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ou ne ferait pas cela pour un royaume.
surte, le mot d'empire est, en général, plus
grand, plus noble que celui de royaume. Bour-
daloue dit à Louis XIV, à la fin d'un sermon:
« Ces succès éclatants font de votre royaume le
plus florissant empire du monde. »

α

Par de purement temporel ou chronologique; il commence, il finit, il dure tant d'années, et il est remarquable par les événements qui s'y passent, glorieux, paisible, orageux, etc. « On voit dans l'Apocalypse le règne de J. C. avec ses saints qu'il associe à son empire. » Boss. « C'est de là que les protestants concluent que le règne de l'Antechrist commence alors.... La prostituée ne peut donc être autre chose que la ville de Rome pillée, dépouillée de ses provinces et de son empire par Alaric et les autres rois. » ID. « Ce n'est ni les longs règnes, ni leurs fréquents changements, qui causent la chute des empires, c'est l'abus de l'autorité. » GIR.

Empire est le mot propre en parlant des peuples: l'empire des Assyriens, l'empire des Perses, l'empire des Romains. C'est qu'on les peut considérer et qu'on les considère sous le rapport de leur puissance, qui, un moment, a tout éclipsé, tout subjugué, tout réglé souverainement, et s'est étendue plus ou moins loin. A l'égard des princes, on doit préférer le mot règne, qui les

Plusieurs royaumes peuvent être compris dans un empire ou être formés de ses débris. « Nous avons très-peu de choses certaines touchant le premier empire des Assyriens.... On voit durer trop longtemps les petits royaumes dont il le faudrait composer. Boss. L'empire d'Alexandre et celui des Romains s'étant formés de plusieurs royaumes, nous jugeons qu'il en a été de même de celui d'Assyrie.» COND. « Charlemagne partage ces vastes provinces qui composent son empire, et qui étaient autant de royaumes, entre ses trois fils. VERT. « Les royaumes formés du débris de l'empire d'Alexandre. » Boss. Les royaumes sortis du débris du premier empire des Assyriens.» ID. Ce grand empire (l'empire romain), qui a englouti tous les empires de l'univers, et d'où sont sortis les plus grands royau-représente comme ayant occupé le trône de telle mes du monde que nous habitons. » ID. « Un empire (l'empire romain), tout détruit qu'il est, attirera toujours les regards de vingt royaumes élevés sur ses débris et dont chacun se vante aujourd'hui d'avoir été une province des Romains et une des pièces de ce grand édifice. » VOLT. Des débris de ce vaste empire (d'Assyrie) se formèrent trois grands royaumes. » ROLL.

année à telle autre. Sous le règne de Gallien, Dieu fit fondre sur l'empire romain tout ce qu'on peut endurer de calamités (Boss.). L'époque glorieuse de l'empire des Babyloniens est le règne de Nabuchodonosor; celle de l'empire des Perses est le règne de Cyrus; celle de l'empire des Grecs est le règne d'Alexandre; et celle de l'empire des Romains est le règne d'Auguste. GIR. « Ctésias Les enfers sont appelés poétiquement le écrivit l'histoire des Assyriens et des Perses en royaume des ombres ou de la nuit (FEN.), c'est-vingt-trois livres. Dans les six premiers, il traià-dire que les ombres et la nuit y règnent, en sont en possession, comme un roi de son royaume. C'est aussi le royaume de Pluton (ID.); mais on le nomme l'empire de Pluton, quand on veut, ou en faire concevoir la vaste étendue, ou représenter le dieu qui y règne comme redoutable, comme y exerçant un pouvoir et y donnant des ordres rigoureux, ce qu'on ne peut dire ni des ombres ni de la nuit. « Télémaque entendit l'empire souterrain mugir. » FÉN. « Il dit à Pluton: Je viens vous demander si mon père est descendu dans votre empire. » ID.

EMPIRE, RÈGNE. Ces deux mots signifient un pouvoir de gouvernement ou de souveraineté.

