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peut arriver qu'on suppose sans dessein, sans | de force en la concentrant. «Si on enchaîne étroimême s'en apercevoir: dans votre raisonnement tement ses pensées, si on les serre, le style devous supposez par inadvertance ce qui est en ques- vient ferme, nerveux et concis. » BUFF.- On est tion. On ne présuppose que volontairement, ex- précis, afin de se faire comprendre, et par conplicitement et avec une sorte de solennité. « Tâ-séquent c'est une qualité essentielle, un devoir chons d'entendre dans le fond ces paroles du Fils de Dieu; et pour cela présupposons quelques vérités qui nous en ouvriront l'intelligence. » Boss. Enfin on suppose quelque chose au moment même où on en a besoin; on présuppose quelque chose par avance, prévoyant bien le besoin qu'on

en aura.

TENDRE A, PRÉTENDRE A. Se porter vers un but, faire effort pour y parvenir.

Tendre se dit des choses comme des personnes: des écrits tendent à l'affaiblissement de la religion, au renversement des Etats. Prétendre ne se dit que de l'action des personnes.

Ensuite, quand on ne parle que des personnes, tendre exprime une action naturelle et non pas volontaire; en sorte qu'on tend à un but par inclination, et non pas de propos délibéré: tel philosophe tend au matérialisme, et il ne paraît pas qu'il s'en doute. Ou bien l'action de tendre est au moins plus vague, plus couverte, plus cachée, moins prétentieuse, moins déclarée. « Le cardinal Fleury se réjouit de pouvoir désormais se conduire en liberté vers le grand objet où il avait toujours tendu, qui était de s'attacher le roi sans réserve. S. S. Catilina tendait sourdement et en secret à la destruction du gouvernement de Rome; jusqu'au 18 brumaire, Bonaparte ne fit aussi que tendre à la domination, mais à partir de cette époque il y prétendit ouvertement.

D

de tout écrivain dans tous les genres; on est concis, afin d'être énergique, de faire une forte impression, et par conséquent c'est une qualité spéciale, une variété de style.-C'est aux mots ou aux termes seuls que convient l'épithète de précis: ils sont précis, propres, clairs, intelligibles, formels; on ne dit point des mots concis. C'est seulement au style qu'est applicable l'épithète de concis: il est concis, vif, serré, pressé, fort, ferme, énergique, vigoureux, nerveux, rapide; si on dit aussi un style précis, c'est qu'on y considère, non son peu d'étendue, mais l'exacte détermination des mots qu'on y emploie.

Ce qui n'est pas précis est vague, indistinct, indéterminé, chargé d'accessoires qui détournent l'esprit de l'objet essentiel et l'empêchent de voir celui-ci exactement, rigoureusement, ni plus ni moins. Ce qui n'est pas concis est développé longuement, étendu, présenté sous divers points de vue. Un ordre précis est un ordre formel, net, donné en termes non équivoques; un ordre concis est un ordre bref, donné en peu de paroles. Je réponds en trois mots; et, quoique très-concis, Mon discours sûrement sera clair et précis. DEST. Avec trop de précision, on devient technique et sec, d'une clarté mathématique; avec trop de concision, on devient énigmatique et obscur. << Dans le discours mis par d'Alembert à la tête de l'Encyclopédie la précision est sans sécheresse.» LAH. « La concision outrée de Perse le rend obscur. » ID.- La précision est ennemie de l'obscurité, mais elle peut se trouver avec l'abondance: la concision est ennemie de l'abondance, mais trop souvent elle se trouve avec l'obscurité.

A quoi on peut ajouter que prétendre est seul comparatif, et que seul il suppose des concurrents qu'on veut précéder ou prévenir, sur lesquels on veut prévaloir ou prédominer. La chose à laquelle on tend peut n'ètre pas facile à atteindre, et pour y parvenir, il faut surmonter des Tous les bons écrivains sont précis; ils emobstacles; la chose à laquelle on prétend est dis- | ploient toujours le mot propre, et ne vous font putée, et on ne l'obtiendra qu'autant qu'on l'em-point tourner sans cesse autour de leur idée. portera sur les autres prétendants, sur ses contendants.

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PRÉCIS, CONCIS. Ces deux termes expriment des qualités du discours également opposées à la longueur, à la verbosité.

