Page images
PDF
EPUB

mettre à la postérité le souvenir des hommes ou des choses, ou sur des édifices pour en annoncer la destination ou quelque chose de relatif à la personne qui les a bâtis ou qui les habite; au lieu que l'épigraphe, qui est d'ordinaire une sentence ou une citation érudite, se met en tête d'un ouvrage d'esprit pour donner une idée de son contenu. Une inscription est plus ou moins importante pour l'histoire et l'archéologie; une épigraphe est grecque, latine ou française, en vers ou en prose, obscure ou aisée à entendre, bien ou mal choisie, bien ou mal adaptée au sujet.

« L'inscription d'une fontaine.» ACAD. « Ce monument porte plusieurs inscriptions. » ID. « Le temple de Delphes avait pour inscription: CONNAIS-TOI TOI-MÊME. » ID. Platon fit mettre cette inscription au-dessus du vestibule de l'Académie QUE PERSONNE N'ENTRE ICI, S'IL N'EST VERSÉ DANS LA GÉOMÉTRIE. » FÉN. « On trouvait les inscriptions des statues du roi arrachées. » S. S. « Il vous est beaucoup plus aisé de faire un beau monument qu'à moi de faire une inscription; la langue française n'entend rien au style lapidaire. » VOLT. D - En citant le passage de Lucrèce que j'ai mis au titre de mon livre, l'observateur copie la faute que j'ai faite .par inattention.... Il explique cette épigraphe dans un sens, auquel, dit-il, je n'ai pas pensé. » J. J. « J'ai reçu le Père de famille; mais je voulais l'édition avec l'épigraphe grecque. » VOLT. < Voltaire ne se doutait pas que, bientôt après, Helvétius ferait un gros livre dont ce.vers pourrait être l'épigraphe. » LAH. « Les journaux sont un vil amas d'écrits accumulés depuis un demisiècle, et dont l'épigraphe devait être ce que Virgile a dit des harpies :>>

MARM.

Contactuque omnia fœdant. » ÉCRITURE, MAIN. Deux mots qui servent à marquer comment une personne écrit sous le rapport de la forme des lettres, comment elle peint en maniant la plume.

en

tent proprement, la première à la façon, la seconde à la manière s'agit-il de louer les choses écrites par une personne, son ouvrage, vous dites qu'elle a une belle écriture; mais vous dites qu'elle a une belle main si vous voulez appeler l'attention sur la personne même, sur son talent. La perfection de l'écriture n'est pas à dédaigner dans un manuscrit, ni la perfection de la main dans un secrétaire. Votre écriture ne sera bien lisible qu'autant que votre main aura été soigneusement formée.

L'écriture se considère a posteriori, après coup, comme quelque chose de fait ou dans quelque chose de fait; la main, au contraire, se considère a priori, avant toute opération, comme quelque chose de capable de faire, comme une puissance ou une faculté. « Le partisan n'eut pas sitôt vu de mon écriture qu'il m'arrêta pour travailler sous lui, en me disant qu'il voulait me former l'esprit et la main.» LES. Gil Blas, secrétaire de l'archevêque de Grenade, veut lui faire prendre pour sous-secrétaire le licencié Garcias; et le prélat, après avoir examiné des choses écrites par l'aspirant, répond à Gil Blas: « Je suis satisfait de ton écriture; mais je t'avoue que je ne serais pas fâché d'avoir de cette main-là une copie de mes ouvrages. » LES. On reconnaît l'écriture de quelqu'un; on recommande quelqu'un pour un emploi en assurant qu'il a une bonne main.