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tait de l'histoire d'Assyrie, et de tout ce qui y était arrivé avant l'empire des Perses; et depuis le septième jusqu'au treizième inclusivement, rapportait tout ce qui regarde les règnes de Cyrus, de Cambyse, du Mage, de Darius et de Xerxès. » ROLL.

Le mot d'empire s'applique bien au gouvernement domestique, au lieu que celui de règne est exclusivement réservé pour le gouvernement public: l'empire des pères, des maris, et jamais le règne. C'est qu'il s'agit ici d'exprimer la manière plus ou moins absolue et plus ou moins étendue dont est exercée une puissance, et point du tout le temps plus ou moins long pendant lequel on l'exerce.

Mais empire a pour accessoires les idées de puissance et d'étendue, comme on le voit par ses Au figuré, la différence est palpable, et entièautres acceptions, suivant lesquelles il est syno-rement conforme ou plutôt identique à celle qui nyme de domination et d'autorité, d'une part, vient d'être reconnue au propre. On dit l'empire et de royaume ou d'État, d'autre part. Règne, de la vertu, de la raison, de la mode, des préjud'où vient le verbe régner, n'a rien de distinctif gés, des arts, etc., pour marquer leur dominaque son rapport à la durée, au temps pendant tion plus ou moins forte et plus ou moins étenlequel le souverain, le chef de l'empire ou du due: Qui peut se soustraire à l'empire des royaume, règne, exerce le pouvoir. « Un empire préjugés ? Mais on dit le règne de la vertu, de la est plus ou moins puissant ou vaste; un règne est raison, de la mode, des préjugés, des arts, etc., plus ou moins long. On dit l'empire de J. C. sur lorsqu'on veut parler du temps pendant lequel tous les peuples, et son règne éternel (Boss.). Il ils sont en honneur, en crédit, en vogue, et restait encore, du temps de Tibère, des monu-gouvernent, pour ainsi dire, les hommes : Quand ments qui marquaient l'étendue de l'empire de Sésostris (ID.); de grands ouvrages ont rendu le règne de Salomon immortel (ID.).

L'empire est une chose; on le reçoit, on le perd, on y associe quelqu'un ou on l'en dé pouille. Le règne est une époque, quelque chose

finira le règne des préjugés ? Quand arrivera celui de la vérité ?

EMPLOI, MINISTÈRE, CHARGE, OFFICE, FONCTION. Partie ou branche de service confiée ou accordée à quelqu'un.

Emploi marque l'application à un certain tra

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« Les Suisses s'offensent d'être dits gentilshommes et prouvent la roture de race pour être jugés dignes de grands emplois. » PASC. « Je n'ai pas pour mission de former des hommes. J'espère que de plus dignes mains se chargeront de ce noble emploi.» J. J. « Protėsilas vous loue, il vous estime, il vous croit digne des plus importants emplois. » FÉN. « Choisissez quelque fille que vous croirez capable d'être formée : songez de bonne heure à la former pour cet emploi (de gouvernante). » ID.

Le ministère suppose un maître dont on est l'agent, qu'on représente et auquel on obéit. C'est l'emploi d'un serviteur.

Phérore fut chargé (par Hérode) du ministère affreux D'immoler cet objet (Mariamne) de ses horribles VOLT.

feux.

PASC. Mais l'office est quelque chose de moin considérable, c'est une charge subalterne: autrefois on disait avoir une charge de président an parlement, et un office de greffier. D'ailleurs, presque toujours l'office est une petite charge auprès du prince ou dans la maison du prince, une charge domestique. Il y avait anciennement dans les cours des offices de bouffon (MAL.). « Le jour commençait à paraître; les femmes allument du feu (dans le palais de Pénélope) et se distribuent dans les différents offices dont elles étaient chargées. » FÉN.« On sait quel crédit les empereurs donnaient à leurs domestiques, que leurs offices appelaient plus souvent près de leurs personnes. » Boss. Tigrane ne paraissait jamais en public sans avoir quatre rois.... Il en avait toujours quelques-uns à le servir aux offices les plus bas. » ROLL.

