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us volontiers en parlant des Grecs; d'autant e la plupart des discours que nous avons s Grecs ont été adressés par des généraux à urs troupes, ou prononcés devant le peuple ns des circonstances graves et solennelles. cune des vaines subtilités des sophistes ne se ouve dans les oraisons de Cicéron, ni dans les rangues de Démosthène (VOLT.).

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dans la morale individuelle qu'il doit être question de la réserve et de la retenue. Si nous manquons de discrétion, ce sont les autres qui en souffrent; nous seuls sommes intéressés à ne pas manquer de réserve et de retenue. Avec de la discrétion, on est un galant homme; avec de la réserve et de la retenue, on est comme il faut être eu égard à ce qu'on se doit à soi-même. Cependant, il arrive quelquefois à nos bons Rien de plus facile à établir que ce caractère teurs d'appliquer indistinctement ces deux | particulier de la discrétion. La politesse et la ots aux discours des Grecs et surtout à ceux discrétion, qui en est une partie, sont néceses Romains. La différence consiste alors en ce saires l'une et l'autre au repos de la société ae harangue a plus de rapport à la forme, et (FÉN.). Il y a des règles de discrétion et de raison au fond. La harangue, suivant Marmon- bienséance à garder envers nos semblables el, n'a pour objet que des actions de grâces, des (BOURD.). Un calomniateur (PASc.), un censeur elicitations et des condoléances: tel est le dis- trop zélé (MASS.), un importun (J. J.) et un poëte ours de Cicéron pour Marcellus, qui ne contient satirique (BOIL.) pèchent essentiellement contre utre chose que l'effusion de la reconnaissance et la discrétion. « Cet écrit est rempli d'égards et e l'admiration publique pour la clémence de de ménagements sur les personnes qu'il attaque: César. L'oraison, au contraire, est plus solide, pas un mot qui les puisse le plus légèrement lle renferme des preuves, elle a pour but de blesser, et la discrétion y est portée jusqu'à éviconvaincre; c'est un plaidoyer: tels sont les ter avec soin de nommer aucun nom. » S. S. « Si discours de Cicéron pour Ligarius et pour la loi mes parties publient ce mémoire, ce ne sera pas Manilia. Distinction d'autant plus plausible, que moi qui aurai manqué de respect et de discréVoltaire emploie le mot oraison dans le sens et àtion. » FÉN. « Ce petit animal mordait sans disla place de plaidoyer: « L'avocat qui plaidait crétion tous ceux qui voulaient badiner avec contre les jésuites, trouva heureusement leur lui. » BUFF. explication du mot apointer; il en fit part aux juges dans une de ses oraisons. »

D

D'un autre côté, harangues de Démosthène ou de Cicéron indique les discours de Démosthène ou de Cicéron comme ayant été prononcés par eux sur tels ou tels sujets, dans telles ou telles circonstances oraisons de Démosthène ou de Cicéron les fait plutôt considérer comme des œuvres littéraires qui nous restent de ces deux grands orateurs, et qui peuvent encore servir de modèles pour la composition. « Les oraisons de Démosthène et de Cicéron instruisent encore l'Europe, quand les objets de ces harangues ne subsistent plus. » VOLT. Corbinelli écrit à Bussy-Rabutin : « J'ai traduit depuis peu deux oraisons grecques, sur deux versions latines, l'une d'Isocrate, l'autre de Démosthène, pour juger de leur éloquence par comparaison à celles des modernes. » « Le prédicateur est chargé d'un certain nombre d'oraisons, composées avec loisir. » LABR. On appellerait oraisons, plutôt que harangues, des discours qui n'auraient pas été prononcés, mais écrits dans le silence du cabinet, pour l'instruction des lecteurs. « Saint Grégoire de Nazianze, voyant la Trinité attaquée, composa ses cinq oraisons, ou discours célèbres contre Eunome. » Boss.

