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manières, composé dans son maintien, apprêté | la tyrannie. » ID. « Plisthène rappelle au féroce dans ses discours ou dans ses écrits.

L'acteur qui charge et un grand faiseur de protestations, sont affectés; l'hypocrite et l'homme qui se donne un air grave, sont composés; le rhéteur et l'écrivain, chez qui on ne trouve ni flexibilité ni rien qui coule de source, sont apprétés.

AFFERMIR, RAFFERMIR, CONFIRMER, CIMENTER, SCELLER. Tous ces verbes, pris ici au figuré, veulent dire donner de la consistance, rendre durable.

Atrée les serments qui ont scellé sa réconciliation
avec son frère. » LAH.

Je n'examine point si les dieux offensés
Scellèrent mes serments à peine commencés.

(Érope à Atrée dans les Pelopides). VOLT.
1° AFFIRMER, ASSURER, CONFIRMER ;
2° ATTESTER, CERTIFIER; - 3° PRETENDRE,
AVANCER, SOUTENIR; 4 GARANTIR, RÉ-
PONDRE; -5° PROMETTRE, Présenter une chose
comme vraie, dire qu'elle est, a été ou sera.
1° Affirmer, assurer, confirmer.

Affermir, raffermir et confirmer ont le même On affirme d'un ton ferme, et en donnant pour radical, ferme, ou firmus qui en latin signifie la certain; on assure d'un ton de confiance, et en même chose. On affermit ce qui est faible: on donnant pour sûr. Affirmer suppose quelque raffermit ce qui chancelle ou est ébranlé; on chose d'évident dont on est convaincu ou dont on confirme ce qui est fort, ce dont on augmente veut convaincre. « On peut affirmer en tout temps encore la force. Affermir marque une première de l'homme que c'est un être intelligent quand il action; raffermir et confirmer en désignent une existe. » FEN. « Ce n'est pas que je veuille affirseconde; mais raffermir la fait concevoir comme mer qu'il y a des corps; car il n'y a encore rien réparatrice, et confirmer comme complétive. Ce d'évident qui me tire du doute sur cette matière.» qui est affermi est solide; ce qui est raffermi est ID. Mais assurer suppose quelque chose de plaurétabli; ce qui est confirmé est d'une solidité sible ou de spécieux dont on est persuadé ou pleine, achevée, parfaite. « L'étude des preuves dont on veut persuader les autres. « Quand j'ai de la vérité de la religion affermit et fortifie notre renversé Périclės par terre en luttant, dit Thufoi. » D'AG. « Les confédérations ne sont qu'un cydide, il assure le contraire avec tant de force, moyen de raffermir et rétablir la constitution qu'il persuade en effet à tous les assistants contre ébranlée par de grands efforts. » J. J. « Cela me le témoignage de leurs propres yeux, qu'il n'est confirme pleinement dans ma résolution. » ID. point tombé. » ROLL. « J'ose presque assurer que les hommes savent encore mieux prendre des mesures que les suivre. » LAH.

Cimenter suppose des parties entre lesquelles on met du ciment, un lien, et qu'on rend ainsi inséparables, indivisibles. On affermit, on raffermit, on confirme un sentiment, ou quelqu'un dans un sentiment; on cimente une union, une alliance, l'amitié. « Dieu a donné aux hommes divers talents. L'un est propre à une chose, et l'autre à une autre, afin qu'ils puissent s'entresecourir, comme les membres du corps, et que l'union soit cimentée par ce besoin mutuel. » Boss. « Le fils de Dieu ayant voulu que son église fût une, et solidement bâtie sur l'unité, a établi | et institué la primauté de S. Pierre, pour l'entretenir et la cimenter. » ID. « Il faut, belle Agathe, cimenter notre intelligence par des liens plus étroits que ceux de l'amitié. » MARM. « Le testament qui doit cimenter un jour nos alliances.» REGN.

