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c'est abaisser encore davantage, de plus en plus, | mettre dans un vaisseau jùsqu'à ce qu'il soit avec effort ou redoublement d'action. On abaisse le mérite par un mot, un propos, en passant; on Remplir a deux nuances distinctives. D'abord, s'acharne à le rabaisser. Rabaisser emporte plus il désigne une réparation, le complément d'un de force non-seulement dans l'action, mais aussi vide partiel, une réitération de l'action de verdans l'intention, dans la volonté; il suppose or- ser; de sorte qu'il signifie ajouter ce qui manque dinairement de l'animosité. pour que la chose soit tout à fait pleine. On emDe plus, rabaisser donne l'idée d'un état anté-plit tout d'un coup et ordinairement un petit rieur au-dessus duquel on s'est élevé et auquel espace, un objet ou un vase de médiocre capacité, ramène celui qui rabaisse; c'est pourquoi l'on dit | sa main (Boss.), ses poches (DUCL.), un verre ou plutôt rabaisser qu'abaisser les prétentions de une bouteille (ACAD.), une cuiller (LABR.), une quelqu'un, le caquet, le ton d'une personne, cruche (LAF.). Il prend la grande cuiller, la l'orgueil, l'arrogance, la présomption et tous les plonge dans le plat, l'emplit, la porte à sa bouvices qui font qu'on se met à une hauteur déme-che. » LABR. Psyché, heureusement parvenue à la surée ou illégitime. On se rabaisse pour rentrer dans un état au-dessus duquel on avait voulu s'élever.

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fontaine de Jouvence, « emplit sa cruche. » LAF.
Quand l'âne, chargé d'éponges, s'est jeté à l'eau,
L'éponge devint si pesante,

Et de tant d'eau s'emplit d'abord,
Que l'âne succombant ne put gagner le bord. LAF.
Mais un étang se remplit d'eau par des crues suc-.
cessives.

Le second caractère de remplir tient au premier. Emplir se prend ordinairement à la rigueur, de manière que le vase n'est empli que quand il n'y reste point de vide; et, au figuré, il exprime de même une plénitude absolue. Montaigne dit, en parlant de l'immuable éternité de Dieu « Par un seul maintenant il emplit le toujours. » Dieu ne pourrait entièrement emplir aucun espace par un certain nombre de petites boules; car les boules qui se touchent laissant un espace triangulaire, il faut pour l'emplir autre chose que des boules (MAL.). Au contraire, remplir marquant succession, action partielle, se prend souvent dans un sens relâché. pour désigner seulement l'abondance ou la multitude. De là vient qu'il est d'un usage beaucoup plus étendu au propre, et surtout au figuré. Emplir se dit proprement des vases, des vaisseaux, des choses destinées à contenir de certaines matières; remplir se dit indifféremment de toute place occupée par la multitude ou par la quantité. Vous emplissez une cruche d'eau, un verre de vin, un sac de blé, vos poches de fruits, une bourse d'argent; vous remplissez une rue de gravois, une basse-cour de fumier, un pays de mendiants, un

AVILIR, RAVILIR. Abaisser de manière à rendre vil, méprisable, à couvrir de honte, d'op-bois de voleurs, et, de quelque matière que ce probre, d'infamie.

Ravilir est augmentatif, c'est avilir à plusieurs reprises, avec redoublement d'action : le métier d'espion ravilit. « Une puissance ennemie, dit Bossuet au sujet du culte païen, avait entrepris de ravilir le nom sacré de Dieu.» « JeanBaptiste n'est rien de ce qu'on pense : il n'est point Elie, il n'est point prophète; et bien loin d'être le Messie, il n'est pas digne, dit-il, de lui délier ses souliers: car il se sert même de cette expression basse, afin de se ravilir tout à fait. » ID. Ravilir marque souvent aussi le rétablissement d'un état antérieur : l'éclat et la renommée avaient ennobli les beaux-arts; la pauvreté les ravilit. « Tout est à nous p ar Jésus-Christ, dit encore Bossuet; il n'y a rien au-dessus de nous, pourvu seulement que nous ne nous ravilissions pas nous-mêmes. »

