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ne bataille la victoire reste quelque temps indéise entre les deux partis. DEMEURER, LOGER, (GÎTER). Avoir sa rési

ence.

« Demeurer se dit par rapport au lieu topograhique où l'on habite; et loger par rapport à l'éifice où l'on se retire. On demeure à Paris, en rovince, à la ville, à la campagne; on loge au ouvre, chez soi, en hôtel garni. » GIR. Demeurer est abstrait et purement indicatif du eu où on a son domicile. Loger est concret et ait penser à la maison où on est retiré.

S'agit-il de donner votre adresse, vous dites où ous demeurez, à la campagne ou à la ville, à Paris, à Lyon, dans tel quartier, dans telle rue. Periandre ne permettait pas à tout le monde ndifféremment de demeurer dans les villes. >> ÉN. « Vous savez où elle demeure. » LES. « Et lans quel endroit demeuriez-vous à Tolède? Dans a rue Neuve, répondit-il. » I». « Il demeurait ur votre quai. » VOLT. « Je ne sais plus où elle emeure. ID. « Nous demeurions dans des quartiers fort éloignés. J. J. « On choisit une age-femme qui demeurait à la Pointe SaintEustache. » ID. Voulez-vous faire connaître le bâtiment, et pour ainsi dire le contenant où vous tes à couvert, vous dites où vous logez, dans une maison de telle ou telle sorte, au rez-dechaussée ou à tel étage. Etre logé à l'étroit, au | premier étage (ACAD.). « Elle logeait dans une grande maison où elle occupait le premier appartement. » Les. Il n'y a dans l'île de Bienne qu'une seule maison, mais grande, agréable et commode, où loge un receveur avec sa famille et ses domestiques. » J. J. « On reprochait un jour Diogène qu'il logeait dans des lieux malpropres. » FÉN. « Syphax invita les deux généraux (Scipion et Asdrubal) à loger dans son palais. >> ROLL.

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Une personne demeure loin de nous ou dans notre voisinage, et elle loge dans un hôtel ou dans une chaumière, dans un château ou dans une ferme, dans un bel appartement ou dans un taudis. « Je me rendis où Phénice m'avait enseigné qu'elle demeurait. Elle était logée avec toute la troupe dans un grand hôtel garni. LES. Voulant savoir de quelle façon Nunez était logé, je me rendis à l'hôtel du seigneur don Bertrand, et j'y demandai Nunez : Il ne demeure plus ici, me dit le laquais. » ID.

D'autre part, on demeure là où on est à demeure, où on est établi, où on reste d'une manière fixe. Il y a dix ans qu'il demeure à Madrid (LES.). « Elle demeure depuis six ans dans mon voisinage.» VOLT. Mais on loge où on s'arrête en passant, où on descend, dans une hôtellerie, ou comme dans une hôtellerie. « Arrivés à Madrid, nous allâmes descendre à un petit hôtel garni où Scipion avait logé dans ses voyages.» LES. Xerxès avait logé chez le père de Démocrite, lorsqu'il vint faire la guerre aux Grecs 1. » FÉN.

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4. Giter, synonyme de loger suivant Girard, se dit peu, outre qu'il est du style familier et même populaire: on l'emploie surtout bien en parlant des animaux, ou, si on l'applique à des hommes, c'est par dénigrement. « Les pluviers se dispersent le soir sur

DÉMOLIR, RASER, DÉMANTELER. Ces trois verbes, usités au propre seulement, signifient la destruction d'un édifice ou d'un ensemble d'édifices faite à dessein ou ordonnée par un homme.

