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lesquels elle est fondée, comment il tourne en
dérision les respectables droits des pères sur leurs
enfants, des maris sur leurs femmes!.... Il fait
rire, il est vrai, et n'en devient que plus cou-flage, ironie, brocard, lardon.
pable, en forçant, par un charme invincible, les
sages mêmes de se prêter à des railleries qui de-
vraient attirer leur indignation. » J. J.

sérieuses de parties de main, de boussonneries,
cela était insupportable.» S. S.

2o Raillerie, dérision, risée, moquerie, persi

La goguenarderie et la gausserie sont de mauvaises plaisanteries ou de mauvaises railleries, telles qu'on en fait dans le bas peuple. Ces mots sont non-seulement familiers, mais encore dépréciatifs ils expriment de pauvres bons mots ou les bons mots de gens grossiers, dont on fait peu de cas.

1° Plaisanterie, facétie, bouffonnerie.

D

La plaisanterie est faite pour plaire et plaît, cause du plaisir. La facétie, du latin facetus, très-enjoué, divertit beaucoup : c'est plus qu'une plaisanterie, c'est une plaisanterie très-fine, très-vive, très-comique, très-réjouissante. « Le duc du Maine raconta l'humiliation de Fagon avec ce facélieux et cet art de fine plaisanterie qu'il possédait si bien. » S. S. « Courcillon était un homme très-singulier, qu'une cuisse de moins n'avait pu attrister, qui s'était mis sur le pied de tout dire et de tout faire, et qui en faisait d'inouïes avec beaucoup d'esprit et une inépuisable plaisanterie et facétie. » ID. « On connut bientôt que le plaisant et le facétieux touche de trop près au licencieux pour en être entièrement séparé.» Boss. Beaumarchais avait la manie des quolibets et des rébus, comme plaisant et facé- | tieux. » LAH. Mais de très-plaisant à trop plaisant il n'y a qu'un pas; aussi facétie signifie-t-il souvent un excès, une plaisanterie trop forte ou inconvenante: Y a-t-il rien de plus ridicule que de voir le grand Condé baiser la châsse de sainte Geneviève dans une procession, y frotter son chapelet, le montrer au peuple, et prouver par cette facétie que les héros sacrifient souvent à la canaille?» VOLT. α L'ignorance du cardinal de La Trémoille, ses mœurs, l'indécence de sa vie, sa figure étrange, ses facéties déplacées, ne peuvent être couvertes par son nom, sa dignité. >> S. S.

De son côté, la boufssonnerie n'est pas seule ment poussée trop loin, comme quelquefois la facétie, elle est grotesque, elle touche à la farce et à la turlupinade. Si la facétie n'a pas toujours assez de mesure, la bouffonnerie n'en a point du tout. On dit une facétie bouffonne (LAH.), preuve que le second mot ajoute au premier. « Le génie des pièces comiques est de chercher la bouffonnerie; César même ne trouvait pas que Térence fût assez plaisant: on veut plus d'emportement dans le risible. » Boss. Voltaire écrit à Laharpe: « Je n'ai point eu encore le courage de faire venir le fatras de ce Gilles nommé Piron on ne peut à mon âge souffrir les plaisanteries de la foire. Je vous sais bon gré de n'être jamais descendu à la plaisanterie bouffonne. » La bouffonnerie est la plaisanterie des tréteaux, c'est-à-dire, en fait de plaisanterie, ce qu'il y a de plus exagéré et de plus impertinent. « Je disais au régent que, s'il voulait plaisanter, je plaisanterais tant qu'il voudrait, mais que de mêler les choses les plus

Raillerie paraît venir de ridere ou de ridialaria: la raillerie consiste donc à rire de quel qu'un, à le tourner en ridicule. Dérision et risét, ayant même origine, paraissent signifier exactement la même chose. Ces trois expressions sontelles donc tout à fait équivalentes?

