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grandes peines sur peine de la vie (Boss., | BUFF. Les enfants retombent fréquemment dans

PASC., SEV., MOL., VOLT.). « Est-ce un article de foi qu'il faille croire sur peine de damnation?

PASC.

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SOUVENT, FRÉQUEMMENT. Bien des fois. Souvent, sans terminaison significative, est absolu et objectif. Fréquemment, d'une manière fréquente, avec la terminaison ordinaire des adverbes, laquelle est phénoménale et subjective, est relatif, a rapport à un sujet et lui attribue une habitude. Ce qui arrive souvent n'est pas rare, se voit de fois à autre il arrive souvent qu'on se repent d'avoir trop parlé. Ce qui arrive fréquemment constitue une loi, un usage, une série d'actions auxquelles un sujet est accoutumé il arrive fréquemment aux gens légers de trop parler. Vous voyez souvent une personne que ie hasard offre à vos yeux dans la rue ou ailleurs; vous voyez fréquemment une personne auprès de laquelle vous êtes assidu, à laquelle vous avez coutume de rendre visite. Vous avez souvent occasion de rencontrer telle personne dans telle maison où vous allez fréquemment.

Par un prompt désespoir souvent on se marie, Qu'on s'en repen! après tout le temps de sa vie. MOL.

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Comme les Romains ne connaissaient pas l'usage du linge, ils étaient dans la nécessité de se baigner fréquemment. » COND.

Un homme parle plus ou moins souvent dans une certaine espèce d'assemblée, c'est là l'expression d'un fait, et non d'un acte habituel, revenant à certains intervalles réguliers; mais cette assemblée se tient plus ou moins fréquemment. « L'affaire du bonnet ne se suivait pas avec moins de chaleur. Les ducs s'assemblaient fréquemment, députaient au régent; et j'étais celui qui d'ailleurs lui parlait le plus souvent et avec le plus de force. » S. S. « Depuis le retour de mon mari, nous reprenons fréquemment ces entretiens en sa présence...; il nous donne souvent de bons conseils sur la manière dont nous devons raisonner avec lui. » J. J.

« Le cri du cravant est un son sourd et creux, que nous avons souvent entendu; c'est une sorte d'aboiement rauque que cet oiseau fait entendre fréquemment. BUFF. Comme ce canard siffle en volant et très-fréquemment, il se fait entendre souvent et reconnaître de loin. » ID. Ce n'est pas que je croie que les régents doivent parler des mœurs et de la religion ni longuement ni fréquemment.... Ce n'est quelquefois qu'un mot, dit, ce semble, au hasard; mais ce mot a souvent de grande suites. » ROLL.

les fautes de légèreté (ROLL.). — « Quelle ¿Eculté n'imaginerait-on pas d'assembler frequen ment le peuple immense de cette capitale (Kine, et de ses environs! Cependant il se passait pes de semaines que le peuple romain ne fût assezblé, et même plusieurs fois.... Tout ce peurk était sur la place publique presque aussi souten magistrat que citoyen.» J. J.

Par cela seul, enfin, que souvent est absolu. il dit davantage, et se mettra plus veloctien après qu'avant son synonyme. « L'eucharistia est une nourriture dont nous devons user. non point rarement ni extraordinairement, comme l'on use des remèdes, mais fréquemment et souvent, comme nous prenons tous les jours les aliments qui nous entretiennent. Borap. STATURE, TAILLE. Grandeur du corps d'un homme.

L'Académie définit stature, hauteur de la taille d'une personne; ce qui s'entend bien et parafi assez plausible. Mais elle définit ensuite taille,li stature du corps, comme si le mot stature se disait d'autre chose que du corps, et comme si la taille ne comprenait rien que la stature.

Stature, latin statura, de stare, se tenir debout, désigne la grandeur du corps en pied seulement. 1aille, de tailler, couper, donner une forme, comme le fait le sculpteur en taillant le marbre, a rapport à toutes les dimensions, à l'épaisseur comme à la hauteur. Taille, et Lon pas stature, épaisse (ACAD., BUFF.), grosse (BUFF.), ronde (ID.), carrée (ID.), ramassée (1v.) « On dit que Commode, ayant vu passer un homme extrêmement gros, se donna le plaisir de lui ouvrir le ventre pour lui rendre la taille pla, légère. » VOLT.— A la rigueur, on devrait dire, une grande taille et une haute stature.

