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L'augure, au contraire, n'a que la valeur d'une opinion, d'une divination; il est fondé sur des circonstances insignifiantes, sur des rapports imaginaires ou vagues. C'est ce qui est confirmé par l'étymologie: présage, præsagium, vient de præsagire, sentir, discerner subtilement les choses d'avance, avant qu'elles soient; augure, de avium garritus, le chant des oiseaux, rappelle une manière de pénétrer et de faire connaître l'avenir évidemment superstitieuse et incertaine, savoir par le chant ou le vol des oiseaux Le retour des hirondelles est un présage du retour du printemps. « Crassus, pendant un sacrifice, ayant laissé tomber son couteau des mains, on en prit un mauvais augure. » MONTESQ. Les premiers succès d'Alexandre étaient autant de présages de ses succès futurs. « Je frémis à ces mots, sans savoir pourquoi, et j'en tirai un mauvais augure. » LES. Le raisonnement, l'expérience, la science tirent des présages; l'imagination, la superstition, le pressentiment tirent des augures.

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Ce qu'on considère surtout dans le présage, c'est sa certitude; et il peut, du reste, se rappor- | ter à des choses pour nous indifferentes. L'augure, au contraire, d'une probabilité très-faible, est essentiellement bon ou mauvais, relatif à des choses qui nous intéressent. « Rossinante, qui avait le nez fin, sentit l'orge aussitôt, et se mit à hennir; ce que don Quichotte regarda comme un infaillible présage du bonheur de sa sortie.... I dit à Sancho Tu vois comme tout se montre favorable à notre dessein; nous n'avons rien vu encore dont nous puissions tirer un mauvais augure. » LES. On présage plus ou moins sûrement; on augure bien ou mal d'une entreprise. Par nos présages on peut juger de nos lumières, de notre sagacité, de la justesse de notre esprit; et par nos augures, de nos espérances, de nos craintes, de nos passions, de notre humeur.

possible et il peut être utile d'en donner une autre, tirée de l'étymologie. prà

Presque revient à près de : presque cent, de cent; presque aux portes de la ville, non loi ou à une petite distance des portes de la ville Quasi est le latin quasi, qui signifie primitive ment comme, de même que quasi fou, quar légitime, comme fou ou comme légitime, comm s'il était fou ou légitime. Presque a rapport à h mesure, à l'étendue, à la quantité; et quasi à la manière. Vous êtes presque plus grand que votre frère, et quasi plus savant. Vous avez presque achevé, et quasi fini. Presque aussitôt après une chose on en fait une autre; et on se porte quasi mal: « Depuis cette funeste époque, le cardinal de Noailles ne porta quasi plus santé, je veux dire qu'il fut presque incontinent attaqué, et peu à peu poussé sans relâche aux dernières extrémités jusqu'à la fin de sa vie. » S. S.

Un voyageur est presque arrivé à son but; presque tous les philosophes pensent telle chose sur tel point: il est presque minuit. Mais on est quasi contraint (MAL.), quasi honteux (Vor), quasi nu (SÉv.), on mène quasi une vie pasto. rale (FONT.), dans telle province on ne parle quasi pas français (LAF.). Là il s'agit de distance, de nombre, de durée; ici de manières d'être ou d'agir, d'états, de qualités.

PRESSANT, URGENT. Ces mots servent à exprimer des impressions faites sur nous par quelque chose qui nous excite à faire au plus tôt certaines actions: affaire pressante ou urgente; besoin, cas, mal pressant ou urgent.

Pressant est moins fort qu'urgent; la chose pressante vous fait dépêcher; la chose argente vous presse l'épée dans les reins, veut absolument être faite sur-le-champ.

α

On dit plutôt un pressant besoin. « S'il y a un besoin pressant que l'expérience nous rende sensible, c'est celui que nous avons d'un tel secours. Boss. « J'ai un besoin pressant d'être instruit à temps. » VOLT. « Les prolétaires donnaient au moins des citoyens à l'Etat, quelquefois même des soldats dans les besoins presMais on dira de préférence une nécessité urgente. « On payait vlontiers les subsides, parce qu'on savait que ce n'était que pour subvenir aux urgentes nécessités de l'Etat. » Boss. « Il ne faut pas que vous abandonniez vos amis dans leurs nécessités urgentes. » VOLT. « Il faut que les diètes extraordinaires soient rares, et convoquées uniquement pour d'urgentes décessités. J. J. « Ce sont des drogues dont on s sert dans les nécessités urgentes. » MOL. « J'ai dit avec quelle précipitation M. de Vendôme partit de l'Italie, sans avoir voulu donner quelques jours de plus à la nécessité la plus urgente. » S. S.

