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temps-là. Elle dit donc à Enoë, son esclave bien-aimée : - Ma belle Juive, si ta loi ne te défend pas d'accomplir les devoirs de ta charge, le jour que tu appelles le sabbat, je te prie de me préparer le bain et la collation... MYRE TE 32, P A quoi la jeune fille de Judée répondit : Je suis à Rome et j'obéis.

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- Avec répugnance, Énoë?..

Non, avec tristesse.

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Que tous les Dieux me gardent d'affliger la douce créature que ma mère m'a léguée par son testament, comme un trésor d'innocence et de fidélité; appelle Midra, ô ma chère Énoë.

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La Juive obéit, et voilà qu'une grande et forle Gauloise s'en vint préparer l'eau tiédie, les huiles et les essences. Cette esclave des Gaules remplissait son service avec une méthode et une exactitude qui désespéraient Sylvia.

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Vraiment! disait-elle, la Gaule est irréprochable en tout point; elle est calme et sereine comme l'eau du bassin. Est-ce que le souffle du vent ne viendra jamais rider cette belle onde tranquille? Souvent il m'arrive, Midra, de vouloir te querel→ ler pour la trop haute perfection de tes œuvres. Que veux-tu? Je suis faite ainsi... mon corps est faible, ma santé délicate... mais j'ai l'ame fiévreuse, tourmentée... et voulant sans cesse s'échapper... la folle! comme si elle se sentait des ailes. →→ Énoë, est-ce que les ames en ont, en effet? tes livres juifs en parlent-ils? Oh! combien de fois m'as-tu vanté tes livres la... Douce patrone, ces livres merveilleux semblent avoir été écrits pour toi ; ils calmeraient ta tête et ton cœur.66 in, 970A Je veux les lire; traduis-les-moi en langue latine..da plus belle des langues, Énoë...

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Après celle de David et d'Ézéchiel, peut-être... 725 29301 Oh! non! tu n'as donc pas entendu le quatrième chant de l'Eneide?.

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Et comment veux-tu que moi, une esclave...?g on - Tu as raison, je suis une insensée... Sylvia baissa la tête et se mit à rêver. Didon et Anna passérent sans doute devant elle, car elle avait le regard fixé sur le marbre de la muraille comme sur un miroir magique ; mais la Gauloise ayant annoncé que le bain était prêt, la jeune patri

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ciennes'éveilla, pour ainsi dire, et quittant la rive de Carthage, elle descendit dans l'eau cristalline d'une mer entourée de jaspe et de porphyre; ses membres délicats, enveloppés de fin lin, s'étendirent avec mollesse, et sa respiration parut moins oppressée; Midra prit alors, dans un coffret d'argent ciselé, de l'huile de Mythilène parfumée avec des herbes du Liban, et elle humecta de cette liqueur la magnifique chevelure de Sylvia. Comme un jeune lis, penché et languissant au soleil de midi, se relève sur sa tige et se balance orgueilleusement dès que viennent les brises du soir, ainsi la belle patricienne se ranima aux senteurs des essences orientales et au contact de l'eau douce et ambrée; elle fit allumer toutes les lampes de la salle de bain, puis elle invita Énoë à s'asseoir auprès du bassin, et congédiant la Gauloise par un signe d'amitié, elle parla ainsi :

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- Je t'aime,ma douce fille de Jérusalem, malgré ton culte et ton origine... Tu sais que Rome est dédaigneuse! je t'accorde même qu'elle est souvent injuste et sans pitié pour le reste du monde. Ta nation, par exemple, est entachée à ses yeux d'une sorte de souillure, d'une fatalité malheureuse, si tu veux; il faut pardonner cela à Rome; les grandes réines sont vaniteuses. Quant à moi, je t'aime comme si tu étais née à Baïe, ou dans la Campanie : tu vois avec quelle précaution je cherche toujours à te parler. je n'ordonne jamais, Enoë, je demande, souvent je prie... Ah! c'est presque de la faiblesse ; une patricienne ! mais aussi, tu as des yeux rêveurs, tu as un front éclairé comme par un beau rayon de la lune; tu réfléchis, tu es grave, tu parles bas, tu soupires quelquefois, tu es mystérieuse dans Les discours autant que par ton silence; tu sembles toujours attendre... et jamais tu ne vois venir.... tu as des frayeurs subites et étranges ; si on te conte une histoire, tu rêves à une autre sans doute, et que tu sais beaucoup mieux, et que tu ne raconteras pas à ton tour, cependant... Enfin, Énoe, tu es l'amie de mon cœur et j'ignore pourquoi c'est toi plutôt qu'une autre. poker PX

