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un contenant, comme une digue et comme une
barrière. Une différence plus grande encore
sépare la rive et le rirage de la côte. Outre qu'ils
ne se disent pas toujours par rapport à la mer,
comme côte, ils demandent qu'on se place en
esprit du côté de la terre pour descendre vers
l'eau; au lieu que côte porte la pensée de la mer
à la terre. Un vaisseau quitte le rivage et se dirige
vers telle côte. « Voyez Virgile représentant les
navires troyens qui quittent le rivage d'Afrique,
ou qui arrivent sur la côte d'Italie. » FÉN. « Nous
nous éloignâmes de l'île de Crète; tous les riva-
ges disparaissaient; les côtes du Péloponèse sem-
blaient s'avancer dans la mer pour venir au-devant
de nous.» ID. Un vaisseau arrive sur une côte, et
pour recevoir les passagers on court à la rive ou
au rivage.

Quoi! vous êtes ici quand Mithridate arrive (de mer),
Quand, pour le recevoir, chacun court sur la rive!

RAG

Dans la Mort de Pompée, Achorée, qui a voulu voir débarquer les assassins de ce héros, dit à Cléopâtre :

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Le bourg est plus considérable que le village, qui est plus considérable que le hameau.

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Le bourg vient immédiatement après la ville pour l'importance, c'est presque une ville. La colonie que Cécrops amena fonda douze villes, ou plutôt douze bourgs dont il composa le royaume d'Athènes. Boss. Les communes sont en parlement pour les villes et les bourgs dont elles sont députées (en Angleterre). » VOLT. « Il paraît impossible que dans les gros bourgs et dans les villes le laboureur néglige de porter son blé au marché. » ID. « Si notre peuplade nombreuse occupe un pays étendu et fertile, il pourra se former des villes, ou du moins des bourgs, partout où elle tiendra des marchés. » COND.Le bourg, comme on le voit, a un marché.

Le village est au-dessous du bourg. « Le roi logea au bourg de Lerma avec une partie de sa suite; on prit les villages des environs pour le reste de la cour. » S. S. « Olmédo me paraît une ville, et vous m'avez dit que c'était un village; il fallait du moins le traiter de gros bourg. » Les. «Au moyen âge, toutes les villes, tous les bourgs, tous les villages étaient fortifiés,» COND. « Les faire embrasser leur religion; ils courent dans les chrétiens, dit Origène, ne négligent rien pour dé-villes, dans les bourgs, dans les villages. » VOLT. Le village a une paroisse et une commune: un curé, un maire de village.

Madame, j'ai couru par votre ordre au rivage. CORN. Quant à la différence de rive et de rivage, voy. Ire partie, p. 181.

BOUCLIER, REMPART. Ces mots au figuré signent quelque chose qui sert de défense.

Mais le bouclier est faible en comparaison du rempart: il ne préserve pas d'une manière aussi sûre et aussi complète. « Seigneur, couvrez cette maison (religieuse) de la vertu de votre ombre; protégez-la du bouclier de votre amour; soyez tout autour d'elle comme un rempart de feu pour la défendre de tant d'ennemis. » FÉN. Vertot fait parler ainsi qu'il suit Appius Claudius devant les sénateurs au sujet de Coriolan : « Si vous-mêmes ne lui aviez pas servi de bouclier et de rempart, on aurait assassiné à vos yeux un de vos plus illustres citoyens. >>

D'ailleurs, le bouclier garantit un combattant, ou dans le combat. « Vous faites un bouclier de cette accusation (d'hérésie) pour repousser les attaques de l'auteur des Lettres à un provincial. » PASC. « C'était la prière qui devait vous fortifier, qui devait vous fournir des armes, qui devait vous servir de bouclier pour repousser les attaques du démon. » BOURD. « Un prêtre doit avoir le bouclier de la foi et de la doctrine pour combattre contre la chair et le sang, contre les puis

sance invisibles.... » MASS.