Il semble aussi que présage se prend plus volontiers en bonne part, et augure en mauvaise. « Les anciens, ne voyant qu'un feu sous les nues, qu'ils nommaient l'astre d'Hélène, ils l'estimaient de mauvais augure; au lieu que lors-sants. » J. J. qu'ils en voyaient deux, qu'ils nommaient Castor et Pollux, ils les prenaient pour un bon présage.» DESC. Lorsqu'Alexandre arma contre Darius, tout paraissait lui ouvrir la conquête de l'Asie. Il voyait, comme présages des succès qui l'attendaient, les victoires de Thémistocle, de Pausanias, de Cimon, la retraite des Dix Mille et les progrès rapides d'Agésilas.... Annibal formait une entreprise plus difficile. On n'avait encore rien tenté qui pût en faire prévoir le succès, et la première guerre entre Carthage et Rome était d'un mauvais augure pour lui. >> COND.

PRESQUE, QUASI. Peu s'en faut. « Le prince est la source de presque tout le bien qui se fait, et quasi toutes les punitions sont sur le compte des lois.» MONTESQ.

Ce qui est pressant ne souffre guère de délai; à l'égard de ce qui est urgent, si on differe, tout est perdu. « Les chirurgiens déclarèrent à l'abbe A en juger par cet exemple, il ne paraît pas y Dubois qu'il lui fallait faire une opération qui avoir de différence entre les deux mots. Cepen- était très-urgente, sans laquelle il ne pouvait dant l'Académie déclare, et avec raison, que espérer de vivre que fort peu de jours. S. S. quasi est familier et peu usité. C'est déjà pour | PRESSENTIR, SE DOUTER, SOUPÇONNER. l'application une indication précieuse. Mais il est | Avoir idée qu'une chose pourrait bien être.

à pressent ce qui doit arriver (sentire præ, r d'avance): c'est toujours l'avenir ou les es futures qu'on pressent, et cela d'une mae inexplicable, par une sorte de divination, piration, de mouvement intérieur dont on ne nd pas compte. « Je suis sûr que vous presd'avance où j'en vais venir. » J. J. « Si pressentez (dans votre élève) ce raisonneI, vous pouvez aisément le prévenir avant le fasse.» ID. « Ce fut Thémistocle, qui, ant dans l'avenir, et pressentant de loin ce n avait à craindre de la part des Perses, na toutes les forces d'Athènes du côté de la » ROLL. « Plus le temps est froid, plus les nes abondent; il semble même qu'elles en sentent la cessation. » BUFF. « Les oiseaux etablissent dans un climat qu'après en avoir ssenti la température. » ID. « La faction ekiste avait pressenti intérieurement que ck ne soutiendrait pas la concurrence avec cini pour le mérite du chant. » LAH.

VALÈRE.

'ai dans le cœur, Hector, un bon pressentiment; t je dois aujourd'hui gagner assurément.

HECTOR.

otre cœur est, monsieur, toujours insatiable.
es inspirations viennent souvent du diable. REGN.
nous semblait que les cruelles déesses ne
is avaient agités que pour nous faire pres-
tir des malheurs auxquels nous étions desti-
.. » MONTESQ.

« Parmi ces jeunes gens j'en remarquai un dont l'habit me fit soupçonner que le cavalier qui l'avait sur le corps pouvait être l'homme que je cherchais. LES. «En touchant mes habits et mon visage, elle soupçonna que je n'étais point l'amant chéri qu'elle attendait. » ID. « L'impression (que fit la fumée noire sortie de la boîte ouverte par Psyché) fut si violente, que Psyché soupçonna d'abord quelque sinistre accident.» LAF.