Fonction, de fungi, s'acquitter, exécuter, est un mot distributif. Il représente seulement un acte, une opération de l'emploi, du ministère, de la charge ou de l'office; remplir les fonctions de son emploi, de son ministère, de sa charge, de son office. « La principale fonction de cet emploi consiste en.... » ACAD. « Faire les fonctions de son ministère, de sa charge. » ACAD. « Pélopidas éleva à une grande dignité cet office (de téléarque), dont les fonctions ne consistaient qu'à faire nettoyer les rues, emporter les fumiers et prendre soin des égouts.» ROLL.

« Tu m'as confié tes femmes. J'ai commencé mon ministère par les châtiments. » (Sélim à Usbeck.) MONTESQ. « Paul, destiné par J. C. à être le prédicateur des gentils, avant que d'être em- Emploi est du style ordinaire. Ministère, latin ployé à ce ministère et que d'exercer pleinement ministerium, appartient toujours au langage son apostolat, va voir Pierre pour le contem-soutenu, particulièrement à celui de l'Eglise. pler. Boss. J. C. dit à son père: Vous m'avez envoyé pour réconcilier le monde, et j'envoie mes disciples avec la parole et le ministère de la réconciliation pour accomplir mon ouvrage.»

ID.

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Charge signifie fardeau. Une charge est un emploi public, important, qui fait qu'on porte le poids des affaires et qu'on joue un grand personnage. Solon donna entrée dans les affaires publiques à tout le peuple, excepté aux artisans qui ne vivaient que de leur travail. Ceux-là étaient exclus des charges. » FÉN. « Les hommes aiment les grandes charges, les honneurs, le commandement. » MAL. «< Plutarque eut dans sa patrie les charges les plus considérables. » ROLL. Il y a encore l'orgueil de la vie, l'ambition, les charges, les grands commandements, qui semblent rendre la vie, pour ainsi dire, plus vivante, parce qu'on devient un homme public. » Boss. «Plusieurs rois d'Europe voulant se rendre despotiques ont réuni en leurs personnes toutes les grandes charges de l'Etat. » MONTESQ. « A Rome, les affranchis pouvaient avoir part aux charges. » ID. « Convient-il que les charges soient vénales? Non, dans les États despotiques; oui, dans les Etats monarchiques. » ID.

Office, du latin officium, devoir, exprime une obligation, c'est-à-dire quelque chose d'onéreux comme la charge. Office et charge se ressemblent beaucoup ils désignent l'un et l'autre des emplois publics qui attirent plus ou moins d'honneur. « Qu'on ne se moque pas de ceux qui se font honorer par des charges et des offices. »

Charge et office ne se disent plus guère, office surtout, parce qu'ils ont rapport à un passé politique qui est loin de nous. Fonction est comme emploi, d'un usage fréquent; mais, outre qu'il est un peu plus relevé, il exprime quelque chose de partiel et se met d'ordinaire au pluriel.

EMPREINDRE, IMPRIMER. Appliquer un corps sur un autre de manière que le premier modifie le second et laisse en lui une marque de son action.

Mais on empreint avec le cachet ou le burin c'est-à-dire de telle sorte qu'il reste une image dans le corps modifié, ou qu'il reçoive une trace profonde. Au contraire, il se peut qu'en imprimant on produise une simple marque, au lieu d'une image, et, d'autre part, l'impression est plus légère, plus faible, plus superficielle que l'empreinte.

1° Quand une chose est empreinte sur une autre, la première est représentée dans la seconde par une image. C'est ainsi que des pas sont empreints sur la terre molle, sur la neige ou sur le sable; c'est ainsi que l'effigie du prince est empreinte sur la monnaie. Mais ce qui résulte de l'action d'imprimer peut n'être pas une image ou une figure vous imprimez un mouvement à un corps. « Nous ne trouvions aucun champ où la main du diligent laboureur ne fût imprimée. » FÉN. Une estampe est bien ou mal empreinte (VOLT.); un livre est bien ou mal imprimé.