- Et moi, dit Énoë, je l'ai deviné, 98 15 917" by szétnu nivive +Parle donc, habile prophétesse! oleo husvab cànôh GQ 2 JK +Genque tu aimes en moi, ma patrone, c'est ta propre image; je te ressemble par la tristesse ; mon amé est un miroir

où tu t'es vue; ce portrait que tu viens de faire, c'est le tien ; tu es ton peintre, ton historien et ton poète. akymie trot zaa - Ce que tu viens de dire est peut-être plus vrai que je n'aurais pensé ; est-ce que nous mourons du même mal, Énoë ?...

Sylvia regarda son esclave; celle-ci leva les yeux à la voûte de la salle. Il y avait à ce dôme une peinture d'Apollodore, qui représentait une Diane lançant son javelot et fuyant dans la forêt. La patricienne à son tour porta son regard de ce côté, et voilà que sortant de l'eau son bras blanc et arrondi', elle désigra du doigt la divinité, en s'écriant: Enbowali on

c'est

Tu as raison, chasseresse! Oh tu as bien raison..... C'est au sommet des rochers, dans la profondeur des bois, à travers le désert âpre et dangereux qu'il faudrait toujours s'enfuir... Cette vie de Rome est enivrante jusqu'au délire... elle tue.Jutsu efl ogol! les 76 9 of 385979% sup zrovna est q

Patrone, dit Énou, est-ce que je vous ressemble encore par cette fatale exaltation? C'est la première fois que je vous vois ainsi... 91, GaM quizei t'up 500bs 96 en q & Jun 2

Ce sera la dernière, reprit Sylvia avec un calme commandé. Parle-moi de ton pays. A Jérusalem, les femmes sont-elles toutes belles et timides comme toi?no Bİ 237 969

Se Les femmes de Jérusalem adorent le vrai Dieu selon la foi de nos pères ; et quand elles reviennent du temple dans leurs maisons, elles filent le lin on enseignent les enfans." 16T - op Elles nenvont donc jamais au cirque, ni au théâtre, ni à aucune assemblée où l'on puisse applaudir ou être applaudie?

- Elles n'ont ni théâtre, ni cirque, ni assemblée où le cœur etda tête puissent s'enivrer, cofet of mo shaod 29b turk I-ab-Jérusalem est une ville triste, austere, malheureuse. amb Jérusalem est une ville sainte. La vie y est sereine comme le lever du soleil sur la mer de Sidon, Patrone, crois-tu au bonheur dans les voluptés comme tes Romains? gob shoo

Assurément non; et tu vois, Énoe, quelle solitude est la mienne. Je vis aussi retirée que si j'habitais la Sabine.99 Et ton ame, patrone?43 m2 200

---Oh ! quant à mon ame, je sens bien qu'elle souffre et que rien ne peut la satisfaire. C'est une colombe attachée par un fil; je crois qu'il faudra le rompre.

Mourir Sylvia!

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- Quand la fatigue est excessive, on tombe sur le chemin. C'est tout simple.atooq nol 2005.

Tes dieux sont impitoyables, Romaine.

Souvent j'ai été tentée de le croire. Pourtant ce sont les mêmes dieux que ma mère a honorés, les dieux du Latium, ma patrie; ceux qui ont guidé nos aigles à la conquête de l'univers; ceux qu'adore César ; ceux du grand poète de l'Italie... Oh! je ne quitterai jamais ces dieux-là.

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Hélas! hélas! reprenait Énoé, faut-il que des mains si pures offrent de l'encens à Moloch et à Baal?

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· Voilà, dit Sylvia, des noms inconnus dans l'Olympe d'Homère. Je t'assure, Énoë, que jamais dame romaine n'a visité les temples de ces divinités.