D'ailleurs main, dans cette acception, étant un terme figuré, convient mieux en poésie. Imiter l'écriture de quelqu'un (FÉN.), est l'expression ordinaire; mais dans l'Astrée, tragédie lyrique, Lafontaine a dit en parlant de Celadon: Quelque ennemi secret vient d'imiter sa main. De même, dans le langage commun, nous emploierions écriture là où Corneille (dans Héraclius) se sert de main :

Madame, dois-je croire un billet de Maurice? Voyez si c'est sa main, ou s'il est contrefait. Vous connaissez sa main, madame; et c'est à vous Que je remets le sort d'un frère et d'un époux. Voyez ce qu'en mourant me laissa votre mère. ÉCRIVAIN, AUTEUR. Homme qui a publié un livre ou des livres de sa composition.

La différence saute aux yeux. Écriture, vertu de sa terminaison, indique un effet, quelque chose qui résulte de l'action d'écrire; au lieu que main désigne évidemment une cause, ce qui fait l'action d'écrire. Un billet est mon L'écrivain se considère par rapport à la maécriture, mon œuvre, un des produits de monnière d'écrire, à l'expression, à la forme. « Je activité; il est de ma main, il émane de moi

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

lui crois des égaux (à Buffon) parmi ses contemporains en qualité de penseur et de philosophe; mais en qualité d'écrivain je ne lui en connais point c'est la plus belle plume de son siècle. » J. J. Certes est réclamé par la poésie, et notre langue doit beaucoup aux écrivains qui le disent en prose.» LABR. Boileau dit de Malherbe : Par ce sage écrivain la langue réparée N'offrit plus rien de rude à l'oreille épurée. << Dans Sénèque le penseur ne vaut pas mieur que l'écrivain; les mauvais raisonnements sont aussi fréquents que les mauvaises phrases. » LAH. Mais ce qu'on regarde dans l'auteur, ce sont les pensées, c'est le fond. « Saint Augustin parle d'une ordonnance que firent les Césars et les magistrats de ce temps-là contre certains auteurs, dont les poésies satiriques et remplies de médisance déchiraient la réputation des plus

[ocr errors]

honnêtes gens. » BOURD. « On doit accoutumer que des billets fort mal digérés et fort raturés. » les jeunes gens, quand on leur fait lire ces ID. « Aussitôt il prit papier, plume et encre; et sortes d'auteurs qui ont plus cherché le merveil- voilà mon jeune homme qui se met à raturer, leux que le vrai dans leur récit, à faire le dis- corriger, à refaire. » VOLT. - L'expression génécernement du vrai et du faux. » ROLL. « Saint rale effacer, dans cette acception, a plus de rapAugustin dit que toutes les vérités qui se trou-port à la suppression de ce qu'on trouve mauvais, vent dans les auteurs païens nous appartiennent. » ID. Auteur orthodoxe, approuvé, original (ACAD.). — « Nous parlerons ailleurs de ce qui regarde le choix des auteurs par rapport aux mœurs. Pour le style il faut faire lire aux jeunes gens, et d'abord et toujours, les meilleurs écrivains. » ROLL.

Un bon écrivain a de la correction et du goût; un bon auteur a du génie. Des écrivains qui ne seraient qu'élégants et corrects le cèdent à des auteurs de génie (DUCL.). « Les auteurs du siècle d'Auguste sont fort supérieurs comme écrivains (à cause de la pureté de leur goût) à ceux du siècle suivant, qui le sont peut-être, à leur tour, comme penseurs et philosophes. » D'AL. Un écrivain est habile; un auteur, profond, original. Boileau et Lafontaine, qui ont emprunté la plupart de leurs sujets, sont néanmoins d'excellents écrivains; Corneille et Descartes sont d'excellents auteurs. Malebranche est tout à la fois un grand écrivain et un auteur éminent. La France brille plus par ses écrivains que par ses auteurs; l'Allemagne, au contraire. Le mauvais écrivain a des imperfections de style qui le rendent fastidieux; le mauvais auteur choque par la sottise ou la déraison.