Précis, de præcidere, couper devant, de manière à empêcher d'avancer indéfiniment, se dit des mots limités, déterminés, qui rendent l'idée exactement, avec netteté, sans ambages ni circonlocutions. Concis, de concidere, couper tout autour avec soin, de manière que la chose soit réduite à elle-même, contractée et comme rendue compacte, qualifie le style opposé au style étendu ou développé.

La différence est bien sensible. La précision concerne le choix des mots et tend à produire la clarté. « La précision et la justesse du langage dépendent de la propriété des termes qu'on emploie.» VAUV. La concision regarde l'exposition de la pensée et a pour objet de lui donner plus

sans vous y arrêter fixement. Montesquieu, Tacite et Salluste sont des modèles parfaits de concision; leurs phrases sont serrées, nerveuses. pleines de sens et réduites au moins de mots possible.

La précision retranche les expressions approchantes, quasi-équivalentes; elle n'en a pas besoin, elle a trouvé le mot qui rend parfaitement toute la pensée : la concision retranche les développements qui donnent au style quelque chose de traînant et de lâche, en même temps qu'ils énervent la pensée. Voulez-vous être précis ? ayez des idées claires et distinctes, et connaissez bien la valeur des mots que vous employez. Voulezvous être concis? retranchez les ornements superflus, les détails inutiles, n'exprimez le sujet que sous une face, mais d'une manière énergique et qui dise beaucoup en peu de mots.

Enfin, pour résumer, il appartient à la logique de recommander la précision, surtout en matière de sciences; car c'est au besoin logique de la pensée que correspond cette qualité il appartient à la rhétorique d'enseigner aux littérateurs les moyens d'être concis et les genres dans les

quels il convient le plus de l'ètre; car c'est un besoin accidentel, et concernant une impression particulière à produire, que la concision doit satisfaire.

PREFIXE ANTÉ.

PREFIXES ANTÉ ET PRÉ.

Antécédent, précédent.

Pris substantivement, ces deux mots désignent des faits passés qu'on invoque à propos de faits actuels; mais ils ont encore dans cette acception et sous cette forme leurs nuances caractéristiques. Antécédent s'est dit d'abord en logique où il a signifié les prémisses ou le principe d'un raisonnement, ce qui sert à amener la conclusion. «Voilà une conclusion bien neuve; admettons-la toutefois, pourvu que l'antécédent soit prouvé. » J. J. « Pour montrer l'absurdité de l'antécédent, j'ai dit que cette conséquence absurde en devait suivre. » DESC. Ensuite et en conséquence antécédent a exprimé généralement des faits qui éclairent sur le fait actuel, qui le prouvent ou le détruisent les juges consultent les antécédents d'un prévenu. Mais précédent, déjà bien distinct en ce qu'il n'est usité que dans le langage des assemblées politiques, où antécédent ne se dit point, l'est encore en ce que le précédent ne se considère que comme ayant eu lieu; on le con

Entre la particule anté et la précédente, comme elle originairement latine, il y a le même rapport qu'entre l'antériorité et la priorité. L'une est plus relative au temps, et répond bien à notre mot avant; l'autre regarde plutôt l'espace, le rang, l'ordre, ainsi que le français devant. Anté- | riorité de temps serait un pleonasme; mais on dit bien priorité de temps, comme on dit priorité, et non pas antériorité, de raison et de nature (FEN.). Ainsi, en latin, antecedere signifie aller quelque part avant un autre, et præcedere, mar-state et on le rappelle plutôt qu'on ne l'interprète cher devant, à la téte. Mais ces deux particules échangent ensuite leurs significations, de telle sorte que la première s'emploie relativement au rang, témoin le mot antépénultième, tout comme la seconde se trouve parfois commencer des mots qui ont rapport à la durée, tels que prévoir et pressentir. En latin même il nous paraît bien difficile de distinguer antecellere et præcellere, anteponere et præponere, anteferre et præferre, anteire et præire, etc.

ANTÉCÉDENT, PRÉCÉDENT. Adjectifs qualificatifs d'une chose relativement à une autre qui vient après.

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et qu'on ne le discute. Un député qui veut faire cesser ou commencer ou continuer les débats sur certaines matières et dans certaines circonstances cite un précédent, c'est-à-dire un exemple antérieur..

PREFIXE SOUS, SUB.

Lever, soulever. Porter, supporter. Poser, supposer.