DISCRETION, RÉSERVE, RETENUE. Qualités négatives du sage, lesquelles consistent à s'abstenir de parler ou d'agir, à ne pas se donner trop de liberté dans ses discours ou dans sa conduite.

La discrétion se distingue d'abord de la réserve et de la retenue par une différence capitale. Elle est relative à autrui, et pour autrui; au lieu que la réserve et la retenue se considèrent solitairement dans le sujet qui les possède, et à la perfection duquel elles contribuent. C'est à la morale sociale à traiter de la discrétion; c'est

SYN. FRANC.

La réserve et la retenue diffèrent aussi. L'une tient à la prudence, l'autre à la tempérance. Pour être réservé, il faut de la réflexion; et, pour être retenu, de l'empire sur soi-même. La réserve est circonspecte; la retenue, mesurée. Avec de la réserve, on est sur ses gardes; avec de la retenue, on gouverne ou on réprime ses mouvements. Sans réserve, on est inconsidéré et on commet des sottises; sans retenue, on est faible et on commet des excès. -« La réserve annonce la défiance. » VOLT. Il y a des choses qu'on ne doit apprendre aux enfants qu'avec précaution et avec réserve (Boss.). « Il est des amitiés circonspectes et réservées qui, craignant de se compromettre, refusent des conseils dans les occasions difficiles. » J. J. La retenue est sœur de la modération. Il y a des gens qui jouent sans retenue, sans une modération convenable (BOURD.). « Platon était si retenu, qu'on ne le vit jamais rire que fort modérément; et il fut toujours si maître de ses passions, qu'on ne le vit jamais en colère. >> FEN. « Rien de plus sujet que le mariage aux excès d'une passion sans règle et sans retenue. » BOURD.

Je m'emporte peut-être, et ma muse en fureur
Verse dans ses discours trop de fiel et d'aigreur :
Il faut avec les grands un peu de retenue.

BOIL.

Avec de la réserve, une femme interdit et surtout s'interdit les avances, les familiarités, les agaceries et les discours qui pourraient tirer à conséquence et l'engager. Avec de la retenue, elle se possède, elle est maîtresse de ses penchants et de ses sens, elle ne se laisse pas entraîner par la passion. Sans réserve, une femme est une étourdie, une imprudente ou une effrontée; sans retenue, c'est une libertine. On parle avec réserve ou avec retenue en ne disant pas tout; mais avec réserve, marque plus la crainte des suites; et, avec retenue,

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l'effort qu'on fait pour ne point s'échapper. - La retenue est, du reste, plus subjective, se rapporte davantage au sujet, à la contrainte qu'il s'impose et au mérite qui en résulte. « Sans déterminer en quoi consiste précisément l'utilité de l'indulgence, ce concile se contenta de décider qu'elle est utile et nécessaire.... Il y a dans cette réserve une retenue qui plaît à Dieu, qui honore son Église, qui exerce la foi. » Boss. DISERT, ÉLOQUENT. Habile à discourir en public, habile dans l'art de la parole.

Disette exprime une grande rareté et une grande
cherté de vivres; .au lieu que famine indique
qu'ils sont épuisés et qu'on n'en trouve plus à
aucun prix. « Cependant les vivres s'épuisent....
A la disette enfin succède la famine, fléau terri-
ble. » MARM. « L'abondance de toutes choses qui
succédait à la disette et à la famine devint nuisi-
ble à plusieurs. D ROLL.
Ensuite, la disette
semble n'atteindre que les pauvres, et la famine
se faire sentir à tous. Pendant que Henri IV assie-
geait Paris, « la disette dégénéra en famine uni-

D

Nous avons emprunté ces deux mots des La-verselle.» VOLT. tins, qui disaient dans le même sens disertus et eloquens. Cicéron et Quintilien nous ont même appris la différence qu'il faut mettre entre l'homme disert et l'homme éloquent. Le disert, de disserere, disserter, discuter, se distingue par la diction; l'éloquent brille par l'élocution ce qui frappe dans le langage de l'un, c'est la clarté; et dans le langage de l'autre, la beauté. Ensuite, l'homme disert instruit, et il plaît par la facilité et par l'élégance de sa parole, mais il n'émeut pas; l'homme éloquent produit un plus puissant effet, il persuade, il s'empare des esprits et les maîtrise.

