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paroles en passa les espérances. » S. S. « Le duc de Vendôme voulut venir jouir à la cour d'une situation si brillante et qui surpassait de si loin tout ce qu'il avait pu espérer. » ID.

Il en est de même quand ces deux verbes signifient qu'une chose excède les forces, l'intelligence, les ressources de quelqu'un. Passer marque une disproportion moins grande ou plus vague. Ce qui passe nos forces va au delà des bornes de notre pouvoir, ne peut être fait par nous; et ce qui les surpasse plane bien au-dessus de nous et nous accable.

Le refus des frelons fit voir

Que eet art (de baur des cellules) passait leur savoir.

LAF.

« Cette vérité est si haute, qu'elle surpasse les forces de ceux à qui on parle. » P. R. Apercevoir l'ordre et en juger est une chose qui passe les sens.» Boss. « Les étoiles, ces globes de feu, sont d'une hauteur qui surpasse nos conceptions.» LABR. Ce qui passe la géométrie nous surpasse.» PASC. C'est-à-dire, ce qui est en dehors des limites de la géométrie se trouve placé bien au-dessus de nous, nous ne pouvons en aucune sorte nous élever jusque-là.

PREFIXES SUR ET DÉ.

Surpasser, dépasser.

SURPASSER, DÉPASSER. Avoir quelque chose de plus en un certain sens, excéder.

Surpassser, c'est s'élever au-dessus, et dépasser, aller au delà ou même plus bas. Un arbre en surpasse un autre; un vêtement de dessous dépasse celui de dessus de tant de doigts. Une maison plus élevée que les autres les surpasse; mais une maison avance-t-elle plus que les autres sur la rue, elle les dépasse, et, à la place de ce mot, surpasser serait d'une impropriété évidente. La queue d'un oiseau dépasse, et non pas surpasse, de la moitié de sa longueur l'extrémité des ailes repliées (BUFF.).

On dit aussi que le succès dépasse, comme on dit qu'il surpasse notre attente, pour signifier qu'il la passe décidément, incontestablement, positivement. Il la dépasse quand il va plus loin, et il la surpasse quand il va au-dessus. J'espérais que ma démarche vous engagerait à rester deux jours avec moi; vous y restez huit jours; le succès a dépassé mon attente. Il aurait surpassé mon attente, si au plaisir de vous posséder quelques jours vous ajoutiez un bienfait, un service auquel je ne songeais point. Dépasser indique une extension de ce qu'on attendait, et surpasser, un surplus, quelque chose de surajouté à ce qu'on attendait. Un écrivain voit le succès dépasser son attente, quand son livre, au lieu d'être connu seulement dans sa patrie, comme il y comptait, se répand par toute l'Europe; et le succès surpasse son attente, quand son livre, au lieu de l'enrichir seulement suivant ses vues, lui fait une grande réputation de savoir. « Le succès surpassait notre attente, car nous n'avions compté que sur la bague, et nous emportions un flambeau, un collier et des pendants d'oreilles. »

LES.

PREFIXE OUTRE.

Passer, outre-passer.

Outre qu'on écrivait autrefois oultre, vient du latin ultra, qui signifie au delà.

PASSER, OUTRE-PASSER. Aller au delà, ne pas se tenir dans les limites, au figuré.

Passer est le terme générique et se dit de toute action de cette espèce même involontaire, même quand elle est le fait du hasard ou de la nature. Ceci passe le vraisemblable, le jeu, la raillerie, la permission; la dépense passe la recette. « Le don des enfants passe les droits de la paternité. J. J. « Cicéron, pour agir efficacement, fut contraint de passer le pouvoir qui lui avait été remis par le sénat. » ID.

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Outre-passer est un terme spécifique employé seulement quand il s'agit de transgressions véritables, faites à dessein, surtout en parlant d'ordres ou de pouvoirs dont on a été chargé par délégation, « Quand il s'agit d'une institution divine, les hommes doivent obéir sans raisonner, et n'outre-passer jamais le pouvoir que l'institution leur accorde. » FEN. « Gardez-vous bien de vouloir arracher des permissions de votre médecin, encore plus de les outre-passer jamais en rien. » ID.

PREFIXES OUTRE ET DÉ.

Outre-passer, dépasser.