Ensuite, on appelle plutôt auteurs les écrivains autorisés ou qui font autorité, qui ont du poids, et spécialement ceux de l'antiquité relativement à ceux de nos jours. « Voilà ce qui nous pénètre d'une juste admiration pour les grands écrivains, pour les auteurs devenus classiques. » LAH. « Il ne serait pas raisonnable que, uniquement occupés de l'étude des auteurs grecs et latins, et peu curieux de faire connaissance avec les écrivains de leur pays, les jeunes gens demeurassent toujours étrangers dans leur propre patrie. » ROLL. Auteur classique; écrivain d'une gazette (D'AL.).

D

EFFACER, RATURER, RAYER, BIFFER. Passer un trait de plume sur ce qui est écrit.

C'est ce que le verbe effacer signifie simplement et sans aucune idée accessoire. Raturer veut dire effacer en composant, ôter des fautes et mettre mieux à la place. Rayer et biffer n'ont point ce caractère littéraire : ils n'emportent point l'idée de correction, mais celle d'abolition ou de retranchement: on raye et on biffe pour faire disparaître.

Raturer, faire des ratures exprime l'action d'un écrivain qui travaille à perfectionner son ouvrage en le châtiant. « A force de raisonner, de parler, de dicter, de reprendre, de corriger, de raturer, de changer, de refondre, tout s'évapore. S. S. « Les présidents du sénat et des académies commencèrent à composer, étudier, raturer et feuilleter leur Vaumorière et leur Démosthène, pour apprendre à parler à un embryon. J. J. « Vous exigez toujours de promptes réponses; cela fait que je ne puis vous écrire

SYN. FRANC.

[ocr errors][merged small]

et raturer en a davantage aux ratures, aux marques laissées et qui restent sur le papier on efface des mots, on rature un manuscrit.

Ainsi, recommençant un ouvrage vingt fois, Si j'écris quatre mots, j'en effacerai trois. BOIL. « Mes manuscrits raturés, barbouillés, mêlés, indéchiffrables, attestent la peine qu'ils m'ont coûtée. » J. J. — Il semble aussi qu'effacer est plus noble, précisément parce qu'il ne rappelle pas comme raturer, des ratures, des traces matérielles de l'action.

Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage; Polissez-le sans cesse et le repolissez; Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. BOIL. Rayer et biffer différent du moins au plus. Un homme privé peut rayer, et cela doucement, avec calme.

Moi, votre ami! rayez cela de vos papiers. MOL. « Je ne crois pas mériter ce reproche, et il faut que vous rayiez cet article sur le mémoire de mes défauts.» SEV. « Il fallait rayer Luther, Bucer et Mélanchton du rang des grands hommes.» Boss. Mais biffer, c'est rayer d'autorité ou avec colère. « Le roi cassa cet arrêt et ordonna que la minute serait biffée et lacérée. » VOLT. Le chancelier d'Aguesseau réprimanda les membres du parlement au nom du roi, et leur ordonna de biffer sur les registres tout ce qu'ils avaient arrêté au sujet des disputes présentes. >> ID. « Boufflers devint furieux.... Villars épouvanté envoya lui-même ses lettres de pairie à Boufflers qui y biffa tout ce qu'il voulut, et ce qu'il biffa demeura supprimé dans l'expédition qu'en fit Pontchartrain. » S. S. - Très-souvent biffer se trouve placé après rayer sur lequel il enchérit. « J'ai rayé et biffé ce traître du registre de mes amis. LES. « Le jugement des commissaires contre Du Faur fut rayé et bissé à la pluralité des voix. » VOLT. « Madame la Dauphine ayant su que cette jolie personne avait signé partout Sophie de Bavière s'est transportée d'une telle colère, que le roi fut trois fois chez elle pour l'apaiser. Enfin tout a été effacé, rayé, biffé. » SEV.

EFFARÉ, EFFAROUCHÉ. Troublé, mis en émoi, comme un animal rendu farouche par l'épouvante qu'on lui cause.