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soit, des trous, des interstices, des fondrières, des vides qu'il faut boucher. Dans le sens figuré, on se sert toujours de remplir : remplir une charge, un emploi, une tête remplie de pensées, d'affaires. « L'imagination grossit les plus petits objets jusqu'à en remplir notre âme.» PASC. C'est avec raison que Laharpe reproche à Voltaire d'avoir mis emplir au lieu de remplir dans ce vers de Mérope :

L'horreur et la vengeance empliront tous les cœurs. ASSURER, RASSURER. Au propre, ces deux mots signifient affermir, rendre stable; et, au figuré, tranquilliser, donner de l'assurance.

Au propre, on assure contre un danger possible ou éventuel, et on rassure ce qui est près de tomber, ce qui menace ruine. « Si loin que vous étendiez votre prévoyance, jamais vous n'égalerez les bizarreries de la fortune: vous aurez tout EMPLIR, REMPLIR. Rendre un vase plein, assuré aux environs, l'édifice fondra tout à coup

Antoine était allé à Brindes, Octave assembla un corps de troupes, et, dans un autre endroit, qu'un général surpris n'eut pas le temps de rassembler ses soldats, qui étaient dispersés çà et là dans unə parfaite sécurité. Ou bien nous assemblons des choses analogues, et rassemblons des choses dissemblables. « Selon Aristote, dit Malebranche, le feu est un élément chaud et sec qui assemble les choses de même nature; l'eau est un élément froid et humide qui rassemble les choses de même et de différente nature. »

par le fondement. » Boss. « Si l'on n'assure le fon- | et errants (FÉN.). Rollin dit que, pendant que dement, on ne peut assurer l'édifice. » PASC. Rassurer exprime qu'il y a plus à craindre, et que la chose a déjà été endommagée ou ébranlée. « Il faut rassurer cette muraille, elle menace ruine.» ACAD. « Télémaque luttant contre Hippias le presse et l'attaque; il l'ébranle, il ne lui laisse aucun moment pour se rassurer. » FÉN. Au figuré, il en est à peu près de même. On assure le faible, et on rassure le peureux : on assure celui qui n'est pas ferme, résolu, qui manque de confiance; on rassure celui qui est déjà troublé, intimidé, en proie à la crainte ou à la terreur. Un homme va subir une opération, vous l'assurez en lui donnant de la confiance; quand arrive le moment, et qu'il tremble à la vue des instruments et des apprêts, vous le rassurez. Il faut, bien entendu, pour rassurer, plus d'efforts et plus de soins.

Du reste, assurer, dans le second sens, n'est guère employé que par les poëtes. Princesse, assurez-vous, je les prends sous ma garde.

RAC.

O bonté qui m'assure autant qu'elle m'honore.
Esther à Assuérus. ID.
Occupé seulement de l'apre jalousie,
Rien ne peut l'assurer, de tout il se défie. LAF.
Et encore à propos de ces deux vers de Corneille:
Un oracle m'assure, un songe me travaille.

(Dans Horace.)

Et tachons d'assurer la reine qui te craint.

(Dans Nicomède.) Voltaire déclare expressément que le verbe assurer n'est pas français dans cette acception. Il est certain qu'il l'a été autrefois. « La compagnie assure jusques aux enfants. » MONTAIGN. « La gloire de mourir avec fermeté, l'espérance d'être regretté, etc., font, pour nous assurer, ce qu'une simple haie fait souvent à la guerre pour assurer ceux qui doivent approcher d'un lieu d'où l'on tire. » LAROCH. « Mlle de Saldagne tremblait comme la feuille; Verville n'était guère plus assuré. » SCARR. « Je vois bien ce que c'est; vous voulez assurer les maris, afin que, n'ayant point de soupçon de vous, ils vous laissent faire vos recherches en toute liberté. » MALH. « Il ne faut pas tant de discours pour conduire les âmes selon les voies de Dieu. Quand vous m'avez exposé les choses, mon silence même vous assure. » Boss. ASSEMBLER, RASSEMBLER. Mettre ensemble, réunir des personnes ou des choses auparavant isolées.