D'ailleurs, le mot taille n'est pas seulement relatif à la grandeur, comme stature, dont il diffère déjà sous ce rapport même: il l'est aussi à la forme, à la coupe, à la manière dont on est taillé en quelque sorte. Une taille, et non pas une stature, aisée et bien prise (S. S.), bien prise et tout à fait régulière (LES.), bien formée (VOLT.), dégagée (ACAD., BUFF.); une jolie taule (BUFF.); d'une bonne taille et d'une jolie tournure (ID.); bien proportionné dans sa taille (lb.): la richesse, l'irrégularité de sa taille (VoLT). Or, comme c'est surtout depuis la ceinture jusqu'aux épaules que se montre la beauté ou la difformité du corps, le mot taille ne désigne quelquefois que cette partie : Taille fine, courte, svelte ou lourde.

du mot commun taille, et non pas, comme on le devrait, du terme spécial de stature : taille de cinq pieds quatre pouces. « La taille de ces deux Lapons était de trois pieds et demi. » VOLT.

D'autre part, souvent étant absolu et objectif Toutefois, lors même qu'il s'agit d'indiquer la peut à cause de cela marquer le passif et indi-hauteur seule du corps, on se sert ordinairement quer un état; fréquemment, au contraire et par la raison contraire, ne s'emploie qu'en parlant d'action, de ce qui se fait. Une personne est sourent malade, et prend fréquemment des remèdes. Il y a souvent du monde dans cette maison; parmi les personnes qui y viennent fréquemment on cite tels ou tels. On est souvent incommodé quand on ne se livre pas fréquemment à certains exercices. - « La calamine est souvent parsemée de petites veines ou filets de mine de plomb.

Mais au moins stature, venant du latin, parall généralement d'une nécessité indispensable, quand on veut exprimer une taille extraordinaire : stature colossale (Acad.); Goliath, ce Philistin d'une énorme stature (BOURD.). Ces os rassemblés et arrangés représentaient un homme

d'une stature prodigieuse ou plutôt monstrueuse.» dit bien une année stérile, une saison stérile en BUFF. Le roi Grandonio avait une stature gi- nouvelles, mais on ne dirait point en pareil cas gantesque, avec un air à inspirer l'effroi.» LES. infertile ou inféconde, apparemment parce que << Si les dieux, dirent les Scythes à Alexandre, les idées sensibles de fertilité et de fécondité avaient proportionné ta stature à ton ambition, sont peu compatibles avec l'idée abstraite de le monde ne te contiendrait pas. » LAH. « Ulysse, temps: on ne se représente guère le temps qui provoqué par Irus, dépouille la stature imposante enfante, qui met hors de soi ou au jour, qui donne l'être par voie de génération.

Infertile et infécond diffèrent comme fertile et fécond (voy. p. 607 et 608).

et les membres nerveux d'un héros. » MARM. On dira plutôt une petite taille. « Il y en avait — qui se moquaient de Pepin et de sa petite taille. » Boss. « Physcon était de petite taille. » ROLL. L'infertilité est en fait, l'infécondité en pufs« Agésilas était d'une taille si petite, qu'à sa pre-sance. L'infertilité des terres amène la disette; mière vue les Egyptiens ne purent s'empêcher de leur infécondité les rend de leur nature improrire. »JD. « Il reconnut Paul à sa taille courte. »ductives. Infertile est une qualification ordinaire: VOLT. Ces histoires de géants vaincus par des hommes d'une taille médiocre sont très-communes dans l'antiquité. » ID. « M. le duc d'Orléans était de taille médiocre au plus. S. S. Harris dit que la tête d'un homme de taille moyenne de l'équipage de Magellan n'atteignait qu'à la ceinture d'un Patagon; que Magellan les nomma Patagons, parce que leur stature était de cinq coudées ou sept pieds six pouces. BUFF. « Il est dit dans une relation que sur la côte de la Terre de feu on vit un homme d'une stature gigantesque; mais que, quand on fut sur le rivage, on vit seulement des tombeaux contenant des cadavres de taille ordinaire. ID. >