Sous, préposition et particule initiale française, dérive de la préposition et particule initiale latine sub, conservée en français comme préfixe seulement dans plusieurs mots composés, tels que subjuguer, substance. Toutes deux tirent leur origine du grec unò. Dans les mots qu'elles commencent, leur forme est ou n'est pas altérée : elle ne l'est pas dans soustraire et subroger; mais elle l'est dans soumettre, dans supposer, suffisant, succéder, suggérer, sujet. Comme particules initiales et composantes, elles marquent primitivement infériorité d'une chose par rapport à une autre à laquelle elle sert de base : Exemples, sous-coupe, substance, sujet, soutenir, subir; ou bien l'action de mettre ou de faire quelque chose au-dessous d'un objet, ainsi que le font voir soumettre, subjuguer, souscrire, substituer, subordonner, submerger; ou bien simplement le fait d'agir par-dessous, comme suppurer, soulever, ou d'agir en dessous, sous main, secrètement, comme suborner, soupçon, suggérer, soustraire. Quelquefois c'est une infériorité d'ordre ou de temps qu'elles signifient: subalterne, sous-ordre, sous-préfet, subdélégué, subséquent, succéder; et c'est quelquefois un degré peu élevé dans la quantité, la qualité ou l'action, auquel cas elles sont minoratives: subdiviser, sourire. LEVER, SOULEVER. Changer la position de bas en haut.

Leur différence ne saurait être déduite avec quelque certitude de celle qui doit se trouver en latin entre ante et præ; car ces prépositions ont entre elles la plus grande ressemblance et nous désespérons de les distinguer sûrement. Mais quant aux mots français antécédent et précédent, nous avons un autre moyen de les séparer et d'en empêcher la confusion. Anté est très-rare dans notre langue en comparaison de pré; il a en français un air de science qui fait que les mots qu'il commence n'appartiennent pas au langage commun: tels sent les mots antédiluvien et antépénultième, les seuls avec antécédent qui aient la particule initiale anté. Il en est de même d'antécédent par rapport à précédent : il appartient exclusivement au langage didactique, savoir à la logique surtout et d'abord, ensuite à la théologie et à la jurisprudence; c'est un terme d'école. « Voyons ce qui se passe en nous, sans nous offusquer l'esprit d'aucun terme de l'école ni d'aucun principe antécédent. » VOLT. On peut remonter de chacune de ces propositions à d'autres propositions antécédentes qui leur sont, identiques. BUFF. « La prédestination est une prédilection de Dieu antécédente à tout mérite. » FÉN. « Dieu a-t-il fait le monde librement, par pur choix, sans aucune raison antécédente ? » VOLT. « L'amour du Lever est le radical nu, le terme simple, ordipeople est la loi immuable et universelle des sou-naire, étranger à tout accessoire. Soulever, comme verains, loi antécédente à tout contrat. » FEN. Précédent, au contraire, est un mot de tous les styles: nous n'avons pas besoin d'en citer des exemples.

α

expression composée, indique plus d'effort et de résistance, c'est-à-dire quelque chose de plus lourd. D'ailleurs, on soulève ce qu'on lève pardessous. Vous levez le couvercle d'un vase, et la

vapeur de l'eau qui bout dedans le soulève. « La marée soulève les navires qui sont sur la vase. » ACAD. « Sur un ballon à demi enflé, dit Malebranche, mettez une grosse pierre, si quelqu'un souffle de nouveau seulement avec la bouche dans ce ballon, il soulèvera la pierre qui le comprime. » Mais si, en qualité de mot composé, soulever dénote quelque chose de remarquable dans le poids du corps, il ne faut pas oublier que sa particule initiale est parfois minorative et doit lui faire signifier, lever peu, à un degré qui reste bas, inférieur. Soulever, dit d'Alembert, ne signifie pas lever entièrement, mais lever tant soit peu. Pour soulever, il suffit de faire perdre terre ou d'opérer une séparation entre le corps et la place où il repose. « Soulever un malade dans son lit. Ce fardeau est si pesant, qu'on a peine à le soulever.» ACAD. « Le flatteur montrant aux autres l'un des mets qu'il soulève du plat: cela s'appelle, dit-il, un morceau friand. » LABR. PORTER, SUPPORTER. Être chargé de quelque poids.

