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cident) quelque commerce. » ID. « La correspondance de Voltaire avec le prince royal de Prusse faisait du bruit alors. » J. J. « Durant les terribles chaleurs qu'il faisait alors. » ID. « Les guerres qu'il y avait alors en Asie. » FÉN. « Solon divisa les citoyens en trois différents ordres, selon les biens dont chaque particulier était alors en possession. ID. Pour lors est l'expression remarquable, de choix, celle qu'on préfère pour indiquer l'époque courte et précise à laquelle un événement particulier, unique, s'est passé : elle convient surtout dans le récit d'un fait avec le parfait défini. Tout est changé, dit pour lors un homme qui.... » MONTESQ. « Et comment, lui dis-je pour lors?... » ID. « L'histoire moderne nous fournit un exemple de ce qui arriva pour lors (après la mort de Lucrèce) à Rome. » ID. « Je fis pour lors si peu d'attention à son langage que...... » J. J. « Pour lors il n'y eut plus moyen de m'en dédire. ID. « Cette femme pour lors mourante. ID. Platon avait quarante ans pour lors (lors de son premier voyage en Sicile). » FÉN. Heureusement pour Platon, Annicéris de Cyrène s'étant trouvé pour lors dans le pays, il l'acheta au prix de vingt mines. » ID. Montesquieu a parfaitement observé cette distinction dans le passage suivant des Lettres persanes : « Monsieur, dit pour lors un ecclésiastique, vous parlez là du temps le plus miraculeux de notre invincible monarque y a-t-il rien de si grand que ce qu'il faisait alors pour détruire l'hérésie?»

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AU MOINS, POUR LE MOINS. En mettant les choses au plus bas, au minimum, pour ne pas dire plus.

Pour le moins est plus précis et suppose une estimation rigoureuse. Apprenez qu'il y a seize ans pour le moins que l'homme dont vous nous parlez périt sur mer. » MOL. Au moins se dit approximativement, sans qu'on soit bien sûr de son calcul. « Un tel livre doit donner au moins vingt mille francs de profit au libraire. » J. J.

5o A, EN.

A conserve son caractère de généralité et de vague par rapport à en dans les expressions synonymiques induire à erreur et induire en erreur, déterminer la croyance à quelque chose de faux. Induire en erreur désigne une action doublement remarquable, et par la part qu'y prend le sujet, car elle est toujours volontaire, et par ce qu'elle a de précis, de décidé, de complet, car induire en erreur, c'est mettre, établir dans l'erreur. « M. l'intendant ne saurait se justifier d'avoir manqué de parole à l'Académie, et de l'avoir induite en erreur par de fausses promesses. » MONTESQ. Induire à erreur peut signifier une action qui n'est pas volontaire, et, dans tous les cas, il signifie seulement l'action de mettre sur la voie de l'erreur, de manière à n'être que la cause éloignée de l'erreur. « Durant les temps d'ignorance, ce que l'âme connaissait de sa dignité et de son immortalité l'induisait le plus souvent à erreur. » Boss, « Il y a bien de la différence, dit Pascal, entre tenter et induire en erreur. Dieu tente, mais n'induit point en erreur. » Tenter, n'est-ce pas au moins induire à erreur ? Le même écrivain rétend que, quand même les schismatiques

feraient des miracles, ils n'induiraient point en erreur; » et l'ayant prouvé, il conclut donc le miracle d'un schismatique ne peut induire à l'erreur. » Comme si, fort de sa démonstration, il voulait dire qu'un tel miracle ne peut pas même causer indirectement l'erreur, y acheminer, y conduire.