a Cicéron dit qu'il a vu bien des gens diserts, c'est-à-dire qui parlaient avec agrément et d'une manière élégante; mais qu'on ne voit presque jamais de vrai orateur, c'est-à-dire d'homme qui sache entrer dans le cœur des autres, et qui les entraîne. » FEN. « C'est cette habileté à orner et à embellir un discours qui met de la différence entre un homme disert et un homme éloquent.... L'homme disert, c'est-à-dire qui s'explique seulement avec clarté et solidité, laisse son auditeur froid et tranquille, et n'excite point en lui ces sentiments d'admiration et de surprise qui, selon Cicéron, ne peuvent être que l'effet d'un discours orné et enrichi de ce que l'éloquence a de plus brillant, soit pour les pensées, soit pour les expressions.» ROLL. « Bossuet était éloquent, saint Augustin était plus disert que ne le sont les autres Africains.... Je dirais à l'évêque de Meaux vous êtes un grand homme; je vous trouve aussi savant pour le moins que saint Augustin, et beaucoup plus éloquent. » VOLT.

«

En général donc disert signifie moins qu'éloquent. L'esprit, l'élégance, la pureté, la justesse et la délicatesse des idées, une diction ornée, fleurie, cadencée, telles sont les qualités distinctives de Fléchier; c'est un écrivain disert, un habile rhéteur qui connaît son art, mais qui n'est pas assez riche de son fonds pour éviter l'abus de cet art. » LAH. « Si j'étais diserte comme Mme de Sévigné, je vous ferais de beaux récits. >> DUDEFF. « Appius dit qu'on lui avait obligation de ce que Volumnius autrefois presque muet, était devenu disert et éloquent. » ROLL.

Ces épithètes gardent les mêmes nuances, lorsqu'elles servent à caractériser le discours. DISETTE, FAMINE. Manque de vivres qui arrive par une cause quelconque dans un royaume, dans une province ou dans une ville assiégée.

Famine enchérit sur disette, c'est une disette fort grande (ROLL.), extrême (S. S.), ou la plus dure disette (VOLT.), une disette affreuse (ROLL.).

Une autre différence résulte de l'étymologie des deux mots. Disette vient de dire (trouver à dire) ou du latin desinere, cesser, tirer à sa fin. Il se considère par rapport aux vivres mêmes qui diminuent beaucoup, aux précautions qu'on aurait dû prendre, aux approvisionnements qu'on aurait dû faire, aux secours qu'on donne à ceux qui sont dans le besoin. Famine, tiré évidemment de faim, rappelle la faim et ses souffrances, et même le genre de mort qui en est la suite. De sorte que la famine est amenée ou produite par la disette. « La disette et la cherté firent une espèce de famine. » S. S. « Hannon mit la disette dans le camp des ennemis.... Désolés par la famine er par les maladies qui en étaient la suite, les Romains auraient été contraints de lever le siège,. si.... » COND.-On dit : les horreurs de la famine (Boss.), faire périr le peuple par la famine (VERT.); les assiégés sont réduits aux extrémités de la famine (VOLT.). La famine est comptée, avec la peste et les guerres, parmi les plus grands fléaux (Boss., FÉN., BOURD.). « Donner du pain à ceur que la famine dévore. » BOURD. Ce caractère paraît essentiel à famine; car il est permis de refuser ce nom même à la disette extrême et générale, lorsque (ce qui est très-rare, du reste) on er souffre peu. « Les Lydiens, pressés d'une extrême disette, s'avisèrent d'inventer les jeux avec lesquels ils donnaient le change à leur faim et passaient des jours entiers sans songer à manger. » J. J.

DISSIPER, GASPILLER, DILAPIDER. Dépenser d'une manière blâmable.