La raillerie se considère en elle-même : elle est fine, délicate, froide, amère, méchante, etc. Dérision a le sens actif, et risée le sens passif: tourner en dérision montre un fait s'accomplissant; digne de risée revient à digne d'être ri, joué, moqué, sifflé. On fait quelque chose par dérision. « La reine Marguerite ayant fait prisonniers Richard et Edmond, son second fils, les fit décapiter, et elle fit mettre par dérision une couronne de papier sur la tête du duc d'York.. Boss. « Les croisés se promenaient dans les rues de Constantinople, portant à la main une écritoire et du papier, par dérision pour cette nation, qui avait renoncé à la profession des armes. » MONTESQ. Mais on est exposé à la risée ou un sujet de risée. « Rendre un homme un sujet de risée. » BOURD. « L'ambition et la simplicité du cardinal d'Amboise furent la risée de toute l'Europe. » Boss. - Osez-vous vous abandonner à cet esprit de dérision qui a été si outrageux contre Jésus-Christ? Ne voyez-vous pas, railleurs à outrance, que d'opprobres et quelle risée vous avez causés au divin Jésus?» ID.

La moquerie est bien plus grave et plus offensante que la raillerie, la dérision et la risée :elle consiste, non pas à rire des gens, mais proprement à leur faire la grimace, en grec poziv, et par conséquent à leur témoigner du mépris. Le railleur est un malin critique, qui se borne å reprendre en nous des ridicules ou des travers, et ses observations, quoique piquantes, peuvent ne pas nous piquer; nous pouvons en rire les premiers, comme fit Socrate à la représentation des Nuées, si, comme lui, nous entendons raillerie. a Il y a de petits défauts que l'on abandonne volontiers à la censure, et dont nous ne haïssons pas à être raillés. » LABR. « La raillerie des monarques flatte, lorsqu'elle est modérée, parce qu'elle donne les moyens d'entrer dans la familiarité. MONTESQ. Mais on n'entend pas moquerie. Le moqueur est un insolent qui nous traite avec dédain. « La moquerie est de toutes les injures celle qui se pardonne le moins : elle est le langage du mépris, et l'une des manières dont il se fait le mieux entendre.... Elie veut rendre l'homme ridicule à ses propres yeux.... C'est une chose monstrueuse que le goût et la facilité qui est en nous de railler, d'improuver et de mépriser les autres; et tout ensemble la colère que nous ressentons contre ceux qui nous raillent, nous improuvent et nous méprisent.» LABR. « Tout air de mépris et de hauteur, tout esprit de critique et de moquerie, marque une âme pleine d'elle-même, qui met tout son plaisir dans le mal d'autrui. Rien ne devrait être si propre à nous humilier que ce genre d'orgueil moqueur,

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dédaigneux, fier, toujours implacable sur les défauts d'autrui. » FÉN. « Comme Romulus faisait creuser le fossé qui devait environnér les murailles de la nouvelle ville, Rémus critiqua d'un ton railleur la petitesse de l'ouvrage; et, ajoutant l'insulte à la raillerie, il sauta le fossé par mépris, pour se moquer de son frère. » ROLL.

Le persiflage est une espèce de raillerie, qui consiste à rire de quelqu'un en lui disant d'un air ingénu des choses flatteuses qu'il croit sincères, mais qui sont autant de contre-vérités. ◄ Si M. de Clermont-Tonnerre paraît avoir loué sincèrement son prédécesseur, la réponse du directeur de l'Académie parut à l'assemblée une ironie perpétuelle, et ce que nous appellerions aujourd'hui une espèce de persiflage, où l'on se moquait finement du prélat en paraissant l'accabler de louanges. » D'AL. « Vous avez écrit à quelqu'un que les Corses avaient seulement prié JeanJacques de mettre leurs lois en bon français: cela me paraît un persiflage. » VOLTAIRE à D'ALEMBERT. « Sophie aime à être louée, pourvu que ce soit tout de bon, et qu'elle puisse croire qu'on pense en effet le bien qu'on lui dit d'elle. Tout galant persiflage est toujours rebuté. » J. J.- On est plus ou moins sensible à la raillerie; on est ou on n'est pas dupe du persiflage. « Ce personnage de la pièce est tout à coup subjugué par le plus frivole persiflage, dont on ne peut être dupe sans être un sot. » LAH.