De même, croire à n'équivaut pas, tant s'en faut, à croire en. Celui-ci marque une croyance plus intime, et accompagnée d'une grande confiance, d'une sorte d'abnégation: croire en Dieu, croire en J. C. « Il n'y a nulle raison de croire à l'Antechrist qui ne soit à croire en J. C.; mais il y en a à croire en J. C. qui ne sont point à croire à l'Antechrist. » PASC. Bossuet a bien visiblement observé la même distinction entre espérer à et espérer en dans l'exemple qui suit. « Il est bon d'espérer en Dieu, et non pas d'espérer aux hommes, parce que l'espérance que l'on a aux hommes ne nous montre que de fort loin la possession; et, au contraire, l'espérance que l'on met en Dieu est un commencement de la jouissance. »

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Enfin Bourdaloue, en employant à avec se fier et en avec se confier, donne à entendre que la différence entre à et en est analogue ou conforme à celle de se fier et se confier, comme cela est effectivement. Voy. se fier, se confier. « Fionsnous à la parole des saints, ou plutôt confionsnous en la parole de notre Dieu.»

A raison de, et en raison de, forment deux locutions prépositives entre lesquelles les dictionnaires ne mettent pas de différence. Il y en a une pourtant, et c'est la suivante. A raison est plus vague ou moins rigoureux et se dit plutôt par rapport à la qualité que par rapport à la quantité. « Il y a des gens capables d'adopter cette critique à raison de sa commodité. » J. J. En raison de, au contraire, est une expression plus stricte, plus exacte et presque toujours relative à la quantité. « L'imposition doit être faite en raison des biens des contribuables. » J. J. On paya cet ouvrier à raison de l'ouvrage qu'il avait fait (ACAD.), suppose qu'on a voulu récompenser la qualité aussi bien que la quantité de l'ouvrage. Mais il faudra dire: on paya cet ouvrier en raison du temps qu'il avait mis à cet ouvrage (ACAD.), le temps ne pouvant être considéré que sous le rapport de la quantité. Cette distinction est si vraie, qu'en raison de est seul usité en termes de science où il est besoin d'une grande exactitude, et que dans cette locution le mot raison peut recevoir des déterminatifs en raison directe, inverse, réciproque. Toutefois, à raison de se dit aussi, comme en raison de, en parlant de quantité ou de nombre. Alors s'il n'est pas plus vague, il est plus général qu'en raison de : il suppose une estimation, non pas spéciale et pour la circonstance, mais faite pour tous les cas : Il lui doit le change de dix mille francs, à raison de tant pour cent (ACAD.). On diralt bien, d'un autre côté: vous aurez part aux bénéfices en raison de votre mise.

Même différence entre à proportion de et en proportion de. A proportion de est plus vague et implique une simple approximation, une mesure peù rigoureuse. « Je suis sensible aux bontés de

M. de Buffon à proportion du respect et de l'es- | une circonstance particulière, il prend les armes time que j'ai pour lui. » J. J. « Les professions pour le renverser; mais un peuple, sans cesse ne paraissent ridicules qu'à proportion du sérieux inquiet et remuant, qui n'obéit qu'avec peine, est qu'on y met. » MONTESQ. « Un de nos amis que rebelle à son roi; les hérétiques sont rebelles à vous aimez à proportion des soins qu'il a de moi. >> Dieu (MONTESQ.). « Quiconque ne résiste pas SEV. En proportion de signifie suivant telle me- à ses volontés, il est injuste au prochain, insure exacte, et a rapport uniquement à la quan- commode au monde et outrageux à Dieu. » Boss. tité. Il ne dépense pas en proportion de son re- << Henri IV était indulgent à ses amis, à ses servenu (et non pas à proportion de son revenu, viteurs, à ses maîtresses. » VOLT. « Le chien se comme le dit à tort l'Académie). « La critique pique d'être soigneux et fidèle à son maître. » Laf. exige du talent en proportion de ce qu'il peut. 7° A, VERS. LAH.

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On a dit à comparaison avant de dire en comparaison : c'est une preuve entre mille que les langues deviennent de plus en plus précises. « La hauteur d'un puits et d'une tour est fort petite à comparaison du diamètre de la terre. » DESC. On disait aussi autrefois au même temps pour en même temps.

6° A, ENVERS. INGRAT, REBELLE, INJUSTE, INDULGENT, FIDÈLE, etc., à et envers.