Sceller rappelle un acte de l'autorité administrative ou judiciaire qui rend authentiques et inviolables les choses auxquelles il s'applique. Ce qui est scellé a reçu un caractère de consécration. << Afin qu'on ne puisse douter de leur bonne foi, non plus que de leur persuasion, J. C. oblige ses apôtres à sceller leur témoignage de leur sang. Ainsi leur prédication est inébranlable; le fondement en est un fait positif. » Boss. « Charondas, trouvant la ville en tumulte, entra tout armé dans l'assemblée; ce qu'il avait défendu par une loi expresse. Un particulier lui reprocha qu'il violait lui-même ses lois. Non, dit-il, je ne les viole point, mais je les scellerai de mon sang, et sur-le-champ il se tue de son épée. » ROLL. « Brutus crut devoir sceller par le sang de ses enfants la délivrance de la patrie, et inspirer aux Romains pour tous les siècles, par cette sanglante exécution, une horreur invincible de la servitude et de

On affirme qu'une chose est ou a été. « Hubner affirme qu'on ne peut trouver en Europe un terrain d'une lieue d'étendue qui ne soit habitė. » VOLT. « Le P. Amiot jure qu'il a traduit ce passage à la lettre. Les ennemis des jésuites diront que ce serment même est très-suspect, et qu'on ne s'avisa jamais d'affirmer par serment la fidélité de la traduction d'un endroit si simple. »ID. « Dans la magie il y a des faits embarrassants, affirmés par des hommes graves qui les ont vus.» LAH. Mais, comme on n'est jamais que moralement sûr de l'avenir, assurer convient seul ou convient mieux en parlant de ce qui sera. « Il fait bâtir une maison dont il assure en toussant, et avec une voix faible et débile, qu'on ne verra jamais la fin.» LABR. « Si l'esprit examine à la lumière pure de la vérité qui l'éclaire toutes les sciences humaines, on ne craint point d'assurer qu'il les méprisera presque toutes. » MAL. Je voulais vous venir, mais sans nul artifice, Assurer que je suis tout à votre service. MOL. Affirmer, affirmare, est un terme de science: la logique n'en connaît pas d'autre pour exprimer l'idée signifiée par tous ces mots; elle definit le jugement une opération de l'esprit par laquelle il affirme ou il nie; la proposition est un discours qui.affirme ou qui nie (ACAD.). Assurer, au contraire, est le mot commun; il n'a ni le caractère de rigueur d'affirmer ni son caractère scientifique.

Confirmer, c'est ajouter à ce qui a été affirmé ou assuré. Ce mot annonce quelque chose de nouveau qui achève ou accomplit une première assertion. « Si le corps pèse si fort à mon esprit, ma religion m'apprend, et ma raison me confir

On prétend à tort ou à raison; on avance plus ou moins hardiment; on soutient avec plus ou moins de force.

4° Garantir, répondre.

-me que cet état malheureux ne peut être qu'une peine envoyée à l'homme. » Boss. « Lorsque nous assurames que Louis XIV n'avait eu aucune part au testament de Charles II, roi d'Espagne, les préjugés de l'Europe et de tous les écrivains s'é- Ces deux verbes ne sont pas de tous les styles; levaient contre nous; cette vérité fut confirmée ils ne conviennent guère qu'à celui de la converpar les Mémoires de M. de Torci et par le temps.»sation. Ils ont d'ailleurs leur sens propre, qui VOLT. Voy., dans la 1" partie, Affirmer, confirmer, p. 134.

2° Attester, certifier.

C'est affirmer ou assurer authentiquement, faire foi, rendre témoignage de vive voix ou par écrit pour ou contre quelqu'un ou quelque chose. Une personne interpellée atteste ou certifie, donne une attestation ou un certificat, qui devient un titre d'une autorité ou d'une valeur plus ou moins grande.

