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degré, ou, dans tous les cas, cette qualité par | pour que l'imagination ait pu songer à s'en emrapport à certaines circonstances particulières. parer, afin de les revêtir de formes. Les noms-adjectifs se disent dans le sens le plus vaste, le plus général, sans égard ni aux choses, ni aux personnes, ni aux circonstances, quelles qu'elles soient. C'est là la différence essentielle. Les suivantes n'en sont que les développements ou les conséquences.

2° Les substantifs abstraits s'emploient rarement sans un complément indirect commençant par de; c'est tout le contraire pour les substantifs-adjectifs. La beauté d'une femme, la vérité d'un récit, la justice et l'honnêteté d'un procédé, la solidité d'un édifice, les.extrémités d'un bâ

ton, etc.

3° C'est à cause de leur caractère d'absolu et d'indétermination que les substantifs-adjectifs, à la difference des autres, s'emploient bien sans l'article dans les expressions telles que celles-ci: Il fait, ou j'ai chaud ou froid.

4° Les substantifs-adjectifs ne s'emploient pas avec les adjectifs qui marquent plus ou moins. On reconnaît à un objet une grande beauté, à un magistrat une grande justice, mais non un grand beau, un grand juste.

5o Les substantifs-adjectifs ne se prennent pas non plus comme les autres dans le sens partitif. On dit qu'un homme a quelque bonté, quelque honnêtete dans le caractère, et non pas quelque bon, quelque honnête.

6 Dans les langues, le grec, le latin et l'allemand, qui, outre des substantifs masculins et féminins, en possèdent qui ne sont ni l'un ni l'autre, et que, pour cela, on appelle neutres (neutrum, ni l'un ni l'autre), les substantifs-adjectifs rentrent toujours dans cette dernière classe; ce qui contribue encore à leur faire perdre tout caractère de relation.

7 Comme les substantifs-adjectifs n'ont rapport à aucune réalité, ils expriment quelque chose d'invariable, de permanent, d'éternel, de non contingent. La beauté, la justice, la vérité, peuvent varier, et varient en effet d'un pays à l'autre; mais le beau, le juste, le vrai de

meurent.

8 Les substantifs-adjectifs appartiennent essentiellement aux sciences spéculatives, et les autres aux sciences empiriques, ou même aux beauxarts. Aristote et la philosophie scolastique prétendaient expliquer toutes les choses naturelles avec le chaud, le froid, le sec et l'humide; la physique moderne étudie la chaleur et l'humidité. L'esthetique traite du beau; la critique étudie la beauté dans les œuvres de l'imagination. La morale s'occupe du bon, la logique du vrai; les moralistes observateurs, tels que Labruyère et Larochefoucauld, recherchent la bonté des actions, et les sciences recherchent chacune un certain genre de vérité. Longin a fait un traité du sublime, qui ne roule en particulier et exclusivement ni sur la sublimité du style, ni sur la sublimité des pensées, ni sur aucune autre sublimité que ce soit. On a personnifié la beauté, la vérité, la justice, et partout on en a fait des êtres du sexe féminin. Le

beau, le trai, le juste sont trop loin des réalités

Entrons dans les détails. Deux systèmes ont régné en philosophie depuis Platon et Aristote sur les idées que représentent les substantifsadjectifs, savoir: celui qui les considère comme des types dont les substantifs abstraits marqueraient les manifestations, et celui qui ne voit, dans les substantifs-adjectifs, que la qualité abstraite au suprême degré. Tout en constatant dans les synonymes que nous allons examiner les distinctions établies plus haut, nous remarquerons que certains substantifs-adjectifs paraissent plus favorables au système platonicien et d'autres au système d'Aristote.

Le BEAU, la BEAUTÉ.