2o Ce qui est imprimé sur une chose, c'est-àdire ce qui y est mis par la pression, tient moins

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que ce qui y est empreint, c'est-à-dire gravé. Les idées des choses que nous avons perçues sont imprimées pour quelque temps dans nos esprits; mais « l'idée de celui qui nous a créés est empreinte profondément au dedans de nous; rien n'est gravé plus avant dans le cœur de l'homme.» Boss. Les objets se trouvent un instant imprimés dans la glace devant laquelle ils paraissent (Boss.); il y a des lois empreintes dans toutes les têtes et dans tous les cœurs, comme il y en a de gravées sur des tables (VOLT.). Pour ôter ce qui est imprimé, il suffit d'effacer; pour faire disparaître ce qui est empreint, il faudrait briser ou

arracher.

« Il s'est acquitté de cette commission avec zèle et empressement. » D'AL. « Le peuple s'acquitta de ce devoir avec un zèle et un empressement bien louables. » ROLL.

Toutefois, il se peut aussi que l'empressement, qui est extérieur, ne soit qu'extérieur, que, au lieu d'être causé par le zèle, il n'en soit qu'une vaine démonstration.

D'un zèle simulé j'ai bridé le bon sire; Avec empressement je suis venu lui dire, S'il ne songeait à lui, que l'on le surprendrait. (Mascarille dans l'Étourdi.) MoL. Ainsi, en général, l'empressement peut avoir dila politesse; le zèle n'en a jamais qu'un, le sucvers motifs, le caractère, l'intérêt, la flatterie, cès ou la prospérité de la chose ou de la personne qui en est l'objet. On a de l'empressement pour une personne qu'on veut gagner, et du zèle pour une personne ou pour une chose qu'on aime pour . elle-même.

Enfin, empreindre est tout relatif à l'effet, à l'état, et la preuve c'est qu'il ne se dit guère qu'au participe passé; imprimer, au contraire, s'emploie à tous les temps à l'actif, et indique particulièrement l'action même. Cette différence est sensible et importante pour les substantifs empreinte et impression. L'impression des plantes et du corps des poissons sur certaines matières d'ordinaire, devient tout à coup, par l'effet de ÉMU, TROUBLÉ, AGITÉ. Une eau, tranquille primitivement molles a produit des empreintes. certaines actions, émue, troublée, agitée. Ces « Dans le cerveau de l'éléphant plusieurs sensa-mots se disent aussi et surtout au figuré d'une tions combinées et contemporaines font des impressions profondes et des empreintes étendues.» BUFF.

EMPRESSEMENT, ZÈLE. Ces mots donnent l'idée du soin et de la vivacité qu'on met à embrasser ou à servir la cause de quelqu'un.

âme que certaines impressions ont mise subitement dans une situation analogue. Un homme eté tiré de son assiette ordinaire par des modifiému, troublé, agité, n'est pas de sens rassis, a cations qu'il a reçues, des influences qu'il a subies. Je le trouvai encore tout ému, tout troublé, tout agité des reproches ou de la scène qu'on venait de lui faire.

et d'un changement d'état doux et modérés : l'eau L'idée propre d'ému est celle d'une impression est émue, quand elle commence à être ébranlée, mise en mouvement, poussée hors de sa place. Troublé emporte l'idée de désordre l'eau est troublée lorsqu'elle est mue tumultueusement, ou que, sans mouvement et en vertu de toute autre cause, intérieure ou extérieure, elle devient trouble, elle se mêle, se charge de matières limoneuses ou terreuses. Agité indique toujours quelque chose de violent : l'eau est agitée, lorsqu'elle éprouve des mouvements en différents sens alternatifs et contraires, lorsqu'elle est bouleversée et rendue comme furieuse.