Ironie, grec alpwveía, n'est autre chose que le nom didactique de la raillerie et du persiflage, celui dont on se sert dans la critique littéraire et en termes de rhétorique. L'ironie était la figure favorite de Socrate. ACAD. « La figure de l'ironie tient presque toujours du comique; car l'ironie n'est autre chose qu'une raillerie. L'éloquence souffre cette figure en prose; mais dans la tragédie il faut l'employer sobrement.... Racine met quelques ironies dans la bouche d'Hermione. L'ironie ne convient point aux passions: elle ne peut aller au cœur, elle sèche les larmes. >> VOLT. « L'ironie peut, selon les occasions, appartenir à la gaieté, au courroux, au mépris; ces deux derniers peuvent donc l'introduire dans le style noble et dans les sujets les plus hauts, m mais rarement, car il ne faut pas laisser le temps de sentir qu'elle est voisine de la plaisanterie. L'ironie est quelquefois la dernière ressource de l'indignation et du désespoir, quand l'expression sérieuse leur paraît trop faible. » LAH.

Le brocard et le lardon sont des traits de raillerie piquante. Familiers et figurés, les mots brocard et lardon désignent des pointes de raillerie, quelque chose de petit et d'acéré qu'on jette, qu'on lance, qu'on reçoit, qu'on essuie.

Mais brocard, dont l'étymologie (de broche, petite broche) n'est pas très-certaine, est moins familier, moins commun que lardon, qui signifie au propre quelque chose de très-peu noble, savoir un petit morceau de lard dont on pique la viande. Sans être du plus haut style, brocard se peut mettre dans les discours et dans les écrits ordinaires. Heureux ceux qui sont intrépides contre tous les brocards des libertins ! » FÉN. Braver tous les brocards de la malignité. VOLT.

Votre honneur m'est cher, et je ne puis souffrir
Qu'aux brocards d'un chacun vous alliez vous offrir.
(Dorine à Orgon dans Tartufe). MOL.
Vous n'entendrez partout qu'injurieux brocards
Et sur vous et sur lui fondre de toutes parts. BOIL.
Gardez-vous bien de cet homme caustique :
Dans ses brocards aucun n'est ménagé.
J. B. Rouss.

«Lalande imprima dans le Journal de Paris cette
lettre qui lui attira tant de brocards en prose et
en vers.» Lah,

Sans être précisément bas, lardon ne convient que dans le style le plus familier, ou est d'un pauvre diable. « On agaça la petite; je pris sa défense. Aussitôt les lardons tombèrent sur moi. » J, J.

Des oisifs de métier, et qui toujours sur eux Portent de tout Paris le lardon scandaleux. REGN. « Il court à Paris beaucoup de satires sur l'expédition de la Silésie. On y fait l'honneur à quelquesuns de vos serviteurs de leur lâcher quelque lardon. » VOLTAIRE au roi de Prusse. « Mme de Pompadour et le bonhomme Tournemine appelaient Crébillon Sophocle, et moi on m'accablait de lardons. O le bon temps que c'était! » ID.. 3° Goguenarderie, gausserie.

Ces deux mots sont aussi familiers; mais ils marquent l'envie de badiner, de s'égayer, plutôt de critique mordante, d'un trait malin dirigé que celle de frapper; ils n'emportent pas l'idée contre une personne et propre à lui faire du mal. la même qu'entre brocard et lardon. - Du reste, entre l'un et l'autre la différence est

Goguenarderie est commun, ainsi que brocard. nos violons à jouer des airs tendres, et grande << La nuit venue, nous voilà tous à goguenarder, chère partout. Dieu sait les brocards qu'on jetait au pauvre gouverneur et à sa fraise. » HAM.

Riez donc, beau rieur. Oh! que cela doit plaire De voir un goguenard presque sexagénaire! MOL. Toutefois n'allez pas, goguenard dangereux, Faire Dieu le sujet d'un badinage affreux. BOIL. dans tout l'ouvrage, et le ton railleur et folâtre << Joignez à cela l'air joyeux et content qui règne si loustic, qui le représente, et qu'il nous asavec lequel...; ce Chinois surtout si goguenard, sure être un homme d'esprit et de sens. » J, J. est goguenard dans les intervalles de ses souf« Le patriarche est toujours malingre; et, s'il frances, il ne doit la vie qu'à ce régime de gaieté. VOLT.