--

Enfin stature ne s'emploie qu'en parlant de l'homme, le seul des animaux auquel convient l'attitude droite. Taille, au contraire, se dit par rapport à tous les animaux pour signifier leur grandeur en tous sens, et leur configuration. « La taille du lion n'est point excessive, comme celle de l'éléphant ou du rhinocéros; elle n'est ni lourde, comme celle de l'hippopotame ou du bœuf, ni trop ramassée, comme celle de l'hyène ou de l'ours, ni trop allongée, ni déformée par des inégalités, comme celle du chameau. » BUFF. Ailleurs Buffon donne une taille au cheval, au castor, au chien, au lynx, et à tous les quadrupèdes en général, même à la chauve-souris.

STÉRILE, INFERTILE, INFÉCOND, (INFRUCTUEUX, INGRAT). Une terre ou autre chose semblable, qui a le défaut de ne pas produire ou de ne pas rapporter, est dite stérile, infertile ou inféconde.

Stérile se distingue d'infertile et d'infécond par deux caractères particuliers. D'abord il ex prime un défaut absolu : ce qui est stérile ne produit ou ne rapporte rien, au lieu que ce qui est infertile ou infécond produit ou rapporte peu. Ce mot vient du grec otepɛós, solide, ferme, dur: la chose stérile est comme un rocher, elle n'ouvre pas son sein pour en laisser ou pour en faire sortir des productions. Une femme stérile ne fait point d'enfant; un arbre stérile, comme un peuplier ou un saule (FÉN.), ne donne jamais de fruit; un désert est stérile (Mass.), il n'y vient rien du tout. De même, au figuré, un esprit ou une matière stérile manque totalement de la qualité dont l'esprit ou la matière infertile possède une quantité insuffisante seulement. suite stérile est, au figuré, d'un usage beaucoup plus étendu que les deux autres mots, il se detache plus aisément du sens propre. Aiusi, on

En

un champ infertile ne se couvre pas de moissons
et de fruits. Infecond est plutôt une qualification
donnée par un chimiste ou un naturaliste, par
un homme qui considère dans les choses leurs
principes, leurs facultés, ce qui en peut sortir.
Infécond, quoi qu'en dise l'Académie (1835), n'est
pas, il s'en faut bien un terme poétique, en
parlant des animaux, et, quand cela serait,
l'exemple qu'elle cite n'en serait pas moins
étrange: vache inféconde. Le mot vache poẻ-
tique! On appelle pays infertile (ACAD.) celui où
on fait de maigres récoltes; œufs (BUFF.) ou
germes (ACAD.), inféconds, ceux qui sont privés
de la vertu productive. Un esprit infertile ne
brille pas par l'abondance de ses œuvres ; un
esprit infécond a peu de capacité ou de génie '.
1. STUPIDE (HÉBÉTÉ), IMBÉCILE, IDIOT,
INEPTE. II. SOT, INSENSÉ, FOU, DÉRAISON-
NABLE, EXTRAVAGANT, ABSURDE.-
III. NIAIS,
NIGAUD, BENÈT, BADAUD, DADAIS, DANDIN.-
IV. BÊȚE (ABRUTI), ÂNE (IGNORANT), BUSE,
BUTOR (BALOURD, LOURDAUD), CRUCHE,
MA-
CHOIRE, GANACHE.

Tous ces mots qualifient en mal sous le rapport de l'esprit : ils signifient que le sujet auquel on les applique manque plus ou moins de quelqu'une des qualités mentales ou relatives à la pensée, dont les hommes sont doués à un plus haut degré que les autres animaux, ou même à l'exclusion des autres animaux.