Démolir, c'est défaire une masse (moles), déconstruire un ouvrage de maçonnerie jusqu'à ce qu'il n'en reste plus que les matériaux. Raser, c'est faire comme le rasoir à l'égard de la barbe, enlever un édifice de manière à faire place nette, à ce qu'il ne reste pas même de trace de la chose. L'action de démolir peut être tranquille et avoir des vues d'utilité, celle, par exemple, de tirer parti des matériaux ou de l'emplacement. Telles l'on démolit les maisons quelquefois : La pierre est mise à part; à part se met le bois.... LAF. « Les Athéniens, menacés d'un déluge de barbares, avaient démoli leurs maisons pour en construire des vaisseaux. » ROLL.« On attribua ce mauvais succès d'Imilcon à la profanation des temples et des tombeaux qu'il avait démolis pour fortifier son camp. » ID. « Il fit démolir un pan de la muraille pour laisser une sortie libre à ses troupes. » ID. « J'ai démoli mon théâtre, j'en fais des chambres à coucher et à repasser le linge. » VOLT. « Pardonnons à ceux qui attaquent les fondements d'un édifice que nous démolissons nous-mêmes, et dont nous prenons toutes les pierres pour nous les jeter à la tête. » ID.

Mais l'action de raser est vive et prompte, faite en vue de punir ou inspirée par quelque passion, telle que la colère ou la vengeance. Autrefois, la justice faisait raser les maisons de certains coupables, et il est arrivé à des vainqueurs de raser des villes entières. « Alexandre, dans les violents excès de sa colère contre Thèbes, qui la lui fit raser, n'oublia pas le respect qu'il devait aux dieux. » ROLL. « Sélinonte fut prise d'assaut, et le vainqueur permit aux habitants de demeurer dans la ville, après l'avoir démantelée.... Hy-` mère, traitée avec encore plus de cruauté, fut entièrement rasée. » ID. « Le nouveau gouverneur assiégea Dôle, qu'il emporta de force, et qu'il rasa, après l'avoir mise au pillage. Boss. Philippe V avait traité plus rudement la petite ville de Xativa dans le cours de la guerre : on l'avait détruite de fond en comble pour faire un exemple; mais, si l'on rase une petite ville de peu d'importance, on n'en rase point une grande qui.... » VOLT. « Charlemagne prend Eresbourg. Il fait égorger les habitants; il y pille, et rase ensuite le principal temple du pays. » ID.

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Démanteler veut dire ôter le mantelet, sorte de machine qui servait à couvrir une place comme un manteau le corps. C'est exclusivement un terme de guerre. On démantèle, non pas comme on rase, par ressentiment du passé, mais pour préserver l'avenir, par précaution, afin de rendre incapable de défense une ville dont on détruit les fortifications ou les murailles. « Du un certain espace où chacun gîte à part. » BUFF. «Le roi arriva à Marly et n'y trouva rien de prêt.... Ce qui avait suivi et qui arrivait à la file, en même désarroi et sans savoir où giter. » S. S. Enfin g ter suppose un séjour de plus courte durée encore, méme, pour l'ordinaire, d'une seule nuit.

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Guast s'empara de Carignan, pendant que Boutière la faisait démanteler, et en fit rétablir les fortifications. » Boss. « Sylla avait exercé sa vengeance sur des villes entières, dont il avait dé mantelé les unes, détruit totalement les autres, en sorte qu'il avait cru faire grâce à celles dont il n'avait que confisqué les terres ou rasé: les citadelles.» ROLL. « Cette dissipation ne saurait être innocente, puisqu'elle ouvre votre coeur, comme une place démantelée, à toutes les attaques de l'ennemi. » FÉN. Lafontaine dit du lion amoureux, qui s'est laissé rogner les griffes et

limer les dents :

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Sans dents ni griffes le voilà Comme place démantelée. DÉMONSTRATIONS, TÉMOIGNAGES, - PROTESTATIONS d'amitié. Marques d'amitié, choses qui donnent à penser qu'on aime.

Les démonstrations et les témoignages diffèrent d'abord en ce que les démonstrations sont plus extérieures, consistent plus dans la montre, sans qu'on puisse dire absolument qu'elles ne sont jamais qu'apparentes. « Saint Jérôme interdisait à la sainte vierge Eustochium les rendez-vous dérobés, les lettres enjouées et mystérieuses, les démonstrations de tendresse et les privautės d'une amitié naissante. » BOURD. « La vie de la cour nous accoutume à ne pas faire grand cas des dehors et des démonstrations extérieures de l'amitié. » MASS. « Il faut faire sentir à nos confrères par des prévenances et des démonstrations d'amitié qu'il y a encore de la ressource pour eux les cœurs insensibles à la vérité ne le sont pas toujours aux tendres témoignages de la charité. » ID. C'est une démonstration d'amitié que d'embrasser son ami; c'est un témoignage d'amitié que de prendre ses intérêts, que de lui prêter de l'argent ou de lui rendre tout autre service. On ne se fie pas toujours aux démonstrations; on est sensible aux témoignages.