Gausserie est tellement commun,

tellement

populaire, qu'on ne le trouve guère que dans la bouche de personnes qui parlent patois. Ainsi, dans les Femmes savantes, la servante Martine, qui n'a nul respect pour le bel usage et pour la grammaire, dit:

Et nous voyons que d'un homme on se gausse, Dans la Force du naturel de Destouches, une Quand sa femme chez lui porte le haut-de-chausse. fermière, Mathurine, dit, en parlant de sa

fille :

Les garçons de cheux nous ne pouvaient pas souf-
frir

Qu'elle fût au village habillée à la mode;
Et défunt mon mari, qui n'était pas quemode,
Parce qu'ils s'en gaussions nous en gaussait aussi.

Margot, couturière, dans la Coquette de Regnard, répond à Arlequin qui lui demande si elle sait raser : « Moi, raser! Je vois bien que vous êtes

un gausseur. »

PLAISIR, AGRÉMENT, DÉLICE, VOLUPTÉ, SENSUALITÉ, JOIE, JOUISSANCE. Modification ou sentiment de l'âme, qui lui convient, qui la flatte, qu'elle aime et qu'elle recherche comme contribuant à son bonheur.

Plaisir, ce qui plaît, est le terme général, le plus communément usité, celui qui a la signiLication la plus étendue : ce qui concerne l'esprit, le cœur, l'imagination, les sens, la fortune, tout est capable de nous procurer du plaisir, et le plaisir peut avoir toutes sortes de caractères, de la douceur, de la vivacité, de la grossièreté, de la noble se, il peut être petit ou grand, éphémère ou durable, innocent ou criminel. On dit l'amour du plaisir (MASS.), et cela comprend tout. Par l'attrait du plaisir les bêtes conservent leur être particulier. » MONTESQ.

Agrément, ce qui agrée, ce qu'on trouve à son gré, agréable, exprime le plaisir considéré objectivement, c'est-à-dire non dans l'âme qui le sent, mais dans l'objet qui le cause. « Dès que ces modes auront perdu ce qu'on appelle la fleur ou l'agrément de la nouveauté. » LABR. « La robe de la fauvette des bois est une des plus variées, et Belon peint avec expression l'agrément, de son plumage.» BUFF. « Les regards attentifs d'Adam sur l'agrément et sur le bon goût de ce beau fruit, firent entrer jusque dans la moelle des os l'amour du plaisir des sens.» Boss. Ce furent les vins d'Italie qui, du temps de Camille, y attirèrent de nouveau les Gaulois. L'agrément de cette liqueur, plaisir nouveau pour eux, fut un attrait puissant pour leur faire quitter leur patrie.» ROLL. Ensuite, l'agrément a plus de solidité que d'intensité; c'est quelque chose d'avantageux, de confortable, de commode, de propre à procurer ou à augmenter le bien-être, et non pas quelque chose de très-doux qui touche la partie sensible de notre être, et importe proprement à notre félicité. « La France est le meilleur pays du monde où toutes les commodités et tous les agréments de la vie concourent au bien-être des habitants. » J. J.

Les délices, car ce mot ne se dit guère qu'au pluriel, comme en latin deliciæ, sont aussi quelquefois des plaisirs objectifs : les délices de la campagne (FLECH.); Titus était les délices du genre humain (ACAD.).

Plaute fut, en son temps, les délices de Rome.

REGA.