D'un autre côté, assembler, en parlant des personnes, marque quelque chose d'ordinaire et qui se fait dans un lieu destiné à cet effet; tandis que rassembler désigne une réunion irrégulière, inaccoutumée, improvisée. A la nouvelle de la fuite de Louis XVI, les membres de la Convention, qui s'étaient assemblés le matin, se rassemblèrent à onze heures du soir. Un prince qui assemble souvent ses troupes pour contempler ses forces, les rassemble quelquefois pour marcher contre l'ennemi. Ce que rassembler exprime d'extraordinaire ne porte pas seulement sur le fait de la réunion, mais aussi sur son objet, comme on le voit par les deux exemples précédents. « Constant assemblait tous les jours de nouveaux conciles pour réformer les symboles. » Boss. « Par combien de subtilités, de détours et d'équivoques les protestants ont tâché de rassembler les membres épars de leur réforme désunie. » ID.

ÉVEILLER, RÉVEILLER. Tirer du sommeil. On réveille difficilement, brusquement, à une heure inaccoutumée, quand on n'a pas dormi suffisamment, d'un profond et pénible sommeil. « Réveiller, dit Marmontel, est plus vif et plus prompt. » Ce verbe marque redoublement d'effort et de résistance. « Le lendemain, à l'heure marquée, il fallut réveiller d'un profond sommeil cet autre Alexandre. » Boss. « On remarque que le prince (de Condé) ayant tout réglé le soir, veille de la bataille (de Rocroi), s'endormit si profondément qu'il fallut le réveiller pour combattre. On conte la même chose d'Alexandre.» VOLT. Condé ayant battu le maréchal d'Hocquincourt à Blénau, « le cardinal Mazarin, effrayé, courut à Gien, au milieu de la nuit, réveiller le roi qui dormait, pour lui apprendre cette nouvelle. » VOLT.

Pour éveiller celui qui a le sommeil tendre, le moindre bruit suffit. Quant à celui qui a le sommeil dur, il faut le réveiller, c'est-à-dire s'y Rassembler suppose plus de difficulté, dans ce prendre à plusieurs fois, en le sollicitant, en le sens que les choses auxquelles il s'applique sont secouant. On réveille et on n'éveille pas un mort, plus éloignées, plus disséminées, plus éparses, en ou quelqu'un de sa léthargie, de son assoupisseplus grand nombre, et qu'elles ne sont pas ac-ment, on s'éveille tard, et on se réveille en surcoutumées à se trouver réunies, à aller ensemble. De sorte que, d'un côté, nous assemblons les choses ou les personnes qui ne sont pas éloignées de nous, que nous avons sous la main, que nous savons où trouver; tandis que nous rassemblons celles qui ne sont pas près de nous, que nous sommes obligés de faire venir de loin et à grand'peine. L'éloquence consiste à persuader des hommes assemblés (J. J.); c'est la poésie qui a rassemblé les hommes des forêts où ils étaient épars

saut. Dans les Euménides d'Eschyle, Apollon est venu à bout d'endormir les Furies, «et leur sommeil est bien dur, car il se passe beaucoup de temps avant que Clytemnestre parvienne à les réveiller. » LAH. « Ceux des Etoliens qui dormaient eurent bien de la peine à se réveiller. » ROLL. On dit plutôt s'éveiller, et être réveillé ou réveiller les autres, car le réveil spontané est presque toujours facile, doux, naturel; au lieu que le réveil produit par d'autres ou sur d'autres

est soudain et plus ou moins violent. « Il s'est | est absolument passée. » PASC. « Dieu enfin se éveûlé, et m'a réveillé, criant au meurtre. » ressouvint de tant de sanglants décrets du sénat SCARR. contre les fidèles. » Boss.