Dissiper vient du latin dissipare, disperser, mettre en déroute, détruire; on dissipe ce qu'on consume, ce qu'on fait disparaître ou évanouir; ce mot indique la perte de la chose. Gaspiller, de vastare, dévaster, gâter, bouleverser, et de pilare, expilare, piller, a pour idée propre celle de désordre; aussi dit-on bien gaspiller du linge. des papiers, pour signifier les mettre sens dessus dessous. Dilapider, introduit dans notre langue au XVIIIe siècle seulement, et pris du latin dilapidare, qui veut dire primitivement démolir, disperser les pierres (lapides) d'un édifice, paraît ne s'appliquer qu'aux grandes fortunes.

La dissipation cause la ruine. Le gaspillage emporte l'idée d'un défaut d'économie. La dilapidation produit le renversement de toute une fortune ou l'anéantissement de fortes sommes.

On dissipe un bien quelconque en le détruisant d'une façon quelconque. On gaspille celui qu'on administre mal, dont on use ou dont on laisse user à tort et à travers, en dépit du bon sens. On

lilapide de grands biens, les finances de l'État, << C'était une femme d'esprit qui savait discerner e trésor public, une belle dot, etc. son monde. » J. J. « Les grands hommes sont Vous dissipez votre patrimoine, si vous l'épui-tous ceux qui surpassent les autres par le cœur ez par des dépenses qui ne sont point utiles ou écessaires, en voyages, en objets de luxe, en laisirs. Vous le gaspillez, si vous le gâtez par de ausses dépenses, en dépensant sans règle, désorlonnément, si vous n'êtes pas rangé, bon ménager, et si tout est au pillage dans votre maison. Vous dilapidez un riche patrimoine.

et par l'esprit, qui ont la vue plus nette et plus fine, qui discernent mieux les choses humaines. >> VAUV. « Il n'était point si aveugle qu'il ne distingudt le jour d'avec la nuit. Il discernait même à une grande lumière le blanc, le noir et le rouge.>> COND. Pour distinguer, il faut être éclairé et à la portée des choses; pour discerner, il faut de la

Enfin, distinguer paraît être purement idéal ou théorique, au lieu que discerner se rapporte aux qualités bonnes ou mauvaises des choses et à

• Représentez-vous un homme né dans les ri-science, de la pénétration et de la critique. chesses, mais qui les a dissipées par ses profusions. Boss. « Anet était un garçon exact et rangé, qui maintenait l'ordre dans la maison de Sa maîtresse. On craignait sa vigilance, et le gas-l'application: à l'un s'attache l'idée d'éclaircissevillage était moindre. » J. J. « Les assignats ne pourraient que tomber sous peu dans le plus affreux discrédit, si l'on continuait à dilapider auour de vous près de deux cents millions par mois. (Pétition à la Convention nationale.) BEAUM.

Qui dissipe son temps le perd; qui le gaspille ce sait pas en régler l'emploi; dilapider ne se dit qu'au propre.

Dissiper est du langage ordinaire; gaspiller, du style familier; dilapider convient surtout en parlant de dépenses et de richesses considérables.

ment, à l'autre celle de choix: on distingue deux objets de connaissance, de sorte qu'à leur égard l'intelligence ne se méprend plus, et de deux objets on discerne le meilleur et le pire. Des personnes qui disputent ou argumentent, ou qui recherchent des nuances entre des mots synonymes, distinguent; des critiques qui jugent des défauts et des perfections, de même que les rois qui s'efforcent de trouver des hommes capables, discernent. On discerne le mérite (BOURD., LABR., VAUV.); on ne dit point le distinguer. « Discerner, parmi les exemples de l'antiquité, ceux qu'il est bon de suivre et ceux que l'on doit éviter. » MARM.