démonstrations ‹ d'amitié ne seraient jamais que On peni fausseté et dissimulation. » COND. faire plus de fond sur les témoignages, qui sont comme des témoins dignes de foi, des signes non équivoques du sentiment dont il s'agit. « Isaac et Rébecca. cachaient leurs jeux innocents et les témoignages mutuels de leurs pudiques tendresses. » Boss. « Il y a des témoignages d'intérêt et de bienveillance qui font plus d'effet et sont réellement plus utiles que tous les dons. J. J... Sur quoi votre imagination est-elle erouchée ? Sur les plus vrais témoignages d'es time et d'amitié que vous ayez jamais reçus de moi. ID. Dans cette scène, Zaïre, en multipliant les témoignages de la tendresse la plus vraie et la plus pure, garde la noble fierté qui convient à l'innocence accusée. » LAH.

Mais si d'un œil bénin vous voyez mes hommages, Pourquoi m'en refuser d'assurés témoignages (Tartufe à Elmire.) MOL.

Les protestations, de leur côté, n'équivalent i aux démonstrations ni aux témoignages. Ce sent toujours des discours, des assurances données par la parole; au lieu que les démonstrations et les témoignages comprennent aussi l'air, l'accueil, les manières, les embrassements, les caresses. Ensuite, les protestations sont hautes, fortes, elles expriment de l'insistance: on renouvelle (LAH.), on redouble (S. S.) ses protestations; on se répand en protestations (LAH.), on fait mille protestations (LES.). « Linder m'a dit maintes belles paroles, m'a fait mille protestations d'amitié. » DUDEFF. « Elisabeth d'Angleterre feignit de croire aux protestations d'amitié que la France ne cessait de lui faire. COND. « Le roi de Prusse faisait faire à Vienne les plus fortes protestation: d'attachement aux intérêts de l'empereur. » S. S. Tryphon tâcha d'attirer Jonathas par de belles paroles et par les assurances les plus vives d'ure amitié sincère.... Il le trompa si bien par ces

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Mais, d'ordinaire, il y a plus : les démonstra-protestations d'amitié, qu'il lui fit renvoyer ses tions sont frivoles, s'arrêtent à l'extérieur et ne troupes.» ROLL. Souvent aussi les protestasupposent pas la réalité du sentiment. tions (pro, en avant, dorénavant) regardent, non le présent, mais l'avenir, ce sont des promesses d'affection. C'est une chose singulière que de voir un grand nombre de personnes se répandre en protestations, en promesses, en paroles, et oublier ensuite tout cela pour agir à leur ordinaire. » D'AL.

« Démonstration, dit Bouhours, va tout à l'extérieur, aux airs du visage, aux manières agréables, aux caresses, à des paroles douces et flatteuses, à un accueil obligeant; témoignage, au contraire, est plus intérieur et va au solide, à de bons offices, à des services essentiels.... Les démonstrations d'amitié sont souvent frivoles; les témoignages d'amitié ne le sont pas d'ordinaire. Un faux ami, un traître, peut donner des démonstrations d'amitié; il n'y a qu'un véritable ami qui puisse donner des témoignages d'amitié. » D

On dit bien de feintes (FÉN.), de fausses (LAH.), de perfides (LES.) démonstrations; des démonstrations outrées (LES.). « Tout est suspect à l'esprit chagrin, jusqu'aux caresses que lui fait sa maîtresse : Je doute fort, lui dit-il, que vous soyez sincère et que toutes ces démonstrations d'amitié partent du cœur.» LABR. « Ils s'embrassèrent tous deux avec des démonstrations d'amitié où il y avait plus d'art que de naturel. » LES. << Il était aisé de s'apercevoir qu'Elisabeth serait toujours l'ennemie de Marie Stuart, et que ses

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1° DÉNIGRER, NOIRCIR; -2° DÉCRÉDITER, DÉCRIER, DIFFAMER; -3° DÉSHONORER. Dire du mal, imputer des fautes ou des crimes, des défauts ou des vices.