On éveille et on s'éveille à l'heure ordinaire, quand il est déjà grand jour. « Je m'éveille le matin avec une joie secrète de voir la lumière.» MONTESQ.

Il est, parbleu, grand jour. Déjà de leur ramage Les coqs ont eveillé tout notre voisinage. REGN. Mais on réveille et on se réveille au milieu ou au commencement de son sommeil, ou bien de grand matin. Le fàcheux, entrant dans la chambre de son ami qui commence à s'endormir, le réveille pour l'entretenir de vains discours. » LABR. « Je ne sais pas quel plaisir vous prenez à me réveiller si matin. MOL.

Malebranche distingue différentes sortes de sensations, les unes fortes et vives, qui, dit-il, étonnent l'esprit et le réveillent avec force, comme lui étant fort agréables ou fort incommodes; d'autres faibles et languissantes, qui touchent peu l'âme, et qui par conséquent l'éveillent à peine, ne lui étant ni fort agréables ni fort incommodes.

Ensuite, réveiller marque le rétablissement d'un état instantanément changé, c'est-à-dire qu'il suppose qu'on s'était éveillé déjà une fois, puis rendormi ceux qui s'étant éveillés n'ont pas soin de se lever, courent risque de se réveiller fort tard. Ce caractère a bien plus d'importance au figuré qu'au propre. On éveille comme on anime le courage, la haine, la colère, en les excitant dans le cœur d'un homme qui ne les a pas; on les réveille, comme on les ranime, en les renouvelant dans le cœur d'un homme qui les a perdus ou qui les perd.

VÊTIR, REVÊTIR. Ils se disent en parlant des habits dont on se couvre.

On revét ce dont on se couvre en second lieu, après s'être vétu, des habits qui se superposent aux vêtements. On est rétu de ses habits ordinaires, de ceux qui sont faits pour le besoin et la commodité; on est revêtu d'habillements extraordinaires par-dessus les premiers, comme, par exemple, d'une armure, des insignes de la royauté, de la pourpre impériale, et en général des habillements faits pour distinguer les honneurs et les dignités.

Un évêque officiant est vêtu de sa soutane, et revêtu des habillements pontificaux. « L'évêque est à l'église avec son clergé, et ils sont déjà revêtus. » Boss. « Le grand prêtre Jaddus s'était avancé, revêtu de ses habits pontificaux, au-devant d'Alexandre, avec tous les autres prêtres, revétus aussi de leurs habits de cérémonies, et tous les lévites rétus de blanc. » ROLL.

SOUVENIR, RESSOUVENIR. Idée précédemment acquise, puis oubliée, et ramenée enfin devant les yeux de l'esprit.

Ce dont on se ressouvient est d'un temps éloigné, et n'a laissé dans l'esprit que des traces obscures, qui ne peuvent être retrouvées qu'à force de recherches et d'efforts. « On se ressouvient des choses passées et éloignées. » VAUG. Ta lettre nous a fait ressouvenir d'une brouillerie dont on avait perdu la mémoire, tant elle

« Le ressouvenir, dit fort bien Roubaud, est le souvenir renouvelé d'une chose plus ou moins éloignée, du moins de notre esprit, et difficile, soit à retrouver, soit à reconnaître. Le souvenir est plutôt d'une chose plus ou moins présente à l'esprit, plus ou moins facile à rappeler, plus ou moins fidèlement représentée; le ressouvenir est plutôt d'une chose plus ou moins oubliée, plus ou moins difficile à retrouver, plus ou moins imparfaitement retracée. »

<< Cypsèle avait tout oublié; mais Périandre le pressa tant, qu'à la fin Cypsèle se ressouvint des dernières paroles que Proclée leur avait dites. » FÉN. « Télémaque croyait même se ressouvenir confusément d'avoir vu en Ulysse des traits de cette ressemblance. » ID.

