importante que celle-ci, d'autant que la considération d'un objet qui n'a point de bornes en ses perfections, nous comble de satisfaction et d'assurance.

Mais tout le monde n'y prend pas garde comme sommes pas la il faut; et parceque nous savons assez, lorsque nous avons une idée de quelque machine où il y a beaucoup d'artifice, la façon dont nous l'avons eue, et que nous ne saurions nous souvenir de même quand l'idée d'un Dieu nous nous avons que a été communiquée de Dieu, à cause qu'elle a toujours été en nous, il faut que nous fassions encore cette revue, et que nous recherchions quel est donc l'auteur de notre âme ou de notre pen-sée, qui a en soi l'idée des perfections infinies qui sont en Dieu, parcequ'il est évident que ce qui connoît quelque chose de plus parfait que soi ne s'est point donné l'être, à cause que par même moyen il se seroit donné toutes les perfections

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