Dénigrer et noircir diffèrent des mots suivants, en ce qu'ils bornent l'attention au sujet : ce qui est dénigré ou noirci est défiguré, mis dans un jour défavorable. Décréditer, décrier, diffamer, déshonorer, sont relatifs à ce que devient le sujet dans l'opinion: ce qui est décrédité, décrié, diffamé ou déshonoré est attaqué ou perdu dans l'esprit des hommes. En dénigrant et en noircissant, on décrédite, on décrie, on diffame, on déshonore.

1° Dénigrer, noircir.

Dénigrer est le latin denigrare, qui signifie exactement noircir. Mais, comme c'est un mot sa

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vant d'origine, il se dit en termes de sciences et de littérature, en matières de théorie. Boileau loue Segrais, et dénigre Brébeuf. » VOLT. « Boileau a denigré le clinquant: du. Tasse.» ID. « Livres de critique, où des hommes incapables de rien produire, dénigrent les productions des autres. ID. «J'ai été un peu affligé de voir le beau siècle de Louis XIV, le siècle des talents en tout genre, dénigré dans plusieurs livres nouveaux. » ID. « Les jansenistes ont voulu que les jésuites n'eussent jamais fait un bon ouvrage. Les jésuites ont denigré Boileau, parce qu'il était ami d'Arnauld. » ID.

ID..

En vain Boileau, dans ses sévérités, A de Quinault dénigré les beautés. Dénigrer les talents (ID.), tous les bons écrivains de son siècle (ID.). « Rien n'est plus ordinaire aux mauvais écrivains que de piller ceux qu'ils dénigrent. » LAH. « Finissons par un morceau de cette Henriade qu'il est de mode aujourd'hui de dénigrer.» ID. J. B. Rousseau a denigré la Henriade et Zaïre. » D'AL. Dénigrer un choix de l'Académie (ID.).

Mais, si dénigrer signifie une œuvre de critique, noircir marque une œuvre de censure; si l'action de dénigrer suppose des défauts de beauté, de goût, de vérité, l'action de noircir porte contre les mœurs et la conduite; si celui qui dénigre veut faire paraître ignorant, sot, ridicule, celui qui noircit veut qu'on soit regardé comme vicieux, méchant, criminel. On dénigre les livres d'un auteur; on noircit sa personne ou son caractère.

MASS.), un remède (ACAD.), un miracle (D'AL.), un historien (ID.), un devin (ID.), en faisant qu'on cesse d'y croire (credere, d'où crédit), en persuadant qu'ils ne peuvent pas ce qu'on pense, ce qu'on en attend, en les faisant tomber. << Parce que, dans la réputation de vertu où était Socrate, il eût été trop odieux de vouloir l'attaquer et l'appeler en jugement, on crut qu'il fallait commencer par le décréditer dans le public; c'est ce. qu'on opéra par la comédie des Nuées. » FÉN. << Ils ont conspiré ensemble pour tâcher à décréditer mes écrits; peut-être à cause qu'ils ont eu peur que, si ma géométrie était en vogue, ce peu. qu'ils savent de l'analyse de Viete ne fût méprisé. » DESC. « Cette sauvegarde de l'inoculation, que le préjugé et la superstition s'efforcent tant de décréditer » D'AL. «Le gouverneur de l'enfant fit plusieurs réflexions qui ne me plurent point, mais que j'évitai de combattre pour ne pas le décréditer dans l'esprit de son élève. » J. J. Mais on décrie, comme on noircit ce qu'on accuse d'immoralité, d'improbité, de bassesse. « Le fanatisme peut faire employer de honteux moyens pour noircir et pour décrier un ennemi de la religion. » MARM. On décrie la conduite de quelqu'un (MONTESQ., VERT.); on ne la décrédite point. « Alexandre VI était un homme décrié par sa mauvaise foi, par son peu de religion, son avarice et ses désordres. » Boss. « Les dérisions et les satires sont trop douces pour décrier un vice (l'hypocrisie) qui mérite l'horreur du genre humain. » MASS. « Peu s'en faut que le cartesianisme ne décrie ses advers ires comme de mauvais citoyens. » D'AL. « Les pharisiens haïssaient J. C., ils le décriaient, ils le calomniaient, ils empoisonnaient toutes ses actions. » BOURD. « Je ne crois pas qu'on puisse en bonne justice coffrer un homme pour avoir décrié la morale des jésuites. » VOLT.