Aucune détermination ne convient essentiellement au simple; mais il est susceptible d'en prendre un grand nombre, surtout celle qui est relative au lieu où l'objet porté doit être remis où portez-vous cela? Du reste, on porte à la main, sous son habit, comme sur sa tête. Supporter, c'est porter étant dessous, et les deux mots ne sont synonymes que quand le premier se prend aussi dans cette acception. Mais alors supporter annonce quelque chose de fort pesant, et appelle l'attention sur ce qui est en dessous. Dans le corps humain, la tête porte les cheveux, les yeux, les oreilles; les jambes supportent tout l'édifice. Les arbres portent des fruits; des animaux portent de la laine, d'autres des poils, d'autres des cornes; un pilier supporte une voûte. Au figuré, supporter signifie subir, endurer quelque chose de pénible qu'on considère comme un poids accablant, un malheur, une perte, la fatigue, la misère, les maux de toutes sortes. Dans le même sens porter est plutôt énonciatif du fait qu'indicatif de la grandeur du poids. Un homme porte son malheur de telle ou telle manière; on n'est pas toujours capable de supporter un malheur, on y succombe quelquefois. Une injure est difficile à supporter et non pas à porter. POSER, SUPPOSER. Admettre comme vrai quelque chose dont la vérité n'est pas établie ou con

venue.

Le supposer, poser dessous, c'est l'admettre afin d'en tirer une induction, d'élever dessus une opinion ou une doctrine. Ce qu'on suppose est comme un fondement sur lequel on asseoit une assertion. Poser quelque chose, c'est vouloir bien le supposer, parce qu'on est sûr que cela ne servira de rien, qu'on ne pourra rien bâtir dessus. « Vous prétendez que cela est, je n'en demeure pas d'accord; mais posons que cela soit. » ACAD. a Posons que j'ai eu tort, certainement il était l'agresseur. » J. J.

Ou bien encore, poser, c'est, toujours dans la conviction qu'on n'en pourra rien tirer, admettre le fait ouvertement, sans hésiter, l'établir en principe; au lieu que le supposer, c'est le poser

avec une sorte de retenue, comme possible ou vraisemblable, sous forme de conjecture, eu égard au sens minoratif de sub. a Posons que nous ayons bien observé tout ce que l'hirondelle voyageuse fait pendant son séjour dans notre climat, et supposons qu'il soit bien certain qu'elle passe d'Europe en Afrique, il nous manquera encore tous les faits qui se passent dans le climat éloigné. » BUFF.

PREFIXES SOUS ET RE.

Soupirer, respirer.

SOUPIRER, RESPIRER.

Roubaud a comparé ces verbes dans deux circonstances, et d'abord, quand le premier s'emploie avec après ou pour, le second prenant un complément direct soupirer après la guerre, respirer la guerre; auquel cas, ils sont bien peu synonymes.

Soupirer, suspirare, sub spirare, souffler de dessous, de bas en haut, pousser des soupirs; on soupire après ou pour une chose qu'on désire avec une sorte de langueur, de calme et d'affliction, comme un amant. « Aimer Dieu, c'est soupirer et languir après lui. » FÉN. Respirer, re spirare, souffler itérativement, aspirer et rendre l'air, se dit figurément en parlant d'une passion dont on est si plein et si animé qu'on semble l'exhaler; c'est ainsi que le feu et la fureur, suivant les poëtes, sortent des narines du coursier fougueux. Soupirer après ou pour se met toujours devant le nom de l'objet qu'on désire, non pas en homme passionné, emporté, mais d'une manière douce, passive, expectante; respirer veut toujours après lui le nom d'une passion à laquelle on est en proie. Il n'est donc pas à craindre qu'on se méprenne à leur égard. On soupire après le retour de quelqu'un (FÉN., J. J.); pour des ri chesses qu'on n'emporte point dans la tombe (ENCYCL.). On respire l'ambition et la guerre (Boss.); la vengeance (BARTH., ACAD.); la fureur du duel (VOLT.). Soupirer après la guerre, c'est être fâché que la guerre, comme objet ou fait, n'ait pas lieu, et désirer qu'elle ait lieu; respirer là guerre, c'est éprouver le sentiment ou la fureur de la guerre. On ne soupire pas après l'ambition; on la respire, comme dit Bossuet.

Mais ensuite, respirer, tout comme soupirer, se trouve quelquefois avec après, que suit le nom d'un objet, et c'est alors seulement qu'il y a entre eux synonymie assez étroite, tous deux signifiant désirer avec ardeur l'objet devant le nom duquel ils se placent: soupirer ou respirer après le retour d'une personne chérie.