D

NOM, RENOM. Grande réputation.

Il y a dans renom l'idée de la répétition du nom, lequel s'est étendu en passant de bouche en bouche; de sorte que renom est le superlatif de nom. Par le nom on est connu, distingué, tiré de l'obscurité; par le renom on fait du bruit, on a de la vogue, on jette de l'éclat. Avec un grand nom on est estimé; avec un grand renom, on est célèbre, on occupe les cent bouches de la renommée.

On se fait un nom, un grand nom en littérature, dans la critique, au barreau, même dans les arts industriels; le renom, comme la gloire, s'acquiert surtout par les armes. « Des chevaliers de haut renom. » LES. Don Sanche, à qui Chimène confie sa vengeance, est un guerrier sans renom; ses mains n'ont point été rendues glorieuses par des exploits fameux. Lafontaine a dit au sujet de Richelieu :

Que la nuit d'aucun temps ne borne la carrière De ce renom si beau, si grand, si glorieux. EMPORTER, REMPORTER. Ils se disent tous deux pour exprimer l'action d'obtenir un prix. On emporte le prix qui n'est pas disputé; on remporte celui qui est mis au concours. Pour emporter l'un, il suffit d'être fort; pour remporter l'autre, il faut être plus fort que les autres, il faut triompher de ses concurrents. La Fontaine dit au Dauphin, en lui dédiant ses fables, qu'il emportera le prix de son travail, s'il parvient à lui plaire. Le Cid, vainqueur de don Sanche, remporte le prix du combat; et ce prix est Chimène.

Emporter le prix, quoiqu'on le dise rarement, est néanmoins la seule expression convenable quand il ne s'agit pas d'un prix proposé à des concurrents et destiné à celui qui surpassera les autres, mais d'un avantage quelconque auquel on aspire. Charost voulait être fait duc et pair; le roi s'y refusait; Charost insista, et à la fin

il emporta le prix de sa persévérance. » S. S. a La sainteté est une vaste carrière où il y a toujours à courir pour emporter le prix. » BOURD. « On en voit qui portent assez bien la croix d'abord et qui se relâchent ensuite: ce n'est point à eux que la couronne est promise, et ce n'est point ainsi qu'on emporte le prix. » ID.

APETISSER, RAPETISSER. Rendre ou devenir | courci.»- De même Voltaire dit à un jeune homme plus petit.

Rapetisser enchérit sur apetisser, et signifie apetisser d'une manière réitérée; il exprime une action plus forte et un effet plus grand. Les jours apetissent quand la diminution est presque insensible; ils rapetissent quand elle est considérable. Rapetisser marque même quelquefois une diminution excessive. « L'espèce humaine paraît agreste, contrefaite et rapetissée dans les climats glacés du Nord. » BUFF. « Les Lapons, les Samoièdes, etc., sont des hommes d'une nature rapetissée, dégénérée. » ID.

Ou bien encore rapetisser est adversatif comme rabaisser, par exemple: il indique une réaction, un effort pour réprimer ce qui tend à s'agrandir. « Vous tendez au grand par la pente de votre cœur, et par l'habitude d'y tendre; mais Dieu veut vous rabaisser et vous rapetisser dans sa main.» FÉN.

qui avait traduit une partie de l'Iliade: « Je vous sais bon gré surtout d'avoir accourci. » Et dans son Essai sur la poésie épique, citant un passage de l'Iliade, il s'indigne contre Lamotte-Houdard qui, dans sa traduction, « étrangle ce beau passage et le raccourcit en deux vers. »

Enfin on accourcit plutôt tout d'un coup. Les Parques, en faisant mourir un homme, accourcissent le fil de ses jours (FÉN.). Mais raccourcir est plus propre à marquer une action successive. « L'esprit de l'homme s'étend et se raccourcit suivant l'application ou l'inapplication où il vit.» FÉN. « L'air froid raccourcit le fer. » MONTESQ. ÉTRÉCIR, RÉTRÉCIR. Rendre ou devenir plus étroit.