Que la préposition à ait pour caractère ordinaire la généralité, le vague et l'indétermination, c'est ce que démontre tout ce qui a été dit jusqu'ici dans ce chapitre. Toutefois, ce caractère ne lui convient que quand, élevée au plus haut degré de l'abstraction, elle s'emploie comme une sorte d'auxiliaire à la suite des verbes et des adjectifs qu'elle joint à leur régime. Hors de là, considérée quant à sa valeur originelle et relativement au rapport qu'elle exprime proprement, elle a un sens précis, et c'est par cette précision même qu'elle se distingue d'autres prépositions, de vers, par exemple.

A et vers servent également à distinguer l'endroit où est une chose ou bien où aboutit une action; mais vers ne le désigne qu'à peu près. Cette étoile est située vers le nord signifie qu'elle est plutôt dans cette partie du ciel que dans une

Chacun de ces adjectifs avec à marque une manière d'être ou une disposition vague, générale, habituelle ou peu remarquable. Aussi est-ce toujours à qu'ils prennent avec les noms de choses, c'est-à-dire quand il s'agit de désigner les sentiments qu'on éprouve, ou d'exprimer comme on est à l'égard des choses. Ingrat à des bontés (FÉN., VOLT.), à des faveurs (MASS.), à un bien-autre, qu'elle est aux environs du nord. Quand fait (Boss.). Rebelle aux lois (J. J.), à la justice, aux ordres ou à la volonté de quelqu'un (ACAD.). << Cela montre combien la réforme était indulgente à ces pieux assassinats.» Boss. Fidèle à sa vocation (BOURD.), à sa parole ou à l'amitié (ACAD.). Les mêmes adjectifs s'emploient avec envers pour annoncer quelque chose de plus spécial, de plus significatif, de plus extraordinaire, et, par exemple, pour montrer de quelle manière on est disposé, non plus à l'égard des choses, mais à l'égard des personnes. Ingrat envers son bienfaiteur (ACAD.), envers Dieu (PASc., BOURD., FÉN.). Rebelle envers son roi légitime (VOLT.). La nature envers vous me semble bien injuste. (Le Chêne au Roseau). LAF.

on dit qu'elle est située au nord, le nord est considéré, non plus comme une grande division du ciel, mais comme un point fixe tout près duquel est l'étoile en question. Viens vers moi, veut dire seulement viens de mon côté, et ne va pas d'un autre, approche-toi de moi. Viens à moi, indique la personne qui parle comme un terme ou un point précis sur lequel elle commande de se diriger.

Ces deux prépositions appliquées au temps different de même. Les historiens font remonter sa naissance vers l'année 1500, c'est-à-dire à peu près à cette année, environ l'année 1500, comme on disait autrefois. A notre heure dernière, indique un moment trop court et trop bien déter<< De cette façon l'Église a cru être assez indul-miné pour qu'on puisse y substituer, dans aucun gente envers les homicides. » PASC. « Il ne suffisait pas que Dieu parût fidèle envers lui (S. Ignace de Loyola). » BOURD. « La charité nous rend fidèles envers tout le monde. » Nic.

cas, vers notre heure dernière.

A, ad, indique le point, mais le point fixe, précis, circonscrit, où l'on tend. Vers, de versus, tourné du côté de, ou simplement du côté de, Avec les noms de choses, il n'y a point de dif- exprime plutôt la situation où le côté par rapficulté; c'est toujours de la préposition à qu'il port à un autre ou à d'autres côtés qu'il exclut : faut se servir. Mais avec les noms de personnes, ce qui est vers l'orient n'est point du côté de envers n'est pas toujours de rigueur. Quelquefois l'occident, du midi ni du nord, sans plus de on peut et on doit dire, ingrat, rebelle, injuste, détermination. C'est pourquoi vers s'emploie parindulgent, fidèle à quelqu'un plutôt que envers ticulièrement bien quand il s'agit d'un lieu qui, quelqu'un. C'est quand on veut indiquer à l'égard | dans l'usage ordinaire, est opposé à d'autres: de quelqu'un un sentiment vague, peu marqué, vers l'orient, vers l'occident, etc.; voyez ce pascomme est celui qu'on éprouve pour les choses, sage dans tel livre, vers le commencement, vers ou bien habituel et par cela même peu frappant. le milieu. Vers contient toujours cette idée d'opL'empereur d'Allemagne Henri IV dit haute-position à d'autres côtés ou à d'autres directions, ment que le pape Grégoire VII ne pouvait être ingrat à son bienfaiteur. » VOLT. « Quand l'allusion se présente d'elle-même, ce serait être ingrat à la Fortune que de la rejeter. » VAUG. Un sujet est rebelle envers son roi, quand, dans