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L'empressement est extérieur, et le zèle intérieur : l'un consiste dans le mouvement qu'on se donne, l'autre dans le sentiment dont on est animé. Avec de l'empressement, on s'agite, on se hâte de se porter au-devant; avec du zèle, on brûle d'un désir affectueux d'être agréable ou utile. Empressement n'exprime que la diligence, n'est relatif qu'à la promptitude, à l'inquiétude, à l'impatience avec laquelle on vient ou on va, on accourt, on prévient, on accueille; zèle exprime l'ardeur de l'âme, le dévouement et le tendre intérêt qu'on prend aux personnes. On dit des airs d'empressement (SÉv.) ou empressés, et la chaleur du zèle (J. J ). On peut tromper par son empressement, et sur son zèle. Trop d'empressement fatigue; trop de zèle aveugle et égare. << Tous coururent en foule vers Denys, et lui demandèrent avec empressement ce qu'il avait ap-bord l'émotion diffère bien du trouble.. Ces nuances se conservent au figuré. Et d'apris des Carthaginois. Il leur répondit que ceux L'émotion est un fait de sensibilité par lequel qui étaient chargés du commandement (à Syra- on est porté pour ou contre une personne ou cuse), au lieu de réveiller le zèle et l'attention une chose. Le trouble est un fait relatif à l'esprit, des citoyens, endormaient la ville en l'amusant et en vertu duquel on se trouve embarrassé, par de vains spectacles. » ROLL. terdit, confondu. On peut être ému jusqu'aux larmes, et troublé jusqu'à ne savoir que dire ou que répondre. On est ému par tout ce qui va au cœur, par tout ce qui touche ou intéresse; on est troublé par tout ce qui peut apporter le désordre dans les facultés intellectuelles, ou causer un dérangement, un égarement d'esprit. Les âmes ou les cœurs sensibles sont faciles à émouvoir; les esprits faibles sont faciles à troubler. On est ému du spectacle de la misère; Cicéron venant plaider pour Milon fut troublé à la vue des soldats de Pompée. · Troublé signifie aussi quelquefois inquiété, dont la paix est altérée, et dans cette acception comme dans la précédente

D'ordinaire, l'empressement est la suite et la manifestation du zèle. Aussi, dit-on bien un zèle empressé (BOURD., REGN.), et l'empressement du èle. J'attends vos mémoires avec l'mpressement du zèle que vous m'avez inspiré. » VOLT. « Marthe est si zélée pour servir Jésus, qu'elle passe jusqu'à un empressement excessif, et jusqu'à une inquiétude dont elle est reprise. » Boss. Et quand les deux mots se suivent, c'est empressement qui vient le second, parce qu'il marque l'effet.

Vous connaissez mon zèle et mon empressement.

SYN. FRANC.

REGN.

in

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tions, de douleurs intérieures et de désespoirs.> BOURD. Antiochus l'Illustre fut tout à coup saisi de frayeur en entendant parler des victoires des Juifs, et il fut jeté dans un grand trouble. Il s'écriait: Mon cœur est abattu par de cruelles inquiétudes. Quelle horrible agitation sens-je en moi-même, moi qui étais si heureux! Boss. J'ai vu le fier Atrée; il semble qu'il médite Quelque profond dessein qui le trouble et l'agite. VOLT.

il se distingue bien d'ému. Il désigne une modification solitaire, toute relative et bornée au sujet; en sorte que l'émotion fait perdre l'indifférence, fait aimer ou haïr, et que le trouble fait perdre le repos ou la tranquillité. On est ému de compassion ou de colère; on a la conscience troublée. « Je suis troublée de votre santé et du voyage que vous faites.... Je vous assure que mon cœur ne regarde point cet éloignement avec tranquillité. SEV. Au reste l'émotion, comme tout ce qui tient à la sensibilité, peut conduire au trouble, c'est-à-dire arriver à empêcher plus ou moins les fonctions de l'esprit ou à diminuer la paix de l'âme; mais comme elle est de sa nature paisible et sans violence, elle ne produit cet effet qu'à un faible degré, peu à peu, à la longue. | « Je vois avec douleur les jalousies, les divisions, « L'émulation, dit Labruyère, est un sentiles inquiétudes s'accroître dans Genève : non quement volontaire, courageux, sincère, qui rend je craigne que ces petites émotions aillent jusqu'au trouble et au tumulte, mais il est triste de voir cette ville ne pas jouir de sa prospérité. » VOLT.