OUTRE-PASSER, DÉPASSER'. Aller au delà des ordres qu'on a reçus, des pouvoirs dont on a été investi.

Celui qui outre-passe est plutôt considéré comme entreprenant, et celui qui dépasse comme délinquant. Le premier ne craint pas de faire quelque chose par delà son ressort et sa sphère d'action généralement plus étendue; le second quitte, laisse en arrière ce qui lui est formellement prescrit. C'est que dé a rapport au point de départ, et indique souvent un défaut, un délit, un délaissement, un dérangement.

Peut-être aussi la différence doit-elle être cherchée moins loin. Outre-passer étant le seul verbe, avec outrager, qui ait outre pour préfixe, semble ne se dire que dans des cas rares et remarquables, quand il s'agit, par exemple, d'un ambassadeur qui ne s'en tient point à ses instructions; au lieu que dépasser commençant par une particule trèsusitée, est une expression courante et non réservée pour ces occasions solennelles.

1. Dépasser en ce sens diffère de passer, comme outre-passer, et au même titre, c'est-à-dire en tant que composé. Mais passer et dépasser sont encore synonymes an propre dans le sens de devancer, laisser derrière en allant plus vite. Le simple est alors absolu, il arrête l'esprit tout entier sur le sujet dont il exprime l'avantage; tandis que le composé est relatif, et fait penser aux vaincus, à ceux qui restent en arrière il y a de la honte à se laisser dépasser par un plus jeune que soi. Ensuite, passer marque plutôt l'habitude, l'ordinaire, et dépasser un fait. «Celévrier passe tous les autres à la course. Le courrier qui partit après moi m'eut bientôt dépassé, » ACAD.

PREFIXE OB.

D'abord préposition latine, puis préfixe en latin et en français, ob signifie devant; et dans la composition il marque situation ou direction en face, vis-à-vis exemples, opposé, occasion (ob cadere, tomber, arriver devant); ou bien un empêchement, une contrariété, une résistance, comme on le voit dans obstacle, offense; ou bien un environnement, un enveloppement, comme dans occuper, obséder (assiéger).

PREFIXES OB ET SUB.

Obreptice, subreptice. Objet, sujet. OBREPTICE, SUBREPTICE. Termes de palais et de chancellerie qui servent à caractériser des grâces obtenues par surprise.

L'un exprime une surprise par omission ou dissimulation; l'autre une surprise par suggestion, par feinte. Il y a obreption quand le solliciteur dans son exposé met obstacle à ce que le dispensateur ait des lumières suffisantes pour se décider avec équité, en omettant une vérité qui annulerait l'effet de la demande. Il y a subreption quand le solliciteur avance comme vraie une chose fausse. Dans les deux cas il y a fraude, ce que rend bien le radical commun, repere, ramper, ne pas aborder le front levé et droit. Mais, d'une part, celui qui en est l'auteur vous laisse simplement dans l'obscurité, met obstacle à ce que vous voyiez; de l'autre, il suscite sous main, furtivement, quelque chose qu'il invente. Il est donc plus coupable ici que là. Et même il peut arriver qu'un titre obreptice soit obtenu de bonne foi, mais jamais un titre subreptice.

OBJET, SUJET. Deux mots synonymes quand ils signifient la chose dont on s'occupe dans une science, dans une dispute ou une conversation. << Les corps naturels sont l'objet ou le sujet des sciences naturelles; vous étiez l'objet de notre entretien; la conversation a changé d'objet; le sujet de leur conversation, de leur entretien, de leur dispute, était.... » ACAD.

Objet, d'objicere, mettre devant, c'est ce qui est placé devant nous; sujet, de subjicere, mettre dessous, c'est ce qui est placé sous notre main. Or, c'est là une opposition qui peut s'entendre de deux manières et donner lieu à deux distinctions différentes.

1o L'objet est quelque chose de plus extérieur, de plus indépendant de celui qui agit; c'est comme la nature devant l'œil du spectateur : le sujet est quelque chose de plus soumis à notre travail et à nos modifications; c'est comme l'argile sous la main du potier. « L'homme, dit Voltaire, est tantôt un objet d'admiration, tantôt un sujet de pitié et de larmes. » Un objet d'admiration: pour admirer il n'y a qu'à regarder; un sujet de pitié et de larmes: pour s'apitoyer et pour pleurer sur une chose ou une personne, il faut s'y intéresser, prendre part à ce qui la concerne, et la mettre en quelque sorte sous sa protection.