Le beau est absolu, la beauté relative. Le beau c'est le beau en soi, le beau véritable, le beau type, c'est un idéal que les artistes s'efforcent de réaliser, et, loin que le beau soit beau par sa conformité à la beauté, comme dit Roubaud, il semble plutôt que la beauté est dans les objets une modification qu'on doit considérer comme une manifestation ou une application du beau. Du reste, le beau, c'est quelque chose de vague ou beau sans exception; ce n'est point une idée plutôt d'étendu qui s'applique à tout ce qui est acquise, mais plutôt une conception par laquelle doit être, et non telle qu'elle est. La beauté est nous nous représentons une qualité, telle qu'elle relative elle se dit de ce qui a la grâce, la forme, les proportions requises par la mode, les moeurs, les usages, pour qu'un objet soit beau. Il y en a de bien des sortes : « Comme on dit beauté poétique, on devrait dire aussi beauté géométrique, beauté médicinale. » PASc.

Le VRAI, la VÉRITÉ. Ces deux mots sont plus synonymes que tous les autres, et ce qui fait qu'on hésite davantage dans l'emploi de l'un ou de l'autre, c'est que tous deux sont très-abstraits, très-éloignés des réalités. Cependant il n'y a point à s'y tromper.

La vérité est le vrai relatif, le vrai qui se démontre et s'acquiert par tel ou tel moyen. Le vrai est un type de vérité, un idéal, une conception à laquelle sont conformes toutes les vérités. Quand Boileau dit, rien n'est beau que le vrai, il exprime d'une manière absolue, nette, précise, tranchante, tout ce qui a été, est, ou sera vrai, tout ce qui est susceptible de posséder la qualité marquée par cet adjectif; il ne reste plus rien à désirer, on n'attend plus que l'auteur détermine de quelle vérité il entend parler. Pascal appelle l'homme « juge de toutes choses, imbécile ver de terre, dépositaire du vrai.» « Dieu et le vrai, dit-il encore, sont inséparables; et, si l'un est ou n'est pas, s'il est certain ou incertain. l'autre est nécessairement de même. » Mais quand il parle du vrai relatif, c'est-à-dire de celui qui s'acquiert, et par tels ou tels moyens, il se sert du mot vérité. « Nous connaissons la vérité, disent les dogmatistes, non-seulement par raisonnement, mais aussi par sentiment et par une intelligence vive et lumineuse. »

Le BON, la BONTÉ; le JUSTE, la JUSTICE; 'HONNÊTE, l'HONNÈTETÉ.

Le juste, l'honnéte, le bon sont dans la conscience de chacun fixes, invariables, immuables. L'homme de bien cherche à réaliser ces idées dans sa conduite, comme l'artiste cherche à réaliser celle du beau. La justice se lit dans les codes, et varie comme eux; l'honnêteté et la bonté ne sont pas moins relatives. C'est par la méditation qu'on arrive à connaître tout ce qu'implique le bon, l'honnéte et le juste; c'est par l'observation ou l'étude des mœurs et des lois seulement qu'on peut connaître la bonté, l'honnêteté et la justice.

L'INFINI, l'INFINITÉ.

que des manifestations; ils n'expriment que l'utilité et l'agrément portés au plus haut degré d'abstraction; l'utile et l'agréable, comme dit Roubaud avec raison, ont en partage et en propre l'utilité et l'agrément.

Le SOLIDE, la SOLIDITÉ.