Attester vient du latin testis, témoin, et emporte l'idée de choses qu'on a vues soi-même. << Le fondement de la prédication des apôtres est un fait positif (la résurrection) attesté unanimement par ceux qui l'ont vu. » Boss. Il faut voir ce qu'attestent les témoins, ils déposent que....» VOLT. Certifier, faire certain, donner la certitude, se dit des choses qui sont parvenues à notre connaissance. « Je crois qu'il est de mon devoir de dire ici ce qui est parvenu à ma connaissance. Je certifie que celui qui dit à Lamberti cette étrange anecdote, était né en Russie, mais non d'une famille du pays.» VOLT. « Ceux qui érigèrent ce marbre attendirent 146 ans que la chose fût bien constatée pour la certifier à la postérité.» ID. « L'attestation, dit Laveaux, en cela d'accord avec Leroy, est un acte authentique par lequel on atteste la vérité d'un fait dont on a été témoin; le certificat est un acte authentique par lequel on assure la vérité d'une chose dont on a acquis la certitude de quelque manière que ce soit.»

Le médecin donne une attestation au malade qu'il soigne. Le maire ou le notaire délivre un certificat sur le témoignage ou l'attestation de certaines personnes ou d'un certain nombre de personnes.

3o Prétendre, avancer, soutenir.

Ces trois verbes ont un sens doctrinal: ils impliquent l'idée de faire valoir ce qu'on dit comme une opinion et de combattre le contraire un philosophe, un controversiste prétend, avance ou soutient telle chose. « Quant à ce que prétend M. Jurieu, que..., outre qu'on lui nie le fait qu'il avance, on lai soutient encore que la conséquence est directement opposée à la parole de J. C. » Boss.

Il y a de l'un à l'autre une gradation sensible. Prétendre marque ce qu'on se propose de défendre; avancer, ce qu'on propose pour le défendre; soutenir, ce qu'on défend actuellement. On prétend et on avance. « Je prétends et j'avance que toute âme chrétienne doit désirer la communion.» BOURD. On avance et on soutient. « J'avance et je soutiens, dit Cicéron, que dans toute cette île il n'y a aucun vase d'argent ou d'airain que Verrès n'ait convoité. » ROLL. « Entrons dans la salle de Pilate, et voyons avec quelle hardiesse la calomnie avance les plus grossières impostures, et avec quelle faiblesse elle les soutient. » BOURD.

est d'assurer ou de confirmer une chose en engageant sa responsabilité, en s'exposant, si la chose n'est pas véritable, à un recours, à des reproches, etc.

On garantit les qualités, on répond des événements. On garantit un homme tel ou tel. J'ignore ce qu'au fond le serviteur peut être ; Mais pour homme de bien je garantis le maître. (Madame Pernelle parlant de Tartufe). MOL. << Parbleu! je vous la garantis (cette pièce) détestable.» ID. « Je vous le garantis trop délicat pour vouloir se faufiler avec des veuves de commandeurs. » LES. « Voilà de l'enthousiasme : il est né poëte; et, à ce seul trait, je vous le garantis tel.» MARM.

α

Je ne garantis point sa science profonde. REGN. « Crois-tu qu'il m'aime? - Lui? je vous garantis qu'il a le goût trop mauvais pour aimer autre chose que lui-même.» DEST.

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On répond qu'un homme fera telle ou telle chose, ou que telle chose arrivera. Si la petite n'avait les cerises de son goûter que par une opération d'arithmétique, je vous réponds qu'elle saurait bientôt calculer.» J. J. « Nous avons des ennemis communs qui cherchent à nous brouiller: je vous réponds de mon côte qu'ils auront beau faire.» ID. « La Beaumelle peut réimprimer...;. je vous réponds que ses nouveaux chefs-d'œuvre ne me feront aucune peine. » VOLT. Laisse-moi faire, je te réponds que je le conjurerai lui-même (ce devin), et qu'il sera bien hardi si je ne le fais pas mourir de peur. DEST.

5° Promettre.

Verbe décidément familier, et qui signifie répondre d'un événement dont on dispose, dire ou assurer qu'on le fera arriver. « Je vous promets qu'il s'en repentira. » ACAD.

Ah! je te promets bien que je n'ai pas envie
De te l'òter, l'infâme à tes feux asservie. MOL.

ACANTHE.

Mais commencez par avoir mon estime.

LE CHEVALIER.