Une science étudie, analyse, cherche à connaître son objet; toute son action se réduit à re

cueillir ce qui lui est donné. Une science dispose plus de son sujet, le modifie davantage; son sujet c'est uniquement ce qui entre dans ses compositions, dans ses théories.

Un auteur quelquefois trop plein de son objet, Jamais sans l'épuiser n'abandonne un sujet. Bor. S'agit-il d'une science d'observation, il vaut mieux dire son objet, et ce mot devra être rem| placé par celui de sujet, s'il est question de sciences spéculatives auxquelles ce dont elles s'occupent ne fait que prêter matière. Le corps humain n'est pas seulement l'objet mais aussi le sujet de la médecine la médecine ne se borne pas à l'observer, elle le soumet à ses essais et à ses ordonnances; c'est proprement le sujet de ses expériences et de ses pratiques, en même temps que l'objet de ses études. « Le psychologue porte toujours en lui-même tout l'objet de ses études, tout le sujet de ses expériences. » JOUFFROY.

<< Dieu a soustrait ses dons à l'homme, et ne lui a laissé que le fond de l'être, pour être l'objet de sa justice, et le sujet sur lequel il exercerait sa vengeance.» Boss. Qu'une chose ou une personne soit l'objet d'un discours, cela indique un discours dans lequel on décrit, on passe en revue les qualités de la chose ou de la personne; qu'elle soit le sujet d'un discours, cela annonce plutôt un discours oratoire, une composition dans laquelle la chose ou la personne sert de texte, est ce sur quoi roule l'action.

En parlant d'œuvres littéraires ou artistiques. le mot sujet convient seul d'ordinaire, parce que ce dont on s'y occupe ne fait que fournir la matière qu'on manie, qu'on transforme, qu'on travaille de toutes les façons.

2° L'objet, c'est ce qui est devant nous, en perspective, ce que nous proposons, le but où va notre action; et le sujet, c'est ce que nous tenons présentement. L'objet de l'histoire, c'est d'instruire, et son sujet ou ses sujets ce sont les événements passés. La philosophie a pour sujet la nature de l'homme et pour objet la détermination des règles de la logique et de la morale. Bourdaloue divise ainsi l'un de ses sermons: Dieu est l'objet et le sujet de la messe ; il en est l'objet, car c'est lui que nous nous proposons d'honorer, et c'est à lui que le sacrifice est offert; il en est le sujet, car c'est l'Homme-Dieu que nous lui présentons, c'est un Dieu qui lui est offert. Vous êtes le sujet de la conversation, quand c'est sur vous qu'elle roule; vous n'en êtes que l'objet, quand elle a simplement trait à vous, quand de te fabula narratur.

En un mot, suivant ce second point de vue, le sujet est la matière, et l'objet le but.

PRÉFIXE TRANS.

Porter, transporter.

Cette préposition et particule initiale latine, admise comme préfixe seulement dans notre langue, a la plus grande analogie avec outre et signifie aussi, au delà. Toutefois, elle paraît en différer par une idée de mouvement qui lui est plus particulière : une chose qui est située au

delà d'une autre, ultra est, comme on le voit par les mots ultramontain, ultérieur, outremer; une chose qui va au delà, trans it.

PORTER, TRANSPORTER. Faire changer de lieu à une chose qu'on a ou qu'on mène avec soi ou sur soi.

quitté. La Trimouille ayant été blessé sous les murs d'Orléans, on le reporta vers les remparts; mais, comme on trouva les chemins fermés, on le transporta à Tours (VOLT.).