Étrécir signifie cette action simplement; rétrécir l'exprime avec une idée particulière d'intention, de réitération, de persévérance ou de force; car rétrécir, c'est étrécir et étrécir encore. — « Ce n'est point un paradoxe de dire que, dans l'état religieux, plus on élargit la route, plus on l'étrécit. » BOURD. On peut donc étrécir même sans le savoir ni le vouloir. « Ce chemin étroit qui mène

D'ailleurs, apetisser marque une diminution subite, en un seul coup, et rapetisser une diminution qui se fait lentement, successivement, par progrès. Une étoffe mise à l'eau une seule fois s'apetisse; elle se rapetisse quand la dimi-au ciel parut encore trop large à sainte Thérèse, nution a lieu à la suite de plusieurs immersions. - << Dans la diastole le cœur s'enfle et s'arrondit; dans la systole il s'apetisse et s'allonge. » Boss. Un vieillard rapetisse, parce que la diminution de taille qu'il subit s'opère par degrés. Boileau dit que la servitude est une espèce de prison où l'âme décroit et se rapetisse, en quelque sorte. ACCOURCIR, RACCOURCIR. Rendre ou devenir plus court.

Accourcir exprime une action modérée et un effet peu considérable. « Voulez-vous accourcir l'opération, ne l'interrompez pas. » FÉN. « Il faut lui accourcir un peu le temps de l'étude. » ID. La ciguë accourcit de quelques jours la vie de Socrate (VOLT.). Sous ces deux rapports raccourcir enchérit sur le verbe simple. « Télémaque et Hippias sont aux prises: ils se raccourcissent, ils s'allongent, ils s'abaissent, ils se relèvent, ils s'élancent.» FÉN. « La nature divine, sans bornes et sans limites, s'est comme raccourcie dans l'incarnation.» Boss. « Mon censeur assure que notre vie est fort raccourcie en comparaison de celle des corbeaux et des cerfs. » VOLT.

Ensuite accourcir signifie plutôt réduire à de justes bornes. « Une phrase heureusement accourcie. » VOLT. « Je prie M. de Grignan de prendre soin d'accourcir les lignes que je veux de vous. » Sév. Au contraire, raccourcir, c'est non-seulement accourcir beaucoup, mais souvent aussi accourcir trop. « Bien loin d'avoir augmenté sans nécessité la durée du temps, je l'ai peut-être beaucoup trop raccourcie. » BUFF. « Les lunettes qui grossissent rétablissent peut-être la véritable grandeur des objets que la figure de notre œil avait changée et raccourcie. » PASC. Buffon dit en parlant du roitelet que les Grecs appelaient d'un nom qui signifie sabot ou toupie : « Cette dénomination est analogue à la forme de son corps accourci et ramassé. » Et ailleurs, au sujet d'un colibri représenté dans une planche enluminée: Le corps de l'oiseau y paraît un peu trop rac

et toute sa vie elle s'étudia à le rétrécir autant qu'il lui fut possible. » BOURD. - Malebranche et Buffon disent que la prunelle de l'œil s'étrécit sous l'impression des rayons du soleil; c'est une action douce et faible. Mais « les muscles, en se resserrant excessivement, rétrécissent la peau, font dresser les cheveux et causent ce mouvement qu'on appelle horreur. » Boss.

D'autre part, rétrécir marque plus proprement ou plus fortement l'excès. Si on ôte à un habit ce qu'il a de trop en largeur, on l'étrécit; on le rétrécit en le rendant si étroit qu'il n'est plus possible de le mettre : Ragotin, dans la comédie de Lafontaine qui porte ce nom, essaye vainement de mettre l'habit que La Rancune a eu la malice de lui rétrécir pendant son sommeil :

Mais que vois-je? aurait-on rétréci mon pourpoint? Rétrécir l'esprit dit plus que l'étrécir, de toutes les manières.