Soupirer après marque toujours un désir doux, tendre, touchant, calme, triste, affectueux; respirer après, c'est témoigner par sa respiration qu'on aspire' à tel but, qu'on voudrait tel objet,

4, Aspirer, ad spirare, souffler vers, de manière à montrer le but auquel on prétend. Ce verbe indique aussi la direction vers un but avec espoir d'y parvenir; mais il est plus relatif à la volonté qu'à la sensibilité.

Et monté sur le faîte, il aspire à descendre. CORN. On peut aspirer à un bien sans désir bien marqué,

et, comme il n'y a que les passions qui se décè- | fournit la partie même qui manque, il parfait, il lent de la sorte, l'expression respirer après an- achève; et le supplément donne quelque chose nonce un désir plus ardent, plus énergique, plus qui tient lieu de complément, c'est-à-dire, non vif, plus impatient, plus empressé. « Mon âme pas quelque chose de même nature que l'objet, désiré, mon âme languit, mon âme tombe dans qui se fond et s'incorpore avec lui, qui y entre de la défaillance, en soupirant après vos éternels ta- manière à ne faire qu'un avec lui, mais quelque bernacles, après cette cité permanente. » Boss. chose d'étranger qui s'y rapporte simplement. Mais Voltaire écrit au roi de Prusse : « Le jeune « Les Pères ont appelé le Saint-Esprit le saint d'Etallonde ne respire qu'après le bonheur de vi- complément de la Trinité, d'autant que l'union. vre et de mourir à votre service. » Et Sganarelle, c'est ce qui achève les choses; tout est accompli dans l'École des maris, se figurant qu'Isabelle quand l'union est faite, on ne peut plus rien meurt d'envie de l'épouser : ajouter. Boss. Voilà bien le complément. Voici Vous le voyez, je ne lui fais pas dire, le supplément selon cette nouvelle acception. Ce n'est qu'après moi seul que son âme respire. MoL.« S'il manque quelque chose au prix pour la dé«La biche altérée ne soupire qu'après les eaux de la fontaine; le loup affamé ne respire qu'après sa proie. Les passions prennent le caractère du sujet | passionné. Un malade trop débile encore et abattu ne fait que soupirer après la santé; le malade, dont le courage renaît avec les forces, ne respire qu'après elle. ROUB.

En un mot, on est plus passif quand on soupire, et plus actif quand on respire après; et c'est pourquoi soupirer après ne dénote pas toujours, comme respirer après, le désir d'un bien qu'on voudrait posséder, mais quelquefois le regret d'un bien qu'on a eu le malheur de perdre. < Votre ami mort, vous soupirez en vain après lui; vous respiriez après votre ami vivant. L'ambitieux déchu des honneurs soupire après eux tout bas; l'ambitieux entreprenant ne respire qu'après les honneurs qu'il poursuit. » ROUB.

PREFIXES SUP ET CON..

Supplément, complément. Supporter, comporter.

SUPPLÉMENT, COMPLÉMENT. Ce qui est ajouté à une chose.

- Le supplément est ajouté en sous-ordre, comme quelque chose de subordonné à l'égard de quelque chose de principal. Le complément complète ce à quoi on le joint; il en est une partie essentielle, et non un accessoire ou un appendice. On donne un supplément de dot ou de solde, et le complément de la dot ou de la solde; c'est, d'un côté, par surérogation, parce que la dot ou la solde complète semble faible, ou qu'on veut témoigner son contentement en donnant quelque chose en sus; de l'autre côté, c'est afin de s'acquitter entièrement. Sans le supplément qu'on donne à un ouvrage, celui-ci serait entier selon le premier dessein de l'auteur; le supplément est un ouvrage à part, subalterne, pour ainsi dire, qui ne fait qu'étendre ou éclaircir quelque partie du premier: sans le complément qu'on lui donne, l'ouvrage manquerait d'une partie nécessaire.

Toutefois le supplément, au lieu de s'ajouter à un tout complet, mais insuffisant, comme le supplément d'un livre, d'un journal, d'une dot, peut aussi, de même que le complément, se trouver joint à un tout incomplet, qui n'est pas entier, auquel manque une partie. Alors la différence reste toujours à peu près la même: le complément sans passion, ou du moins cette idée ne domine pas dans aspirer à comme dans soupirer et respirer après.

livrance d'un chrétien, saint Pierre Nolasque offre un supplément admirable, il est prêt à donner sa propre personne. » Boss.