Le hameau est plus petit encore que le village. << Un hameau de cinq ou six feux. » LES.

Du lieu qui me retient veux-tu voir le tableau? C'est un petit village ou plutôt un hameau.... BOIL. << Où donc, dans quel village, dans quel hameau deux jeunes gens de l'âge de Lubin et d'Annette ignorent-ils comment on se marie? » LAB.

La paraissait du roi Romule
Le donjon et son vestibule,
Le tout couvert modestement
De chaume; mais si simplement,
Qu'il eût passé pour l'apanage
De plus d'un vacher de village,
Encor dirai-je d'un hameau,

Tant ce donjon paraît peu beau.

SCARR.

hameaux, dans les fermes mêmes, on travaille les
« Dans les bourgs, dans les villages, dans les
matières premières pour les rendre propres aux
usages du colon ou du fermier. » COND. « Dans
lement dans les villes, ils se cultivent encore dans
ces monarchies, les arts ne se cultivent pas seu-
partout. » ID.
les bourgs, dans les villages, dans les hameaur,

«Si l'on élève l'une auprès de l'autre quelques Rempart est plus général : le rempart met à maisons rustiques, voilà un hameau: ajoutez à ce couvert de toutes sortes de dangers, et de dan-hameau une église paroissiale, c'est un village : gers éloignés, même simplement possibles. « Le faites tenir dans ce village un marché réglé, duc de Bourgogne doit maintenant se former l'es-vous aurez un bourg.» BEAUZ. prit au goût du bon et du solide, et s'en faire un rempart contre l'attrait des plaisirs et l'habitude de la dissipation.» S. S. « La fuite est au moins le plus sûr et le plus fort rempart que vous ayez à opposer au monde.» BOURD. « On amasse les revenus de l'Eglise pour s'en faire un rempart contre les accidents à venir. » MASS.

BOURG, VILLAGE, HAMEAU. Assemblage de maisons habitées par des paysans, par des gens de la campagne.

BOUT, EXTRÉMITÉ, FIN. Ce qui termine une chose.

Le bout termine une étendue en longueur : le bout d'une ligne, d'un fouet, d'une pique, d'un fusil, d'une allée, de la carrière. L'extrémité termine une étendue en longueur seulement, ou en longueur et largeur, ou en fongueur, largeur et profondeur. On dit également, l'extremité d'une ligne, d'une surface ou d'un corps; les extrémités du royaume, d'une province,

de l'orient, du monde. Dieu surpasse-t-il les = extrémités de l'univers en longueur, largeur et profondeur?» FÉN. - Et lors même que extrémité se dit en parlant d'une étendue en longueur seulement, il differe toujours de bout, en ce que celuici se prend matériellement pour une partie de la I chose, au lieu que extrémité, purement abstrait et dérivé directement du latin, n'a pas rapport à la chose même et n'en marque point une continuation. C'est la différence de sommet à sommité En mathématiques, on considère l'extrémité ou les extrémités de la ligne; mais on dit dans le langage ordinaire que le bout d'une ligne d'écriture n'est pas droit, que le bout d'une ligne à pêcher est armé d'un hameçon. « Les extrémités d'une ligne sont des points; les extrémités des superficies sont des lignes. Voilà les définitions, ou plutôt les suppositions sur lesquelles roule toute la géométrie. » BUFF. « Une jambe emportée avec les bouts des nerfs qui y étaient. » Boss.-Ou bien extrémité marque ce qu'il y a de plus éloigné dans la chose, de plus en dehors, extrà, et pour ainsi dire de plus extérieur dans le bout: on a mal au bout des doigts, on met le bout du doigt dans quelque chose; l'extrémité des doigts est très-sensible.