Girard prétend que le solide a plus de rapport à l'utilité, et la solidité à la durée; mais il ne prend le mot solidité que dans un sens physique, ou, tout au moins, peu abstrait. Il est bien vrai qu'effectivement la solidité est un mot moins abstrait que le solide, et cela doit être d'après la règle générale. Mais il eût fallu considérer les L'infini est absolu, sans aucune relation à quoi deux mots dans le cas où ils sont le plus synoque ce soit; c'est, par exemple, dans la sphère nymes, c'est-à-dire tous deux abstraits, quand, des nombres, ce qui n'est ni pair ni impair, ce par exemple, on parle de la solidité d'une preuve qui n'augmente pas par l'addition et ne diminue (P. R.) ou d'une réponse (Boss.), auquel cas pas par la soustraction d'une unité., Si l'infinité ne on n'a évidemment aucun égard à la durée de ces s'emploie pas toujours avec désignation expresse choses. La solidité est quelque chose de moins des objets auxquels on la rapporte, elle est au abstrait, c'est la qualité de ce qui n'est pas facile moins très-propre à recevoir ce déterminatif, et à ébranler ou à détruire, au physique et au mopartant à sortir du vague où s'enveloppe l'infini. | ral. Le solide, c'est, d'une manière très-étendue Toutes les grandeurs tiennent le milieu entre et très-abstraite, ce qui fait qu'il y a dans les l'infini et le néant.... Nous sommes placés entre objets de la réalité, du fond, quelque chose qui une infinité et un néant d'étendue, de nombre, n'est ni vain ni frivole, comme par exemple dans de mouvement, de temps. » PASC. L'infinité, les objets qui ont de la solidité. Le solide est donc d'ailleurs, se prend seule, dans un sens hyperbo- ce qui constitue la solidité, ce qui en est l'eslique et relatif, pour signifier une grande multi-sence, ce sans quoi il n'y aurait point de solidité; tude: l'infini ne descend point ainsi de sa hauteur et ne se prête point ainsi aux à peu près du relatif; il échappe à toute comparaison. Le SUBLIME, la SUBLIMITÉ.

vous de cette pensée pour chercher le solide et la consistance. » Boss. « Notre piété n'a point encore cette solidité et cette consistance qui est le fruit de la prière. » FÉN.

Les EXTREMES, les EXTRÉMITÉS.

c'est l'être abstrait dont la solidité est la qualité propre. Aussi dit-on d'une manière tout absolue le solide, et d'une manière relative la solidité d'une chose, quelque solidité. « Le Diable boiteux Le sublime est tout ce qu'il y a de plus élevé, est un roman agréable et utile, c'est-à-dire utile ce au delà de quoi on ne conçoit plus rien. La par l'agréable et le solide: c'est ce qu'on veut sublimité est la qualité communiquée par le su- aujourd'hui dans les écrits, c'est-à-dire, outre blime, et presque toujours elle est présentée en l'utilité de plaisir, quelque solidité, de l'inrelation avec les choses auxquelles elle appar-struction, des mœurs, du vrai. » LES. << Serveztient. Le sublime est plutôt pour la conception, pour la théorie, on l'admire; la sublimité, plus accessible, tombe dans le domaine de la pratique, on y atteint difficilement. C'est de cette façon que Condillac distingue ces deux mots. Voici ses propres termes : « On dit le sublime dans le style, dans le discours, et la sublimité d'une science, d'un art, d'une pensée, du génie. Le premier élève l'âme par le nombre des grandes idées qu'il lui offre en peu de mots et d'une manière simple; le second lui représente ce qu'il y a de plus élevé dans une science, un art, etc., comme une chose à laquelle il n'est pas aisé d'atteindre. » « Aristote En cherchant le sublime, je ne suis point tombé dans le galimatias. Platon : Vous avez parlé d'une manière sèche et incapable de faire sentir la sublimité des vérités divines. » FÉN. Bien sentir le sublime des auteurs sacrés; être agité, à la représentation d'une tragédie, des mouvements que la sublimité ou la violence des sentiments peut exciter dans le cœur (D'AG.).

L'UTILE, l'UTILITÉ; l'AGRÉABLE, l'AGRÉ

MENT.