VOLT.

Au peu d'esprit que le bonhomme avait L'esprit d'autrui par supplément servait. Laharpe dit dans la préface de son Cours de littérature: « Ce livre est le complément des études pour ceux qui peuvent pousser plus loin celles qu'ils ont faites; c'en est le supplément pour les gens du monde qui n'ont pas le temps d'en faire d'autres. >>

SUPPORTER, COMPORTER. Ces deux verbes s'emploient bien avec la négation, pour exprimer qu'une chose ne saurait en souffrir une certaine autre.

Ces sortes d'ouvrages ne supportent pas la critique, et ne comportent pas tant d'ornements. Ils ne supportent point la critique, ils en sont accablés; ils ne comportent pas tant d'ornements, c'est-à-dire que, naturellement ils ne les admettent pas, ils ne peuvent subsister avec eux. D'une part, c'est un manque de force; de l'autre, c'est une incompatibilité essentielle. Dans un récit on dira qu'un ouvrage n'a pas supporté la critique; ce n'est que dans le didactique, là où il est question de convenances idéales, considérées à priori, qu'on pourra dire d'ouvrages ou d'autres choses qu'ils ne comportent pas ceci ou cela. Ce qui ne supporte pas une chose, y succombe; ce qui ne comporte pas une chose, y répugne. « Vous voyez combien ces maximes (que je viens de réfuter), supportent mal l'examen de la saine raison. » J. J. « Le gouvernement monarchique ne comporte pas des lois aussi simples que le despotique. MONTESQ.

PREFIXES SUB ET EX.
Subsister, exister.

SUBSISTER, EXISTER. Avoir l'être, n'être point à néant.

Le premier vient de sub stare, se tenir sous. et le second de, ex stare, se tenir hors de. Ce dernier a beaucoup plus d'extension: il s'emploie pour affirmer expressément que les choses sont, jouissent de la réalité, sont produites, tirées hors du néant, mises au jour, font acte de présence, quand leur réalité est ou niée ou ignorée. Subsister, c'est continuer à être ou à exister sous et malgré les coups les atteintes, les circonstances fâcheuses auxquelles la chose a dû résister, n'ètre ni détruit, ni changé, au point de devenir

méconnaissable. Ce verbe a donc pour accessoires | venu, en tombant pour ainsi dire du ciel sur le la durée et un obstacle à surmonter, une cause coupable, alors il faudra préférer surprendre : de destruction à vaincre. « Toutes choses ont « Je l'ai surprise mettant du rouge. » ACAD. passé, et celle-là a subsisté. » PASC. Le peuple juif subsista toujours malgré sa misère (PASC.), et malgré les entreprises de tant de puissants rois qui essayèrent de le faire périr (ID.); il subsista toujours parmi tant de changements (Boss.). « L'empire du Fils de l'Homme doit subsister au milieu de la ruine de tous les autres..» Boss. « Il est nécessaire que l'espèce même des éléphants ait autrefois existé, subsisté et multiplié dans le Nord.» BUFF.

Prendre est comme la matière avec laquelle on fait surprendre, mais il y manque la forme. Aussi dit-on bien, prendre au dépourvu, prendre sur le fait; à la place de prendre dans ces expressions, surprendre formerait tautologie, et on ne l'emploie ainsi que quand on veut parler avec une grande rigueur, en légiste : « Solon ordonna qu'on pourrait tuer impunément un adultère, lorsqu'on le surprendrait sur le fait. » FÉN. C'est aussi dans le langage précis et bien déterminé de la justice qu'on dit surprendre plutôt que prendre en faute: On l'a surpris en faute, en flagrant délit (ACAD.). « Si je suis surprise en faute, on punira, comme à Sparte, non le délit, mais la maladresse.» J. J.