C'est le seul but que j'aurai désormais;
J'en serai digne, et je vous le promets. VOLT.
1o AFFREUX, HORRIBLE; — 2° EFFROYABLE,
ÉPOUVANTABLE. Très-mauvais.

Affreux et horrible expriment une impression de peine produite sur notre nature sensible ou morale; effroyable et épouvantable une impression d'étonnement et de peur. La laideur et le crime sont plus proprement affreux et horribles; les grands périls, les bruits ou les faits extraordinaires qui annoncent de grands désastres sont plus proprement effroyables et épouvantables. Affreux et horrible signifient plutôt très-mauvais esthétiquement et moralement; effroyable et épouvantable, très-mauvais eu égard à la grandeur du mal que l'objet contient et amène.

Ensuite, affreux et horrible sont des qualifica

Et je ne vois rien sous les cieux
D'affreux, d'horrible, d'odieux,

Qui ne me fût plus que vous supportable.

(Alcmène à Jupiter dans Amphitryon). MOL. 2o Effroyable, épouvantable.

Ils diffèrent comme effroi et épouvante. Ce qui est effroyable, glace, confond, rend stupéfait, tout ébahi. «O nuit désastreuse, nuit ef

tions essentielles, absolues. Il est affreux de calomnier un bienfaiteur. « C'est une chose horrible de tomber entre les mains du Dieu vivant. » Boss. Effroyable et épouvantable, qui peut ou qui doit causer de l'effroi et de l'épouvante, sont des qualifications contingentes: ce qui est effroyable et épouvantable ne produit pas nécessairement son effet. Le péché est horrible et l'enfer épouvantable.» Boss. De là vient que effroyable et épou-froyable, où retentit tout à coup comme un éciat vantable moins stricts, moins rigoureux, se prennent plus facilement par extension pour très-grand, sans rien garder du sens de mauvais. Foule (BOIL.), nombre (S. S.), quantité (SÉv.), distance (PASC., MOL.), différence (P. R.) effroyable; faim (ACAD.), étourderie (J. J.), sabbat (SÉv.), vacarme (S. S.) épouvantable.

1° Affreux,

horrible.

Affreux, qui cause des affres. Affre est un vieux mot français qui ne s'emploie plus que dans cette phrase, les affres de la mort, et signifie angoisses, souffrances. Horrible vient du latin horrere, se hérisser, parce que les poils se hérissent à la vue d'une chose horrible. Le dos de ce sanglier était armé d'une soie dure, aussi hérissée et aussi horrible que les piques d'un bataillon. » FÉN.

L'objet affreux est lugubre, triste, noir, sombre; il abat, il atterre, on en souffre, on ne peut le soutenir, on en est accablé. Tristesse (REGN.), mélancolie (MONTESQ.), pâleur (FÉN.), obscurité | (ID.), nuit (ID.), vieillesse (SÉv.), pénitence (BOURD.) affreuses; transes affreuses (BOIL.); accablement affreux (MONTESQ.), deuil affreux (ID.). Lafontaine parle d'un antre

affreux et solitaire

Triste séjour de l'ombre. « Les cérémonies lugubres et affreuses employées dans le dévouement.» ROLL. « Cette situation triste, pour ne pas dire affreuse. » S. S.

Ou suis-je? quelle nuit Couvre d'un voile affreux la clarté qui nous luit?

VOLT.

Mais, au lieu d'être passive, l'impression produite par ce qui est horrible est active. L'horrible soulève, révolte, provoque une réaction de la part de notre âme qui s'en détourne avec empressement. On reçoit des nouvelles affreuses (VOLT.); on frissonne en entendant d'horribles discours (ID.). On dit un état affreux (FÉN., J. J., MONTESQ.), et une horrible physionomie (S. S.), un horrible sacrilege (ID.). « Il tarde à Télémaque de s'éloigner de la présence horrible de Pluton. » FÉN.

Je l'ai rendue horrible à ses yeux inhumains,
Et ce fer malheureux profanerait ses mains.