Fin est relatif, non pas à l'étendue et à l'espace, comme les deux autres, mais à une action et à la durée: La fin d'un récit, de la vie, d'une année, d'un règne, d'un spectacle, d'un concert, d'une maladie; prendre fin. La différence est palpable entre le bout et l'extrémité, ou les extrémités du monde d'une part, et la fin du monde de l'autre.

Le bout répond d'ordinaire à un autre bout d'un bout à l'autre; brûler la chandelle par les deux bouts; les deux bouts d'une chaîne, d'une lunette. « Les Lapons portent un bâton ferré, pointu d'un bout et arrondi de l'autre. » BUFF.L'extrémité répond au centre. « Le sang revient des extrémités au centre. » FÉN. « Epicure tient que l'univers n'a ni milieu ni extrémités. » ID. « Que les extrémités et le milieu (dans un poëme) se répondent. » MARM. « Et du centre, et des extrémités du royaume, la voix s'élève.... » ID. Quand on dit de quelqu'un qu'il habite au bout ou à l'extrémité de la ville, on fait entendre, d'une part, qu'il est loin de l'autre bout où on est, et d'autre part, qu'il est loin du centre.La fin répond au commencement. « Dieu n'a ni commencement ni fin. » ACAD. « Sans commencement il n'y a point de fin, et toute fin a un rapport essentiel à son commencement. » BOURd.

Toutefois, bout, dans certains cas, paraît plus synonyme de fin. Mais d'abord bout, d'une origine vulgaire, est moins noble que fin, traduit du latin finis. Ensuite, le bout se considère plutôt par rapport à la matière d'une chose et en exprime la dernière partie, et fin est plus relatif à une action et en désigne la cessation. On est au bout et non à la fin de son argent, de son rouleau. Il ne reste plus rien à faire à celui qui est au bout de ses travaux; celui qui est à la fin de son travail ne fait plus rien. Il en est de même du bout par à rapport à la fin d'un discours, de nos peines, d'une affaire. Bout est objectif et donne

l'idée d'une chose; fin est subjectif et rappelle une action.

BRONCHER, TRÉBUCHER. Faire un faux pas. un faux pas parce qu'on a heurté contre un tronc Broncher, de l'italien bronco, tronc, c'est faire ou une souche. Trebucher, italien traboccare, de tra bucco, dans un trou, c'est faire un faux pas et tomber.

de secousse, de marche inégale, dérangée, ralenBroncher n'emporte d'autres idées que celles tie. « L'esprit (à la différence du cœur) manque, il se trompe, il bronche à tout moment; ses allures ne sont point égales. » SÉv. « L'éléphant est une monture très-douce, car il ne bronche japrochaine est essentielle à trébucher. Trebucher mais. BUFF. Mais l'idée de chute effective ou s'est dit autrefois pour tomber. Boileau dit de

Ronsard:

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faut qu'un petit caillou pour vous faire broncher;
Broncher dit donc moins que trébucher. Il ne
si vous perdez l'équilibre, vous trébuchez. On
peut broncher et se redresser aussitôt; si l'on ne
tombe pas toujours en trébuchant, au moins on
de tomber trébuche. « L'auteur, sur un fagot
chancelle. Qui bronche jusqu'à courir le risque
d'épines, avait vu sa pièce chanceler au premier
acte, trebucher au second, et tomber au troi-
sième. » MARM.

Comme on le traînait (le cheval de bois), il broncha,
Et, prêt à trébucher, pencha.
SCARR.

Votre raison qui n'a jamais flotté,
Que dans le trouble et dans l'obscurité,
Et qui, rampant à peine sur la terre,
Veut s'élever au-dessus du tonnerre,
Au moindre écueil qu'elle trouve ici-bas,
Bronche, trébuche et tombe à chaque pas.
J. B. Rouss.