Je voudrais qu'à l'utile on joignît l'agréable. VOLT, Toutes les distinctions établies en commençant s'appliquent très-bien ici. La seule chose à remarquer, c'est que l'utile et l'agréable ne sont point, comme le beau, le juste, etc., des types, des idéaux dont l'utilité et l'agrément ne seraient

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Les extrêmes sont, comme le solide, l'utile, l'agréable; ils se prennent dans un sens trèsabstrait. Ainsi, en arithmétique, on dit, les extrêmes d'une proportion, en parlant du premier et du dernier terme, au lieu que dans la géométrie, science moins abstraite, on considère les extrémités de la ligne. En général, les extrêmes signifient des oppositions vagues, indéfinies, qui ne sont de mise que dans des phrases absolues peu précises, et dans les mêmes circonstances les extrémités offrent un sens plus déterminé. On dit, par exemple, porter les choses à l'extrême ou à l'extrémité: les porter à l'extrême, c'est les porter jusqu'au dela de toute limite; les porter à l'extrémité, c'est les porter jusqu'à la dernière limite. La première locution emporte un excès auquel il n'y a pas de bornes; la seconde, un excès concevable, aussi grand qu'il peut être par la nature de la chose; c'est seulement porter les choses jusqu'à la rigueur, et c'est pourquoi on dit bien la dernière et les dernières extrémités. Toutes les fois, du reste, que l'excès est déterminé par ce qui précède ou ce qui suit, le mot extrémité est le seul propre. Dans les Provin

ciales, le père jésuite ayant dit qu'il est permis de tuer pour un vol, l'interlocuteur demande : Combien faut-il que la chose vaille pour nous porter à cette extrémité? Enfin, comme le sublime, les extrêmes se disent plutôt quand il s'agit de théorie, de spéculations, d'opinions, et les extrémités quand il s'agit de pratique, de conduite.

Le ROUGE, la ROUGEUR.

Le rouge est abstrait et absolu; la rougeur est Concrète et relative. Le rouge se prend, comme le blanc et le noir, dans le sens le plus général et le plus vaste pour marquer le type d'une sorte de couleur, type invariable, subsistant seulement dans l'esprit et qui n'est considéré par rapport à aucun objet particulier; la rougeur, comme la blancheur et la noirceur, exprime dans divers objets une qualité qui tombe sous les sens, qui se manifeste à tel degré et de telle manière; c'est une réalisation du rouge: aussi dit-on la rougeur, et non le rouge, de quelque chose, des joues, des lèvres, par exemple. — On dit bien, en parlant d'une personne, que le rouge lui monte au visage, et que la rougeur lui monte au visage; mais l'une de ces deux expressions s'en-¦ tend toujours comme marquant une coloration du visage produite par un sentiment de l'âme, tel que la pudeur ou la colère, au lieu que l'autre, peut n'indiquer que le fait physique du sang qui monte au visage. Que si parfois on emploie aussi rougeur pour signifier qu'on rougit par l'effet d'un sentiment qu'on éprouve, ce mot se distingue toujours par sa relativité: on dira donc la rougeur, et non le rouge, de la honte ou de la modestie, une aimable rougeur, une rougeur subite, et non un aimable rouge, un rouge subit; et, au sujet d'une personne, sa rougeur et non son rouge. Enfin on se sert de rougeur pour les cas particuliers: à ces mots, dans telle occasion, on vit la rougeur lui monter au visage; remarquez la rougeur qui lui monte au visage. Rouge, au contraire, est réservé pour les phrases générales: on ne peut entendre de pareilles choses sans que le rouge monte au visage. « Le rouge au visage et le feu aux yeux sont un signe de la colère. Boss.

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Le FAUX, la FAUSSETÉ.

Le four est absolu, et la fausseté relative. Le faur.comme le vrai, est un idéal, quelque chose de vague et d'étendu qui s'applique sans exception à tout ce qui est faux, et à l'aide de quoi on distingue la fausseté partout où elle se trouve. La fausseté, au contraire, est le faux qui se fait voir, qui se manifeste effectivemen dans les êtres particuliers. On dit le faux d'une manière toute générale, sans penser à rien de réel : discerner le vrai d'avec le faux (ACAD.); « le faux est toujours fade. BOIL. On dit bien la fausseté avec détermination des personnes ou des choses: la fausseté d'un homme ou d'une nouvelle. Toutefois le faux se prend aussi relativement, mais c'est seulement dans la sphère de l'idéal, dans les matières abstraites, à l'égard des choses pensées et non à l'égard des choses existantes: on dit bien le faux d'un système (COND.), le faux d'une conséquence (BUFF.), le faux des