Les choses ne nous font pas pressentir; car le pressentiment est tout d'inspiration, ou sans cause assignable. Les choses ne nous font pas nous douter; car on se doute en vertu d'une disposition ou d'une sagacité propre, subjective, indépendamment des objets. Mais les choses nous font soupçonner, le soupçon est une croyance légèrement motivée, qui résulte de ce qui nous apparaît.

PRÉSUMER, CONJECTURER (PRÉSOMPTION, CONJECTURE): · AUGURER. Concevoir quelque chose d'après les apparences, d'après de simples indices.

Présumer, du latin præ sumere, prendre d'avance, signifie prendre d'avance un avis, préjuger. Conjecturer, de conjectare, jeter ensemble des dés, pour savoir, pour deviner, d'où conjector, interprète des songes, c'est imaginer ou se représenter les choses. Qui présume se fait proprement une opinion; qui conjecture se fait une idée. Ce qu'on présume n'est pas toujours certain, et demande à être confirmé par des preuves; ce qu'on conjecture n'est pas toujours vrai, et demande à être confronté à la réalité,

je douter et soupçonner se rapportent, non pas quement à l'avenir, mais à toutes les parties temps. De plus, ils expriment une manière connaître qui n'a rien d'instinctif et de mysté-vérifié par les faits. La présomption est une ux se douter suppose de l'esprit, de la esse; et soupçonner, des indices. «Ils soupment au fond de leur âme le profond mépris e la philosophie a pour eux, quoiqu'elle ne a vante pas. Mais à force d'esprit ils s'en dout. » D'AL.

Jans se douter le pronom personnel a pour et de mettre le sujet en scène, de le montrer développe son talent ou sa pénétration. « Ce nce n'était point si stupide qu'il ne se doutât n qu'une parelle assemblée était une conspiion contre son autorité. VERT. « La physique périmentale était un trésor caché dont Bacon tait douté, et que tous les philosophes, encourés par sa promesse, s'efforcèrent de déterrer. » LT. « Le fourbe, qui se douta bien de son desn, ne fit pas semblant de se défier d'elle. » s. Il se dit fort habile dans cet art, mais il s'en doute pas. » ACAD.

croyance, une affirmation: on présume que l'âme ne meurt point (J. J.). La conjecture est une explication, une manière de voir, un pressentiment, une théorie: on conjecture un événement (VOLT.); ne donner une explication que comme une conjecture (Boss.); ne donner ses idées que pour des conjectures (COND.). Là où il s'agit de juger, de décider, et, par exemple, devant les tribunaux et dans les affaires, on pré| sume; là où il s'agit de rechercher, de se rendre compte, de trouver les causes et le comment de ce qui arrive, dans les sciences naturelles, en particulier, on conjecture. La présomption supplée à la certitude. N'imaginant point comment l'être pensant peut mourir, je présume qu'il ne meurt pas. » Boss. « Une bonne cause ajoute aux autres avantages de la guerre.... On a sujet de présumer qu'on a Dieu pour soi.... >> ID. « Lorsqu'on arrêta la Brinvilliers dans Liége, on trouva une confession générale écrite de sa main, qui servit non pas de preuve contre elle, mais de présomption. » VOLT. « Ce ne sont pas là des convictions entières, mais ce sont les présomptions les plus fortes. » ID. « Qu'on se permette de telles présomptions dans la chaleur Edipe, qui sait que dans ce temps-là même d'une querelle littéraire, cela est très-blâmable s'est battu contre deux étrangers en Phocide, et très-commun; mais le prendre pour des preuit soupçonner dès ce moment que Laïus a été ves dans les tribunaux, voilà une jurisprudence é de sa main.» VOLT. Soupçonnant sur plu- à faire trembler. » J. J. La conjecture supplée à la eurs indices que mon jeune docteur n'avait vue. « Oh! si je savais mieux tous les détails en du tout compris à l'histoire, je........ » J. J. ¦ que j'ignore (du plan de persécution suivi contre

On soupçonne comme on conjecture et comme
présume, d'après certains signes, en se fon-
at sur certaines apparences.

On soupçonne aisément, à sa triste figure,
Qu'il cherche en vain quelqu'un qui prête à triple
REGN.

usure.