Comme on le voit par ce dernier exemple, la différence est la même au figuré. Broncher veut dire faire des fautes ou des erreurs légères. « La lumière de Dieu fait sentir jusque aux moindres fautes; mais elle ne décourage point. On marche devant lui; mais si on bronche, on se hâte de prendre sa course, et on ne pense qu'à avancer toujours. » FÉN.« Des auteurs anciens, qui bronchent à chaque pas, ont pourtant conservé leur grande réputation. » VOLT. Trébucher, au contraire, signifie faillir ou errer gravement.

J'en vais donner pour preuve une personne
Dont la beauté fit trébucher (succomber) Rustic.

LAF.

Et qui, voyant un fat s'applaudir d'un ouvrage, Où la droite raison trébuche à chaque page, Ne s'écrie aussitôt : l'impertinent auteur! BOIL. BUT, VUES, DESSEIN. Ce à quoi on regarde dans ses actions, ce qui dirige la conduite. En agissant ainsi, il a eu un but, des vues, un dessein. Pascal a fait connaître le but, les vues, le dessein ou les desseins des jésuites dans leur dispute contre Port-Royal.

Mais d'abord entre but d'une part, vues et dessein de l'autre, la différence est fort grande. Le but est quelque chose d'objectif ou d'extérieur : on se propose un but, on y tend; on y parvient, on l'atteint, ou le contraire. Vue et dessein expriment quelque chose de subjectif, qui est ou se passe en nous: on a des vues, on forme des desseins. Un but est plus ou moins éloigné; des vues et des desseins sont louables ou blâmables. On peut même dire le but des vues ambitieuses ou des desseins ambitieux des hommes, c'est d'augmenter l'idée qu'ils ont d'eux-mêmes (NIC.). On attribue un but à autres choses qu'à des êtres pensants: le but de la vie humaine (FÉN.), le but de l'élo- | quence (ID.). « Le but de la poésie est de plaire à l'imagination. » ROLL. Il n'y a que les êtres pensants qui puissent avoir des vues ou des desseins. · Outre cela, le but a plus de généralité et se rapporte à tout un genre d'actions, ou aux actions de toute la vie; aussi ce mot ne se dit-il guère qu'au singulier: « Tout le but de l'homme est d'être heureux. » Boss. Mais on peut avoir des vues et surtout un dessein relativement à une seule action et pour un cas particulier. Tous les hommes tendent à ce but, la félicité, quoique

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avec des vues différentes et des desseins differents (PASC.).

Vues et dessein diffèrent aussi. Les vues sont plus vagues; les desseins, plus arrêtés, mieux déterminés. « Ce prince ne faisait jamais rien de public sans des vues secrètes et sans des desseins particuliers. » VERT. Quand on a des vues sur une chose, on ne laisse pas d'y songer; quand on forme ou qu'on a le dessein de se la procurer, on s'en occupe et on y travaille d'une manière plus décidée et plus sérieuse. Avec des vues d'ambition on aspire aux honneurs; avec des desseins ambitieux on suit, pour arriver aux honneurs, un plan de conduite réfléchi et bien ordonné.

On dit ordinairement vues, au pluriel, le pluriel étant particulièrement propre à signifier quelque chose de peu précis; par la raison contraire, dessein s'emploie de préférence au singulier. « Le dessein que forma Themistocle, et qu'il exécuta, de tourner toutes les forces d'Athènes du côté de la mer, marquait en lui un génie supérieur, capable des plus grandes vues.» ROLL. « Le dessein de Cimon était, après qu'il aurait achevé la conquête de Cypre, de passer en Egypte, et d'y susciter de nouvelles affaires aux barbares; car il n'avait point de médiocres vues. » ID. « Cassius, de retour à Rome, après avoir obtenu par ses brigues l'honneur du triomphe qu'il méritait peu, porta plus loin ses vues ambitieuses, et forma le dessein de se procurer un pouvoir absolu. » ID. Tibère dit dans une lettre à Séjan: « Je me tais en ce moment sur mes vues, et sur le dessein que j'ai de vous attacher étroitement à ma personne. » D'AL.

loger et à coucher; au lieu que ceux qui viennent d'un autre pays, par la raison contraire ont besoin d'avoir, outre la nourriture, une demeure, une retraite pour le jour et surtout pour la nuit. 1° Cabaret, taverne, gargote, guinguette. Lieur

pour leur argent de quoi boire et manger.