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expériences d'un physicien (VOLT.); mais on ne dit point le faux, comme on dit la fausseté d'un homme, de son caractère, de son visage. Et encore même alors le faux n'est qu'incomplétement relatif; car on ne dira point le grand faux, mais la grande fausseté d'un système ou d'un raisonnement. A quoi on peut ajouter que le faux se sent et que la fausseté se démontre. Le faux est plus vague et l'objet d'une aperception presque instinctive : « A la lecture, le faux de cette conception saute aux yeux. » LAH. La farisseté est mieux délimitée, mieux circonscrite, plus définissable et quelquefois moins essentielle que dépendante de la forme.

Le FRIVOLE, la FRIVOLITÉ.

Le frivole est abstrait et absolu; la frivolité est concrète et relative. On peut en théorie recommander de fuir le frivole, sans penser aux choses frivoles qui existent; mais en voyant les choses de ce monde on dira: laissez là ces frivolités. Le frivole est la qualité en soi, considérée intellectuellement, et la frivolité cette même qualité montrée par l'expérience, se manifestant, faisant impression sur nous : le frivole est insignifiant, la frivolité est insupportable; le frivole des choses de ce monde les rend indignes de notre ambition, et nous sommes continuellement frappés de la frivolité des choses de ce monde. Le GRAND, la GRANDEUR.

Le grand est abstrait et absolu : c'est une abstraction, un idéal, un type, qui n'admet ni degrés ni variations, et dont les diverses grandeurs` sont des images ou des imitations plus ou moins approchantes. Ce mot exprime d'une manière précise, abstraction faite des objets et des personnes, ce qui s'élevant au-dessus de l'ordinaire est digne de notre admiration. La grandeur est quelque chose de réel et de relatif qui tombe sous les sens et qui est plus ou moins conforme au grand. Le grand est une chose conçue; la grandeur, une chose perçue. On vise au grand; on admire la grandeur d'un héros. — D'ailleurs le grand se dit surtout dans l'ordre des idées, dans les matières de spéculation ou de littérature. « Le grand, le solide de la religion prend la place dans un bon esprit de tout le frivole qui l'avait amusé. MASS.

Le FORT, la FORCE.

Le fort est une qualité abstraite, intrinsèque; la force, une qualité effective et se faisant présentement sentir : le fort d'un argument le rend solide, la force d'un argument le rend victorieux; vous êtes incapable d'apercevoir le fort de cet argument, et de résister à la force de cet argument. L'homme qui est au fort de l'âge, c'està-dire au milieu de l'âge ou de la vie, dans l'âge viril, peut être très-faible par lui-même; car le mot fort est pris ici dans un sens vague, absolu, et il n'exprime ni une force propre au sujet, ni une force qui se développe actuellement. L'homme qui est dans la force de l'âge est vigoureux. ÉPAIS, ÉPAISSEUR.

Épais est abstrait, et épaisseur concret. On dit qu'une chose, un mur, par exemple, a tant d'épais: c'est une détermination toute mathématique. Épaisseur exprime une qualité physique,

d'application, trop petite ou trop grande, utile | l'une ressemble simplement ou est analogue, et ou nuisible, suivant les cas un mur a ou n'a l'autre est identique à celle qu'a possédée Herpas assez d'épaisseur pour supporter telle charge; cule. Il faudrait une force herculéenne pour rencertains corps ne sont opaques qu'à cause de verser cet obstacle, et il a fallu la force d'Hercule leur épaisseur. pour exécuter les douze travaux. Un habillement Le CHAUD, la CHALEUR; le FROID, la FROI-anglais ou français est fait à l'instar de ceux DEUR; le SEC, la SÉCHERESSE; l'HUMIDE, l'HU-d'Angleterre ou de France, et peut se confectionMIDITÉ.