On avilit ses mœurs, on noircit sa conduite; On le rend odieux à l'Europe séduite. VOLT. « Vous verrez à quel point la calomnie m'a noirci (en le faisant passer pour impie). Mes ouvrages, qui sont la peinture de mon cœur, seront mes apologistes.» ID. « Quand il s'agirait de convertir toute la terre, il ne serait pas permis de Pensez-vous affaiblir ma gloire et ma puissance, noircir des personnes innocentes. » PASC. « L'en- En décriant mes soins, mon état, ma naissance? vie noircit nos qualités les plus louables. » MASS. (Cicéron à Catilina.) ID. « On ne se contente pas d'attaquer mon livre, - On décrédite un ministre en diminuant ou en on n'oublie rien pour noircir ma personne. » FÉN. détruisant la bonne opinion qu'on a de son habiAlbéroni croyait qu'en vain ses ennemis s'effor-leté (Boss.); on décrie un prince qu'on représente çaient de le noircir, d'employer la calomnie pour le rendre odieux. » S. S. « Un ecclésiastique placé auprès de Fénelon pour être son espion, observa longtemps l'âme douce et pure qu'il était chargé de noircir. D'AL. La calomnie peut noircir l'homme le plus innocent, la conduite la plus pure.» ACAD.

De là il suit qu'en général noircir dit plus que dénigrer, exprime quelque chose de plus odieux. Qui dénigre veut nuire; qui noircit veut perdre. Un simple détracteur dénigre; un ennemi violent ou acharné noircit.

2° Décréditer, décrier, diffamer.

D'abord décréditer et décrier n'ont pas précisément le même sens. On décrédite ce qui est accrédité ou en vogue, en empêchant qu'on continue à y avoir confiance; on décrie ce contre quoi on crie, ce qu'on dénonce comme mauvais, comme méprisable. C'est la capacité qu'on attaque en décréditant: on décrédite un homme d'affaires (BouH.), un concurrent (BOURD.,

comme indifférent aux affaires et comme plongé dans la débauche (ID.). Plus de faveur, d'engouement, de cours, de partisans, de pratiques, pour ce qui est décrédité; plus d'estime pour ce qui est décrié.

Diffamer, de fama, renommée, bruit public, c'est décrier dans le monde, au loin, partout. « Archiloque avait si cruellement diffamé Lycambe, qui lui avait refusé sa fille, que le malheureux se donna la mort. » LAH. « Que la gloire est un pesant fardeau! De quelque côté que je tourne la vue, je vois ma mémoire diffamée. » Don Quichotte. LES. « L'endroit était plus connu et plus diffamé que le voisinage de Scylla et de Charybde.» LAF. « Il l'a diffamé partout. » ACAD.

3° Déshonorer.

Déshonorer marque l'effet produit par les actions de tous les verbes précédents. Comme on dénigre et on noircit pour décréditer, décrier ou diffamer, de même en décréditant, en décriant

et en diffamant on tend et on n'arrive que trop
souvent à déshonorer. L'Académie fait diffamer
synonyme de décrier et de décréditer, et le dé-
finit par:
: chercher à déshonorer.
DÉNOÛMENT, CATASTROPHE. Ces mots sont
considérés ici dans leur rapport commun avec la
conclusion d'une action dramatique.

c'est le ressort employé pour développer l'intrigue. Mais quelquefois aussi la catastrophe ne contient pas le dénoûment ou tout le dénodment. C'est ce qui arrive dans Britannicus. Britannicus meurt empoisonné, voilà la catastrophe. Mais tout n'est pas encore expliqué que devient Junie? Il faut un dénoûment ultérieur Dénoûment, mot tout français, formé du verbe pour nous l'apprendre, et ce dénoûment est le dénouer, se dit de toutes sortes de poëmes dra-parti que prend Junie de se mettre au nombre matiques, particulièrement de la comédie. Le des vestales.