TARDER, RETARDER. Remettre à faire en un temps plus éloigné ce qu'on devrait faire sur-lechamp.

Mais tarder ne désigne que le fait de ne pas exécuter assez tôt; retarder annonce une résolution de la volonté. Pour tarder à partir, il suffit de ne pas partir, et, pour retarder son départ, il faut volontairement et sciemment le fixer à une époque postérieure à celle où il avait été fixé d'abord.-De là une seconde différence. Retarder suppose quelque difficulté survenue, qui force de contrevenir à ce qui avait été réglé, déterminé; de manière que celui qui tarde n'agit pas en temps convenable et que celui qui retarde n'agit pas en temps convenu. Un paresseux tarde à partir; un homme qui n'avait pas prévu la longueur de certaines affaires, se voit contraint de changer sa résolution et retarde son départ.

D'ailleurs tarder s'emploie toujours avec à ou de suivi d'un infinitif, au lieu que retarder veut toujours après lui un substantif sans préposition: tarder à ou de faire une chose; retarder

son départ, son mariage, la conclusion d'une | mes. » Mass. « En fait de style, toute répétition affaire. On retarde autant l'œuvre de Dieu, qu'on tarde à se mettre dans cette disposition.»

Boss.

AMOLLIR, RAMOLLIR. Rendre mou ou moins dur, au propre et au figuré.

qui n'enchérit pas doit être évitée. »> VOLT.- Mais on renchérit, on renchérit encore sur quelque chose qui est déjà fort, violent ou excessif. « Renchérir sur l'indignation ou sur le zèle de quelqu'un. » J. J., Boss. « Renchérir sur l'énergie de la poésie par celle de l'harmonie et du chant. » J. J. « Des ministres de J. C. non-seulement imitent les mœurs et les excès des mondains, mais renchérissent même sur eux. » MASS. « Dans les accusations de Cicéron contre Verrès, on voit le crime renchérir sur le crime. » MARM. « Diogène

On amollit ce qui est dur; on ramollit ce qui est trop ou très-dur. La chaleur du soleil amollit la cire; le feu ramollit le fer. — « La langue humecte et amollit les viandes.» Boss. « Les cailloux les plus durs se décomposent à l'air : peu à peu toute leur substance se ramollit et se convertit en terre argileuse.» BUFF. « Dieu touche le cœur du pé-perfectionna le cynisme, c'est-à-dire qu'il rencheur pour le ramollir, parce qu'il est dur comme le marbre. » Boss.

Au figuré, ramollir exprime plutôt un excès. Amollir les cœurs ou les âmes, c'est les porter à la douceur. « Roideur de caractère que rien n'amollit. » J. J. « Amollir l'humeur d'un homme d'esprit, le rendre plus doux et plus sociable. » LABR.

BOIL.

chérit sur les excès de son maître. » COND. « Ne rougissez-vous pas de renchérir en fait d'intérêt sur les plus infâmes subtilités qu'aient jamais inventées les plus célèbres usuriers?» MOL.

Au propre, la différence est à peu près la même. ENFERMER, RENFERMER. Mettre une chose ou une personne dans un endroit clos.

ou qu'on n'arrive jusqu'à elle.