Patrone, tu as beau sourire, ta gaieté, ressemble à ces pâles rayons qui percent la nue avant l'orage. Ils ne font que rendre plus sombres les profondeurs du tableau. Jau

Quand Énoë parle ainsi, je soutiens qu'elle est plus habile et qu'elle a plus de science qu'Antonius Musa, le médecin de César Auguste et le mien, and angst, viókrob xFND

Ah! médecin insensést a cộng, tot 9b joes

Que veux-tu? ils commencent et finissent tous de même... Le corps ! les corps! Oui, et un beau jour l'ame s'enfuit, impatientée de ce qu'on ne songe jamais à elle. Je pen

– Par l'amitié sainte que tu m'as vouée, par le tombeau de Claudia ta mère, et par la majesté du temple de mon dieu, qui est le tien aussi, oh! je t'adjure, Sylvia, de me révéler la cause de ton chagrin rongeur.

-Enfant des bords du Jourdain, ce pays des palmes, sois affranchie de la servitude; va, retourne aux murs sacrés de Jérusalem, rentre au foyer de ton père, et dis-lui qu'une dame romaine, ta maîtresse, s'est déclarée ton amie et ta sœur; emporte des vases de Corinthe, des tuniques de Milet, des bot tes d'essences, des manteaux avec leurs agrafes d'or; sois riche, libre et heureuse... Plains-moi, surtout aime-moi toujours, mais ne m'interroge jamais sur la blessure de mon cœur.

Qu'il soit fait selon ta volonté, repondit Énoe. Je retournerai sur la terre d'Israël, je dirai comment des pirates m'enlevèrent et me vendirent sur les côtes d'Italie; comment ta mère Claudia m'acheta et me légua à sa fille bien-aimée, je

raconterai tes douces vertus ; je parlerai de ta beauté, pareille à celle de Rachel, et, ravis d'admiration, tous les miens loueront le Seigneur et lui demanderont de se révéler à toi, qui es la plus pure d'entre les femmes d'Occident. Sylvia, tu es semblable au ramier solitaire, qui vient soupirer dans les lentisques du parc du Liban, ce jardin de Salomon. Bienheureuse ma nation, si tu viens un jour à Jérusalem écouter les docteurs enseignant la loi et les prophètes annonçant le Messie qui régnera sur toute la terre, car, alors, tu diras: Je suis de tes filles, ô Sion!

- Vous aurez un roi qui régnera sur toute la terre? Et César? et les héritiers de César?

Ils baiseront les sandales d'or de notre roi universel, et ils n'oseront contempler les splendeurs de sa tiare.

-- Si tu n'étais l'amié de mon enfance, j'aurais peur de toi, te croyant atteinte de folie.

-Patrone, ce qui est folie à Rome est sagesse à Jérusalem. - Et ce qui est sagesse au temple de Jérusalem...

Oh ! de grace, arrête-toi... Ce serait blasphémer.

Cette belle Juive, disait en elle-même Sylvia, est, on le voit bien, une ame éclose aux rayons de l'Orient; certes, elle est sincère dans son adoration devant les poètés de son pays; sa religion est un amour. Qu'importe le nom de son Dieu; elle croit parce qu'elle aime. C'est une créature tendre, souffrante et enthousiaste... C'est ta sœur, ô Sylvia! Oui, je parlerai d'elle à César.... peut-être, en sa faveur, adoucira-t-il le sort des Juifs à Jérusalem.

Puis elle regarda Énoë, qui, en ce moment, priait pour elle, les bras croisés à la manière des Orientaux, et la figure tournée du côté du levant. Et comme elle lui demandait ce qu'elle faisait ainsi, la Juive répondit:

-J'implore le grand médecin pour l'autre moitié de moimême que je laisserai souffrante sur la terre d'Italie.

Sylvia comprit alors tout ce que lui coûterait la liberté qu'elle venait de donner à Énoë. Elle soupira profondément, incertaine si la fille de Judée préférait encore sa maison de Romé aux palmes du parc de Salomon et aux portiques du temple. Ses yeux se mouillèrent de quelques larmes qui tombèrent silencieusement, comme des perles, sur la surface limpide du bassin de porphyre.

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