dénoûment du Barbier de Séville (BEAUM.), de A tout cela, il faut ajouter que le dénou l'Étourdi, de l'École des maris de Molièrement, action ou manière de dénouer, se rap(VOLT.). « Dans Molière il y a des longueurs, les intrigues quelquefois sont faibles, et les dénoùments sont rarement ingénieux. » VOLT. « Le dénoûment des Adelphes (de Térence) n'a nulle vraisemblance. » ID. Mais catastrophe, tiré immédiatement du grec, s'applique seulement aux tragédies, qui sont les pièces de théâtre les plus

relevées.

porte à celui qui dénoue, au poête et à son
talent. « Ce qu'il y a eu de plus éminen:
dans Corneille, ce sont ses dénoûments. » LABR.
<< Dans ce cas Corneille eût sacrifié la plupart des
beautés de ses pièces, comme le dénoûment de
Rodogune. » MARM. « Dans Bajazet, le dénoú-
ment n'est point bien préparé. » SÉv. « Quand
une tragédie est bien faite, l'action se développe
d'elle-même, et avance sans obstacle jusqu'au dé-
noûment. » COND. « Le plus grand défaut de
cette tragédie est celui du dénoûment qui n'est
ni assez préparé ni assez motivé. LAH. « Un
bon tragédien est très-propre à être un très-bon
historien, parce qu'il faut dans toute histoire une
exposition, un nœud, un dénoûment et de l'in-
térêt. » VOLT. - Mais la catastrophe se considère
en soi, comme un objet, et non comme une action
ou le résultat d'une action: elle est sanglante
(Boss., RAC.), tragique (Boss.), affreuse (LAH.).

Ensuite, même quand il est question d'une tragédie, on n'en désigne la conclusion par catastrophe, qu'autant que cette conclusion est réellement tragique, c'est-à-dire funeste ou même sanglante. C'est une conséquence de l'étymologie du mot xaraσrpoon, renversement, bouleversement, mort. « On n'attache plus au mot catastrophe que l'idée d'un événement funeste. On ne dirait pas la catastrophe de Bérénice ou de Cinna. Avant Corneille on n'osait pas donner le nom de tragédie à une pièce dont le dénoûment n'avait rien de sanglant; et Aristote pensait de même,« Mahomet consterna d'abord par la sombre et lorsqu'il semblait vouloir interdire à la tragédie triste atrocité de la catastrophe. » LAH. « Sur le le dénoûment heureux. » MARM. « Les Euméni- théâtre des Grecs, la fable n'ayant à produire des d'Eschyle, le Philoctète de Sophocle et l'O- qu'une catastrophe terrible et touchante, poureste d'Euripide se terminent par un dénoûment vait être simple. » MARM. Bourdaloue dit en parheureux. Dans les tragédies modernes les cata-lant de la passion de J. C. « Après tant de strophes funestes trouvent naturellement leur place. » ID. « Le poëme tragique vous mène par les larmes, par les sanglots, par l'incertitude, par l'espérance, par la crainte, par les surprises et par l'horreur jusqu'à la catastrophe. » LABR. Ces mots préparent la terreur et fortifient le tragique de la catastrophe. » VOLT. « La catastrophe de Rhadamiste produit la terreur et la pitié.... Tout ce dénoûment n'est pas moins tragique que le reste de la pièce. » LAH. « La terreur et le tragique de cette catastrophe.... » VOLT.

scènes différentes, et toutes également lugubres, nous approchons enfin de la funeste catastrophe d'une tragédie si sanglante. »

-

1° DÉNUÉ, DÉPOURVU, DESTITUÉ; 2° DÉPOUILLÉ, PRIVÉ. Qui manque de certaines choses.