Mais les délices ont cela de propre, surtout par rapport à l'agrément, qu'elles sont des plaisirs délicieux, suaves, de grands plaisirs, des plaisirs d'une douceur extrême, qu'on savoure, et qui, si on n'y prend garde, sont de nature à amollir. «Dans cette extase mes désirs étaient la mesure de mes plaisirs. Non, jamais les plus voluptueux n'ont connu de pareilles délices, et j'ai cent fois plus joui de mes chimères qu'ils ne font des réalités. » J. J. « L'aveugle opéré par Cheselden disait que chaque nouvel objet était un délice nouveau, et que son plaisir était si

grand qu'il ne pouvait l'exprimer. BUFF. «]; connais les délices de ton pays, disait Brasidas un satrape qui comparait la vie de Sparte à celle de Persèpolis; mais tu ne peux connaître is plaisirs du mien. » J. J. Renoncer à la mollew et aux délices (BOURD.). «Où est-ce que se trou la sagesse ? Ce n'est pas parmi ceux qui vive: dans le plaisir et les délices. » ID. « Quoi qu'e dise Tite Live, les délices de Capoue n'avaient pas amolli les soldats d'Annibal. COND.

α

D

Volupté, latin voluptas, peut désigner d'abor. le plaisir personnifié. « Quand vous n'avez aimé que vous et votre plaisir, vous avez foulė Dicu aux pieds; la volupté est devenue votre dieu; vous avez poussé le plaisir, comme parle saint Paul, jusqu'à l'avarice. » FÉN. « Jésus-Christ n'établit pas des prédicateurs pour être les ministres de la volupté, de la délicatesse. » Boss. Si l'amour du plaisir l'emporte dans les sourerains sur la gloire, tout prête des armes à la volupté. MASS. « On est étonné d'entendre sortir cette parole de la bouche du panégyriste de la volupté (Epicure), qui fait consister le sourerain bien dans le plaisir. » ROLL. « Un partisan de la volupté, dans l'école d'Aristippe, pouvait-1 s'abandonner sans réserve à tous les plaisirs des sens? BARTH. Mais d'ordinaire volupté donnne l'idée d'un plaisir de choix, recherché, exquis, comme le sont en un mot les plaisirs d'un voluptueux. Les raffinements de la volupté (ACAD., MASS.). Des ministres de Jésus-Christ raffinent sur les plaisirs, se piquent de plus de goût que le mondain, de plus de délicatesse pour la volupté. » MASS. « Ils mangent délicatement et avec réflexion; il n'y a sorte de volupté qu'ils n'essayent, et dont ils ne puissent rendre compte. » LABR. « Le genre anacréontique est un genre de poésie lyrique dont la grâce est le caractère, et qui respire la volupté. » MARM. Ajoutez à cela que volupté i..dique presque toujours des plaisirs sensuels, ceux de l'amour e de la table. « La grâce s'assujettit le cœur de l'homme en lui faisant perdre par un chaste plaisir le goût des anciennes voluptés. » ROLL « C'est ce plaisir (du vrai) qui a transporté lus philosophes, et qui leur a fait souhaiter que la nature n'eût donné aux hommes aucunes coluptés sensuelles, parce que ces voluptés troublent en nous le plaisir de goûter la vérité toute pure. » Boss. « Ce jour où tout ce qu'il y aura eu de plus sale et de plus corrompu dans leurs sentiments..., dans leurs plaisirs et leurs brutales voluptés sera tiré des ombres qui l'enveloppaient. » BOURD.

Sensualité signifie plutôt le goût du plaisir, la concupiscence, l'appétit, que le plaisir luimême. « Le démon inspire la sensualité, il enflamme la concupiscence, afin de faire servir l'esprit à la chair. Boss. « Un libertin, dans l'emportement de ses débauches, cherche partout une proie à sa sensualité. » BOURD. « Satisfaire sa sensualité. » ID. « Les émotions de la sensuslité. » Boss. Du reste, soit au singulier soit au pluriel, le mot de sensualité ne suppose ni recherche, ni choix, ni raffinement. A notre table règne une sensualité sans raffinement. » J. J.

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2

On joint un orgueil de démon à la sensualité céder aux affaires les amusements, les divertisdes bêtes. )) FÉN. La sensualité est un instinct sements, les récréations et les réjouissances brutal, et les sensualités sont des plaisirs pro- (PASC.). pres à le satisfaire, plaisirs bas, charnels, grossiers. La volupté peut dégénérer en débauche, la sensualité en crapule.