Au figuré, transporter signifie toujours et uniquement porter ailleurs: du milieu de certains livres mal faits on pourrait à volonté transporter un chapitre au commencement ou à la fin. « L'i

En sa qualité de verbe simple, porter désigne le fait ordinaire: portez ces lettres à la poste, ces papiers dans mon cabinet. Par la raison con-magination vous prête le langage des passions que traire, transporter exprime un fait remarquable, vous n'éprouvez pas et vous transporte dans une ou qu'on veut faire remarquer, soit à cause de la situation qui n'est pas la vôtre. » LAH. Mais refaçon dont il s'opère: moyens, bâtiments de porter, c'est porter une seconde fois, répéter: il transport, facilité du transport; on transporta le faudra reporter cette somme au haut de la page malade à l'hôpital sur un brancard, l'armée au suivante, c'est-à-dire l'y répéter. « C'est là un écrit delà du fleuve sur des radeaux; soit à cause que inconnu de Marmontel, et dont il s'est bien gardé les objets sont considérables : avec la foi on trans- de reporter rien dans ses Éléments. » LAH. Ou porte les montagnes : La mécanique fait jouer bien, c'est porter plusieurs fois, itérativement. les ressorts et transporter aisément les corps pe- « Pourquoi Dieu a-t-il voulu que les cantiques sants (Boss.); soit parce que le changement de qu'il a dictés nous reportassent souvent sur les lieu en lui-même importe beaucoup : le commerce mêmes idées? » LAH. Ou bien encore, c'est opéconsiste à transporter les objets de consommation rer la réparation d'une faute, porter la chose là d'un lieu où ils abondent dans un autre où le be- ou elle sera mieux: ce paragraphe doit être resoin s'en fait sentir. Vous payez tant de port pour porté à tel chapitre; c'est là sa place. « On n'a pu une lettre ou un paquet, choses peu considéra- mettre en vers les noms des officiers blessés, et bles, qui se portent tous les jours et de la même ces noms ont été reportés dans les notes. » VOLT. manière; vous payez tant pour le transport de Avec le pronom personnel ces verbes signifient vos meubles ou de vos marchandises. Porter est tous deux, porter sa pensée vers absolu et ne regarde que le but, le lieu où la époque. Mais se transporter est plus général et se chose est portée; transporter est relatif, il rap- dit à l'égard de l'avenir comme à l'égard du pelle le lieu quitté et l'action qui remplit l'inter-passé : « Transportez-vous avec moi au jour où valle entre les deux termes : c'est spécialement porter ailleurs.

une autre

tous les hommes seront jugés. » VOLT. Se reporter ne regarde que le passé, et même, à la rigueur, le passé où on a été : se reporter aux jours de son enfance. Relativement au passé, se transporter s'étend à toutes les époques même les plus reculées.

Et de même au figuré. Qu'un conquérant porte ses armes ou la désolation dans tel pays, ce qui vous frappe, c'est uniquement l'idée du lieu qui devient le théâtre de ses exploits. Mais que l'empire soit transporté de la nation vaincue à la Toutefois se reporter s'emploie aussi pour des nation conquérante, qu'un événement soit trans-temps antérieurs à celui où on a vécu reporporté sur la scène ou un mot du propre au figuré, l'idée qui prédomine est celle du déplacement, du changement, d'un contraste entre ce où a été la chose, et ce où elle passe.

Mèmes nuances, quand les deux verbes s'emploient avec le pronom personnel. Se porter n'a rapport qu'au lieu où aboutit l'action : ce corps d'armée se porta sur tel point; la foule se porte à tel endroit, s'y porte, le sang se porte à la tête. << Ils iront errants d'une mer jusqu'à l'autre et se porteront d'Aquilon en Orient. » PASC. Se trans porter est une expression solennelle qui montre le sujet quittant sa résidence pour se rendre extraordinairement dans un endroit : le magistrat se transporta sur les lieux; transportez-vous en imagination, en idée, dans tel temps ou dans tel pays. « L'évêque de Cominges reçut ordre du roi de se transporter à Paris pour traiter de l'accommodement entre les jésuites et les jansénistes. » RAC.

PREFIXES TRANS ET RE.
Transporter, reporter.

TRANSPORTER, REPORTER. Faire changer de lieu en portant.