(Phèdre parlant de l'épée d'Hippolyte). RAC,
Bourreau de votre fille, il ne vous reste enfin
Que d'en faire à sa mère un horrible festin.
(Clytemnestre à Agamemnon). ID.,
OEgine, arrache-moi de ce palais horrible.

(Jocaste). VOLT.

« La Brinvilliers, cette horrible femme.» Sév. << Il ne faut pas pousser le terrible jusqu'à l'horrible on peut effrayer la nature (sur la scène), mais non pas la révolter et la dégoûter. » VOLT. Par conséquent, horrible renchérit sur affreux. Mon cœur souffre, à vous voir, une peine incroyable: C'est un supplice qui m'accable;

de tonnerre cette étonnante nouvelle Madame se
meurt, Madame est morte! » Boss. « Des regards
effroyables.» RAC. «L'indignation leur fit élever à
tous un cri si effroyable, que l'on rapporte qu'un
corbeau qui volait au-dessus de l'assemblée en
fut frappé comme d'un coup de tonnerre, et
tomba au milieu de la place. » ROLL.-Ce qui
est épouvantable trouble l'esprit, rend tout
éperdu et porte à fuir en désordre. « Les esprits
faibles se figurent des spectres épouvantables;
ils se troublent et se récrient comme si tout était
perdu! » MAL. Menaces épouvantables (ACAD.).
<< Les hypocrites se sont armés contre ma comé-
die avec une fureur épouvantable. » MOL.
ALCMÈNE.

Et moi, partout je vous fuirai.

JUPITER.

Je suis donc bien épouvantable.

(Amphitryon). MOL. Effroyable est plus voisin d'étonnant, et épouvantable d'étrange. Il en est de même dans le sens hyperbolique de ces mots. Effroyable se dit pour marquer qu'il y a prodigieusement de quelque chose: « Il y avait un monde effroyable à leur assemblée. » ACAD. « Une multitude effroyable d'Allemands. Boss. « Des essaims effroyables de sauterelles. » ROLL. « Il en mourut un nombre effroyable. » S. S. Épouvantable se dit pour signifier qu'une chose est ou se produit d'une manière inconcevable, qui trouble les idées, qui fait qu'on ne s'y reconnaît plus. Désordre (J.J., Boss.), carnage (Boss.), confusion (MOL.), faute (J. J.), étourderie (ID.), fracas (ACAD.) épouvantable. Effroyable ne regarde que la quantité seule; épouvantable se rapporte à toute autre chose, la complication ou le mélange. Dépense essroyable, arrête l'esprit sur la grande quantité de choses dépensées: « Huit cents livres! Mais voilà une dissipation effroyable. » DEST. Dépense épouvantable, appelle l'attention sur la manière extravagante, désordonnée dont on a dépensé. On dit un bruit effroyable (Boss., FÉN.), et un vacarme ou un sabbat épouvantable (ACAD., SÉv., S. S.). Pareillement, un cri est proprement effroyable:

α

Un effroyable cri, sorti du sein des flots,

Des airs en ce moment a troublé le repos. RAC. Mais une clameur, ou un mélange de plusieurs cris, est épouvantable :

Soudain de mille cris le bruit épouvantable
Vient arracher ses sens à ce calme agréable. VOLT.

Un temps affreux et un temps horrible sont des temps très-vilains, très-déplaisants. Mais l'un afflige, attriste, désespère; l'autre vexe, indigne, et fait, comme dit Mme de Sévigné, en employant cette expression, qu'on garde le coin de son feu et qu'on ne met pas le nez dehors. — Un temps effroyable et un temps épouvantable sont des temps très-mauvais, à faire peur. Mais

l'un suppose de la grêle, des torrents de pluie, des tonnerres, des ouragans; et l'autre. un dérangement des saisons, un désordre dans les éléments.

AGIR, FAIRE. Se manifester comme cause, exercer sa puissance.

pas un instant tranquille et ne permettent pas de goûter en paix le fruit du crime.« Dieu n'accorde aucun repos au pécheur, et sans relâche l'inquiète (par les remords), l'agite, le tourmente. » BOURD. « Ce seul vers (de Voltaire),

Mais s'il n'était Brutus, il l'allait pardonner, en dit plus qu'une scène entière d'agitations et de tourments. » LAH.