D

α

elle

Effaré exprime toujours un trouble visible, et comme hagard auquel il ressemble fort, il ne se dit guère que de l'air du visage. « Il avait l'air tout effaré. S. S. « Vous veniez nous offrir votre air effaré pour nous faire rire. » J. J. « Quand Octave entra dans la chambre de Cléopâtre, se leva promptement, et alla se jeter à ses genoux, horriblement défigurée, les cheveux en désordre, le visage effaré et sanglant, la voix tremblante.» ROLL. « Statira mourante, sa fille à ses pieds, et Cassandre essaré, quatrième tableau. » VOLT.

Tu parais sans haleine, et les veux effares. In.

35

M'as-tu de tes gros yeux assez considéré?
Comme il les écarquille et parait effare!

(Mercure à Amphitryon.) MoL.

« Qu'est-ce donc que vous me regardez tout effa-
rée ?» (La comtesse d'Escarbagnas à sa domesti-
que). ID.
Effarouché, au contraire, annonce
un trouble qui peut ne pas se manifester au
dehors. Une imagination effarouchée. D FÉN.,
J. J. « Quand on a affaire à des esprits effarou-
chés et inquiets, on s'expose à voir les démar-
ches les plus simples et les plus honnêtes pro-
duire les soupçons les plus injustes. » VOLT.
« Ceux qui ne jugent d'un ouvrage que par le
nom de l'auteur seront un peu effarouchés des
libertés que j'ai prises. » ID. « Si vous cherchez
un autre examinateur, je vous supplie d'éviter
les personnes trop effarouchées. » FÉN. « Je fus
si effarouché que je n'eus pas le mot à dire pour
détourner ces beaux propos. » S. S.

Paul disait aux Philippiens: Je suis encore bien loin du terme; mais je marche toujours pour tdcher d'atteindre où le Seigneur Jésus m'a prédestiné. » BOURD.

De plus, on s'efforce de faire ce qui peut être fait par force. Des troupes s'efforcent de rompre un pont, d'emporter une place, de débusquer l'ennemi; vous vous efforcez de soulever un fardeau, de bander un arc; dans la fable de Lafontaine, la Grenouille et le Rat, la grenouille

S'efforce de tirer son hôte au fond de l'eau. Mais on tache par d'autres moyens que la force, par des soins, de l'attention, de la persévérance, de la douceur ou de l'habileté. « La loi commune veut que nous tâchions de conserver notre vie le plus longtemps qu'il nous est possible.» LAF. « Que ne tâchons-nous à les ramener à leur bon sens par la patience et par la douceur? » Boss. « Tâchez surtout de dormir et d'éloigner dès le soir toutes les pensées qui vous réveillent. » SÉv. - Ainsi, un lutteur s'efforce de renverser son adversaire, et tâche de le surprendre. Efforcez

avoir beaucoup d'empire sur soi-même: tâchez d'échapper aux tentations, cela demande une vigilance continuelle et beaucoup d'adresse. On s'efforce de découvrir quelque chose à force de regarder, en regardant de tout son pouvoir; on tâche d'entendre un discours en se mettant à portée. « Pendant que tous les alliés ennemis de Salente se jetaient en foule les uns sur les autres pour les voir de plus près, et pour tacher d'entendre leurs sages discours, Idoménée et tous les siens s'efforçaient de découvrir, par leurs regards avides et empressés, ce que signifiaient leurs gestes et l'air de leurs visages. » FÉN.

Ensuite, comme le verbe effarer, à la différence d'effaroucher, ne s'emploie guère qu'au participe, effaré marque parfois un état de trouble absolu sans rapport à une cause qui l'ait pro-vous d'être vertueux, il faut pour cela être ført, duit. On peut avoir l'air effaré naturellement, par habitude ou par distraction. On n'est pas effarouché sans l'ètre par quelque chose. C'est toujours le résultat d'une impression reçue. On est effare simplement, et effarouché par telle ou telle chose. Buffon dit d'une huppe que, quand elle était effarée, elle se réfugiait sur un ciel de lit, et qu'un jour, ayant été effarouchée par l'apparition de quelque objet nouveau, elle s'envola. Enfin, quoique les deux mots aient au fond la même racine, le latin ferus, farouche, effarouche, qui rappelle si évidemment farouche, repro- | duit seul exactement l'idée du radical commun. Ellaré est tout passif. Il désigne purement un état, état dans lequel on est presque stupide, on a perdu la tramontane, comme dit Mme de Sévigné en employant ce mot. Effarouché exprime qu'on est irrité par la cause qui effarouche, excité à la repousser ou à la fuir, et qu'on garde assez de présence d'esprit pour en chercher les moyens. Prévenir les objections des docteurs effarouchés. FÉN. « Un pays mécontent et effarouché de la domination de Ferdinand. » VOLT.