Démêler, défaire le mélange ou ce qui est

DISTINGUER, DISCERNER, DÉMÊLER. Apercevoir nettement, sans se méprendre, sans confon-mêlé, dégager du milieu de, c'est apercevoir un dre avec autre chose.

objet dans une foule d'autres de même ou de différente espèce, où il est enveloppé et comme perdu; démêler une aiguille dans une botte de foin. Ce mot emporte toujours l'idée de complication, d'intrigue et d'embarras. Sur ce vers de

Distinguer, de dis, qui marque division, et de tinguere, teindre, signifie teindre de manière à séparer, et par extension, reconnaître par les diverses teintes. Discerner vient de dis et de cernere: cernere veut dire séparer, et plus ordinai-Corneille : rement voir par les yeux de l'esprit, décider, juger, faire le discernement, de même que le grec | xpíverv d'où il dérive.

Et c'est mal démêler le cœur d'avec le front, Voltaire fait la remarque suivante : « Je crois qu'il eût fallu distinguer, au lieu de déméler, car le cœur et le front ne sont point mêlés ensemble.>> On dit bien démêler la vertu d'avec ses apparences (MOL.), parce que la vertu est comme embarrassée dans ou sous les artifices de l'hypocrisie. On distingue les différentes qualités d'un tableau, et on démêle celles d'une tragédie (VOLT.).

Je saurai démêler un pareil artifice. VOLT.
Je n'ai point démêlé les intrigues secrètes.... Id.
Malgré l'obscurité de son illusion,
J'espère démêler cette confusion.

CORN.

Distinguer se prend plutôt au propre pour marquer une action des sens et particulièrement de la vue; discerner s'emploie de préférence au figuré pour désigner une opération purement mentale. « Je fais le même jugement de ceux qui disent qu'ils avaient les règles des géomètres, mais confondues parmi une multitude d'autres, dont ils ne pouvaient pas les discerner, que de ceux qui, cherchant un diamant de grand prix parmi un grand nombre de faux, mais qu'ils ne sauraient pas en distinguer, se vanteraient, en les tenant tous ensemble, de posséder le véritable.» PASC. Cependant le passage est si naturel et si ordinaire du propre au figuré, et réciproquement, que distinguer et discerner se trouvent l'un et l'autre dans les deux sens. Mais on distingue à des signes ou à des caractères visibles, apparents, faciles à saisir, comme les couleurs; au lieu qu'on discerne ce qui est caché ou délicat, ce qu'on n'aperçoit qu'avec de la finesse et de la sagacité. « Dieu est La raison est la faculté de distinguer le bien et le plus subtil et le plus pénétrant anatomiste de le mal, et plutôt encore le vrai et le faux. On ne notre coeur; il entre jusque dans les plis et les dit discerner le bien et le mal, et surtout le vrai replis de l'âme pour en discerner les mouvements et le faux, que dans les cas difficiles, et quand il les plus cachés. » BOURD. « Elle pénétrait les dé-est besoin d'une raison exercée, habile et pénéfauts les plus cachés des ouvrages d'esprit et en trante. On déméle le bien et le mal, ou le vrai et discernait les traits les plus délicats. » FLÉCH. le faux, quand ils ont été entremêlés de manière

« Démêler les choses entrelacées. » FÉN. « Qui démêlera cet embrouillement?» PASC. « Il naît dans l'âme un désordre et une confusion qu'elle a peine à démêler. » ID. « Démêler une équivoque. » Boss. « Ce sera une affaire inextricable, de démêler ces contradictions. » ID. « C'est le devoir d'un souverain de démêler la vérité au milieu de cette confusion que forment les passions des hommes et les intérêts des différents partis. COND.

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Vous distinguez le sens naturel d'une proposition; vous discernez le sens caché ou détourné d'un oracle; et vous démélez le sens intrigué d'une énigme.

DISTINGUER, SÉPARER. Oter une chose d'avec une autre ou d'avec d'autres.