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doul

moi), si je voyais mieux ceux que je n'ai fait que fort nuisible à l'Etat et aux honnêtes gens. - §.5 conjecturer!» J. J. « Livré à la haine publique, Les ennemis de César n'augurèrent pas jush sans qu'il me fût possible d'en apercevoir, d'en des suites que son faste devait entrainer. Re conjecturer au moins la cause. » ID. « On ne dé-« Pendant que Platon était encore au mail glo couvre point l'homme sage, tant ses conduites un jour qu'il dormait sous un myrte, on sent profondes; mais il sonde le cœur des autres, qu'un essaim d'abeilles se posa sur ses lèvre, fin et on dirait qu'il devine, tant ses conjectures sont d'où l'on augura que cet enfant deviendrait u sûres. Boss. « Dieu ne pourrait voir la déter- homme éloquent, dont le style serait d'une mination des causes libres que par conjecture, ce grande douceur.» ID. qui est contradictoire avec la prescience infinie.>> MONTESQ.

Toutefois conjecturer se prend aussi dans le sens logique et judiciaire de présumer; mais il annonce quelque chose de plus falbie ou de moins fondé, de moins probable : la conjecture n'est guère plus qu'une supposition, un soupçon. « Nul n'a droit de conclure positivement que la pénitence faite par un homme du monde soit indigne. Mais au défaut de l'évidence, du moins on peut en avoir des conjectures; et ces conjectures peuvent être si fortes, qu'elles donnent lieu à une raisonnable présomption. BOURD. « Les juges de Toulouse, qui condamnérent Calas au plus horrible supplice, devaient avoir certainement plus de présomptions de son innocence que de son crime. Les juges du bailliage de Bar, qui firent périr en 1768 un vieillard nommé Martin sur la roue, le condamnèrent sur les plus fausses conjectures. » VOLT. « Le prédicateur ne fait point valoir, comme l'avocat, les violentes conjectures et les présomptions. » LABR.

La présomption est objective, donnée par les choses. On dit, non pas ma présomption, mais la présomption, comme on dit la vraisemblance. « Il n'y a que de l'avantage pour celui qui parle peu, la présomption est qu'il a de l'esprit. » LABR. Si Sésostris construisit ce mur pour n'être point vole, c'est une grande présomption qu'il n'alla pas lui-même voler les autres nations, et conquérir la moitié du monde pour son plai sir. VOLT. La conjecture, an contraire, est subjective ou dépendante du sujet, arbitraire; aussi dit-on, non pas la conjecture, mais ma conjecture, comme on dit mon sentiment, ma pensée, mon goût. «Voilà des soupirs qui veulent dire quelque chose, et ma conjecture se trouvera véritable. » MOL.

VALÈRE.

Ergaste, que dis-tu d'une telle aventure?

ERGASTE.

.Selon ma conjecture,
Je tiens qu'elle n'a rien de déplaisant pour vous.
ID.

J'ai vu avec la plus grande satisfaction mes conjectures confirmées par les faits. BUFF. « L'esprit critique rend les hommes déterminatifs et leur fait préférer leur goût et leurs conjectures à toute tradition et à toute autorité. Boss.

Augurer se dit seulement en parlant des choses à venir, qu'il fait considérer comme devant être bonnes ou mauvaises, heureuses ou malheureuses. « Les plaisirs de la table avec quelques étrangers ne firent pas augurer que le czar Pierre serait un réformateur.» VOLT. « Ces facilités du régent firent augurer en lui une faiblesse

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SOPHIE.

L'effet en sera prompt et me sera fatal.
LE MARQUIS.
Pourquoi de mes desseins augurez-vous si mal?
DEST.

PRÉVALOIR (SE), SE GLORIFIER, SE TARGÜER.
Tirer avantage.

