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ne devons point en supposer d'autres en ses ouvrages, de peur de lui attribuer de l'inconstance; d'où il suit que, puisqu'il a mû en plusieurs façons différentes les parties de la matière lorsqu'il les a créées, et qu'il les maintient toutes en la même façon et avec les mêmes lois qu'il leur a fait observer en leur création, il conserve incessamment en cette matière une égale quantité de mouvement. De cela aussi que Dieu n'est point, sujet à chanloi de la na- ger et qu'il agit toujours de même sorte, nous pouture, que cha-vons parvenir à la connoissance de certaines règles, meure en l'é- que je nomme les lois de la nature, et qui sont les pendant que causes secondes des divers mouvements que nous

37.

La première

que chose de

tat qu'elle est

rien ne le

change.

remarquons en tous les corps, ce qui les rend ici
fort considérables. La première est que chaque
chose en particulier continue d'être en même état
autant qu'il se peut, et que jamais elle ne le change
que par la rencontre des autres. Ainsi nous voyons
tous les jours que lorsque quelque partie de cette
matière est carrée, elle demeure toujours carrée,
s'il n'arrive rien d'ailleurs qui change sa figure; et
que,
si elle est en repos, elle ne commence point à
se mouvoir de soi-même : mais, lorsqu'elle a com→
mencé une fois de se mouvoir, nous n'avons aussi
aucune raison de penser qu'elle doive jamais cesser
de se mouvoir de même force pendant qu'elle ne
rencontre rien qui retarde ou qui arrête son mou-
vement; de façon que si un corps a commencé

une fois de se mouvoir, nous devons conclure qu'il continue par après de se mouvoir, et que jamais il ne s'arrête de soi-même. Mais, parceque nous habitons une terre dont la constitution est telle que tous les mouvements qui se font auprès de nous cessent en peu de temps, et souvent par des raisons qui sont cachées à nos sens, nous avons jugé, dès le commencement de notre vie, , que les mouvements qui cessent ainsi par des raisons qui nous sont inconnues s'arrêtent d'eux-mêmes, et nous avons encore à présent beaucoup d'inclination à croire le semblable de tous les autres qui sont au monde, à savoir que naturellement ils cessent d'euxmêmes et qu'ils tendent au repos, parcequ'il nous semble que nous en avons fait l'expérience en plusieurs rencontres. Et toutefois ce n'est qu'un faux préjugé, qui répugne manifestement aux lois de la nature; car le repos est contraire au mouvement, et rien ne se porte par l'instinct de sa nature à son contraire ou à la destruction de soi-même.

38.

Pourquoi les corps poussés continuent de

de la main

se mouvoir après qu'elle

Nous voyons tous les jours la preuve de cette première règle dans les choses qu'on a poussées au loin: car il n'y a point d'autre raison pourquoi elles continuent de se mouvoir lorsqu'elles sont hors de la main de celui qui les a poussées, sinon les a quittés. que, suivant les lois de la nature, tous les corps qui se meuvent continuent de se mouvoir jusqu'à ce que leur mouvement soit arrêté par quelques au

ne devons point en supposer d'autres en ses ouvrages, de peur de lui attribuer de l'inconstance; d'où il suit que, puisqu'il a mû en plusieurs façons différentes les parties de la matière lorsqu'il les a créées, et qu'il les maintient toutes en la même façon et avec les mêmes lois qu'il leur a fait observer en leur création, il conserve incessamment en cette matière une égale quantité de mouvement. 37. De cela aussi que Dieu n'est point sujet à chanLa première loi de la na- ger et qu'il agit toujours de même sorte, nous pouture, que cha-vons parvenir à la connoissance de certaines règles, meure en l'é- que je nomme les lois de la nature, et qui sont les pendant que causes secondes des divers mouvements que nous

que chose de

tat qu'elle est

rien ne le

change.

que par

remarquons en tous les corps, ce qui les rend ici fort considérables. La première est que chaque chose en particulier continue d'être en même état autant qu'il se peut, et que jamais elle ne le change la rencontre des autres. Ainsi nous voyons tous les jours que lorsque quelque partie de cette matière est carrée, elle demeure toujours carrée, s'il n'arrive rien d'ailleurs qui change sa figure; et que, si elle est en repos, elle ne commence point à se mouvoir de soi-même : mais, lorsqu'elle a com→ mencé une fois de se mouvoir, nous n'avons aussi aucune raison de penser qu'elle doive jamais cesser de se mouvoir de même force pendant qu'elle ne rencontre rien qui retarde ou qui arrête son mouvement; de façon que si un corps a commencé

une fois de se mouvoir, nous devons conclure qu'il
continue par après de se mouvoir, et que jamais il
ne s'arrête de soi-même. Mais, parceque nous habi-
tons une terre dont la constitution est telle que
tous les mouvements qui se font auprès de nous
cessent en peu de temps, et souvent par des rai-
sons qui sont cachées à nos sens, nous avons jugé,
dès le commencement de notre vie, que
les mou-
vements qui cessent ainsi par des raisons qui nous
sont inconnues s'arrêtent d'eux-mêmes, et nous
avons encore à présent beaucoup d'inclination à
croire le semblable de tous les autres qui sont au
monde, à savoir que naturellement ils cessent d'eux-
mêmes et qu'ils tendent au repos, parcequ'il nous
semble que nous en avons fait l'expérience en plu-
sieurs rencontres. Et toutefois ce n'est qu'un faux
préjugé, qui répugne manifestement aux lois de la
nature; car le repos est contraire au mouvement,
et rien ne se porte par l'instinct de sa nature à son
contraire ou à la destruction de soi-même.

38.

Pourquoi les corps poussés

de la main

continuent de

se mouvoir après qu'elle

Nous voyons tous les jours la preuve de cette première règle dans les choses qu'on a poussées au loin: car il n'y a point d'autre raison pourquoi elles continuent de se mouvoir lorsqu'elles sont hors de la main de celui qui les a poussées, sinon les a quittés. que, suivant les lois de la nature, tous les corps qui se meuvent continuent de se mouvoir jusqu'à ce que leur mouvement soit arrêté par quelques au

39. La seconde

loi de la na

ture, que tout

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tres corps; et il est évident que l'air et les autres corps liquides entre lesquels nous voyons ces choses se mouvoir diminuent peu à peu la vitesse de leur mouvement: car nous pouvons même sentir de la main la résistance de l'air, si nous secouons assez vite un éventail qui soit étendu; et il n'y a point de corps fluide sur la terre qui ne résiste encore plus manifestement que l'air aux mouvements des autres corps.

La seconde loi que je remarque en la nature est que chaque partie de la matière en son particulier corps qui se ne tend jamais à continuer de se mouvoir suivant meut tend à des lignes courbes, mais suivant des lignes droites, mouvement bien que plusieurs de ces parties soient souvent

continuer son

en ligne droite.

contraintes de se détourner parcequ'elles en rencontrent d'autres en leur chemin, et que, lorsqu'un corps se meut, il se fait toujours un cercle ou anneau de toute la matière qui est mue ensemble. Cette règle, comme la précédente, dépend de ce que Dieu est immuable et qu'il conserve le mouvement en la matière par une opération très simple; car il ne le conserve pas comme il a pu être quelque temps auparavant, mais comme il est précisément au même instant qu'il le conserve. Et, bien qu'il soit vrai que le mouvement ne se fait pas en un instant, néanmoins il est évident que tout corps qui se meut est déterminé à se mouvoir suivant une ligne droite, et non pas suivant une circulaire:

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