α

à ne pouvoir être séparés l'un de l'autre que par | intellectuel, et divertir un état pénible de rame. une raison qui sait employer à propos l'analyse, On vous distrait de vos pensées, de vos rêveries; développer et résoudre tous les sophismes, et dé- on vous divertit de vos tristes pensées, de votre brouiller toutes les confusions. mélancolie, de votre douleur. Un rien distrait les personnes légères; un rien divertit les personnes insouciantes. - Mais détourner, faire sortir de la voie ou de sa voie, a un caractère pratique indiqué par l'Académie, qui dit : « Détourner d'un dessein convient mieux que distraire d'un dessein.» Détourner quelqu'un, c'est, non pas comme le distraire et le divertir, l'empêcher d'être à une chose, mais l'empêcher d'aller à une fin, de faire ou d'entreprendre. Distraire et divertir changent l'objet dont on s'occupe; détourner change le but qu'on poursuit, la marche, la conduite. On distrait d'un sujet de pensée ou de discussion, on divertit d'un sujet de chagrin; mais on détourne du devoir ou d'un projet.

Distinguer, dis tinguere, teindre diversement, sentir la différence des teintes. Séparer, se parare, disposer ou mettre à part, de côté. C'est l'œil qui distingue; c'est la main qui sépare, comme c'est elle qui prépare. Distinguer consiste à ne pas confondre; séparer consiste à désunir, à écarter. Un signe, un caractère, un trait, le visage, l'âge, le mérite, le rang, les idées que nous nous faisons des objets, servent à les distinguer; tout ce qui est propre à isoler les choses ou les personnes les unes des autres, dans l'espace ou dans le temps, comme un mur, une rivière, un voyage, la mort, un délai, un intervalle, servent à les séparer. Les choses distinguées ne sont plus prises l'une pour l'autre indifféremment; les choses séparées ne sont plus ensemble ou ne se touchent plus. « Nous voyons tous les arcs diversement colorés qui composent l'arc-en-ciel réunis par des nuances délicates qui joignent leurs couleurs sans les confondre, et qui les distinguent sans les séparer.» P. A. Le botaniste distingue les plantes que le pharmacien | sépare en les plaçant dans divers bocaux. « La différence des modes et du langage distingue plus les nations que celle des mœurs; l'absence sépare les amis sans en désunir les cours. » GIR.

De plus, à distinguer, et à distinguer seul, s'attache une idée de distinction, d'honneur, de prérogative. « La petite colonne qui sert de tombeau à Miltiade, n'est distinguée des autres, que parce qu'elle en est séparée. » BARTH. « La tendresse fit oublier à J. C. les lois générales de sa justice, pour séparer la vierge Marie de la masse commune des enfants d'Adam, pour la privilégier, pour la distinguer, pour l'honorer. »> BOURD.

Cependant séparer se prend quelquefois dans le sens plus théorique de distinguer. Mais alors il dit plus, il équivaut à bien distinguer, à mettre entre les choses, non-seulement de la différence, mais de la distance. « La raison sépare l'homme de tous les animaux. » ACAD. « On doit séparer les rubis, topazes et saphirs des matières transparentes vitreuses, et leur donner une tout autre origine. » BUFF. « On doit séparer l'émeraude et la placer à une grande distance de toutes les autres pierres vertes. » ID.

DISTRAIRE, DIVERTIR, DÉTOURNER. Faire aller ou venir ailleurs.

Quand il est question de l'homme, le distraire, c'est l'empêcher de penser à une chose; le divertir, c'est l'empêcher d'y songer. On distrait en faisant cesser l'application de l'esprit; on divertit en faisant cesser la préoccupation. Distrait, on est rendu inattentif; diverti, on est tiré de peine ou d'ennui. Distraire suppose un travail

|

Au propre et en parlant des choses, on dit également distraire, divertir et détourner des papiers, des effets, des fonds. Dans ce cas encore distraire et divertir diffèrent un peu l'un de l'autre, et tous deux diffèrent beaucoup de détourner.