Il est vrai qu'en Espagne, où vous régnez en maître, Le soin de contenir un peuple effarouché, La gloire, l'intérel, seigneur, vous ont touché. In. - L'air effaré est le contraire de l'air calme, tranquille. L'air effarouché est le contraire de l'air familier, contant, soumis, le contraire de celui qu'ont les animaux privés, apprivoisés ou domestiques.

EFFORCER (S'), TÂCHER. Travailler à faire quelque chose qui est peu en proportion avec

nos moyens.

S'efforcer se dit bien d'une manière absolue, sans indication de la chose à faire, au lieu que tâcher s'emploie toujours avec relation au but qu'il s'agit d'atteindre. S'efforcer arrête l'esprit sur la peine que se donne le sujet; tâcher est inséparable de l'idée de la tâche, de l'objet qu'on se propose et qu'on poursuit. « Le principal exercice de la perfection consiste à s'avancer, à s'efforcer, à se surmonter et à se vaincre.... Saint

α

Enfin, s'efforcer marque une action plus énergique ou plus positive. On s'efforce de faire, on tache d'éviter; on s'efforce de vaincre, on tâche de parer le coup; on s'efforce de surmonter ses passions, on tache de n'y pas céder ou de leur donner le change; on s'efforce deparvenir, on tâche d'empêcher ou de retarder sa ruine.- Par conséquent, s'efforcer est propre à enchèrir sur tâcher. « Saint Augustin voulait dire seulement que dans l'occasion on doit toujours tâcher, toujours s'efforcer, toujours s'exciter soi-même, conari. » Boss. La fière Sophie tâche de supporter avec dignité le coup imprévu qui la frappe. Elle s'efforce d'y paraître insensible. » J. J. « Les ambassadeurs de Masinissa remercièrent le sénat de ce qu'il avait fait à leur maître des présents magnifiques, dont ce prince avait déjà tâché de se rendre digne, et qu'il s'efforcerait de mérite encore davantage. » ROLL.

ÉGAL, PLAIN, PLAT, UNI, RAS. Tous ces mots se disent d'une chose qui s'étend exactement en ligne droite suivant deux dimensions seulement, longueur et largeur.

Egal et plain s'appliquent à une étendue placée horizontalement et dont les parties ne sont ni plus hautes ni plus basses les unes que les autres. Mais égal suppose une plus petite étendue, étendue travaillée ou disposée par la main des hommes, comme une aire, une allée, un chemin, et il est plus rigoureux que plain, plus mathématique,

pour ainsi dire: un chemin bien égal est de niveau, ne s'élève ou n'incline point du tout ici ou là. Plain s'emploie en parlant d'une étendue plus vaste, étendue non modifiée par l'homme, et il ne nie que les grandes inégalités, les éminences ou les dépressions considérables. « La Beauce est un pays plain. » ACAD.

Plat convient à une étendue placée en quelque sens que ce soit, et, par exemple, à la toile d'un tableau, au visage ou au dos d'une personne, à une planche dans quelque position qu'elle soit, ou dressée ou couchée. C'est, non plus un terme de géométrie comme égal, ou de géographie comme plain, mais un terme de physique ou un mot du langage commun. Un objet plat n'est ni convexe ni concave, n'a ni saillie ni enfoncement. « Sur une superficie toute plate les peintres nous représentent des corps diversement relevés et enfoncés.» DESC.