Mais les qualités dont ces termes marquent le défaut ou la privation ne sont pas les mêmes. Les unes sont l'entendement, l'intelligence, la conception ou l'imagination; elles font l'esprit brillant, vif pénétrant, habile : les autres sont le

1. La définition de stérile, d'infertile et d'infécond s'applique également à infructueux et à ingrat: terre infructueuse, terre ingrate. Mais infructueux marque proprement l'effet de la stérilité, de l'infertilité et de l'infecondité: aussi dit-on souvent sterile et infructueux (PASc., P. R., MAL.). Quand une femme est stérile, son union avec un homme est infruc tueuse: si une terre est sterile, infertile ou infeconde, elle est par cela même infructueuse, inutile; on n'en tire rien. De son côté, ingrat, qui n'est pas reconnaissant, qui ne sait pas gré de ce qu'on a fait pour lui, a une nuance bien caractéristique, il implique l'idée des soins de la culture et de leur inefficacité : une terre ingrate ne récompense pas le laboureur de ses peines. La terre n'est jamais ingrate, elle nourrit toujours de ses fruits ceux qui la cultivent soigneusement; elle ne refuse ses biens qu'à ceux qui craignent de lui donner leurs peines. » Fźx.

a

jugement, le sens, la raison et le bon sens; elles font l'esprit juste, réglé, droit, sage (voy. Entendement, p. 568). Autre chose est trouver en soi-même des ressources et de la facilité, soit pour comprendre ou saisir, soit pour inventer, pour composer, pour se signaler dans les arts, dans la conversation, ou par ses écrits; autre chose est savoir discerner les meilleurs partis à prendre, ce qui convient ou ne convient pas, ce qui est conforme ou contraire à des règles. Aussi n'est-il pas rare de voir ces qualités séparées: avec des moyens très-ordinaires, très-médiocres pour apprendre et pour produire, on a quelquefois une grande justesse, une grande rectitude d'esprit. Telle était la femme de J. J. Rousseau, suivant ce qu'il rapporte d'elle. « Bornée, et, si l'on veut, stupide, elle était d'un conseil excellent dans les occasions difficiles. » Au contraire, de brillantes facultés intellectuelles, une mémoire et une imagination peu communes, ne sont pas toujours jointes, il s'en faut bien, à un grand sens et à une raison solide. « Les Grecs, dit Voltaire, ont eu de l'esprit jusqu'à la folie. >> De là une première division entre les synonymes de cette famille. Les uns, savoir: stupide (hé- ¦ bété), imbécile, idiot et inepte, expriment principalement, sinon uniquement, le manque d'intelligence ou de conception. Ils peuvent former une première classe. Dans une seconde entrent naturellement les mots sot, insensé, fou, déraisonnable, extravagant et absurde, qui servent plutôt à attribuer un défaut de jugement, de raison ou de bon sens.

D

I. Stupide (hébéte), imbécile, idiot, inepte. Dépourvu des qualités d'esprit qui font apprendre ou comprendre, concevoir ou imaginer facilement.

Stupide, latin stupidus, de stupere, rester fixe, immobile, engourdi, exprime la pesanteur et comme la torpeur de l'esprit. Le stupide ne s'émeut ni ne se meut: il est impassible, insensible aux impressions, rien ne peut le tirer de son assoupissement, il est comme paralysé. « La stupidité est en nous une pesanteur d'esprit qui accompagne nos discours et nos actions. » LABR. « L'on voit peu d'esprits entièrement lourds et stupides. » ID. & Supposons dans l'esprit du sauvage autant d'intelligence et de lumières qu'on lui trouve en effet de pesanteur et de stupidité.» J. J. « Il faut croire avoir affaire à un stupide incapable d'aucune sorte de sentiment pour ima giner de lui faire oublier cette perfidie. » S. S. « Ce mortel assoupissement et cette stupide insensibilité où nous vivons à l'égard du salut. »> BOURD. Le plus souvent Charles VI était dans une stupidité et une insensibilité prodigieuse. Boss. « Les douleurs muettes et stupides.» LABR. « Phédon est abstrait, rêveur; et il a, avec de l'esprit, l'air d'un stupide. » ID. « Vous prendriez souvent Ménalque pour un stupide, car il n'écoute point, et il parle encore moins.» ID. « Un homme (Lafontaine) paraît grossier, lourd, stupide; il ne sait pas parler ni raconter ce qu'il vient de voir.» ID. Rome mit d'abord les rois dans le silence, et les rendit comme stupides. » MONTESQ. « Je restais immobile et stupide sans

D

-

Buffon qua

pouvoir agir ni penser. » J. J.lifie de stupides des animaux sédentaires. paresseux, indifférents au péril, qui ne s'épouvantent ni ne fuient à l'approche de l'homme 1.