«

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et à, jamais; celui ci est absolu. Un médecin ou
un marchand, en concurrence avec d'autres,
dira: Venez vers moi. Mais on dira à un homme
qui n'a de secours à attendre d'aucune part:
| Venez à moi; ce qui ne supposera pas, comme

dans le cas précédent, la défense d'aller d'autre la même différence trouvée entre à et avec, côté. Un vaisseau se dirige vers l'orient, parce entre à et pour, entre à et sur, se retrouve entre qu'ainsi il arrivera plus tôt au terme de sa course de et avec, entre de et pour, entre de et sur. que s'il allait vers l'occident, etc. On se dirige à Quelques exemples suffiront pour le démontrer. un lieu, par des raisons tirées du terme luiDe et avec, comme à et avec, désignent égalemême : un vaisseau va au nord, l'autre au midi, ment l'instrument ou la matière dont on se sert parce qu'ils espèrent tirer de plus grands avan- pour faire quelque chose. Frapper du pied ou tages de leur commerce, l'un avec le nord, l'autre avec le pied, lancer de la main ou avec la main, avec le midi. On lève les yeux ou les mains vers payer de ses deniers ou avec ses deniers, comle ciel toutes les fois qu'on a quelque raison pour bler un fossé de pierres ou avec des pierres. De ne pas les abaisser vers la terre; on lève les yeux est pour l'ordinaire, l'habituel; avec, pour les ou les mains au ciel pour implorer l'assistance cas particuliers, singuliers, remarquables: on de Dieu, pour adresser au ciel quelque prière. frappe du pied la terre, et avec le pied un objet Après avoir considéré les divers éléments, pour qu'on rencontre, une bête venimeuse, le haut en tirer des preuves de l'existence de Dieu, Fé- d'une chaise ou d'une table; on comble un fossé nelon continue en disant : « Il est temps de lever de pierres, de décombres, et quelquefois, pennos yeux vers le ciel.» « Tout près de là était un dant la guerre, on comble les fossés avec des cahomme qui, élevant les yeux au ciel, disait : davres. Ou bien encore on se sert d'avec pour Dieu bénisse les projets de nos ministres!» spécifier, dans le genre d'instrument et de maMONTESQ. Que de voix plaintives s'élèvent au tière généralement employés, l'espèce ou l'indiciel contre ces hommes! » MASS. vidu qu'on emploie dans un cas particulier. << S'il avait eu une fronde, le sauvage lancerait-il de la main une pierre avec tant de roideur?» J. J. Nous lançons mieux des pierres avec la main droite qu'avec la main gauche. On paye de ses deniers, et avec les premiers deniers de sa recette. On distingue les choses les unes des autres, comme on les compare les unes aux autres, sans grand effort, sans attention, sans difficulté, à première vue; et on les distingue les unes d'avec les autres expressément, en démêlant, en déterminant, en marquant fortement leurs traits caractéristiques; c'est la différence de l'homme qui voit et représente aux autres ses perceptions, à l'homme qui regarde et rend compte aux autres de ses observations.