On transporte ailleurs; on reporte, comme on pporte, chez soi, dans le lieu qu'on avait

SYN. FRANC.

tez-vous ou transportez-vous au temps des croisades. En se transportant on va ailleurs, on voit autrement ou d'autres choses, on se dépouille des préjugés de son temps. « Il faut qu'en lisant les auteurs anciens on se transporte dans les temps et dans les pays dont ils parlent, et qu'on ne se laisse point prévenir contre des coutumes anciennes, parce qu'elles sont contraires aux nôtres. » RoL. En se reportant on revoit une époque qui est familière, des faits au milieu desquels on a pour ainsi dire vécu par l'instruction, ou bien on voit les événements se passer de nouveau, se répéter. Laharpe rapporte qu'ayant lu à ses auditeurs des morceaux traduits des discours de Démosthène et d'Eschine, « on sut comprendre, en se reportant dans l'assemblée d'Athènes, que, si, dans un pareil moment, Démosthène avait dû monter jusqu'au ciel, son adversaire avait dû être réduit à ne pas lever les yeux. »

PREFIXE CONTRE.

Faire, contrefaire.

Contre, latin contra, indique situation ou manière d'être d'un objet opposée à celle d'un autre, ou vis-à-vis d'un autre.

FAIRE, CONTREFAIRE, Se donner l'air d'avoir

11

T

certaines qualités : faire ou contrefaire l'homme | nière négative. Celui-là annonce donc une irré

de bien.

gularité de conformation bien plus choquante. Contrefaire, c'est représenter une personne, L'homme contrefait est une sorte de monstre: faire en face d'elle une personne semblable en l'homme mal fait n'est que laid. << Un homme l'imitant, comme il arrive quand on se meut de- bossu est contrefait; un homme gros et court est vant une glace. En sa qualité de composé, il dé- | malfait.» COND. De son côté, Fénelon dépeint note un dessein formel, l'intention expresse de ainsi l'homme malfait: << Pittacus était d'une paraître autre qu'on n'est, une feinte préméditée. figure assez difforme: il avait toujours mal aut Celui qui fait l'important, l'entendu, le grand yeux; il était fort gros et fort négligé et marchait seigneur, prend l'air de ces personnages, sinon désagréablement, à cause de quelques infirmités sans le vouloir et sans s'en apercevoir, du moins qu'il avait aux pieds. Sa femme n'avait rien qu'un sans suivre en cela un plan conçu d'avance, et très-grand mépris pour lui, à cause qu'il était sans s'efforcer de tout son pouvoir de tromper les malfait. » autres sur son compte. Il en est de même de celui qui fait l'homme de bien. Mais celui qui contrefait l'homme de bien ou l'insensé joue un rôle de propos délibéré, a précisément pour but d'en imposer, et emploie avec application et persévérance toutes sortes de moyens pour atteindre ce but.

De plus, on fait l'homme de bien ou l'insensé un instant, en passant, sous un rapport, devant telle personne. << David ayant fait le fou en présence du roi Achis, ce prince le fit éloigner. » | Boss. Mais quand on contrefait l'homme de bien ou l'insensé, on fait un vrai personnage, on cherche à imiter son modèle constamment et de toutes les manières, on suit un système de conduite. « Le premier Brutus contrefit l'insensé pour échapper à la défiance et à la tyrannie des Tarquins. » VOLT., COND. De là vient qu'on ne dit pas contrefaire, comme on dit, faire l'affligé, le malade, le mort. « Je ne faisais pas le dévot, dit le cardinal de Retz dans ses Mémoires, parce que je ne me pouvais pas assurer que je pusse durer à le contrefaire. »

PREFIXES CONTRE ET DÉ.

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CONTREDIRE, DÉDIRE. Dire non sur ce qui a été dit par quelqu'un.

Contredire exprime une opposition; dédire signifie l'action de défaire en parlant quelque chose qui a été fait. Nous contredisons quelqu'un, quand nous nous élevons contre ce qu'il a avancé, contre ses jugements ou ses assertions; nous le dédisons, quand nous disons non, après qu'il a dit oui, relativement à une chose à accorder, quand nous retirons la parole qu'il a donnée pour nous. Se contredire et se dédire, c'est dire le contraire de ce qu'on a dit soi-même. Mais on se contredit ans le savoir ni le vouloir; au lieu que se dédire, en vertu de sa particule initiale, exprime une action plus expresse, plus déterminée, c'est-àdire une action toujours volontaire qui a pour but de défaire ce qu'on croit avoir dit de mal, en un mot une rétractation.

PREFIXES CONTRE ET MAL.
Contrefait, malfait..

CONTREFAIT, MALFAIT. Qui est affligé dans on corps de quelque défaut apparent.