Imbécile, latin imbecillus, de in privatif. a de bacillus ou baculus, bâton, signifie primitive ment sans bâton, sans appui, faible. La faiblesse caractérise en effet l'imbécile. Il est faible d'esprit, languissant, sans énergie, pusillanime «Humiliez-vous, raison impuissante; taisez-vous, nature imbécile.» PASC. « Traiter de faiblesse, d'imbécillité et de travers d'esprit la ferveur a la fidélité des serviteurs de Dieu. » MASS. « C'est le cas d'appeler les choses par leur nom: cette faiblesse est en effet l'imbécillité la plus complète. » LAH. « Les gens mous et inappliqués, quelque génie qu'ils aient, se rendent imbéciles, et se dégradent eux-mêmes. » FÉN. Les rois enervés par les délices et la flatterie, làches, sats caractère, méritent l'épithète d'imbéciles : l'ine bécile Claude (MONTESQ.). «L'Egypte aurait pu être formidable; mais la cruauté de ses rois. leur lâcheté, leur avarice, leur imbecillité, leurs affreuses voluptés les rendirent odieux à leurs sujets. ID. Imbécile se dit particulièrement bien des enfants et des vieillards, et en général de tous ceux qui sont faibles de corps, la faiblesse des organes se trouvant jointe d'ordinaire à celle de l'esprit.

D

L'imbécile Ibrahim, sans craindre sa naissance, Traine, exempt de péril, une éternelle enfance.

D

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<«< Ils traînent une vieillesse imbécile et méprisable. VOLT. « Vieux père de famille imbécile, » ID. « L'âge et le chagrin l'avaient fort approché de l'imbécile. » S. S. « Le vieux eunuque qui est à notre tête est un imbécile à qui l'on fait croire tout ce qu'on veut. » MONTESQ.-Comme l'esprit faible est le contraire de l'esprit fort, de l'esprit incrédule, l'imbécillité consiste parfois à croire trop aisément. « Une crédulité imbécile.» VOLT.

Des superstitions imbéciles. » ID. « La divination fut inventée par le premier fripon qui reccontra un imbécile. » ID. « On me prendra pour un grand sot, si j'ai cru persuader mes lecteurs (du désintéressement du régent), et pour un inbécile si je l'ai cru moi-même. S. S.- Da reste. imbécile enchérit sur stupide, et indique un défaut plus grand, plus avilissant, plus honteux,

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4. Hébété, du latin hebes, émoussé, semble equivaloir tout à fait à stupide. Cependant, comme c'est un participe passé, et non pas un adjectif pur, il rappelle une action soufferte, un effet éprouvé de la part de certaines choses et dans certaines circonstances. Le stupide est tel; l'hebete a été rendu tel.

Je laisse aux doucereux ce langage affété,
Où s'endort un esprit de mollesse hebete,

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« Quailus était blasé, hébété de vin et d'ean-de-vie. » S. S. « Je reutrai chez moi rendu de fatigue et presque hebete de douleur. » J. J. « Après deux ou trois mois de ce beau travail, et des efforts inimaginables jaune et presque hébété. » ID. Orgon était un homme pour apprendre les échecs, je vais au café, maigre, sage, un homme de cœur :

Mais il est devenu comme un homme hébéte,
Depuis que de Tartuffe on le voit entêté, MoL,

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plus voisin de la nullité. L'esprit n'est que lent | J. J. « L'ineptie avec laquelle j'ai parlé de votre et comme assoupi dans le stupide; au lieu qu'il art. » ID. est débile et infirme dans l'imbécile. « Il y a des stupides, et j'ose dire des imbéciles, qui se pla-prit; l'imbécile est impuissant et n'a aucune

cent en de beaux postes, et qui savent mourir dans l'opulence. » LABR. « Je voudrais qu'il fût encore plus stupide et plus imbécile. » DEST. Le bœuf a un air de stupidité, et l'âne un air E d'imbécillité.» BUFF.