Distraire, c'est détacher, séparer du reste. mettre à part; divertir, c'est changer le sens, la destination, l'emploi; détourner, c'est s'emparer, prendre pour soi, dérober. Les actions de distraire et de divertir, celle de distraire surtout, peuvent n'être pas mauvaises. « Sur cette somme il faut distraire tant. » ACAD. « Il n'est reste de riches évêques protestants en Allemagne que ceux de Lubeck et d'Osnabruck, dont les revenus n'ont pas été distraits. » VOLT. « Par ces ventes du domaine de la république, on va divertir les fonds les plus assurés pour la paye des légions.» VERT. « Le principal embarras roulait sur le moyen de fournir à la dépense néces saire pour secourir les Olynthiens, parce que les fonds de la caisse militaire étaient divertis ailleurs, et employés à la célébration des jeux publics. » ROLL. Mais l'action de détourner est positivement et toujours un délit. « Cette femme se tient en embuscade pour tromper son mari. et détourner pour son jeu tout ce qui peut verir sous sa main. » BOURD. « Les révoltés scellèrent tous les papiers et les effets, et n'en détournėrent aucun. » S. S. « Si Paul Emile, maître des trésors immenses de Persée, en avait détourne une partie pour s'enrichir, pourrait-on dire que ce seraient la vertu et l'honneur qui auraient introduit ces richesses dans sa maison? » ROLL. « Le même jour que Lautrec partit de Paris. Madame détourna 400 000 écus que le roi avait ordonnés pour le Milanais. » Boss.

α

2° PARTA

1° DISTRIBUER, DISPENSER ; GER, DÉPARTIR, RÉPARTIR. Donner d'une chose à plusieurs personnes.

Distribuer et dispenser, c'est donner à divers ou de côté et d'autre, çà et là, şuivant la valeur de la particule latine dis. Partager, départir et répartir, c'est donner une part, pour part ou en faisant des parts. Distribuer et dispenser n'emportent d'autre idée que celle de dualité, de pluralité, de multiplicité; partager, départir et répartir font concevoir des parts, des lots, des quantités relatives. Distribuer et dispenser des

umônes, c'est les répandre, les disséminer; par- | fait attention en employant ces deux verbes, mais ager, départir et répartir des biens, c'est les à ce qui suit l'action de départir tombe de onner par portions, tant aux uns et tant aux haut, vient a'une personne haut placée; celle de utres. On distribue et on dispense bien, en dis- répartir suppose dans les personnes auxquelles osant les choses, les unes ici, les autres là, elle aboutit des droits auxquels on a soin de se omme il convient, avec ordre; on partage, on conformer. Celui qui partage n'est pas juste, lépart et on répartit bien, en donnant à chacun quand il fait des parts beaucoup plus grandes ou utant qu'il faut, en procédant équitablement, plus fortes les unes que les autres; celui qui vec justice. Qui distribue ou dispense peut mal départ n'est pas juste, quand il ne consulte que placer, auquel cas il est exposé aux plaintes de ses prédilections et ses préventions dans la disceux qui ont été oubliés, qui n'ont rien obtenu; pensation de ses bienfaits; celui qui répartit jui partage, départ ou répartit peut commettre n'est pas juste, quand il ne proportionne pas de grandes inégalités, et alors il excite les récla- exactement les parts aux droits ou aux devoirs, mations de ceux qui ont été comparativement les gains aux mises ou aux avances, les charges mal traités. aux facultés ou aux revenus. Pour plus de détails sur ce qui concerne les rapports de départir et de répartir, voy. l'article où il en est question dans la Ire partie, p. 125.

a

Tarquin avait enlevé aux premiers de la ville des terres pour les distribuer aux personnes de la plus vile condition; les charges et les impositions de l'Etat qui, auparavant, étaient réparties également, il les avait toutes fait tomber uniquement sur la tête des citoyens les plus considérables. » ROLL. · Apollon dispense ses faveurs aux beaux esprits (REGN.);

En ses présents le ciel est toujours juste;

Il ne départ à gens de tous états
Mêmes talents.

1° Distribuer, dispenser.

LAF.

DIURNE, QUOTIDIEN, JOURNALIER. Relatif à cette partie du temps qui s'écoule entre le lever et le coucher du soleil, ou bien entre un lever ou un coucher du soleil et un autre.