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Méridional, septentrional, oriental, occidental; du midi, du nord, de l'orient, de l'occident. Conseiller honoraire, conseiller d'honneur. Homme important, homme d'importance. Esprit systématique, esprit de système. Etc.

L'adjectif se prend dans un sens plus étendu et moins rigoureux que la locution adjective. Il marque moins, comme elle, un rapport étroit d'appartenance ou de dérivation qu'un rapport éloigné de ressemblance avec la chose ou l'idée signifiée par le substantif. Une force herculéenne et la force d'Hercule se rapportent l'une et l'autre au héros fabuleux appelé du nom d'Hercule; mais

ner dans tous les pays du monde; un habillement d'Angleterre ou de France n'a pas seulement du rapport avec ces deux pays, il en vient, il y a été fait. Il y a des théâtres italiens, et non des théâtres d'Italie, dans presque toutes les capitales de l'Europe. D'un autre côté, il ne faut pas confondre la musique d'Italie avec la musique italienne: la musique d'Italie a été produite en Italie, par des auteurs de l'Italie, avec des paroles italiennes, et pour les théâtres d'Italie, qui les ont ensuite transmis aux autres : la musique italienne appartient au genre de celle des auteurs italiens, sans que peut-être elle vienne de l'Italie, sans que les paroles en soient italiennes et sans qu'elle ait été destinée aux théâtres de l'Italie. L'expression école de Descartes a une signification plus étroite que cette autre, école Cartésienne. Un philosophe de l'école de Descartes a entendu ce grand maître, a été du nombre de ses disciples immédiats, ou du moins professe et soutient tout son système et les mêmes doctrines que lui absolument; pour être de l'école Cartésienne, il suffit d'admettre les principes de Descartes ou un système qui ait du rapport avec le sien. Les idées de Platon sont propres au philosophe grec; les idées platoniciennes sont de tous les temps, de tous les lieux, et de tous les hommes; elles n'ont avec Platon qu'un faible rapport. En un mot, de Platon est un qualificatif propre, et platonicien un qualificatif commun. Un son argentin est un son qui ressemble beaucoup à celui que rend l'argent, mais ce n'est pas précisément le son de l'argent. De feu, d'eau, de métal, de soufre, se disent en parlant de choses composées des matières qu'ex

4. Faut-il regarder comme soumis à la règle les mots nouvelle et nouveauté, chose nouvelle, quoique le premier ne soit ni masculin, ni représentatif d'un type, d'un idéal abstrait? Rien ne s'y oppose, si on examine attentivement leur différence. En effet, nouvelle est plus abstrait que nouveauté, la nouvelle se rapporte à la connaissance qu'on acquiert plus qu'aux choses qui en font le sujet; à tel point que ce mot signifie quelquefois l'avis qu'on donne ou qu'on reçoit de ce qui vient d'arriver. La nouveauté, au contraire, a plus de rapport aux choses mêmes, à la réalité. La nouvelle est sue de peu de monde; elle porte sur des événements passés, chose idéale, non sub-priment les mots feu, eau, métal, soufre; igne, sistante. La nouveauté n'était pas établie, n'était pas en usage, n'avait pas cours jusque-là. Une nouvelle est curieuse, inopinée, surprenante; une nouveauté est louable ou pernicieuse, suivant qu'elle conduit à une pratique bonne ou mauvaise. Quand les deux mots se disent des choses qu'on n'avait pas encore apprises, le mot nouvelle est absolu et celui de nouveauté a rapport à la personne instruite. Pour qu'une nouvelle soit telle, il ne suffit pas qu'on vienne à la savoir, il faut encore qu'elle annonce quelque chose qui a eu lieu récemment. Tout événement est pour moi une nouveauté, quand je le connais pour la première fois, fût-il très-ancien et déjà connu de tout le monde.

aqueux, métallique, sulfurique ou sulfureux se
disent en parlant de choses qui renferment quel-
ques parties de ces matières mêlées avec d'autres,
ou bien même qui ont simplement du rapport
lités.
avec ces matières pour certaines de leurs qua-

MÉRIDIONAL, SEPTENTRIONAL, ORIENTAL, OCCIDENTAL; DU MIDI, DU NORD, DE L'ORIENT, DE L'OCCIDENT. Nous disons également les peuples, les pays méridionaux, septentrionaux, orientaux, occidentaux, et les peuples, les pays du midi, du nord, de l'orient, de l'occident, pour marquer où ils sont situés sur la terre.