Il existe d'abord une grande différence entre se prévaloir et se glorifier. On se prétcut d'une chose qui fait qu'on précaut, qu'on vout avant (præ) les autres ou plus que les autres, qui donne de la prépondérance; on se glorifie d'une chose glorieuse, dont on fait gloire, qui flatte l'amour-propre. Vous vous prévalez de ce dont vous tirez profit; vous vous glorifiez de ce dont vous tirez vanité. Qui ne se prévaut pas, le por vant, est désintéressé ou loyal; qui ne se glorif pas, quand il y a lieu, est modeste. Il y a presque toujours injustice ou usurpation à se préro loir, et assez souvent orgueil à se glorifier. On se prévaut de son autorité ou de la faiblesse d'un adversaire pour obtenir quelque chose d'utile, pour se rendre le plus fort, pour l'emporter sur les autres; on se glorifie de sa noblesse ou de son savoir comme de quelque chose de beau, on se glorifie d'avoir fait une action qu'on estime honorable et digne de louange.

Les anciens Romains ne se voulaient prévaloir en leurs guerres que de la vertu simple et naïfve,... En la guerre contre Ariovistus, il surveint quelque remuement entre les deux armées: sur ce tumulte, César se trouva avoir fort grand advantage sur ses ennemis; toutesfois il ne s'en voulut point prevaloir, de peur qu'on luy peust reprocher d'y avoir procedé de mauvaise foy. MONTAIGN. A Rome, les esprits ambitieux et remuants excitaient les jalousies pour s'en prévaloir. » Boss. « Vous ne pouvez vous prévaloir des passages de Vasquez que vous m'opposez, • PASC. « Cette faiblesse qu'on sent dans les rois fait que chacun ne songe qu'à s'en prévaloir : on les presse, on les importune, on les accable, et on réussit en les accablant. FÉN. « Ma lettre pouvait donner sur moi bien des prises. Il le v avec joie; mais comment se prévaloir de cet avantage sans se compromettre? En montrant cette lettre, il s'exposait au reproche d'abuser de la confiance de son ami. » J. J. Un médecin dit à d'autres dans Molière : « Profitons des sottises des hommes le plus doucement que nous pour rons; nous ne sommes pas les seuls qui tâchons à nous prévaloir de la faiblesse humaine.

Il faut qu'il y ait un étrange renversement dans la nature de l'homme pour vivre dans cet ét (de négligence du salut), et encore plus pour en faire vanité.... Ce repos brutal entre la crainte de l'enfer et du néant semble si beau, que non

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ment ceux qui sont véritablement dans ce malheureux, s'en glorifient, mais que même qui n'y sont pas croient qu'il leur est ux de feindre d'y être. » PASC. Les sociles indépendants, les trembleurs se glorile leur simplicité: ils se vantent tous de ne roire que le symbole. » Boss. Ne vante pas ta science, qui ne sert qu'à te rendre coupable; ne te glorifie pas de tes dons, e font que t'obliger à un plus grand e. »ID. « Il vit à l'égard de Dieu dans une e d'indépendance d'autant plus criminelle bien loin d'en rougir, il semble encore nt s'en glorifier. » BOURD.

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targuer ne vient pas de la langue latine me les deux mots précédents; son origine est nement vulgaire. Aussi appartient-il au ge commun. Il ajoute à l'idée de se prér et à l'idée de se glorifier celle d'une outreance rare; en sorte qu'il signifie se prévaloir glorifier avec un excès, un emportement 1x ou ridicule. C'est, du reste, un mot qui ouve à sa place dans des écrits tels que les dies de Molière et de Regnard, et les Conns de J. J. Rousseau. Se targuer de la de gouverneur et de chargé de la pere du roi pour empêcher le régent de parler au roi dans un cabinet, c'était (pour le chal de Villeroy) porter l'audace jusqu'à des soupçons les plus fous et les plus in ux. S. S. « Pour imposer à l'ambition, il l'intimider. Doit-on donc affecter de l'or, vouloir dominer chez ses voisins, prendre irs insolents et menaçants de hauteur, se un point d'honneur de ne point reculer, d on a tort, et se targuer de ses forces? » COND.

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2° Supplier, conjurer.

Supplier et conjurer ont pour accessoire de se rapporter à la manière supplier, c'est prier d'une manière humble, soumise, respectueuse; et conjurer, prier d'une manière pressante, instamment.