α

Le cabaret, la taverne, la gargote et la guin-ouverts au public, où les gens du pays trouvent guette sont pour les habitants du pays; le logis, l'auberge et l'hôtellerie sont pour les voyageurs et les étrangers. Les ouvriers d'une ville, surtout ceux qui ne tiennent pas ménage, en fréquentent les cabarets, les tavernes, les gargotes et les guinguettes. Les personnes, qui doivent visiter ou parcourir une contrée, s'informent s'il s'y trouve, sur les routes et dans tous les lieux où elles veulent s'arrêter plus ou moins, de bons logis, de bonnes auberges ou de bonnes hôtelleries.

De plus, ce qui est offert dans le cabaret, la taverne, la gargote et la guinguette, c'est le vivre ; dans le logis, l'auberge et l'hôtellerie, c'est aussi le couvert. Différence tout à fait conforme à la précédente les habitués des cabarets, des tavernes, des gargotes et des guinguettes, ayant chacun son chez soi près de là, ne peuvent avoir besoin que de boire et de manger, et il est tout naturel qu'ils n'aillent pas demander ailleurs à

Cabaret est le terme général. Dans le cabaret, primitivement, on ne tenait que du vin; plus tard on y a aussi servi à manger. Vin de cabaret (ACAD.). « Un Romain qui avait donné asile à l'orateur Marc-Antoine, voyant chez lui un hôte de cette importance, voulut le bien traiter. Il envoya donc son esclave au cabaret, avec ordre de prendre du meilleur vin.... ROLL. « Rolando entra dans un fameux cabaret, demanda du meilleur vin, et dit à l'hôte de nous préparer à dîner. » LES.

Un autre, à toute force, en me serrant la main, Me veut mener souper au cabaret voisin. REGN. « Un jour, étant à Boudry, j'entrai pour diner dans un cabaret. » J. J.

La taverne est un ignoble cabaret, qui donne seulement à boire, mais où on boit à l'excès, où on se soûle; c'est un cabaret qui n'est hanté que par des ivrognes et par la canaille. « Le monde a

vu le rebut de toutes les classes de la société, et | excellente à deux pas de sa maison, que l'on y surtout de la dernière, s'échappant des galetas, était bien servi, et qu'il y allait quantité d'hondes tavernes, des cachots, des bagnes et des gi-nêtes gens. » LES. bets, désarmer, dépouiller, égorger tous les ordres de citoyens. » LAH. « Plongé dans les plus brutales débauches, il a passé sa vie dans les tavernes et les mauvais lieux. » J. J. « Les plus bas gredins tiennent parmi nous des discours plus honnêtes dans leurs tavernes. » VOLT. « NOS voleurs (en Angleterre) passent leur misérable vie dans des tavernes avec des filles perdues; ils les battent, ils se battent entre eux; ils tombent ivres au milieu de leurs pintes de plomb dont ils sé sont cassé la tête.» ID. « La gueuserie était mon élément. Accoutumé aux soupes d'Egypte, je n'aimais que la taverne. » LES.

La gargote est un petit cabaret où on prend des repas à bas prix, et plus ordinairement un méchant petit cabaret où on mange mal et malproprement. « Les deux écus que je demandais au duc d'Orléans étaient pour les donner aux deux chanoinesses de sa part, afin qu'elles eussent au moins pour quelques jours à dîner de quelque gargote. » S. S. « Nous avions le soir une table particulière. Dans la plus vilaine gargote on est servi plus proprement, plus décemment, en linge moins sale, et l'on a mieux à manger. » J. J.