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Idiot, latin idiota, grec lôidtng, dont la racine est toos, particulier, singulier, privé, se dit d'un homme renfermé dans un cercle d'idées très-étroit, et élevé pour ainsi dire à l'écart ou dans l'isolement. Ce mot dénote un grand dénûment intellectuel, faute d'être sorti de sa demeure, d'avoir agrandi ses vues, d'avoir beaucoup observé. Un homme réduit, comme le veut Pascal, à se contempler lui-même, serait un idiot (VOLT.). « Soyez pauvre d'esprit, recherchant le commerce des simples et des petits.... La grâce fait qu'on est ravi d'être avec les gens les plus grossiers et les plus idiots. » FEN. Y a-t-il quelque stupidité pareille à celle d'un enfant élevé toujours dans la chambre et sous les yeux de sa mère ?... La première fois que je sortis de Genève, je voulais suivre un cheval au galop... ; jouet de tous les enfants du village, j'étais un véritable idiot pour eux. J. J. Dans l'École des Femmes, Arnolphe prétend se préparer dans Agnès une femme vertueuse, en l'empêchant d'acquérir de l'esprit; il la place donc dans un petit couvent, et recommande de prendre tous les soins nécessaires pour la rendre aussi idiote que possible (MOL.). En effet, elle est, en sortant de sa retraite, d'une innocence et d'une simplicité qui ravit son futur époux. Il est échappé à Louis XIV de dire que M. du Maine avait à la vérité beaucoup d'esprit et de talent, mais qu'il n'en savait rien faire; qu'il était toujours seul...; que c'était un idiot avec tout son esprit, qui ne savait jamais quoi que ce soit qui se passât hors de la sphère de ses charges, et qui, étant fort plaisant, amusant et de bonne compagnie, était sauvage au point de ne vouloir voir personne. » S. S.

Inepte, latin ineptus, non apte, non propre ou capable, désigne un défaut de capacité. L'inepte n'est bon à rien, il n'a pas de génie ou de dispositions. « La sottise est la gaucherie de l'esprit qui se pique d'adresse, l'ineptie de l'esprit qui se pique d'habileté. » MARM. «M. d'Aubonne se chargea de voir à quoi j'étais propre. Le résultat de ses observations fut que, malgré ce que promettaient mon extérieur et ma physionomie, j'étais, sinon tout à fait inepte, au moins un garçon de peu d'esprit. » J. J. « Aristophane s'élevait dans ses comédies contre l'ineptie du peuple dans ses choix et dans ses délibérations. » BARTH. Rien ne surprenait davantage milord Maréchal que la confiance téméraire d'un général ignorant, qui, osant commander sans avoir longtemps appris à obéir, paye son ineptie par ses défaites.» D'AL. Jésus-Christ s'associe des coopérateurs qui en eux-mêmes sont absolument ineptes aux grands desseins qu'il veut accomplir par leur ministère.» Boss. ■ Essuyer d'ineptes censures. »

Le stupide est lourd et n'a aucune vivacité d'es

force d'esprit; l'idiot est borné et n'a aucune étendue d'esprit; l'inepte est incapable et n'a aucune habileté d'esprit, aucun talent.

II. Sot, insensé, fou, déraisonnable, extravagant, absurde.

Dépourvu de la qualité mentale la plus caractéristique de l'homme par rapport aux autres animaux, et en vertu de laquelle nous jugeons, nous inférons, nous prévoyons, nous nous conformons à des règles, nous discernons le vrai d'avec le faux, le bien d'avec le mal, ce qui convient d'avec ce qui ne convient pas.

Sot, italien stolto, du latin stultus ou stolidus, dont la signification est à peu près la même, fait la transition entre cette série de mots et la précédente. Le sot manque à la fois d'esprit et de jugement, mais plutôt encore de jugement; ce qui a fait dire à Larochefoucauld: On est quelquefois sot avec de l'esprit, mais on ne l'est jamais avec du jugement.» « Il n'y a point de sots si incommodes que ceux qui ont de l'esprit. » ID. « Pompadour était un sot de beaucoup d'esprit. » S. S. « L'on n'a qu'à parler avec une robe et un bonnet carré, tout galimatias devient savant, et toute sottise devient raison. >> MOL.