L'agitation enchérit de toutes manières sur l'émotion et sur le trouble.

D'abord elle est de plus longue durée et paraît davantage à l'extérieur. « Les yeux et les sourcils de Protésilas montraient je ne sais quoi d'agité, de sombre et de farouche. » FEN. L'émotion et le trouble font pâlir et trembler, tout au plus: dans l'agitation on gesticule, on se démène, on va et on vient avec précipitation.

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ÉMULATION, JALOUSIE. Sentiments qui nous portent à rivaliser avec quelqu'un. à faire effort pour l'égaler ou le surpasser : l'émulatívn et la jalousie ne se rencontrent guère que dans les personnes de même art, de mêmes talents et de même condition.

l'âme féconde, qui la fait profiter des grands exemples, et la porte souvent au-dessus de ce qu'elle admire. La jalousie, au contraire, est un mouvement violent, et comme un aveu contraint du mérite qui est hors d'elle: elle va même jusqu'à nier la vertu dans les sujets où elle existe: ou, forcée de la reconnaître, elle lui refuse les éloges, ou lui envie les récompenses: passion stérile, qui laisse l'homme dans l'état où elle le trouve; qui le remplit de lui-même, de l'idée de sa réputation; qui le rend froid et sec sur les actions ou sur les ouvrages d'autrui; qui fait qu'il s'étonne de voir dans le monde d'autres talents que les siens, ou d'autres hommes avec les mêmes talents dont il se pique: vice honteux, qui, par son excès, rentre toujours dans la vanité et dans la présomption, et ne persuade pas tant à celui qui en est blessé, qu'il a plus d'esprit et de mérite que les autres, qu'il lui fait croire qu'il a lui seu! de l'esprit et du mérite. »

Comparée à l'émotion, l'agitation est plus forte l'émotion affecte l'âme, et ne lui permet pas de rester indifférente; l'agitation frappe l'âme et lui inspire une vive inquiétude. L'homme ému se sent touché; l'homme agité est hors de soi << Je vis un petit conciliabule très-ému.... Le duc du Maine parla à son frère le comte de Toulouse avec agitation. » S. S. On ne dit pas une douce, « L'émulation anime les esprits. » ROLL. « C'est une tendre agitation, comme on dit une douce, un sentiment honnête qui fait naître et développe une tendre émotion; l'agitation est toujours vio- les talents. Elle nous porte à imiter ce que nous lente et pénible D'ailleurs l'âme émue n'éprouve admirons et nous fait rendre justice à ceux que qu'un seul sentiment, comme la pitié, l'atten-nous voulons égaler. COND. Elle naît en drissement, la joie au lieu que l'âme agitée est l'homme de cœur, quand il voit faire aux autres en proie à des sentiments divers qui la balancent, de grandes actions.» Boss. Mais la jalousie est la ballottent et se la renvoient pour ainsi dire. une passion haineuse, injuste, aveugle. « Il n'est « De quels mouvements divers l'âme est-elle agi- plus rien de sacré pour un cœur que la jalousie tée dans le jeu, selon les divers caprices du ha-aigrit et infecte. » MASS. Quand on nourrit sard? MASS. Dans l'incertitude, dans le doute, dans une position où il y a à espérer et à craindre, on est agité.

Dans le doute mortel dont je suis agité. RAC. « Malgré toute l'affectation de fermeté et de tout espérer de la guerre, Albéroni éprouvait de grandes agitations intérieures sur l'incertitude des succès où il allait se livrer. S. S.