La guinguette est un cabaret hors de la ville, où le peuple va boire, danser et se divertir les jours de fête. Nos promenades tête-à-tête hors de la ville, où je dépensais magnifiquement huit ou dix sous à quelque guinguette. » J. J. « Orchestre à peine digne des tréteaux d'une guinguette.» ID. « Les violons des guinguettes. » ID. « Un musicien de guinguette. » BEAUM. « Les fêtes ne peuvent avoir été instituées que par les commis des aides, par les cabaretiers, et par ceux qui tiennent les guinguettes. » VOLT. J'avais dîné souvent avec deux poëtes de l'ancien opéra-comique, dont le génie était la gaieté, et qui n'étaient jamais si bien en verve que sous la treille de la guinguette. » MARM. « Je fus élevé dans la guinguette du fameux Lucas, le premier homme du Gros-Caillou pour les noces et les festins, et surtout pour les matelotes. » ID.

D

α

2° Logis, auberge, hôtellerie. Lieux ouverts aux voyageurs et aux étrangers, qui y trouvent pour leur argent tout ce qui concerne le vivre et le couvert.

Le logis, le mot l'indique assez, fournit surtout le logement ou le couvert. Dans un bon logis à pied et à cheval le voyageur trouve pour soi et sa monture un gite commode.

L'auberge fournit surtout le vivre. « Oronte s'est logé dans une auberge où il a, dit-il, le plaisir de ceux qui voyagent sans leurs peines, parce qu'il voit tous les jours à souper de nouveaux visages. » VAUV. « Si je voyage, on me consignera aux passagers, aux cochers, aux cabaretiers; à peine trouverai-je à manger avec quelqu'un dans les auberges, à peine trouverai-je un logement qui ne soit isolé. » J. J. « Je pris le parti de louer une chambre garnie.... Comme l'heure du dîner approchait, je demandai à mon hôtesse s'il n'y avait pas quelque auberge dans le voisinage. Elle me répondit qu'il y en avait une

SIN. FRANG.

L'hôtellerie fournit également le couvert et le vivre. Mais ce mot, dérivé du latin hospes, hôte, annonce quelque chose de plus grand et de plus relevé que le logis et l'auberge, ou se dit dans un style moins commun. « J'arrivai à Tolède. J'allai loger dans une bonne hôtellerie, où je passai pour un cavalier d'importance. » LES. « Je laissai don Alphonse dans son hôtellerie. » ID. L'hôtellerie du maître de la poste était la mieux fournie qu'il y eût entre Calais et Paris. » HAM. « Nous ne sommes ici-bas que comme des voyageurs dans une hôtellerie, ou sous une tente. »

FÉN.

D

Logis est peu usité, et, du reste, vague, attendu qu'il signifie en général une maison quelles que soient les personnes qui l'occupent ou doivent l'occuper. Auberge manque de noblesse: l'auberge ne reçoit guère que des gens de la campagne qui se rendent dans quelque petite ville voisine pour leurs affaires, avec ou sans charrettes, avec ou sans monture. Le mot hôtellerie lui-même a été dédaigné pour celui d'hôtel, qui est encore plus noble, car il se dit d'abord de la maison d'un grand, d'une demeure somptueuse : l'hôtel de Venise, l'hôtel d'Angleterre. Voy. première partie : Hôtel, hôtellerie, p. 203.

CADUCITÉ, DÉCRÉPITUDE. État de l'homme dans l'âge où il décline.