Le premier dit plus que le second. Contrefait signifie fait contrairement à ce qui est bien, et malfait ne présente la même idée que d'une ma

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PREFIXE INTRO.

Préposition et préfixe en latin, intro marque le passage du dehors au dedans.

PREFIXES INTRO ET PRO.
Introduire, produire.

INTRODUIRE, PRODUIRE. Conduire ou mener quelqu'un avec soi pour le faire connaître à d'autres. Introduire ou produire dans le monde. à la cour, auprès d'un grand, dans les salons d'un ministre.

Introduire, ducere intro, c'est conduire dedans; produire, ducere pro, c'est conduire.en avant. L'action de l'un consiste à donner accès, à mettre en rapport avec; celle de l'autre à faire paraître et briller, à mettre sur un théâtre. On introduit un étranger, on produit un homme de talent. Celui qu'on a introduit à la cour ou dans le monde y est reçu, y a ses entrées; celui qu'on y a produit s'y fait remarquer, s'y montre avec avantage. Sans quelqu'un qui vous introduise. vous ne serez point admis; sans quelqu'un qui vous produise, votre mérite ne pourra se faire jour.

On conçoit néanmoins qu'un homme éminent se produise de lui-même à la cour ou dans le monde, sans y être introduit; il convient alors de lui appliquer ce qu'un certain personnage dans Regnard dit d'un autre :

α

Il a su se produire,

Et n'a pas eu besoin de moi pour s'introduire. Celui qui s'introduit de lui-même dans une société est un intrus. Massillon, dans un sermon adressé aux Grands, développe parfaitement l'idée de produire. « Vous produisez, dit-il, des hommes de Dieu qui seraient demeurés dans la poussière, et qui, à la faveur de votre nom et de votre appui, paraissent dans le public, mettent en œuvre leurs talents et contribuent à l'édification des fidèles. » Et non-seulement, tandis que celui qui vous introduit se borne à vous présenter pour la première fois, à vous procurer une entrée quelque part, celui qui vous produit vous met à même de vous faire valoir, mais encore il prend d'ordinaire quelque soin de vous faire valoir lui-même, il vous prône, il est votre promoteur.

PRÉFIXE RA.

Conter, raconter.

CONTER, RACONTER. Narrer des faits, les représenter de vive voix et quelquefois par écrit.

Racine contari, qui dans percontari veut dire | reux âge?... Mais j'en veux une, une seule, s'informer, interroger avec curiosité, et qui vient pourvu qu'on me la laisse conter le plus longuesans doute de cunctari, différer, s'arrêter ou s'a- ment qu'il me sera possible, pour prolonger mon muser; de sorte que, dans le sens actif, conter plaisir. » J. J. signifierait informer en arrêtant, en amusant. C'est, en effet, ce qu'exprime le verbe simple conter qui est de la conversation et dans le genre familier.

PREFIXE CA.

Hutte, cahute.

HUTTE, CAHUTE. Petite cabane faite avec de la terre et du bois ou de la paille.

Quoique l'usage soit d'écrire le premier de ces mots par deux t et le second par un seul, leur rapport pour le sens ne permet pas d'hésiter à leur assigner le même radical, savoir l'allemand Hütte, qui exprime la même chose et tient de près au verbe hüten, garder, préserver, garantir. D'autant plus que cahute a commencé par s'écrire et se trouve encore écrit dans Trévoux cahuette; ce qui répond exactement à ca Hütte.