La joie et la jouissance, du latin gaudium, sont subjectives. Elles sont opposées, non pas à la douleur, mais à la tristesse et à la peine, et elles dépendent moins de l'extérieur et des événements que du caractère ou de ce qui se passe dans l'âme, des pensées, des souvenirs, des réflexions. Leur différence saute aux yeux.

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1° Plaisir, jeu.

Plaisir est beaucoup plus général : il y a bien des plaisirs qui ne consistent pas en jeux, ou qui ne dérivent pas du jeu, comme les plaisirs des sens ou du cœur, les plaisirs de la table ou du repos, la plupart des plaisirs de la campagne, etc. Le jeu est un plaisir qui suppose un exercice du corps ou de l'esprit, mais léger, sans rien de sérieux et de difficile, tel que celui des enfants qui n'agissent que pour badiner, folâtrer, s'ébattre. Un homme sensuel aime le plaisir; un homme actif, qui s'occupe volontiers, mais à des choses vaines, à des bagatelles, aime le jeu. On est avide de plaisir; on est ar

2o Amusement, divertissement, récréation, réjouissance.

La joie est vive, se manifeste, éclate; au lieu que la jouissance est intime et calme. Les joies du paradis, les joies d'une mère, se témoignent au dehors par diverses expressions; car la joie est proprement un mouvement de l'âme épan-dent ou adroit au jeu. chement, mouvement, transport, cris, larmes, signes de joie. La jouissance est un état de l'âme retirée, renfermée, concentrée en elle-même, tout occupée à jouir. « Ces tranquilles jouissances ont la sérénité de celles du paradis.» J. J. < Paisible et pure jouissance. » ID. « L'intimité de la jouissance. » BUFF. « Le plaisir de cette jouissance (de l'hirondelle) se marque par de petits cris de gaieté. » ID. « Le secret témoignage qu'on se rend à soi-même est une des meilleures jouissances. » VOLT.

D'un autre côté, la joie peut être excitée par un bien qu'on n'a pas encore, mais qu'on imagine et qu'on espère. La jouissance, au contraire, implique possession actuelle. « Il y a l'amour qui jouit, il y a aussi l'amour qui dé-ments?» BOURD. sire; et l'un et l'autre a son chant, parce que l'un et l'autre a sa joie. La joie des bienheureux, c'est leur jouissance; l'espérance est la joie de ceux qui voyagent. » Boss.

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1° PLAISIR, JEU; 2o AMUSEMENT, DIVERTISSEMENT, RÉCRÉATION, RÉJOUISSANCE. Choses auxquelles on se livre pour son agrément ou son bien-être. Un religieux doit s'interdire les plaisirs, les jeux, les amusements, les divertissements, les récréations et les réjouissances du monde; un chrétien ou tout homme sage doit