Caducité est d'abord plus général : il se dit des choses aussi bien que de l'homme. « Le vice le plus inhérent et le plus inséparable des choses humaines, c'est leur propre caducité. » Boss. Caducité, c'est-à-dire mortalité, fragilité, disposition prochaine à choir (cadere), à tomber, à finir. « Il doit rester dans cet édifice rétabli quelques vieilles pierres, reste de sa caducité ancienne. » ID. « Je vois en la vieillesse d'Elisabeth la mourante caducité de la loi. » ID. « Bâtiment, édifice caduc. » ID. « La chute des maisons ruinées par caducité, ou par les incendies, les tremblements de terre. » ROLL. La généralité de ce mot est tellement sentie que, quand on veut l'appliquer la vie humaine en particulier, on prend quelquefois le soin de le déterminer la caducité de l'âge (Boss., S. S.), la caducité de son âge (Boss., MASS.).

Lorsque les deux mots se rapportent à la vieillesse, décrépitude, qui est le terme spécial, enchérit sur caducité. Il marque d'abord un âge plus avancé.

Caducité vient de cadere, choir, déchoir, tomber, et par sa terminaison il exprime, non pas l'action ou la qualité effective de tomber, mais la disposition à tomber; en sorte que ce qui est caduc est sujet à tomber, menace ruine: la vieillesse caduque et ruineuse d'un temple (Boss.). Décrépitude a pour racine crepare, faire du bruit, et signifie faire du bruit, ou craquer, en se détruisant, car de marque dégradation, destruction. Si donc dans la caducite on menace ruine, dans la décrépitude on est en ruine.

L'idée de la caducité enferme l'idée de la vieillesse, et celle de l'affaiblissement des organes,

23

dit-elle, je suis décrépite: on ne peut plus m'envisager sans horreur. Il faut me cacher au fond d'un cloître : j'aime mieux m'y tenir renfermée le reste de mes jours, que d'offrir aux yeux un objet effroyable. » LES. « Je pense que vous avez eu bien des amants dans votre jeune âge. - Trédame, monsieur, est-ce que Mme Jourdain est décrépite?» MOL.

CALENDRIER, ALMANACH. Liste de tous les jours de l'année, rangés par mois et par semaines, et marqués chacun du nom d'un saint, avec indication des fêtes principales, du commencement des saisons, des variations régulières de la lune, ainsi que de l'augmentation et de la diminution des jours.

rien de plus c'est un état de défaillance. « Cra-il, vieillard décrépit. » FÉN. « Francisca, me tès mourut de caducité et de défaillance. » FÉN. Renvoyer le repentir aux années de caducité et de défaillance. » MASS. «Ils le laissaient avec leur père pour être le support de sa caduque vieillesse. Boss. « Une vigueur spirituelle, qui se renouvelle de jour en jour, ne permet pas à son âme de sentir la caducité de l'âge. » ID. « Si les pilules dont Votre Majesté a honoré ma caducité peuvent me rendre quelque vigueur.» VOLT. « Je sais par expérience ce que produit à la longue une forte application, c'est d'éprouver la caducité avant le temps.» D'AL. « De vieilles prétendues repenties, dont l'esprit romanesque était demeuré pour le moins galant, si la caducité de l'âge en avait banni les plaisirs. » S. S. « C'est dans une caducité où il ne paraît avoir plus rien de redoutable à l'ennemi qu'il sent plus de force que ja mais, MASS. « Ceux que nous attaquons, dit Catilina à ses complices, affaiblis par la caducité, énervés par les délices, sont tombés dans une langueur universelle.» ROLL. - L'idée de la décrépitude, avec l'idée de la vieillesse, contient celle d'infirmités, de délabrement de la machine; c'est la vétusté de l'homme, c'est un commencement de mort. « Sages vieillards, vous êtes décrépits, languissants, cacochymes, perclus de tous vos membres; vous ne sauriez agir; vos douleurs augmentent de jour en jour. » J. J. « Je suis accablé de tous côtés dans une vieillesse que les maladies changent en décrépitude. » VOLT.« Les religieuses ont toujours conservé à cette abbesse une grande tendresse, jusqu'au dernier moment de sa vie, et dans l'extrême caducité de son âge.... Jusque dans la vieillesse la plus décrépite elle souffrait les incommodités et les maladies sans chagrin et sans murmure. » Boss.