Uni veut dire non raboteux, sans aspérité, et par conséquent, en parlant d'un chemin, doux, facile. Uni comme une glace (LES., ROLL.). « Vous voyez un miroir uni; il est démontré que c'est une surface très-raboteuse. » VOLT. « Au lieu de griller et de rendre la peau rude, cette eau la rend douce et unie. » SEV. « On fait rouler une boule dans un lieu uni. » FÉN.

Ras, qui a le poil coupé ou fort court, signifie ici sur quoi il n'y a rien, ni choses données par la nature, comme des arbres et des plantes, ni choses faites par les hommes, comme des places fortes « Le traître Ariamne mena Crassus au travers de la plaine par un chemin d'abord uni et facile, mais qui devint ensuite très-difficile par les sables profonds où l'armée se trouva engagée au milieu d'une vaste campagne toute rase et d'une affreuse aridité. ROLL. « Annibal voyait que le poste qu'il occupait dans une plaine rase et découverte était tout ce qu'il pouvait choisir de plus avantageux pour faire agir sa nombreuse cavalerie et ses éléphants. » ID.

[ocr errors]

ÉGARDS, MÉNAGEMENTS, ATTENTIONS. Manières d'agir réfléchies et mesurées, tendant à témoigner des sentiments favorables. Avoir pour quelqu'un des égards, des ménagements et des attentions, c'est se conduire envers lui de façon, non-seulement à ne pas lui dépiaire, mais encore à contribuer à sa satisfaction. « L'esprit du monde n'est qu'un commerce de souplesse, d'égards, de complaisance, d'attentions, de ménagements. » MASS.

Egards est de la même famille que regard, regarder, garde, garder, prendre garde. Les égards consistent à voir, à envisager les personnes sous certains aspects, et à prendre garde à ce qui leur est dû sous ces rapports, à y avoir égard, à ne pas y manquer: ils consistent dans l'observation des convenances sociales; ils sont inspirés par le sentiment du devoir et par le respect des bienséances. « La soumission constante du dauphin pour Louis XIV n'était pas seulement une vertu de raison: il ne donnait rien aux égards et à la bienséance; il ne suivait que le mouvement de son cœur. » MASS. « La politesse est naturalisée à la cour. Un homme excessivement grand rend tous les autres petits.

De là les égards que l'on doit à tout le monde; de là naît la politesse.» MONTESQ. « Les bienséances ne sont que des égards. » MARM. « Il gardait toujours en apparence les mêmes égards et les mêmes mesures d'honnêteté. » VERT. « Notre commerce se refroidit à vue d'œil, et nous n'eûmes plus l'un pour l'autre que des égards de bienséance et d'honnêteté. LES.

a

L'honnêteté, les égards et la politesse des personnes avancées en àge de l'un et de l'autre sexe, me donnent bonne opinion de ce qu'on appelle le vieux temps. » LABR. On a des égards pour ceux qu'on considère, et c'est pourquoi égards et considération sont synonymes entre eux, et avec déférence et respect (voy. l'article suivant). « Cet orgueil nous fait croire qu'on ne nous rend pas ce qui nous est dû, qu'on n'a pas pour nous assez d'égards, qu'on ne nous considère pas autant que nous le méritons. » BOURD. « Christiern était sans considération pour la dignité des personnes, et sans égards pour les lois ni pour les priviléges du pays. » VERT.