Diurne, latin diurnus, de dies, jour, signifie proprement d'un jour ou de jour. C'est un terme d'astronomie et d'histoire naturelle, introduit dans notre langue au XVIIIe siècle. Le mouvement ou la révolution diurne de la terre se fait en un

volution annuelle s'accomplit en une année. Il y a des oiseaux de proie et des papillons diurnes, comme il y en a de nocturnes (Buff.).

Quotidien et journalier diffèrent considérablement de diurne, d'abord parce qu'ils sont du langage commun, et ensuite parce qu'ils marquent rapport, non pas à un jour ou au jour, mais à la succession des jours, à tous les jours, à chaque jour. Aussi, diurne serait d'une impropriété sensible dans des expressions telles que : journal quotidien, progrès journaliers de la raison.

Quoique les deux mots soient tirés immédiate-jour, au lieu que son mouvement annuel, sa rément du latin distribuere, dispensare, le premier se dit partout et en parlant de toutes choses, au lieu que le second convient particulièrement dans le style soutenu et quand il est question de choses relevées, de personnages éminents ou d'êtres supérieurs. « Les pharisiens étaient sévères pour distribuer ou faire distribuer aux pauvres certaines aumônes.... Ils se regardaient comme les oracles du peuple et les seuls maîtres de la vraie doctrine, se croyant suscités de Dieu pour la dispenser. » BOURD. « Les fidèles se déchargeaient sur les apôtres du soin de distribuer les biens communs.... Le nombre des fidèles croissant, ce dépouillement ne fut plus possible: la dispensation des biens temporels eût toute seule occupé les pasteurs destinés à dispenser les mystères de Dieu.» MASS. Distribuer semble annoncer plus de choses, une multitude de choses à donner; dispenser se distingue par la noblesse de ces choses, ou bien par le rang et l'autorité de ceux qui les donnent. « Nous peuplons la terre et les cieux de génies, nous en distribuons partout où la nature paraît animée.... Exerçant une immense autorité, ils dispensent la vie et la mort, les biens et les maux, la lumière et les ténèbres.» BARTH.

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2° Partager, départir, répartir. Partager a rapport à la chose; départir et répartir sont plutôt relatifs aux personnes. On partage un tout qu'on divise, dont on fait des parts (partes agere) ou des lots; partager une somme, un royaume, un gâteau, une succession, le butin, etc. « Les Lacédémoniens fortifièrent Décélie, ayant partagé l'ouvrage entre toutes les troupes pour l'achever plus promptement.» ROLL. Mais que les choses départies ou réparties forment ou ne forment pas ainsi une masse susceptible de décomposition, ce n'est pas à cela qu'on

Quotidien et journalier ont aussi leurs.nuances respectivement distinctives. Quotidien est une épithète déterminative ou caractéristique, et journalier une épithète circonstancielle. On dit qu'une chose est quotidienne, et on dit ceci ou cela d'une chose journalière. « La réception de l'Eucharistie était quotidienne anciennement. » FÉN. « La communion journalière doit être votre soutien. » Boss. Quotidien fait connaître qu'une chose a lieu chaque jour : fièvre quotidienne. « D'anciens auteurs ont donné aux éléphants une religion naturelle et innée, l'observance d'un culte, l'adoration quotidienne du soleil et de la lune. BUFF. Journalier rappelle incidemment qu'une chose dont il est question est une de celles qui ont lieu chaque jour. « Nous pouvons juger du dépôt successif et journalier des eaux par les feuillets des ardoises. » BUFF.

Ce qui est quotidien arrive tous les jours d'une manière fixe et invariable; ce qui est journalier arrive à peu près tous les jours, ou arrive tous les jours, mais tantôt d'une façon tantôt d'une autre. Un journal quotidien se fait remarquer par les différents tons ou les différents tours de ses déclamations journalières. On attend la visite cuotidienne (BEAUM.)

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