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Dans la caducité, le corps ressemble, comme dit Bossuet, à un édifice dont les fondements sont ébranlés. Dans la décrépitude, le corps présente dejà un aspect cadavereux. « On a vu des pasteurs dans une décrépitude, où à peine leur restait-il assez de force pour soutenir un cadavre tout prêt à retomber en pourriture, songer encore à l'argent. » MASS. « Vers quatre-vingts ans, le P. de La Chaise voulut se retirer. La décadence de son corps et de son esprit l'engagea à redoubler ses instances. Les infirmités de la décrépitude qui l'assaillirent ne purent le délivrer. Les jambes ouvertes, la mémoire éteinte, le jugement affaissé, les connaissances brouillées, rien ne rebuta le roi, et jusqu'à la fin il se fit apporter le cadavre et dépêcha avec lui les affaires accoutumées. » S. S. Décrépitude fait une image hideuse, et décrépit est un terme injurieux, surtout en parlant d'une femme. « J'ai bien peur de ne reparaître que quand une décrépitude avancée m'aura imposé la nécessité de ne plus me montrer. » VOLT. « Ils ressemblent à ces vieillards décrépits, qui se font asseoir à leur porte, quoique, dans cette posture, ils ne soient qu'un objet de compassion ou de mépris. » D'AL. « La femelle devient encore plus dégoûtante et plus affreuse dans sa vieillesse, l'objet le plus hideux de la terre est une décrépite. » VOLT. Le mendiant Irus voulut chasser Ulysse de son poste. Retire-toi, dit

C'est exactement ce que signifie calendrier ; et, comme toutes ces connaissances peuvent être présentées brièvement, le calendrier se réduit d'ordinaire à un simple tableau. L'almanach, au contraire, est toujours un livre, et ce livre contient de plus que le calendrier, des observations astronomiques, notamment sur les éclipses, de prétendus pronostics du beau et du mauvais temps, des prédictions fantastiques, l'indication des foires, et quelquefois d'absurdes prescriptions sur les jours où il convient de semer, de planter, de se faire saigner ou de prendre médecine. Au reste, il est impossible de circonscrire avec une entière précision le domaine de l'almanach: c'est. aujourd'hui surtout, une partie de la menue littérature extrêmement variée. Il se publie sous ce titre au commencement de chaque année une foule de petits livres plus ou moins utiles, adressés à diverses classes et traitant différentes sortes de matières. Le calendrier, la seule chose commune à tous, et qui est la même pour tous, sert d'occasion.

CAPABLE, HABILE, ADROIT, INDUSTRIEUX. INGÉNIEUX, INTELLIGENT, ENTENDU. Épithètes qualificatives d'un homme propre à bien faire certaines choses.

Capable et habile ont été très-nettement séparés l'un de l'autre par Voltaire : Le capable, dit-il, peut, et l'habile exécute. » On est capable en puissance, habile actuellement. La capacité est une disposition, quelque chose qui promet, de sorte que l'homme capable ressemble à un vase vide, qui ne contient pas, mais qui est en état de contenir, capax; l'habileté est une qualité effective, qui consiste à bien tenir (habere, avoir, tenir), à bien manier, à agir avec facilité. Un général capable est naturellement apte à commander, ou bien il a lu tout ce qu'on a écrit sur la guerre, assisté même à plusieurs combats; un général habile a commandé plus d'une fois avec succès, il a fait ses preuves. On dit une vaste capacité, et une habileté consommée. On juge à priori ou d'après de simples indices qu'un homme est capable, qu'il fera bien; c'est à l'œuvre qu'on voit si un homme est habile, s'il fait bien. Pour former des sujets capables, l'éducation doit proposer à l'imitation des jeunes gens les hommes qui ont été habiles.

S'agit-il de ce que pourra faire quelqu'un dans une place qu'il n'a pas encore occupée, on se

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