Il en est de même de faible et de faiblesse, défaut qui consiste à se laisser entraîner. Faible, quoique disLes adjectifs sont des expressions sans exactitributif et par cette raison semblant échapper à la règle, se considère d'une manière abstraite et idéale, tude et sans rigueur. Un peuple méridional n'est dans l'esprit, dont il désigne une simple disposition, pas nécessairement et absolument au midi, mais au lieu que faiblesse se considère dans la réalité il est seulement plus près du midi que tout autre, comme une faute dont on se rend effectivement cou- dans une certaine région actuellement considérée: pable. On a des faibles, on commet des faiblesses. le Danemark n'est pas un pays du midi, mais relatiUne mère a un faible ou du faible pour son fils, vement à la Suède, c'est un pays méridional. Les quand elle est portée à l'excuser, et de la faiblesse, quand elle lui pardonne en réalité, quand son pays du midi appartiennent au midi; les pays faible pour lui se manifeste par des effets, quand méridionaux regardent le midi, ont rapport au elle condescend à ses volontés et fournit à ses dé-midi. Si même on entend les deux expressions dans le sens relatif, l'adjectif sera encore plus

penses.

étendu. plus large et plus vague. Les provinces cette expression se prend d'ordinaire en bonne méridionales de la France comprennent toutes' part; esprit de système, au contraire, indique la celles qui sont plutôt au midi qu'au nord, et les même chose d'une manière rigoureuse, c'est-àprovinces du midi ne comprennent que celles qui dire toujours comme un défaut ou un excès. sont le plus au midi: Lyon et Bordeaux se trou- « Cette réduction des phénomènes à l'unité convent dans la partie méridionale du royaume, Mar- stitue le véritable espit systématique, qu'il faut seille et Toulouse dans la partie du midi. bien se garder de prendre pour l'esprit de système avec lequel il ne se rencontre pas toujours. » D'AL.

CONSEILLER HONORAIRE, CONSEILLER D'HONNEUR, désignent des hommes qui ont également le titre honorifique de conseiller, sans charge et sans émoluments.

L'expression conseiller d'honneur est plus restreinte et plus rigoureuse; elle s'appliquait anciennement à des personnages, comme gouverneurs et prélats, qui, bien que sans charge, avaient séance et voix délibérative dans certaines compagnies. Conseiller honoraire se prend dans un sens plus large: il signifie un conseiller totalement hors d'exercice et qui ne conserve que son titre; de sorte que l'adjectif honoraire, à la différence de la locution adjective d'honneur, exprime un honneur très-vague, très-peu significatif, presque sans réalité et sans prérogatives.

HOMME IMPORTANT, HOMME D'IMPORTANCE.

Homme qui a de la valeur, du poids, du crédit,

de l'influence.

homme

Quand nous disons homme d'importance, de distinction, homme de marque, nous exprimons des qualifications réelles, rigoureuses; mais quand nous disons homme important, distingué, marquant, nous le prenons dans un sens moins strict et plus large. L'homme d'importance est au fond et absolument un homme de grande considération. « La consideration où était Naboth n'arrête pas Jézabel. C'était un homme d'importance, puisqu'on le met entre les premiers du peuple. » Boss. La même qualité semble moins rigoureusement et moins essentiellement propre à l'homme important. « Voyez l'homme important!» DEST. Voilà pourquoi important signifie souvent à lui seul. un faiseur d'embarras, un homme qui fait le glorieux, le capable, le nécessaire : « Un grain d'esprit, dit Labruyère, et une once d'affaires, plus qu'il n'en entre dans la composition du suffisant, font l'important. » Mais l'expression homme d'importance n'a ce sens défavorable que quand on le marque expressément par d'autres mots :

LAF.