Au reste, malgré l'assertion de Girard, exister ne s'applique pas seulement aux substances, mais à tout ce dont on veut affirmer l'existence avec insistance et force. On dit d'un projet, d'une conception quelconque, qu'ils existent depuis longtemps; il n'y a point de couleurs qui n'exis- La pluie nous a pris en chemin, à deux lieues tent dans la nature; cette coutume existe depuis de la ville, à telle heure; c'est le fait, vous l'applus de cent ans; il existe des traces de son pas-prenez à quelqu'un : la pluie nous a surpris en sage, des preuves de son crime, etc. Girard s'est encore trompé en n'assignant à subsister pour idée caractéristique que la durée; c'est la durée relative, inaltérable, la continuité de durée, qu'il fallait dire. Quant à la durée simple, exister la marque également bien. Cet usage a existé deux cents ans; il existait encore sous Louis XIV.

PREFIXE SUR.

Prendre, surprendre. Passer, surpasser. Sur, en latin super, conservé dans quelques mots français, superficie, superfin, en grec úñep, en allemand über, préposition et particule initiale exactement contraire à la précédente. Elle exprime supériorité d'une chose à l'égard d'une autre qui lui sert de base ou comme de base: Exemples surpeau, surface, surnom; ou l'action d'agir sur une chose ou au-dessus d'une chose, comme dans surnager, surveiller, surmonter, survenir; ou une primauté d'ordre ou de temps: surintendant, surhumain, surnaturel, surlendemain, survivre. Mais le plus souvent elle est additive, elle marque quelque chose de donné ou de fait en sus, un surplus qui augmente ou complète, parfois même rend excessif, comme on le voit par les mots surarbitre, surnuméraire, surenchérir, surfaire, surajouter, surcharge, surabondant, surexciter, surtaxe.

PRENDRE, SURPRENDRE. Attraper, être inopinément témoin d'une action faite par quelqu'un. Prendre est simplement énonciatif du fait, et ne se substitue à surprendre que comme le genre à l'espèce, quand on ne veut pas user d'une grande précision. Surprendre, c'est particulièrement prendre sur le fait, au moment où on s'y attend le moins. On dira d'un accusé : il a été pris à voler des fruits; et à une personne à qui un bon mot échappe, quoiqu'elle improuve cette sorte d'amusement: je vous y prends à votre tour. Dans ces exemples, ce qui importe, c'est le fait plutôt que sa manière. Mais veut-on marquer spécialement que c'est au dépourvu, à l'improviste, que le coupable a été pris et que le témoin est sur

chemin; nous ne l'avions pas prévue, nous étions loin de nous y attendre. On prend quelqu'un au saut du lit; le sage n'est jamais surpris par les événements. Là, ce qu'il s'agit d'exprimer avant tout, c'est le fait de s'emparer, de ne pas laisser sortir, échapper; ici, c'est la manière d'être pris que sait éviter le sage, c'est-à-dire à l'improviste et sans y être préparé. « A quelque âge, en quelque état que la mort nous prenne, elle nous surprend. » FÉN. On prend, c'est-à-dire on attaque les ennemis en flanc; on les surprend, c'est-àdire qu'on les prend au dépourvu.

PASSER, SURPASSER. Excéder, en parlant de deux choses ou de deux personnes dont l'une l'emporte sur l'autre.

Le composé annonce une supériorité plus re marquable, c'est-à-dire plus grande, ou tout au moins plus positive, plus tranchée. Car passer, c'est être plus grand dans quelque sens que ce soit, et sans qu'on détermine sous quel rapport. et surpasser, c'est s'élever au-dessus, dominer.

Passer, c'est simplement être plus qu'égal. «J'envie aux grands le bonheur d'avoir à leur service des gens qui les égalent et qui les passent quelquefois.» LABR. Ou bien passer se dit dans un sens général, vague ou peu rigoureux. « Voilà qui est admirable! Cela passe tout ce qu'on a jamais vu.» MOL. Dans, contentement passe richesse, il y a une sorte de restriction en faveur de la richesse, qui disparaîtrait, si on mettait surpasser à la place du verbe simple. Surpasser marque une prédominance et une prédominance décidée. « L'unité peut, étant multipliée plusieurs fois, surpasser quelque nombre que ce soit. >> PASC. « La somme des maux surpasse de beaucoup la somme des biens. » J. J. « Les Perses, disait Bélisaire, ne vous surpassent point en courage.. MONTESQ.

α

Le succès a passé mon attente, dit moins que, le succès a surpassé mon attente. D'un côté, le succès a été au delà de mon attente dans un sens quelconque qui n'est pas spécifié; de l'autre, il a été au-dessus, ce qui marque plus déterminément une supériorité ou une supériorité moins vague et moins indécise. « L'effet de ces

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