Agir est purement formel ou relatif à la forme: on agit de telle ou telle manière. Faire est, au contraire, matériel ou relatif à ce qui provient Aussi les grandes passions ne connaissent d'un développement de force: or fait ceci ou guère que les tourments et les transports. Le mot cela. « L'homme fait ce que Dieu veut, il agit d'agitation convient mieux pour les sentiments par la volonté de celui qui l'a mis au monde. » ou les passions plus faibles. Lors même qu'il s'aVAUV. « C'est pour Dieu et par la volonté de Dieu git d'objets à l'égard desquels il y a lieu d'espérer qu'un chrétien doit toujours agir.... Tout ce qu'il et de craindre, auquel cas agitation est le mot fait doit se trouver à la place et dans l'ordre où propre, on emploie tourment de préférence, si la règle veut qu'il se trouve. » MASS. « La sagesse ces objets sont importants, intéressent beaucoup. veut que, dans tout ce que nous faisons, nous Dans une cruelle inquiétude, dans une mortelle agissions avec réflexion. » GIR. On agit pour faire attente, une amante ou une mère n'est pas seuleune chose, et il arrive parfois d'agir beaucoup.ment agitée, mais tourmentée. de se donner beaucoup de mouvement, sans rien 1° AGRÉABLE; faire.

Agir regarde l'œuvre, la conduite, indépen- | damment de tout résultat; faire regarde l'ouvrage ou l'effet. Aussi dit-on agir, absolument, le pouvoir d'agir, tandis que à faire il faut un complé ment qui indique ce qu'on produit en faisant. Ei même quand ce complément manque, il est facile à sous-entendre. « Si vous voulez absolument m'envoyer cet écrit, faites. » J. J.

Agir en sage, c'est être sage, se comporter en sage; faire sagement, c'est effectuer quelque chose de sage. Clovis rendit ce pays à Gondebaud. Il fit sagement. » COND.

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AGITATION, TOURMENT. Grande peine d'es

prit.

2° DOUX, SUAVE, FLATTEUR, DÉLECTABLE, DÉLICIEUX, DÉLICAT, EXQUIS; - 3o RIANT, GRACIEUX, ATTRAYANT, CHARMANT. Qui plaît, qui fait sur nous une impression bonne ou heureuse. 1° Agréable.

Agréable est le terme général : il sert à qualifier tout ce qui nous fait quelque plaisir, tout ce qui nous affecte en bien ou d'une manière heureuse. Il a sous lui deux espèces, représentées par les deux séries de mots suivantes.

d'apercevoir des objets, des spectacles, des visages riants, gracieux, attrayants ou charmants. On dit une couleur douce ou suave, un son flatteur, parce que les qualités dont il s'agit frappent seulement les sens; mais on dit un tableau gracieux, une musique charmante, parce qu'il est ici question de choses qui parlent à l'esprit ou à l'imagination par l'intervention des sens.

Doux, suave, flatteur, délectable, délicieux, délicat et exquis se disent des choses qui touchent les sens, produisent des sensations et intéressent la sensualité. Riant, gracieux, attrayant et charmant se disent de celles qui sont perçues uniL'agitation est une alternative de mouvements quement par la vue, quelquefois par l'ouïe, qui contraires; c'est la peine d'une âme partagée produisent des sentiments, et se rapportent à entre plusieurs sentiments, l'espérance et la l'esprit ou à l'âme. L'homme voluptueux n'estime crainte, par exemple, qui va et vient de l'un à que ce qui est doux, suave, etc.; l'homme cul'autre, qui flotte, qui est dans une grande inrieux de belles choses, l'amateur, est heureux quiétude. Le tourment, au contraire, ne suppose ni pluralité de sentiments ni incertitude; c'est une peine causée par un mal déterminé et présent. Roxane qui doute si elle est aimée, qui croit tantôt l'être et tantôt ne l'être pas, éprouve les agitations de l'amour : sûre de n'être pas aimée, Phèdre souffre le tourment ou les tourments de l'amour.- Une vie d'agitation est une vie sans repos, pleine d'alarmes et de soucis. Une vie de tourment est une vie de souffrances. « Qu'est-ce que la vie de la cour, qu'une agitation éternelle sur l'avenir; qu'une révolution fatigante de craintes, de précautions, d'espérances? Mais une âme soumise à Dieu n'éprouve point ces troubles, ces frayeurs qui agitent les enfants du siècle. » MASS. Qu'est-ce que la vie d'époux mal assortis, sinon un éternel tourment? L'avenir nous agite; le présent et le passé nous tourmentent. D'ailleurs, tourment dit beaucoup plus qu'agitation. Le tourment est une torture, un affreux supplice: l'agitation n'est qu'une privation de repos, le plus grand des troubles. Dire qu'on est tour menté de remords, c'est donner une idée de l'extrême intensité de la peine qu'on éprouve; dire qu'on est agité par ses remords, c'est seulemert faire entendre que les remords ne laissent