Se croire un personnage est fort commun en France:
On y fait l'homme d'importance.
Des personnes de distinction et de marque sont
telles rigoureusement, en vertu de qualités fixes,
le rang, la naissance, les priviléges; les per-
sonnes distinguées et marquantes sont jugées telles
par suite de faits ou de circonstances qui n'ont pas
une signification aussi rigoureusement décisive.
Nous nous servons rarement des expressions,
d'importance et de distinction, tandis qu'à tout
propos nous employons les épithètes important
et distingué. — Même différence entre un homme
qualifié et un homme de qualité, entre un homme
considérable et un homme de considération.
ESPRIT SYSTÉMATIQUE, ESPRIT DE SYSTÈME.
Goût des systèmes, disposition à systématiser.
Esprit systématique dénote un goût modéré, et

SYN. FRANC.

HOMME, OUVRAGE SPIRITUEL; HOMME, OUVRAGE D'ESPRIT. Homme, ouvrage dans lequel l'esprit se fait remarquer.

L'homme d'esprit possède l'esprit en propre, est
composé ou tout pétri d'esprit, en quelque sorte;
l'homme spirituel a de l'esprit, ne manque pas
d'esprit. L'adjectif se dit, dans une acception très-
étendue et presque illimitée, de tout ce qui ma-
nifeste quelque signe d'esprit, et particulièrement
des choses; ce qui est spirituel ne tient à l'esprit
que par un rapport léger, superficiel, et se tra-
duit plutôt sous forme de bons mots ou de sail-
lies que par des œuvres solides et durables.
L'homme d'esprit a du talent, des ressources;
l'homme spirituel brillera, par exemple, dans la
De même dans un ouvrage spirituel, il y a un peu,
conversation; il plaît, c'est tout ce qu'il peut faire.
ou de temps en temps, de ce qui constitue l'ou-
ingénieux et homme de génie.
vrage d'esprit.—On distinguerait de même homme

tenant ou relatif à l'homme.
HUMAIN, D'HOMME ou DE L'HOMME. Appar-

Humain marque un rapport plus étendu plus vaste, une dépendance moins étroite. « L'orangoutang contrefait toutes les actions humaines, et Une voix humaine désigne une voix telle que celle cependant il ne fait aucun acte de l'homme. » BUFF. des hommes en général, par opposition à celle des animaux, par exemple: une voix d'homme n'est ni enfant, ni femme. D'ailleurs, voix hupeut vouloir dire la voix d'un être humain qui maine n'entraîne pas rigoureusement l'idée d'une voix qui est celle d'un homme dans le silence de la nuit, on croit entendre une voix humaine, c'est-à-dire une voix semblable à celle d'un homme, à celle qui viendrait d'un homme. D'au

tre part, l'esprit humain est une expression bien l'homme: c'est l'esprit de l'homme et tout ce qui plus compréhensive et plus large que l'esprit de s'y rapporte, tout ce qu'il produit ou subit; l'esprit de l'homme est l'esprit humain réduit à ce qu'il a d'essentiel, considéré seulement dans sa nature et par rapport aux autres esprits célestes ou terrestres : l'étude, les phénomènes, les facultés de l'esprit humain; l'esprit de l'homme ne peut sonder tous les mystères de la création. Industrie humaine ne signifie pas strictement et uniquement, comme industrie de l'homme, ce que l'homme peut par son travail en opposition à ce que fait la nature. Cette expression rappelle tous les détails de l'industrie de l'homme, tout ce qui s'y rapporte; en d'autres termes, industrie humaine se dit dans les cas particuliers et relatifs, où l'on en décrit ou rapporte les effets; industrie de l'homme est l'expression qui convient quand on veut caractériser, en général, le travail de l'homme, considéré comme pouvant plus ou moins

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