A l'égard du trouble de l'esprit, l'agitation le cause plutôt que l'émotion, parce qu'elle est plus violente, et à l'égard du trouble de l'âme, de son inquiétude, de l'altération de sa tranquillité, agitation en marque le comble. La conscience est troublée par des scrupules, et agitée par des remords; une conscience troublée n'est pas en repos; une conscience agitée est harcelée, tourmentée. «< Considérez tout ce que l'ambition attire d'inquiétudes, d'alarmes, de troubles, d'agita

contre son frère des sentiments de jalousie, ses talents, sa réputation, sa prospérité sont autant de vers qui nous rongent. » ID.

«S'il y a des émulations de vertus, il y en a de contention et de jalousie; et, pour une émulation légitime, il y en a cent de criminelles. » BOURD. Ce sujet (la vengeance du meurtre d'Agamemnon), traité tant de fois parmi les modernes, n'a pas excité moins d'émulation chez les anciens. Il a été un objet de concurrence entre Eschyle, Euripide et Sophocle.... Cette noble rivalité ne passait pas pour une basse jalousie. » LAH.« Il y avait eu de tout temps entre Lucullus et Pompée une émulation qui approchait fort de la pique ou de la jalousie. » ROLL — « Il a régné entre tous les ordres religieux une émulation qui est souvent devenue une jalousie éclatante la haine entre les moines noirs et les

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blancs subsista violemment pendant quelques lide parut sensible à mon attention. Qui croirait siècles.» VOLT.

Entrons: d'abord on voit la Jalousie,
Du dieu des vers la fille et l'ennemie,
Qui, sous les traits de l'Émulation,
Souille l'orgueil et porte sa furie

Chez tous ces fous courtisans d'Apollon. ID. ENCORE, AUSSI. Ces adverbes servent à exprimer que, outre ce qui a déjà été fait, dit ou donné, on fait, on dit, on donne quelque chose.

que je fus assez enfant pour en pleurer d'aise! >> ID. « C'était à qui des deux serait le plus enfant.»

ID.

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Enfantin et enfantillage, directement formés du français enfant, ne rappellent du premier âge que ce qui s'en remarque à l'extérieur, savoir des qualités ou indifférentes ou estimables; puéMais encore emporte une idée d'identité et ril et puérilité, latin puerilis et puerilitas, de marque addition ou énumération, au lieu que puer, enfant, ne rappellent de ce même âge que son synonyme aussi implique une idée de diverce qui regarde l'intérieur ou l'esprit, c'est-à-dire sité et suppose comparaison. J'ai, je fais, je dis, des défauts, défauts de réflexion, de sens, de je donne encore, c'est-à-dire de plus, c'est-à-dire jugement, de solidité. Enfantin et enfantillage que moi, la même personne, je continue à avoir, se prennent donc d'ordinaire en bonne part, puéà faire, à dire, à donner. J'ai, je fais, je dis, jeril et puérilité jamais ou presque jamais. donne aussi signifie que moi, de mon côté, pareillement, également, avec d'autres personnes, j'ai, je fais, je dis, je donne telle ou telle chose.

J'ai cité des exemples, je vais en citer encore (PASC., VOLT.). « Non-seulement il est libéral, mais encore il est prodigue. » ACAD. « Je pourrais combattre cette pensée par plusieurs raisons. Je pourrais vous représenter que.... Je pourrais ajouter encore que.... » Boss. Il demandait ceci, il demande encore cela (VOLT.), « Avec ces beaux secrets Roger Bacon possédait encore tous ceux de l'astrologie judiciaire. » ID. « Après avoir été ouvertes à la poste, mes lettres le seront encore dans la maison où je vais loger. » J. J.

« Cela est faux, que, la défense étant permise, le meurtre soit aussi permis. » PASC. « Comme il était naturel que le temps fît inventer beaucoup de choses, il devait aussi en faire oublier d'autres. Boss. « Ce prélat tartare fut insulté par les caravanes; les Chinois le furent aussi. » VOLT. Les riches ne logent que leurs amis; mais les pauvres logent aussi les chevaux de leurs amis.>> J. J. Je vous enverrai ce morceau non-seulement pour réjouir mon cœur, mais aussi pour profiter de vos lumières. » ID.