L'idée propre de ménagements est de faire moins (minus agere) qu'on ne pourrait, d'épargner, d'en user avec modération. Nous traitons les personnes avec ménagement, comme nous manions avec ménagement des objets fragiles ou dangereux pour ne pas leur nuire ou pour ne pas nous nuire. Ils consistent à diminuer la rigueur, à traiter avec quelque bonté, à éviter de choquer, de faire de la peine. On doit avoir des ménagements pour les faibles, pour les puissants, pour les personnes susceptibles, ombrageuses, d'une humeur difficile. « On pourrait bien nous reprocher trop de ménagement, trop de douceur, trop de condescendance. » Boss. « Il laisse cela sans réplique, quoique ce fût le lieu de marquer la douceur, les ménagements, la longue attente, la charité du concile et de saint Cyrille envers Nestorius.» ID. « On nomme précautions oratoires certains ménagements que l'orateur doit prendre pour ne point blesser la délicatesse de ceux devant qui ou de qui il parle. » ROLL. << Coriolan manquait de douceur et de condescendance.... Il ne connaissait point ces ménagements et cette sage flexibilité qui se plie au besoin des affaires et à la diversité des caractères de ceux avec qui l'on a à traiter. ID. « L'affaire est délicate, et demande à être traitée avec tous les ménagements possibles.» VOLT. La Hollande ne pouvait concevoir la modération de Louis XV. On regardait toutes ses démarches pacifiques et tous ses ménagements, tantôt comme des preuves de faiblesse, tantôt comme des pièges. » ID. « Tib. Gracchus ne proposa la loi Licinia qu'avec tous les ménagements qui pouvaient adoucir les usurpateurs des terres publiques. » VERT. « Le père Tellier ne connaissait ni monde, ni mesures, ni degrés, ni ménagements. » S. S. « Cette disposition des enfants à l'emportement, au dépit, à la colère, demande des ménagements excessifs. » J. J.

La différence des égards et des ménagements est parfaitement exprimée dans ce passage de Saint-Simon : « Après la bataille d'Hochstedt, le duc de Marlborough traita les officiers les plus

distingués, tombés en son pouvoir, avec tous les égards, les complaisances, les politesses les plus prévenantes en tout; et le commun des prisonniers reçut par ses ordres tous les ménagements et toutes les douceurs possibles. » Cette même différence est facile à saisir dans cette phrase de J. J. Rousseau : « En qualité de malade, j'ai droit aux ménagements que l'humanité doit à la faiblesse et à l'humeur d'un homme qui souffre. Je suis pauvre, et il me semble que cet état mérite encore des égards. »

a

di

sans attentions, on ne connaît ni les soins assidus, ni les empressements officieux, ni ces distinctions délicates qui flattent tant les personnes qui en sont l'objet.

ÉGARDS, CONSIDÉRATION, DÉFÉRENCE, RESPECT. Sentiment favorable, en vertu duquel nous rendons une sorte d'hommage à la personne qui en est l'objet.

Les égards témoignent de l'honnêteté, la considération de l'estime, la deférence de la docilité, et le respect de la vénération.

Égards est le terme Le plus général et le moins significatif. Nous avons des égards pour toutes les personnes auxqueles nous avons égard, auxquelles nous faisons attention, que nous remarquons parmi les autres, sous quelque aspect que ce soit. Ce mot n'emporte pas nécessairement l'estime ni l'idée de supériorité, comme les trois autres: il y a des égards qui sont dus à la faiblesse, à la pauvreté, à l'infortune. « Ayez les égards que le sang demande. » Boss. « Eire fort contre les faibles, sans nuls égards pour les petits. » LABR. « Que le roi aime ses sujets : le peuple demande si peu d'égarás, qu'il est juste de les lui accorder. » MONTESQ. « Il ne faut pas insulter aux malheureux et oublier les égards qui leur sont dus. » J. J. - Ensuite, ce mot ne s'employant qu'au pluriel dans cette acception, exprime moins le sentiment, comme les trois autres, que des procédés, des façons d'agir qui l'annoncent. On a des égards, c'est-à-dire qu'on se conduit de telle manière, par considération, par déférence ou par respect. « Je jugeai par les égards que tout le monde avait pour lui que c'était un homme de considération. » J. J.