Laveaux prétend avec raison que renfermer se Aux accents dont Orphée emplit les monts de Thrace, dit d'une clôture plus étroite qu'enfermer. Le Les tigres amollis dépouillaient leur audace. premier mot indique plus de précautions, et plus Ramollir les cœurs ou les âmes, c'est les énerver.de danger que la chose ou la personne n'échappe « Cette musique, qu'il fait mépriser comme capable de ramollir les courages, était sans doute cette musique molle et efféminée, qui n'inspire que les plaisirs et une fausse tendresse. » Boss.Quand les deux mots marquent un défaut ou un excès, il est plus grand exprimé par ramollir, ou présenté en opposition avec un état antérieur d'où ce verbe annonce qu'on a été tiré. « Les Toscans étaient amollis par leurs richesses et par leur luxe.» MONTESQ. « Les Mèdes, autrefois si laborieux et si guerriers, mais à la fin ramollis par leur abondance.» Boss.

ADOUCIR, RADOUCIR. Rendre doux, au propre et au figuré.

Radoucir se dit de choses plus rudes, ou plus aigres, ou plus dures : « on radoucit les métaux par une fonte réitérée » ACAD.; ou bien des choses qui, étant douces, ont été changées et qu'on ramène à leur état primitif de douceur : « la pluie a radouci le temps. » ACAD. Mais, on dira d'une manière générale avec l'Académie, la pluie adoucit le temps.

D

Il en est de même au moral. On radoucit un homme qui est fort en colère.-Ensuite, on adoucit l'humeur de celui qui l'a naturellement rude, et on radoucit l'humeur de celui qui l'ayant naturellement douce, en a changé tout à coup.

ENCHÉRIR, RENCHÉRIR. C'est figurément, par rapport à une chose, à ce qu'on a fait ou dit, y ajouter, faire ou dire plus.

Mais renchérir marque un enchérissement difficile ou extraordinaire, parce que la chose était déjà forte ou portée à un haut degré. Aussi dit-on renchérir encore (J. J., S. S.), renchérir même (MASS.).

Enfermer, c'est simplement ne pas laisser aller librement dehors ou mème seulement ne pas laisser dehors. « La petite maison de la Vierge Marie, transportée de Nazareth à Loretto, fut enfermée dans une église superbe. » VOLT. « Que servirait, dit Montesquieu, d'enfermer les femmes dans nos pays du Nord où leurs mœurs sont naturellement bonnes?» Mais il dit ailleurs : « Dans les Etats despotiques, les princes ont plusieurs femmes et mille considérations les obligent de les renfermer. »

En effet, tous ces soins sont des choses infâmes :
Sommes-nous chez les Turcs pour renfermer les
femmes ?
MOL.

« Il renferma sa femme avec tant de sévérité,
qu'elle n'eut permission de voir qui que ce fût. >>
S. S. Harpagon, qui a peur d'être volé, « ren-
ferme toutes choses, et fait sentinelle jour et
nuit. » MOL. Dans le Dépit amoureux, Mascarille
pour échapper à la poursuite des ennemis de son
maître, lui dit :

Ne nous obstinons plus à rester dans la rue;
Allons nous renfermer.

MOL.

On est enfermé dans sa loge au spectacle, dans sa chambre à la ville; on est renfermé dans une prison.

Renfermer désigne toujours une action volontaire, et ne pourrait, par conséquent, se substituer à enfermer dans une phrase telle que celleci: « Je vois ces effroyables espaces de l'univers qui m'enferment. » PASC.

Enfin renfermer peut aussi exprimer quelque chose de difficile. « Il n'y a qu'une profonde sagesse qui ait pu renfermer toute une grande plante dans une si petite graine. » Boss.

On enchérit sur quelque chose d'ordinaire, de faible, de simple, de naturel. « M. Vernes enchérit partout sur le sens naturel des mots pour me rendre plus coupable. » J. J. « Une simple légèreté dans la bouche d'un souverain va faire de nouveaux impies; on croit plaire, en enchérissant, et des railleries deviennent des blasphe-exprimée par le radical,

AMASSER, RAMASSER. Faire un amas, un assemblage, réunir.

SYN. FRANÇ.

Ramasser a pour nuance de marquer les soins, la peine qu'on a eue à rassembler des choses diverses ou éparses. Amasser n'est relatif qu'à l'idée

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