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La distance est si grande entre à et vers dans à la fin et vers la fin, qu'on peut mettre entre deux une autre préposition, sur: sur la fin. Quand on est à la fin de quelque chose, on a fini, on n'a plus rien à faire; quand on est ters la fin, on est déjà loin du commencement, on a même passé le milieu, mais rien de plus; quand on est sur la fin, ou va finir, on voit le terme tout près de soi, on y touche, on est presque dessus. Une discussion s'élève vers la fin d'un repas; c'est une vive querelle sur la fin du repas; et, à la fin du repas c'est une rixe, on sort de table pour se battre. « Elle me prie à la fin de son billet de lui renvoyer ce livre, » J. J., implique qu'après cette prière le billet ne contient plus rien. « J'avais fait, vers la fin de l'É- D'un autre côté, de et pour, dans moyen mile, une sortie contre cette cruauté, » J. J., in- de parvenir et moyen pour parvenir, sont entre dique seulement que cette sortie se trouve dans eux comme à et pour, dans les expressions synola dernière partie de l'ouvrage, et non pas dans nymiques ci-dessus examinées. Vous direz d'une la première ni dans celle du milieu. « Vous me manière toute générale il ne néglige aucun reprochez de n'avoir pas fait changer de système moyen de parvenir; et d'une manière particulière: à Wolmar sur la fin du roman, » J. J., c'est-à-c'est là un excellent moyen pour parvenir. On dire au moment ou sur le point de le finir, quand trouve un inoyen de parvenir, on cherche un le roman approche du terme. - D'ailleurs sur a❘ moyen pour parvenir. Les mêmes nuances peucela de particulier, qu'il désigne, non pas la si- vent servir à distinguer occasion de et occasion tuation comme les deux autres, mais l'approxi-pour, soin de et soin pour le soin que prenmation ou l'action d'approcher : il n'est appli- nent tous les peintres de placer leurs tableaux cable qu'aux choses qui se font et non aux choses dans un jour avantageux ne contribue pas peu à qui sont. Ainsi on ne dit pas sur le milieu d'un les faire valoir; Cicéron propose, à l'imitation de champ ou du ciel, comme on dit au milieu ou l'historien, pour la disposition des faits, « le soin vers le milieu d'un champ ou du ciel. A la fin ou qu'un homme de bon goût prend pour placer de vers la fin d'un livre se trouve telle chose; sur la bons tableaux dans un jour avantageux. » FÉN. fin d'un livre, l'auteur fait telle chose, l'action change ou se modifie de telle manière. Il est sur son départ, et non à ou vers son départ, parce qu'il s'agit ici d'une action pure et non d'une chose.

8° DE et AVEC, DE et POUR, DE et SUR. Comparativement l'une à l'autre, les deux prépositions à et de sont, celle-ci plus déterminative, celle-là plus génerale. Mais à l'égard des prépositions spécificatives proprement dites, c'està-dire de toutes les autres, elles ont un sens également vague et indéfini. Ainsi, à et de sont dans le même rapport relativement à par; et

SYN. FRANC.

En conversation on parle, on discourt de choses et d'autres, de nouvelles, de modes, de voyages: un orateur parle, discourt, sur tel ou tel sujet, un savant sur des matières plus ou moins difficiles. Faire un traité d'horticulture et un traité sur la culture du dahlia. « Tous ceux qui se sont mêlés d'écrire ou de la religion ou de la philosophie se sont servis d'Homère et de ses livres.» MONTAIGN. Pour bien écrire sur la religion et sur la philosophie, il faut de longues études, une rare application et comme une vocation particulière. Une assemblée est instituée pour délibérer de telles ou telles choses, ou elle déli