Dénué, dépourvu et destitué s'emploient comme adjectifs, au lieu que dépouillé et privé sont des participes. De là entre les uns et les autres une grande différence. Les premiers marquent un état; les deux derniers désignent un état qui a ét produit on est dénué, dépourvu, destitué, simplement; on est dépouillé ou privé, parce qu'on a été dépouillé ou privé, par suite d'une action ou d'un événement, par le fait de quelqu'un ou de quelque chose.

1° Dénué, dépourvu, destitué.

Enfin, même quand la tragédie se termine d'une manière terrible, conformément au but de cette sorte de poëme, la catastrophe n'y est pas la même chose ou n'y est pas toujours la même chose que le dénoûment. La catastrophe y est le coup, le fait d'ordinaire sanglant qui est placé Pour ce qui concerne d'abord dénué et dévers la fin; le dénoûment est la manière dont le pourvu, l'un est absolu, l'autre relatif; l'un expoëte fait cesser l'intrigue, l'embarras et par prime la nudité, l'autre le défaut de provision suite l'inquiétude du spectateur. La catastrophe seulement, le manque de moyen. Quand on est frappe, produit dans l'âme une grande impres- dénué de sens, de raison, d'esprit, on n'en a sion: le dénoûment débrouille, développe, éclair-point; quand on en est dépourvu, on n'en a cit les situations et satisfait la curiosité de guère, on n'en a pas assez pour faire ceci ou l'esprit. La catastrophe doit être terrible et tou- cela. chante, elle doit frapper le dernier coup; le dénoûment doit être clair, il ne doit laisser aucun doute ni sur les suites de l'action ni sur le sort des personnages.

Souvent la catastrophe sert de dénoûment

Me croyez-vous de sens si dépourvue,

Que devant vous je commisse un tel tour? LAF. « Je ne suis pas encore assez dépourvu de sens et de raisonnement pour ne pas voir que.... » S. S. «Que ce qui était la cause de Dieu devienne la

pouillée de ses honneurs.» LAH. « Le courage d'esprit avec leque! Louis XIV vit sa fin fut dẻpouillé de cette ostentation répandue sur toute sa vie. » VOLT.

Si les cieux, dépouillés de leur empreinte auguste,
Pouvaient cesser jamais de le manifester,

Si Dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer. ID.
- En outre, dépouillé, despoliatus, suppose quel-
quefois une spoliation, une action violente, telle
que celle d'un soldat qui enlève à son ennemi ce
qu'il porte sur lui. « La mère des Calas fut privée
de ses filles, et dépouillée de tout son bien. »>
VOLT. « La présence d'Adherbal, dépouillé de ses
Etats, et la mort de son frère, excitèrent une in-
dignation générale. » VERT.

nôtre, et on verra si nous sommes aussi dépourrus d'adresse que nous le disons. » BOURD. Ajoutez qu'on n'est pas dénué et dépourvu des mêmes choses. On est dénué de tout ce qui vêt, entoure, accompagne, et de tout ce qui est bon ou commode, sans aucun rapport à un emploi, à une destination, à un but. « On n'envisage que la substance du péché, dénuée de tout ce qui l'accompagne et de tout ce qui la suit. » BOURD. Dénué de mérites et de vertus (ID.); dénué d'argent MOL.), de biens (FEN.), de tout (BOURD.). Mais on est dépourvu de ce qui fait la force ou la sûreté, de ce qui rend capable d'action ou de résistance. Un pauvre est proprement dénué, une place est dépourvue. Buffon a dit : « Des terres froides, ingrates et dénuées, » et Fénelon : « La plupart des places qui nous restent sont dépourrues. Nous avions tout à craindre de la sagesse de Sésostris; mais sa puissance passant dans les mains de son fils, dépourvu de toute sagesse, nous conclûmes que nous n'avions plus rien à craindre. » FÉN. «Le défaut d'une seule de ces qualités rend aussi bien un homme inca-jours sur une personne. Les âmes du purgatoire pable d'être ce qu'il prétend, que s'il était dépourvu de toutes. » BOURD. Dénué, il vous manque quelque chose pour être bien; dépourvu, vous êtes faible ou impuissant. Un poëme est dénué d'intérêt; un pays, dépourvu de lois. L'homme dénué de sagesse est, selon la comparaison d'un auteur chinois, comme une armée dépourvue de chef. Vous êtes dénué de qualités, de vertus, de mérites; dépourvu d'énergie ou de ressources.