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L'amusement et le divertissement sont des ressources de circonstance contre certaines situations déplaisantes ou pour échapper à certains inconvénients. Mais l'amusement fait qu'on muse, qu'on s'occupe à des riens; il a cela de commun avec le jeu, qu'il est léger et frivole. On n'écoute plus sérieusement la parole sainte c'est une sorte d'amusement et de jeu.» LABR. On dit un vain amusement (PASc., BOIL., BOURD.); être attaché aux amusements et aux bagatelles du monde (BOURD.). « Qu'y a-t-il de plus méprisable qu'un prêtre et un magistrat, dont les journées et toute la vie se consument en frivoles amuseIl y a dans le monde des gens dont la sphère est bornée au plaisir ou à l'ennui, qui passent leur vie à de frivoles amusements, à s'informer de ce qui se dit, à courir après les spectacles, à se réjouir dans les compagnies, à railler sans cesse, sans jamais rien faire ni rien dire de sérieux. » ID. Le divertissement divertit, fait diversion, tourne d'un autre côté, arrache à des préoccupations; ce qui suppose quelque chose de moins puéril et de plus fort. Le logis fournissait pareillement à Psyché ses plaisirs, qui n'étaient tantôt que de simples jeux et tantôt des divertissements plus solides (comme Plaisir et jeu sont des mots simples; les d'apprendre l'histoire des dieux et les secrets quatre suivants sont composés. De là il résulte de la poésie). Psyché commençait à ne plus agir que plaisir et jeu sont absolus, et amusement, en enfant.» LAF. Vous avez besoin d'amusement divertissement, récréation, réjouissance, rela- pour vous empêcher de penser à une personne tifs, relatifs à l'état du sujet dont on parle. Par absente; et de divertissement pour dissiper la tout et toujours le plaisir et le jeu ont leur va. tristesse que vous cause une perte cruelle. On va leur qui est constante; il y a des plaisirs et des à la promenade pour s'amuser, et à la chasse jeux même pour les animaux. Mais on recherche pour se divertir. On dira d'une chose qu'on fait l'amusement, quand on s'ennuie, et afin de passer pour tuer le temps: cela n'est pas fort divertisle temps; le divertissement, quand on a besoin sant, mais cela m'amuse; cette pièce m'a assez de se répandre au dehors, et afin de se distraire; amusé, mais cette autre m'a fort diverti. Un la récréation, quand on a beaucoup travaillé, conte amuse; un drame divertit. « On ne peut pas et afin de prendre un moment de relâche; la dire d'une tragédie qu'elle amuse, parce que le réjouissance, quand on est joyeux, et afin de genre de plaisir qu'elle fait est sérieux et pénémanifester sa joie. Les plaisirs et les jeux sont trant, et qu'amuser emporte une idée de frivolité des choses dont les hommes se servent pour dans l'objet, et d'impression légère dans l'effet s'amuser, se divertir, se récréer et se réjouir. qu'il produit. » D'AL. On s'amuse assez bien Il y a auprès des rois des personnes qui obser- seul, mais seul on ne se divertit guère. L'amuvent tout le temps de leur loisir pour leur four-sement peut être simple, tranquille, languissant nir des plaisirs et des jeux, et pour faire suc- (PASc.) même. « Vous ne sauriez croire combien

en user avec mesure.

dont on écrit les dimensions dans un registre afin de s'en ressouvenir pour faire le plan. Fair un plan, c'est tracer en petit, sur du papier, d carton ou toute autre matière semblable, les angles et les lignes déterminées sur le terrain dom: on a levé le plan; de manière que la figure uncée sur la carte ou décrite sur le papier soit tout à fait semblable à celle du terrain, et possède e petit, quant à ses dimensions, tout ce que l'autre contient en grand. >

l'étude des plantes jette d'agrément sur mes promenades solitaires; les plus simples amusements me suffisent. » J. J. « Votre lettre a bien tenu sa place dans nos tranquilles amusements, et l'aurait bien tenue aussi dans le milieu de Versailles, si j'y étais. » SÉv. Le divertissement est plus vif, plus animé, plus bruyant. « Il faudrait trouver des divertissements moins emportés que le spectacle. Boss. « Qui ne voit la vanité du monde, excepté des jeunes gens qui sont tous dans le bruit et dans le divertissement. » PASC. La distinction est juste, mais trop peu géné La bonne compagnie et les vieillards s'amusent; rale. Lever un plan, c'est le prendre; ce qui imle peuple, les soldats, les jeunes gens se diver-plique toujours qu'on est en face de l'objet et

tissent.

D

Les récréations sont les courts divertissements de gens fatigués, qui ont besoin de se refaire. Des personnes continuellement oisives s'amusent et se divertissent indéfiniment et sans but ultérieur; il n'y a de récréations que pour celles qui travaillent et qui doivent bientôt se remettre à l'œuvre, après avoir réparé leurs forces. « Le plaisir doit être l'accessoire, une récréation pour mieux se remettre, comme le sommeil qui nous renforce et nous donne haleine pour retourner plus gaiement à l'œuvre. » CHARR. Que les justes aient leurs relâches et leurs récréations. » BOURD. Le passage alternatif du travail à la récréation.» J. J. « Offrir une honnête récréation à des gens continuellement occupés » ID. C'est à Sparte que les plus rudes travaux passaient pour des récréations, et que les moindres délassements formaient une instruction publique. » ID.