bère de telles ou telles choses d'ordinaire, suivant le cours naturel des affaires; elle délibère sur une chose dans un cas particulier, ou sur une chose qu'on spécifie ou qui est remarquable sous quelque rapport, imprévue, importante, capable de causer de longs débats. On félicite quelqu'un d'avantages communs, qui lui sont advenus, qui n'ont pas dépendu de son mérite propre, et, par exemple, d'un changement de fortune par suite de succession (LES.). « Je vous félicite du plaisir que vous avez eu de faire le voyage avec M. le comte d'Egmont. » MONTESQ. On félicite quelqu'un sur ses qualités, sur ses talents et sur ce qu'ils lui ont valu ou attiré d'heureux, sur le succès de ses travaux (FÉN.), de ses sermons (LES.), sur son goût (VOLT.), sur l'agrément et sur la politesse de son langage (LABR.). Congratuler s'employait aussi autrefois de la même manière, c'est-à-dire avec de dans les cas ordinaires, qui ne méritaient pas qu'on insistât, lorsqu'il s'agissait d'un pur bonheur. « Quand on congratulait Tite d'une conquête si glorieuse (celle de la Judée) : Non, non, disait-il, ce n'est pas moi qui ai dompté les Juifs; je n'ai fait que prêter mon bras à Dieu, qui était irrité contre eux. » Boss. Mais congratuler sur était une expression de choix, réservée pour les cas où il fallait louer la personne elle-même, ses mérites ou son habileté. « Un flatteur congratule Théodème sur un discours qu'il n'a point entendu, et dont personne n'a pu encore lui rendre compte. » LABR.

9o POUR et AFIN, AVEC et PAR.

Quand à et de sont synonymes, on peut aisément réduire chacun à son rôle précis et véritable en mettant entre eux l'opposition de la généralité à la spécialité. Il en est de même quand à et de se trouvent synonymes, chacun de son côté, des prépositions spécificatives, par, avec, pour, etc.; le caractère de la généralité convient aux premières, et aux dernières celui de la spécialité. Mais il y a plus: les prépositions spécificatives sont-elles elles-mêmes synonymes entre elles, alors leur différence se trouve encore dans cette même opposition: l'une des deux prépositions est plus générale, l'autre plus spéciale. De sorte qu'on peut établir d'une manière presque absolue la règle suivante pour la distinction des prépositions à qui il arrive d'exprimer le même rapport, c'est-à-dire d'être synonymes, c'est que l'une d'elles est pour les cas ordinaires, habituels, communs, l'autre pour les cas extraordinaires, particuliers, remarquables. Après tous les détails donnés dans ce chapitre et dans les trois qui précèdent, il suffira d'apporter seulement deux exemples pour confirmer cette théorie.

POUR et AFIN signifient l'un et l'autre qu'on fait une chose ou qu'une chose est faite en vue d'une autre.

En ce sens, pour est, par rapport à à, l'expression spéciale, particulière, remarquable: travailler à s'instruire, travailler pour s'instruire. Mais il devient à son tour l'expression générale, ordinaire, vague, par rapport à afin: travailler pour s'instruire, travailler afin de s'instruire. Il

marque une fin, une intention, moins particu lière pour l'individu ou pour la circonstance. Toutes les femmes se parent pour aller au bal; mais, parmi elles, il y en a quelques-unes qui se parent afin de faire des conquêtes. Vous mangez pour vivre, et dans la maladie vous mangez de préférence de certains aliments afin de rétablir votre santé.-Et non-seulement pour exprime plus vaguement, plus faiblement l'intention, mais encore il semble être tout objectif et n'avoir rapport qu'au résultat qu'on a en vue de produire; il pourrait être remplacé par, à l'effet de; tandis que afin, tout subjectif, annonce expressément le dessein d'arriver à un certain but et se traduirait plutôt par, en vue de. On dit faire ses efforts, ou s'efforcer pour, quand on ne considère que l'effet qu'on s'efforce de produire, et faire des efforts afin, quand on a surtout égard au dessein, à l'intention, au désir qu'on a d'atteindre un but. Mais plus on fait d'efforts afin de le bannir, Plus j'en veux employer à le mieux retenir.

MOL. (Orgon parlant de Tartufe).