Au dire de Roubaud, la particule initiale du composé viendrait du grec péw, je coule, je roule, je parle. Il n'en est rien assurément. Elle est formée de re et de ad, et c'est pourquoi Ménage écrit racconter, comme on écrit raccourcir et raccommoder. Dérivation aussi peu contestable pour raconter, que pour rapetisser, rapiécer. Il doit donc y avoir dans raconter quelque chose qui rappelle la double influencé des préfixes re et ad. D'abord, raconter marque une seconde action : on ne raconte que ce qui s'est passé; on le rapporte, on le reproduit par la parole. Si on ra- Mais d'où vient la syllabe initiale de cahute? conte des histoires ou des aventures mensongères, On ne peut que le conjecturer. Hutte, importé on les raconte néanmoins comme ayant eu lieu, par les Francs, dut paraître aux vaincus d'une comme ne recevant dans le récit qu'on en fait prononciation rude et difficile, à cause de l'aspiqu'une seconde existence. Mais on ne conte pas ration si forte en allemand de la lettre h. N'est-il toujours des choses qui se sont passées : « Dans pas probable qu'alors les Gaulois l'auront adouci ces bois de myrtes les amants viennent se conter en le faisant commencer de la même manière que leurs peines.» MONTESQ. On conte des fables, des cabane, mot déjà connu et d'une acception à peu histoires, c'est-à-dire des inventions ou des fic-près pareille? La race franque, celle des guertions qu'on donne pour telles. Et toutes les fois qu'on conte même des choses passées, ce n'est pas en tant qu'elles se sont passées qu'on les fait connaître, mais comme fournissant matière à amusement plutôt qu'à instruction; ce n'est pas avec ce soin, avec cette attention particulière à rester vrai et fidèle, qui sont marqués dans le second verbe par la particule re. On conte sans gêne, avec abandon et facilité; en racontant on s'efforce de rendre un compte exact.

riers, aura continué à appeler huttes, conformément au sens primitif, ce qu'aujourd'hui nos soldats nomment plus généralement baraques; tandis que les paysans auront désigné par cahutes des huttes cabanes, des huttes répandues dans la campagne et servant d'habitation aux gens les moins aisés.

Dans la Coupe enchantée de Lafontaine, un paysan, parlant patois, dit que sa cahute, à qui il donne aussi le nom de logette, a été le lieu de « Périandre fit plusieurs questions à Cypsèle retraite de Lucinde pendant toute une nuit. La pour savoir ce que lui avait dit Proclée. Cypsèle, hutte n'est point une cabane de paysan ou de berqui avait tout oublié, lui conta seulement le bon ger bâtie dans les champs, ou quelque chose de traitement qu'il en avait reçu. Périandre le pressa semblable: ce qui la caractérise, ce n'est pas la tant, qu'à la fin Cypsele se ressouvint des der-misère, c'est qu'elle est faite grossièrement et nières paroles que Proclée lui avait dites et en fit le récit à son père. » FÉN.

D

On conte des histoires; on raconte une histoire. Bien conter, c'est conter agréablement; bien raconter, c'est dépeindre exactement ce qui a eu lieu. « Un homme (Lafontaine) paraît grossier, lourd, stupide; il ne sait pas parler ni raconter ce qu'il vient de voir; s'il se met à écrire, c'est le modèle des bons contes. » LABR. « Les fables de l'Arioste amusent, parce qu'il en rit le premier; ce qui rend sa manière de conter si piquante et si originale, mais Homère raconte sérieusement des extravagances. » LAH.

De son côté, ad signifie à, vers, et désigne que le raconteur s'adresse à quelqu'un; relation qui, sans être étrangère à conter, ne lui convient pas aussi essentiellement. On conte quelquefois pour conter, spontanément, et plutôt pour son propre plaisir que pour celui de l'auditeur, qui n'y prend pas grand intérêt. « Je n'eus rien de plus pressé que d'aller conter à tout le monde ce qui venait de m'arriver. » J. J. « Que n'osé-je raconter au lecteur toutes les petites anecdotes de cet heu

sans industrie. « Sous le czar Pierre, des bâtiments d'une architecture régulière et noble furent élevés au milieu des huttes moscovites. » VOLT. « Ces peuples grossiers n'avaient aucune industrie; il n'y avait pas à Moscou une seule maison de pierre: les huttes de bois étaient faites de troncs d'arbres enduits de mousse. » ID. « Toutes ces peuplades vivent sous des huttes : les arts y sont inconnus. » ID. On dit encore aujourd'hui que les soldats se huttent, c'est-à-dire construisent des huttes ou des baraques pour se loger. « A peine les soldats eurent-ils le temps de se hutter. Ils se huttèrent comme ils purent. » ACAD.

PREFIXE BE, BIS.

Besace, bissac.

α

BESACE, BISSAC. Longue pièce de toile cousue en forme de sac, ouverte par le milieu et faite pour être portée de manière que les deux bouts pendent, l'un d'un côté, l'autre de l'autre.

Quoiqu'ils different à l'oeil et à l'oreille, ces deux mots, pour l'étymologiste, sont absolument

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