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qu'on travaille d'après lui. « Charles XII avait envoyé secrètement plusieurs officiers en Asie et jusque dans l'Egypte, pour lever le plan des villes et l'informer des forces de ces Etats. » VOLT. « Je sais que vous vous amusez à dessiner l'architecture, et je vous ai choisi pour me leter un plan: c'est celui de notre college; examinez hien l'édifice, et, après en avoir exactement tracé l'enceinte, figurez-en l'élévation. MARK. Faire un plan, c'est le composer avec ce qu'on a recueilli en levant le plan, comme le dit fort bien l'Encyclopédie; mais ce peut être aussi le créer, le tirer de soi-même avant que l'oljet existe, auquel cas le plan n'est plus une cope, mais au contraire un modèle, un projet. « L'homme sage ne parle qu'à propos. Isaie l'appelle architecte. Il fait des plans pour longtemps: il les suit, il ne båtit pas au hasard. » Boss. a Faites des plans, voyez l'exécution; qu'on vous rende compte. » FÉN.

PLANCHE, AIS. Morceau de bois plat, mince et long.

La réjouissance est un divertissement très-vif, qui se marque par des fêtes, des cris, des acclamations de toute une réunion d'hommes. Mais ce Planche, étant du féminin, exprime le genre, qui la distingue par-dessus tout, c'est qu'elle n'est ais, étant du masculin, désigne une espèce. point une ressource pour tirer le sujet d'un état | Planche a une plus grande étendue de significafâcheux; au contraire, c'est une démonstration ion, forme des dérivés, se dit au figuré, et d'allégresse, un effet du besoin de redoubler une entre dans diverses locutions plus ou moins fajoie déjà existante en la faisant éclater. Si je ne milières; ais n'est employé, ou plutôt n'a été m'amuse, si je ne me divertis, si je ne me récrée, employé (car il a bien vieilli) que dans le sens je suis mal à l'aise; si je ne me réjouis, je ne littéral, et encore aux conditions suivantes. témoigne pas, je ne fais pas paraître assez l'aise Au lieu que le mot planche représente l'chjet que je ressens. Par rapport au bien-être, l'amucomme une matière dont on doit faire quelque sement, le divertissement et la récréation sont des chose, chez le marchand de bois ou dans l'atelier conditions, des moyens; la réjouissance est un du menuisier, l'ais, généralement plus petit et complément et une expression. Un jour de noces façonné, a une destination particulière; difest un jour de réjouissance (LES., VERT.). L'É-férence qui tient encore à celle du genre. Les glise interdit toutes les réjouissances pendant le relieurs, les imprimeurs, les fondeurs, les vicarême; on s'abstient alors de célébrer des ma- triers appellent du nom d'ais de petites planches riages (Boss.). « Le gouverneur du Milanez était qui leur servent à divers usages, à séparer, à dans Casal, où il faisait le carnaval à la mode du serrer ou à contenir. Ce n'est pas tout : pays, avec des réjouissances extraordinaires. » l'ais, latin assis, du grec at, couper, d'où ID. « C'étaient (les saturnales) des jours de ré-atívn, hache, se trouve plutôt placé de champ jouissances qui se passaient en festins. » ROLL, dans les emplois qu'on en fait et la planche, « Quand j'allais voir mes parents, on ne savait chose plane ou plate, est plutôt mise à plat et quelle fête me faire; et tous les jours que nous employée dans ce sens pour servir par sa surface passions ensemble étaient des jours de réjouis-même, comme dans une table, un pont, un sance. » MARM.

PLAN (LEVER UN), FAIRE UN PLAN. Former un plan, en être l'auteur.

Les deux expressions sont distinguées de la manière suivante dans l'Encyclopédie. « On lève un plan en travaillant sur le terrain, c'est-à-dire en prenant des angles et en mesurant des lignes,

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plancher. << Dans la torture les jambes du patient sont serrées entre des ais; on enfonce des coins de fer ou de bois entre les ais et les genoux, les os sont brisés. » VOLT. Qui donc suggera à l'habitant des rives de l'Orénoque l'usage de ces ais qu'il applique sur les tempes de ses enfants?» J. J.

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