2o Doux, suave, flatteur, — délectable, délicieux, délicat, exquis. Qui procure une sensation ou des sensations de plaisir.

Doux s'applique proprement aux sensations du goût; suave à celles de l'odorat; flatteur à celles de l'ouïe: une saveur douce, une odeur suave, un son flatteur.

Mais, comme le goût est une sorte de toucher, doux s'étend aux sensations du tact. Et même, comme l'action de tous les sens s'opère par un contact avec les qualités correspondantes des choses, l'épithète de doux se donne à tous les objets qui peuvent satisfaire nos sens, les modifier d'une manière qui convient à notre nature et qu'elle aime. Seulement, il faut ajouter que le doux, à la différence de l'agréable, auquel il ressemble par sa généralité, exclut tout ce qui peut être piquant ou aigre. « Ce ne sont pas absolu

(ACAD.), une maison riante (ID.); et, un tour gracieux (FÉN.), de gracieux contours (ACAD.), des manières gracieuses (ID.). Pour réussir dans les arts d'agrément, un auteur doit choisir des sujets riants et les traiter d'une manière gracieuse. Un spectacle riant suppose des objets immobiles; un spectacle gracieux suppose un certain jeu d'acteurs'.

ment les choses les plus douces qui sont les plus | manière aisée et élégante. On dit un aspect riant agréables aux sens, mais celles qui les chatouillent d'une façon mieux tempérée; ainsi que le sel et le vinaigre sont souvent plus agréables à la langue que l'eau douce.» DESC. « C'est autre chose de dire qu'une consonnance est plus douce qu'une autre, et autre chose de dire qu'elle est plus agréable; car tout le monde sait que le miel est plus doux que les olives, et toutefois force gens aimeront mieux manger des olives que du miel. » ID.

Suave a aussi son acception étendue et détournée. Il s'emploie à l'égard des qualités senties par la vue, l'ouïe et le goût, quand ces qualités sont d'une douceur particulière, qui demande pour la rendre une expression extraordinaire. L'eau douce n'est ni salée ni amère; l'eau suave a une douceur propre. Les vins suaves ont parmi les vins doux un je ne sais quoi qui les distingue et que les gourmets savent apprécier. Il y a des couleurs douces, comme il y en a de rudes; la couleur de l'émeraude est suave, tel peintre a un coloris suave.

Flatteur ne convient que pour ce qui est senti ou perçu par l'oreille: un murmure flatteur; le son flatteur de sa voix; le Rhin dort au bruit flatteur de son onde naissante (BOIL.). Flatteur veut toujours dire doux à entendre.

Délectable, délicieux, délicat et exquis sont par rapport aux mots qui précèdent des superlatifs. Ils attribuent aux choses la propriété de causer, non pas du plaisir simplement, mais des délices ou un très-grand plaisir.