Supplier, de sub plicare, plier au-dessous, se prosterner, marque une posture de suppliant, d'homme qui s'abaisse, qui se jette à terre ou aux genoux. Quand il s'agit de confesser sa faute, de faire satisfaction, de supplier, la voix devient douce, timide, soumise. >> ROLL. En parlant aux rois ou des rois, aux grands ou des grands, c'est le mot propre. « Votre Majesté a toujours daigné nous entendre par elle-même; et nous ne craignons pas de lui déplaire, en la suppliant à genoux, comme nous faisons, que notre jugement parte de son trône. » Boss. « Le peuple même, dans un jour d'assemblée, se jetant à leurs genoux (de Pompée et de Crassus), les supplia de vouloir bien se réconcilier. » VERT. «Nous nous jetons, sire, aux pieds de Votre Majesté nous la supplions de nous faire jouir de ces priviléges. » VOLT. Dans les derniers états généraux, la nation supplia Louis XIII d'abolir les restes honteux de l'esclavage. » ID. Autrefois les requêtes commençaient par : « Supplie humblement un tel.... » ACAD. Toutefois à l'égard de Dieu et des saints on se contente ordinairement du mot de prier, soit parce que leur supériorité est tellement incontestable qu'il est inutile de la faire sentir par nos expressions, soit parce que primitivement prier est un terme consacré pour signifier un acte de culte. Il ne faudrait pas croire, du reste, sur la foi de Vaugelas, que ce fût une faute de dire supplier Dieu, au lieu de le prier. « Remuez, Seigneur, remuez nos consciences. Votre prophète vous suppliait de ne le point reprendre dans votre fureur, et de ne le punir point dans votre courroux. BOURD.

Conjurer, c'est prier avec force, en jurant, en faisant intervenir les choses saintes, par ce qu'il y a de plus sacré. Un prédicateur a beau déclamer, un confesseur a beau conjurer, exhorter, menacer...; on ne se réveille plus.» BOURD. « Cette mère avait prié un solitaire de venir à Antioche et de se charger du soin de son fils. Elle l'en conjura d'une manière si vive et si touchante, qu'il ne crut pas pouvoir s'en défendre. ROLL. Dans les Fourberies de Scapin, Scapin dit à Octave: «J'ai fait de grands serments de ne me mêler plus du monde; mais si vous m'en priez bien fort, peut-être.... » A quoi Octave répond: << Ah! s'il ne tient qu'à te prier bien fort pour obtenir ton aide, je te conjure de

tout mon cœur de prendre la conduite de notre barque. MOL. « Contrains-les d'entrer ne veut dire autre chose, sinon, priez, conjurez, pressez, obtenez. » VOLT. « J'avais cent fois remontré, prié, pressé, conjuré, et toujours inutilement. » J. J. « Je l'ai prié, pressé, conjuré, boudé, baisé, je lui ai pris les deux mains, je me serais mise à genoux s'il m'eût laissé faire: il ne m'a pas même écoutée. » ID.

3° Invoquer, implorer.

Invoquer et implorer ont pour accessoire de se rapporter à l'objet. Aussi, à la différence de leurs synonymes précédents, prennent-ils bien le mot qui exprime cet objet pour complément direct invoquer, implorer le secours de Dieu ou de quelqu'un. Ils supposent d'ailleurs une situation critique qui exige qu'on nous vienne en aide; et par là leur signification se trouve étroitement déterminée. Nous prions, nous supplions ou conjurons quelqu'un de faire toutes sortes de choses, de nous laisser tranquilles ou en repos, par exemple; quand nous l'invoquons ou que nous l'implorons, c'est toujours afin qu'il nous assiste, afin qu'il use de sa puissance en notre faveur.

logé chez lui quatre dragmes par jour, et lui donnerait à souper à lui et à tous ses a qu'il voudrait prier. » ROLL. Mme de Sevignet au sujet de son ami Corbinelli, bel esprit que a disputaient plusieurs sociétés, uniquement par égayer leurs repas: « Je ne le vois plus... quelquefois le matin je ne me trouvais à passage quand il va à l'un des trois ou qu dîners où il est tous les jours prié, je ne ž reconnaîtrais plus. »

Inviter, latin invitare, suppose, au contraire, de la considération et de la cérémonie. « Philip de Macédoine se prépare à célébrer à Eges, ave une magnificence incroyable, les noces de Cléopâtre sa fille. Il y avait invité toutes les per sonnes les plus considérables de la Grèce..I ROLL. « L'empereur Othon II voulait régner. [ entre donc dans Rome; il y invite à dlaer le principaux sénateurs et les partisans du consul: on dit qu'il les fit tous égorger. » VOLT. « Le ni Christiern II invita à souper dans son palais deux évêques, tout le sénat, et quatre-vingt-qu torze seigneurs.... Tous les convives furent ma sacrés. » ID. << Socrate dit à Aristodeme: Seriez-vous d'humeur à venir aussi souper che

Homère feint que Ménélas vint au festin d'Agamemnon sans être invité. » RAC.