Dans sa démonstration de l'Existence de Dieu. Fénelon, voulant montrer que tout dans l'univers manifeste un dessein, un plan, une intention, dit de chaque chose, elle est arrangée de telle et telle façon, afin que... On dira au contraire, pour faire telle chose, il faut, il est nécessaire, il suffit que..., parce qu'alors on considère surtout la possibilité et la facilité du résultat indépendamment de l'intention où l'on est de produire. Ainsi, afin signifie une intention particulière, ou particulièrement l'intention. Il signifie une fin particulière, une fin qui n'est pas celle qu'a tout le monde en faisant la chose, une fin à soi, secrète, fine, peu commune, détournée, éloignée, en un mot, qui se distingue des fins ordinaires. « Le marchand fait des montres pour donner de sa marchandise ce qu'il y a de pire: il a le cati et les faux jours, afin d'en cacher les défauts et qu'elle paraisse bonne; il la surfait pour la vendre plus cher qu'elle ne vaut; il a des marques fausses et mystérieuses, afin qu'on croie n'en donner que son prix. » LABR. << Nous nous étions hâtés de venir attaquer Salente pour nous défaire du plus faible de nos ennemis, afin de retourner ensuite nos armes contre cet ennemi plus puissant. » FÉN.

AVEC et PAR expriment le rapport de l'instrument ou du moyen employé pour parvenir au but proposé, avec l'agent qui emploie cet instrument ou ce moyen.

Mais avec est l'expression spéciale, et partant il désigne un rapport plus étroit, plus immédiat, un instrument précis, réel, physique; par est l'expression générale, ce qui fait qu'il signifie un rapport plus indirect ou plus éloigné, un moyen abstrait, idéal. Blair (Rhétorique, 3° partie, lecture X), à qui nous empruntons cette distinction, la développe et la justifie de la manière suivante : << On tue un homme avec une épée, il meurt par violence; un criminel est garrotté avec une corde par le bourreau. On trouve, dans un passage de l'Histoire d'Écosse, par Robertson, un exemple sensible de la différence qui existe entre ces deux particules. Un ancien monarque écossais demandait à ses nobles, par quel droit ils possédaient

leurs terres; les nobles se levèrent, et tirant leurs épées: « C'est par elles, s'écrièrent-ils, que nous les avons acquises, c'est avec elles que nous les défendrons. Par elles indique que leur épée fut un des moyens par lesquels ils acquirent leurs terres, lorsqu'ils employèrent la force pour s'en rendre les maîtres, et avec elles signifie que leur épée est l'instrument direct et immédiat qu'ils sont prêts à employer pour les défendre.

sous le point de vue moral, comme une violation; attenter sur ou contre la vie de quelqu'un signifie physiquement et rigoureusement porter la main, sur lui, ou du moins c'est le sens propre d'attenter sur, et, de son côté, attenter contre se distingue par un caractère tout particulier. - On attente sur et contre les personnes; et quand on attente sur et contre les choses, cela s'entend d'une maniere plutôt physique et réelle que mo

10° CONTRE. -— CONTRE et A, CONTRE et rale et abstraite. SUR, ETC.

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Voici maintenant la différence d'attenter sur et d'attenter contre. Attenter sur, prendre sur, empiéter sur, est d'un usurpateur, d'un homme injuste; attenter contre, s'élever et marcher contre, sans crainte ou sans respect, est d'un audacieux ou d'un sacrilége. On attente proprement sur les droits. « Attenter sur la bourse du prochain. LES.

Amour m'a fait défense

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(Psyché.) LAF.

« Ozias attenta sur les droits sacrés du sacerdoce.» Boss. On attente proprement contre ce qu'il y a de plus élevé et de plus vénérable, et cette expression donne l'idée de marcher contre, ouvertement, hardiment, malgré les obstacles, l'opposition ou le caractère d'inviolabilité. « Attenter contre l'État, contre son roi, contre Dieu. » Boss. « Richelieu fit accuser les conspirateurs de vouloir attenter contre le roi même. » VOLT. « Si un prêtre osait parmi nous attenter quelque chose de semblable à l'action de Joad contre les personnes du sang royal, il serait condamné au dernier supplice. » ID. « Ceux qui s'emparaient des droits régaliens voulurent épouvanter par le supplice de la roue quiconque oserait attenter contre eux. » ID. « Garde-toi bien, dit l'Amour à Psyché, d'attenter contre ta vie !» LAF.