Privé est subjectif, relatif au sujet, qu'il présente comme à plaindre, comme mis dans un état fâcheux, dans un état où il ne peut jouir de ce qu'il a ou de ce qu'il pouvait avoir. La racine est privus, propre, sien, ce qui appartient en propre. On dit bien dépouiller une chose, ses vêtements, sa fierté; l'action de priver tombe tou

souffrent d'être privées de la vue de Dieu (BOURD.).
« Nous nous alarmons, nous nous troublons,
nous nous désespérons, à mesure que ces biens
nous échappent et que nous nous en voyons pri-
rés. » ID. « Ces princes, malheureusement privés
de succession, ne pouvaient recevoir de consola-
tion plus touchante que de voir.... » S. S.

Dans mon triste palais, seul et privé d'enfants,
J'aurais pu voir en vous l'appui de mes vieux ans.

VOLT.

Le second des fils d'Alexis était Ivan, encore plus maltraité par la nature que son frère Fodor, presque privé de la vue et de la parole, ainsi que de santé, et attaqué souvent de convulsions. >> ID. « Le premier vœu des aveugles est de recouvrer la vue, leur plus grand regret est d'en être privés. » LAH.

Destitué, du latin destituere, abandonner, signifie dépourvu par délaissement, réduit à soi-même,« qui n'a pas d'auxiliaire ou de soutien, à qui manque une force d'emprunt. On est destitué d'assistance (BOURD., Boss.), d'appui (Boss., ROLL.), de crédit (MASS., FEN.), d'un secours (BOURd.), du secours de la grâce (Boss.); une chose est destituée de fondement (ACAD.), de preuve (J. J.), de vraisemblance (LAH.). << Montaigne considère l'homme destitué de toute révélation. PASC. « Destitués, comme ils ont été, des expériences et des instruments nécessaires, les anciens n'ont pas dû prétendre à la gloire d'avoir tout connu.» J. J. « Les huguenots se trouvant destitués de la présence d'un chef si considérable (l'amiral de Coligny), le prince n'en pouvant plus, se retirèrent.» Boss. Fénelon dit de lui-même, dans sa querelle avec Bossuet: « Je suis seul et destitué de toute ressource humaine.» « Il ne reste alors aux consuls que des menaces, destituées réellement de tout pouvoir.» ROLL. Nous sommes dénués et dépourvus de ce que nous n'avons pas, destitués de ce qu'on ne nous prête pas, de ce qu'on ne nous donne pas. Destitué de bon sens et de raison, est tout à fait impropre, quoi qu'en dise l'Académie. On en citerait difficilement un seul exemple tiré d'un bon auteur.

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DÉSERTEUR, TRANSFUGE. Soldat qui abandonne le service sans congé.

Le déserteur (qui deserit, celui qui déserte ou fait défection, qui quitte son drapeau ou l'armée dont il fait partie), se retire, se sauve; c'est un lâche. « Alexandre dit à ses soldats qui refusaient de le suivre au delà de l'Hyphase: Allez donc en votre pays, et vantez-vous, lâches déserteurs de votre roi, de l'avoir abandonné. » ROLL. Le transfuge (qui trans fugit, celui qui s'enfuit au delà ou de l'autre côté), passe dans le parti opposé; c'est un traître. C'est la coutume de traiter favorablement d'abord les transfuges, à cause du service qu'on en tire, mais de les mépriser après comme des traîtres.» ROLL. Le déserteur n'est plus avec les siens, le transfuge est contre les siens; et, pour parler notre langue actuelle, le déserteur et le transfuge désertent, le premier à l'intérieur, le second à l'ennemi. Grande différence dont il est tenu compte dans le code militaire. « César demanda aux Helvétiens des otages leurs armes, et les esclaves déserteurs qui avaient été reçus dans leur camp.... Après qu'ils eurent livré les otages, leurs armes et les transfuges, il leur accorda à tous la vie sauve. » ROLL.

De même, au figuré, déserteur a rapport seu33

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