Un sot savant est sot plus qu'un sot ignorant.
ID.

J'oppose quelquefois, par une double image,
Le vice à la vertu, la sottise au bon sens. LAF.

L'esprit que peut avoir le sot est dénué de jus-
tesse; aussi l'emploie-t-il à tort et à travers. C'est
un brouillon qui ne doute de rien et qui est
plein de suffisance. Sotte vanité. « Quand on
court après l'esprit, on attrape la sottise. » MON-
TESQ. Le type du sot, c'est le Trissotin (trois
fois sot) des Femmes savantes, qui, avec peu ou
point d'esprit, croit et veut faire croire qu'il en
a infiniment, qui fait le bel esprit; il prétend et
s'imagine briller, mais il ne parvient qu'à ètre
ennuyeux et insupportable.

L'insensé et le fou diffèrent de même du sot. La sottise est un travers qui se montre surtout dans le commerce de la société, et dont on ne craint pas de se moquer. Le défaut de l'insensé et celui du fou sont tout autrement graves; ils ne se rapportent point à l'esprit, mais à la raison uniquement, et on plaint ceux qui les ont, au lieu de les tourner en ridicule.

Mais l'insensé est considéré en lui-même, et le fou par rapport à ce qu'il fait. L'un est un malheureux dont on a pitié; l'autre est un frénétique avec lequel on évite de se trouver ou qu'on renferme. Il n'y a pas d'insensés furieux, d'insensés à lier, comme il y a des fous furieux et des fous à lier. Un chien fou est un chien enragé. Un jeune insensé juge fort mal; il a le sens troublé, égaré, malade (in sanus, non sain); un jeune fou tient une conduite déréglée. L'insensé est inhabile à discerner les raisons, les convenances, les conséquences des choses; le fou passe les bornes, se livre à des excès. On juge en insensé, on agit en fou, on aime comme un fou.

968

Une entreprise insensée n'a ni rime ni raison, rien ne peut la justifier; une folle entreprise jette dans des dépenses exorbitantes, ou fait faire des démarches très-regrettables. Une joie ef une passion insensées ne conviennent pas, sont blåmables; une gaieté folle, une passion folle éclatent d'une manière immodérée.

III. Niais, nigaud, benét, badaud, — dadair, dandin.

Les mots déjà examinés sont de tous les styles, du style noble comme du style famiz, et ils dérivent du latin ou du grec. Ceux-ci sout plus particulièrement du style de la comédie, et tous ont une origine vulgaire. Ils expriment tous une sorte de sottise sans prétentions, laquele prête à rire, mais n'est pas fàcheuse et fatigunte comme la sottise proprement dite. Dans les c médies et les parades, les personnages dont les rôles sont plus spécialement destinés à exciter le rire et la gaieté, les Gilles, les Jocrisses et les Pierrots, font les niais, les nigauds, les benéts, les badauds, les dadais et les dandias. Et ce qui n'est pas moins caractéristique, c'est que ces mots, à la différence de ceux qui précèdent, cat un rapport particulier à l'extérieur de la per sonne, c'est qu'ils montrent la sottise s'expe mant par l'air, le rire, les gestes, la maniere d'être ou de se présenter. « Je ne serais pas sur

Déraisonnable et extravagant rappellent les deux verbes déraisonner et extravaguer d'où ils dérivent. C'est de là que se tire leur différence d'avec insensé et fou. Au lieu d'exprimer, comme ceux-ci, des états permanents et absolus, ils désignent des qualités accidentelles, imputées en raison d'actions particulières. L'insensé et le fou sont en proie à une véritable maladie mentale; aussi les enferme-t-on et les traite-t-on dans une maison, autrefois appelée hospice des insensés, et que nous nommons aujourd'hui hôpital des fous; il suffit de commettre une certaine faute pour être qualifié de déraisonnable ou d'ex travagant. L'homme déraisonnable et l'extravagant se conduisent quelquefois comme les insen-pris que bien des gens crussent tout de bon que sés et les fous. Danchet était un imbécile, parce qu'il avait la physionomie niaise. » LAH.