D'autre part, inviter, comme on peut le voir par les deux derniers exemples de Voltaire, est seal propre à désigner une manoeuvre ou un artifice pour faire venir, pour attirer. « Un autre galant, s'y prenant mieux, engageait une vieille comédienne de ses amies à m'inviter à souper chez elle où il ne manquait pas de se trouver. » LES.

Invoquer, invocare, c'est appeler à son se-Agathon, quoique vous ne soyez point prit?.. cours; implorer, in plorare, pleurer à ou vers. ou se tourner vers quelqu'un en pleurant, c'est appeler à son secours en cherchant à toucher, étant dans une position déplorable ou digne de pitié. Bourdaloue reproche aux chrétiens d'invoquer les saints pour des biens temporels, pour être plus heureux et plus opulents; et quand nous invoquons une loi ou le droit commun, c'est sans supplication et sans nous trouver en général dans une position à verser des larmes. Mais des prisonniers qu'on égorge implorent la pitié et la bonne foi de leurs assassins (Boss.); on implore la clémence, la miséricorde. On invoque en priant simplement, quelquefois même sans prier, auquel cas c'est un droit qu'on revendique; on implore toujours en priant, et même en suppliant. « J'oserai donc non implorer la protection des princesses, mais invoquer leur justice.» BEAUM. « L'homme est naturellement obligé d'invoquer et d'implorer continuellement le secours divin. » D'AG.

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Dans cet asile saint elle invoque à genoux
La faveur de ses dieux, qu'elle implore pour vous.
VOLT.

PRIER à dîner, INVITER à dîner, (PRIER de dîner). Faire l'offre d'un dîner.

Dans l'expression prier à dîner, prier ne signifie plus, comme primitivement, demander une grâce ou demander quelque chose comme une grâce, avec soumission et humblement; c'est un terme de pure civilité qui, par l'abus qu'on a fait des mots prier et prière, a fini par marquer de la familiarité et du sans-façon. On fait dire à Jésus, qu'il ne faut pas prier ses amis à dîner quand ils sont riches. » VOLT. « Retire chez lui, Babouc envoya chercher des livres nouveaux pour adoucir son chagrin, et il pria quelques lettrés à dîner pour se réjouir. Il en vint deux fois plus qu'il n'en avait demandé. » ID. « Sylla ordonna qu'un hôte donnerait à chaque soldat

Prier de dîner équivaut à prier à diner, saní une légère différence qui a été indiquée dans la Ire partie, p. 62.

PRINCIPE, ÉLÉMENT. Les principes et le éléments d'une chose sont ce qui la fait être, la causes ou les fondements de son existence.

Mais principe, latin principium, dont la racine est præ avant, a une signification plus étendue il exprime tout ce qui préexiste à un objet et lu donne l'être. Élément, du latin alimentum, alment, nourriture, substance, désigue seulement ce qui constitue l'objet, la matière qui le compose. Le principe peut être abstrait; l'élément est concret.

Outre les atomes, c'est-à-dire les éléments. Epicure admet encore un autre principe, qui est le vide, « mais il ne le considère pas comme un principe de composition des corps. » Fex. L'élément est toujours un principe de composition des corps. De même Aristote reconnaît comme principes des choses naturelles et la matière et la privation; à propos de quoi Fénelon ajoute cette remarque: Aristote ne considère pas la privation comme un principe de composition des corps, mais comme un principe externe de leur production.» Elément de production ne se dis pas. La chaleur est le principe et non l'élément de la vie. Dieu est un principe et non un élé ment des choses. « La physique est celle quier plique les principes des choses naturelles, et les propriétés des corps; qui discourt de la nature

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