Attention vient de ad tendere, tendre vers, riger son esprit vers une chose, la remarquer parmi les autres. Les attentions sont des marques et des témoignages de l'attention particulière qu'on fait aux personnes; elles consistent dans des soins officieux, tendres, particuliers, assidus, empressés, touchants, distingués, qui prouvent l'envie qu'on a de se rendre agréable. Elles proviennent d'un zèle affectueux pour les personnes qu'on aime réellement ou dont on veut se faire aimer. De tendres attentions (Mass.); les attentions les plus touchantes (VOLT.). « Un favori se trouve souvent déconcerté des bassesses, de la flatterie, des soins superflus et des attentions frivoles de ceux qui le courent. » LABR. « Je comblais cette femme d'attentions, de soins, de petits cadeaux, et j'avais extrêmement à cœur de m'en faire aimer. » J. J. « C'est un très-galant homme, plein d'attentions et de soins. » ID. « Je continuai d'être en liaison avec M. Vernes. Mais je ne trouvai pas dans son commerce ces attentions qui marquent l'attachement et qui produisent la confiance. » ID. «< Sylla avait avec lui Archélaūs, qu'il accablait de caresses, et dont il prit un très-grand soin dans une maladie dange- Considération désigne le grand cas qu'on fait reuse qui attaqua ce général. Ces attentions de des personnes la considération a pour objet Sylla.... ROLL. « César avait une affection par- quelque chose de plus considérable, de plus reticulière pour Brutus.... Il porta les attentions marquable que les égards. On a de la considérasur lui jusqu'à recommander aux siens, en tion pour tous les mérites, personnels ou extéallant au combat, de ne le point tuer. » ID. « Les rieurs, réels ou d'opinion, la naissance, la plus petites attentions, qui semblaient devoir richesse, le crédit, la probité, les talents, les échapper à la superiorité du génie du prince de grandes places, les dignités, etc. « Les Athéniens Conti, n'échappaient pas à la bonté de son aimaient fort Diogène et avaient beaucoup de cœur. » MASS. « Les jeunes maris ne marquent considération pour lui. » FÉN. « Ce n'est que la des attentions et des empressements que pour les seule considération que j'ai pour monsieur votre femmes qu'ils devraient mépriser. » DEST. Ce père qui m'a fait courir après vous. Je n'ai pu mot, d'ailleurs, se dit de choses de moindre souffrir qu'un honnête homme fût exposé à la conséquence, qui n'ont de prix que par l'in- honte de tous ces bruits. » MOL. « Je lui marquais tention bienveillante qu'elles manifestent de en toutes choses presque les égards et la considépetites attentions. « Envoyez l'édition complète ration d'un fils. » J. J. « Tout cela fut accompade mes œuvres à M. de Laharpe. Je suis bien aise gné de témoignages d'estime et de considération.» de lui montrer quelques petites attentions dans ID. « La considération devient la récompense du son malheur.» VOLT. savoir. COND. « Lorsque dans la monarchie la profession lucrative des traitants parvient encore à être une profession honorée, un dégoût saisit tous les autres états, l'honneur y perd toute sa considération. » MONTESQ. « Il l'assura qu'elle serait toujours traitée avec toute la considération que méritait une fille de sa naissance.» LES. « La mort n'a pas plus de considération pour les rois que pour leurs valets de pied. ID. « Il est en haute considération. » ACAD.- Ce mot est le seul d'ailleurs qui se prenne bien au passif; en sorte qu'avoir de la considération simplement, c'est être considéré. « L'Espagne eut alors une consi

« Les égards ne vont pas jusqu'au respect, mais ils en approclient; les ménagements ne vont pas jusqu'au sacrifice de nos volontés, mais ils les modèrent. Les attentions ne vont pas jusqu'au dévouement, mais elles le commencent en quelque sorte. » ROUB.

Sans égards, on est grossier et injuste, on manque aux bienséances, aux devoirs de société, à ce qu'on doit aux personnes suivant les âges, les conditions et les positions; sans ménagements, on est rude, on manque de modération, de mesure, de retenue, on traite les gens à la rigueur;

D

« PreviousContinue »