Déraisonnable et extravagant different aussi l'un de l'autre. Deraisonnable indique une simple dérogation à la raison, un manquement; ce qui ne présente à l'esprit qu'une idée purement négative. Extravagant, de vagari extra, vaguer, errer ou s'égarer hors de, a bien une autre force: il exprime un écart, et comme un vagabondage. L'homme déraisonnable n'est pas sage, n'est pas juste; l'homme extravagant est dans le délire: il est singulier, extraordinaire, bizarre, il s'em porte bien loin des règles, il choque les usages reçus et les idées communes.

Absurde, latin absurdus, a, quant à l'énergie, beaucoup de ressemblance avec extravagant: i signifie quelque chose d'aussi inouï, d'aussi choquant, d'aussi monstrueux en quelque sorte d'aussi éloigné du sens commun. « Il ne s'ensuit pas que mon opinion soit souverainement absurde: on peut se tromper sans tomber dans

હૈ

Mais il faut d'abord mettre à part dadois et

dandin; car, si tous les mots de cette classe se rapportent à l'extérieur en même temps qu'a lintérieur ou à l'esprit, dadais et dandin soat pritcipalement et presque uniquement relatifs à l'extérieur, et encore à une partie de l'exterieur, à la manière de se tenir. Le dadais et le dandin sont embarrassés de leur corps, ne savent qu'en faire, quelles attitudes lui donner.

Niais a été d'abord un terme de fauconnerie

appliqué aux oiseaux qu'on prenait dans le nid, qui n'en étaient pas encore sortis, et qui. frut d'expérience, ne se défiaient encore de rien. « Les faucons qu'on prend au nid s'appellent faucons niais. » BUFF. L'homme niais est neuf ou novice comme un enfant, simple, facile à duper sans malice et sans défense contre des rites qu'il ne soupçonne point. « Vous etes-vos de es l'extravagance, et toute erreur n'est pas une ab- qu'un artifice aussi niais et puéril perait surdité. » J. J. Mais extravagant a surtout rapport à la conduite, et absurde à la spéculation. L'extravagant est comme un fou, se comporte en

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qui

se degrade

quelqu'un? BEAUM. « Le naif
tombe dans le niais. » RIV. « Ces sortes dep

mes retombent quelquefois dans ce qu'on appele fou; il fait des extravagances, des folies, des le style niais. » VOLT. Elle est précieuse et excès; il faut réprimer ses saillies. L'absurde çonnière.... Elle affecte toujours un ton de r raisonne d'une manière détestable; c'est l'esprit languissant et niais, et fait la moue pour moter

le plus grossièrement faux.

Le sot est ridicule et haïssable par ses prétentions à l'esprit. L'insensé et le fou sont privs de

une petite bouche. » MOL.

ISABELLE.

« Au trébuchet! Un mari ne se prend p

la faculté qui nous guide dans notre conduite; comme un oiseau; il faut bien d'autres pe

mais l'insensé ne voit pas le bien, et le fou ne le fait pas; on considère l'un passivement, quant à

COLOMBINE.

« Je te dis qu'en amour ils sont si nisu

son état, c'est un infirme; on considère l'autre fille qui sait un peu son métier en ver

activement, c'est un furieux, un emporté. Le déraisonnable et l'extravagant n'écoutent pas Li

trente à la fois. » REGN. Niais se dit particulièrement bien des eaur raison, agissent parfois et dans l'occasion en in- par reminiscence sans doute de l'idee pre

sensés ou en fous; mais l'extravagant diffère du

« Les poules, animal d'ailleurs simple t

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déraisonnable par son excentricité, pour ainsi semblent appeler leurs petits égarés. Bessa dire, par son étrange originalité, par les excès mort vient toujours imprévue; et pendant qu où il se porte. Absurde a bien aussi ce caractère la manière de ces oiseaux niais, nous nous d'extravagant, mais il se dit plutôt relativement paissons de ce qu'on nous presente pour aw à la manière de penser, de déduire, de conclure, amuser, le lacet vient tout à coup, et nous s

que par rapport à la manière d'agir.

mes pris. » ID. « Les tocks (espèce d'oiseau

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