Ce qui est délectable paraît devoir être ce qu'est effectivement délicieux, très-agréable (voy. Ir partie, p. 243). Ce qui est délicat a la qualité exprimée par delectable et délicieux, mais factice, et non pas naturelle on dit un fruit délectable ou délicieux, et une chère ou une table délicate. Exquis semble équivaloir tout à fait à délicat; étant participe passé comme ce dernier, il représente comme lui une qualité qui dépend de l'art et du goût des hommes, qui résulte de l'arrangement des choses, de l'apprêt, et qui est fort estimée, qui a une grande valeur d'opinion. On dit un mets exquis ou délicat, et, en parlant de la faculté par laquelle nous apprécions un mets, un goût exquis ou délicat. Mais ce qui est exquis n'a rien de commun, est choisi ou distingué; ce qui est délicat n'a rien de grossier, est fin. Il fallait à Apicius des mets exquis et recherchés avec soin; il faut à certains estomacs débiles des mets délicats, tendres, légers.

3 Riant, gracieux, attrayant, charmant. Qui excite un sentiment ou des sentiments de plaisir. Ce qui est riant ou gracieux plaît; ce qui est attrayant attire; ce qui est charmant plaît ou attire extrêmement, d'une manière merveilleuse, irrésistible.

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Attrayant marque l'attrait, la propriété d'attirer, de faire venir à soi. Ce qui est attrayant séduit. « Elle a la bouche grande; mais on y voit des grâces qu'on ne voit point aux autres bouches; et cette bouche, en la voyant, inspire des désirs; elle est la plus attrayante, la plus amoureuse du monde. » MOL. «De là ils iront voir le Vésuve. Conçois-tu ce que cette vue a de si attrayant? » J. J.

Charmant, qui charme, qui enchante, qui produit sur nous une impression mystérieuse et surnaturelle, a une force de signification singulière. L'objet charmant nous transporte; il n'y a rien au-dessus. « Le paysage de Genève est charmant; il n'y a rien de si agréable dans la nature.>> J. J.

Comment me trouves-tu?- Charmante. Votre beauté surprend, ravit, enlève, enchante. REGN. Le colibri et l'oiseau-mouche, ces deux chefsd'œuvre, ces deux merveilles de la nature, sont dans toute la rigueur du terme, et suivant la juste expression de Buffon, de charmants oiseaux.

AGRÉMENTS, GRÂCES, AMÉNITÉ. Qualités qui rendent aimable et par lesquelles plaisent les personnes, les discours, les écrits.

L'aménité, du latin amœnus, riant, doux, consiste dans la douceur. Il y a des graces piquantes, celles de l'épigramme, par exemple, et les agréments de la figure ne sont pas incompatibles avec un certain air de hauteur, d'empire et de fierté; mais l'aménité exclut tout ce qui est de nature à blesser les autres. Les agréments et les

4. Girard a comparé ensemble agréable et gracieux seuls et sans les autres mots considérés dans tout cet article. Il a été conduit à la même distinction. On est agréable par toutes sortes de qualités; on n'est gracieux que par celles qui se voient, qui tombent sous les yeux. L'homme agréable peut plaire par ce qui n'est pas apparent, observable, extérieur, c'est-à-dire par le fond, par l'esprit, l'humeur, le caractère ; l'homme gracieux ne plait que par le dehors, l'air, l'abord, les manières. On ne s'ennuie pas avec l'agréable, il amuse, il intéresse; on est ravi de l'accueil et des façons du gracieux, il est avenant ou poli. On dit d'une manière générale et abstraite, il est agréable de vivre avec ses amis; gracieux est toujours une expression concrète, relative aux formes ou à la D'ailleurs, agréable n'implique aucune action de la part du sujet; et c'est au contraire ce que gracieux suppose. « Gracieux est un terme qui manquait à notre langue, et qu'on doit à Ménage. Il veut dire plus qu'agréable; il indique l'envie de plaire. » VOLT. « Junon emprunte la ceinture de Vénus pour était agréable (FEN.) naturellement, sans chercher à se rendre toute gracieuse. » ROLL. Mais Alcibiade l'être. En matière d'art, la chose agréable agrée; la chose gracieuse est tournée de manière à agréer, mais il est à craindre qu'elle ne tombe dans l'affeetation.

forme.

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