Des idées de gaieté, de badinage, d'innocence, d'intérêt, de vie sereine et de beauté ou de grâces s'attachent naturellement aux mots enfantin et enfantillage. « La duchesse de Bourgogne avait amusé le roi par des badinages nouveaux et enfantins. » S. S. « Thomas Diafoirus, étant petit, ne jouait jamais à tous ces petits jeux que l'on nomme enfantins. » MOL.

Venez, famille désolée;
Venez, pauvres enfants, qu'on veut rendre orphelins,
Venez faire parler vos esprits enfantins.

(L'Intimé présentant les petits chiens dans
les Plaideurs.)

RAC.

« Si quelque chose peut rendre un esprit serein, adoucir la peine par l'onction de l'amour, c'est cette conduite simple, libre et enfantine entre les bras de Dieu. » FÉN. « Là fut le terme de la sérénité de ma vie enfantine. Dès ce moment je cessai de jouir d'un bonheur pur. » J. J. « Quelle netteté de judiciaire enfantine suppose la réponse de cet élève ! » ID. « Cette eau a la vertu de faire d'un visage décrépit une face enfantine. » LES. - « Ne trouvez-vous pas que Mme de Saint-Julien a quelque chose de Mme du Châtelet? Elle en a l'éloquence, l'enfantillage et la bonté, avec un peu de sa physionomie. » VOLT. « On pardonnait ces naïvetés à son âge (les gentillesses d'un jeune petit-maître). Il mèlait des sentiments si ENFANT, ENFANTIN, PUÉRIL. (ENFANTIL-fiers et si nobles aux enfantillages de l'amourLAGE, PUÉRILITÉ.) Ces mots qualifient relative- propre, que tout cela ensemble n'avait rien que ment au premier àge, marquent avec le premier d'intéressant. » MARM. âge de la conformité ou du rapport.

Voilà donc mon paquet, et vous le vôtre aussi.

REGN.

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Ce qui est puéril et la puérilité se distinguent Mais enfant a cela de tout à fait spécial, qu'il par un caractère d'étourderie, d'extravagance, s'applique seulement aux personnes, au lieu d'absurdité, de vanité, de mauvais goût ou de qu'enfantin et puéril se disent exclusivement de bassesse. « L'imagination ne produit souvent que ce qui appartient aux personnes, de leurs ac- des idées vaines et puériles, qui ne servent point tions ou de leurs discours. Un homme est enfant, à perfectionner le goût, et à nous rendre meilplus ou moins enfant, et il se conduit ou parfe leurs.» LABR. « Si l'on faisait une sérieuse attend'une manière enfantine ou puérile. « Les mysti- tion à tout ce qui se dit de froid, de vain et de ques sont si enfants, si on les croit, et d'une telle | puéril dans les entretiens ordinaires, l'on aurait innocence, que souvent ils signeront ce que vous honte de parler ou d'écouter. » ID. Des principes voudrez, sans songer s'il est contraire à leurs (FÉN.), des sophismes (P. R.) puérils. « Des légissentiments. » Boss. « Je ne puis me corriger de lateurs se sont amusés à faire des institutions mes châteaux en Espagne. J'ai beau vieillir, je puériles. » MONTESQ. « Ce qui me choque de ces n'en suis que plus enfant. » J. J. « Le cadet des beaux esprits, c'est qu'ils ne se rendent pas utiles deux petits du Soussoi paraissait venir à moi si à leur patrie, et qu'ils amusent leurs talents à volontiers que, plus enfant qu'eux, je me sentais des choses puériles. » ID. « Combien l'homme est attacher à lui déjà par préférence. » ID. « L'inva- | faible, puisque les plus hautes productions des

D

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