A et de sont les seules prépositions dont nous ayons longuement déterminé la valeur en les considérant, dans des chapitres distincts, à la suite de verbes qui s'emploient aussi sans préposition. Exemples: prétendre, toucher, suppléer, croire quelque chose; prétendre, toucher, suppléer, croire à quelque chose : désirer, espérer, préférer faire une chose et de faire une chose, hériter une chose et d'une chose, traiter D'attenter sur des jours qui sont en sa puissance. un sujet et d'un sujet. On pourrait faire le même travail sur d'autres prépositions, sur contre, par exemple: on dit également combattre quelqu'un ou quelque chose, et combattre contre quelqu'un ou quelque chose. Après quoi, le sens de la préposition étant bien constaté, il serait facile de la distinguer soit de à et de de, soit de celles des prépositions qui sont spécificatives. Ainsi on apercevrait plus aisément la différence d'attenter contre par rapport à attenter à et à attenter sur, celle d'entreprendre contre par rapport à entreprendre sur, et ainsi des autres exemples, s'il y en a. COMBATTRE quelqu'un ou quelque chose, COMBATTRE CONTRE quelqu'un ou quelque chose. Contre marque opposition: combattre contre se doit donc dire, quand il s'agit d'exprimer une opposition forte, extraordinaire, acharnée, la lutte d'un homme qui combat le sachant et le voulant, d'une manière ouverte et déclarée, qui ne craint pas de s'élever et de se porter contre. Cette expression dénote naturellement de la part du sujet une grande hardiesse ou de l'audace, et de la part de la personne ou de la chose combattue une grande résistance et la difficulté de la vaincre. Les Titans combattirent contre Jupiter. << Suivant les traditions de l'antiquité, les pre-nous entreprenons sur ses droits, nous nous donmiers héros combattirent contre les lions et contre les sangliers avec des massues. » VOLT. « Par ces flèches tu seras invincible, comme je l'ai été, dit Hercule à Philoctète, et aucun mortel n'osera combattre contre toi. » FÉN. « Semblable à un rocher contre lequel les vents combattent en vain, Philoclès demeurait immobile. » ID. « Combattre contre un plus puissant que soi. » MAL.

ATTENTER À, ATTENTER SUR, ATTENTER CONTRE. Commettre un attentat.

▲ est une préposition générale, indéterminée, vague; au lieu que sur et contre sont des prépositions spécificatives. Attenter à sera donc l'expression générale, affaiblie, idéale, abstraite : attenter à l'honneur, à la probité, à la pudeur, à la liberté, mais non pas attenter à une personne. D'autant que, suivant l'étymologie de la préposition à, attenter à doit désigner une tentative avec un plus ou moins grand éloignement du but. Attenter à la vie de quelqu'un représente l'attentat

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ENTREPRENDRE SUR, et ENTREPRENDRE CONTRE different absolument comme attenter sur et attenter contre.

Entreprendre sur exprime une simple usurpation; c'est, sans aucun titre et violemment, s'arroger un droit ou une autorité. « En jugeant du prochain nous attentons sur l'autorité de Dieu,

nons ou nous prétendons nous donner un pouvoir qu'il s'est réservé, et qui lui est propre.» BOURD. « L'adultère entreprend sur la femme de son prochain sans autre titre que sa convoitise.» Boss. « Chez les Grecs l'homme civil n'était autre chose qu'un bon citoyen qui se laisse conduire par les lois, et conspire avec elles au bien public sans rien entreprendre sur personne. » ID. Entreprendre contre se dit en parlant d'une entreprise ou d'une usurpation indigne, audacieuse, insolente. « La puissance des démons les rend superbes et audacieux : ils entreprennent contre le fils de Dieu même; peut-on voir une audace plus emportée ? » Boss. « L'homme, ver de terre, croit que le presser tant soit peu du pied, c'est un attentat énorme, pendant qu'il compte pour rien ce qu'il entreprend hautement contre la souveraine majesté de Dieu et contre les droits de son empire!» ID. « Ce prétendu attentat d'un soldat chrétien contre Julien eût passé pour une entre

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