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l'a encore complètement expliquée. C'est une histoire assurément curieuse par
le fait qu'aucun des contemporains de Louis XIV ne l'a contée. S'il y a eu un
secret, il a été bien gardé. En 1745 seulement, l'auteur de Mémoires secrets
pour servir à l'histoire de la Perse mit à la mode pour la première fois
cette cause célèbre; Voltaire se chargea aussitôt de l'enquête. Il se passionna
pour ce fait divers de la cour du grand roi. A Paris il inter-
rogea le gendre du médecin de la Bastille qui avait soigné
l'inconnu, un ancien commissaire des guerres à Cannes, qui avait
des renseignements sur la détention du prisonnier à l'île

Sainte-Marguerite, d'autres encore
dont il invoque ici le témoignage.
Très fier d'avoir établi ce pro-
blème, il laissa à la posté-
rité le soin de le résoudre.

Toutes les suppositions
ont été faites. On a pensé
que c'était Fouquet, ou le duc de
Beaufort, ou le duc de Vermandois,

ou le duc de Monmouth. Il est à peu

GROTESQUES POUR BALLETS ET OPÉRAS. près certain qu'en voulant pique GROTESQUES POUR BALLETS ET OPÉRAS.

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GROTESQUE POUR BALLETS
ET OPÉRAS.

G

la curiosité, Voltaire a égaré l'histoire.
Le prisonnier a existé, mais moins.
surveillé qu'on ne l'a cru, masqué de
velours simplement, et non de fer. Ce
n'était ni un personnage de la

famille royale, ni un homme cé

lèbre, peut-être un agent assez obscur du
duc de Mantoue, un certain Mattioli, ou moins
encore, un simple valet de chambre, Eustache
Dauger. C'est pour cela sans doute que les
contemporains n'y ont même pas pris garde;
et les historiens de notre temps inclinent à
les imiter. La clef du mystère, si on la trou-
vait, ne serait sans doute pas très précieuse.

GROTESQUE POUR BALLETS
ET OPÉRAS.

Plutôt que d'ajouter foi à ces médisances du xvII° siècle, il est plus utile de relire le joli tableau que Mme de Lafayette nous a laissé de la jeune cour, et de la famille royale au grand complet. «< La reine-mère, par son rang, tenait la première place dans la maison royale et, selon les apparences, elle devait la tenir par son crédit; mais le même naturel qui lui avait rendu l'autorité royale un pesant fardeau pendant qu'elle était tout entière entre ses mains, l'empêchait de songer à en prendre une partie lorsqu'elle n'y était plus. Son esprit avait paru inquiet et porté aux affaires pendant la vie du roi son mari. Mais, dès qu'elle avait été maîtresse et d'elle-même et du royaume, elle n'avait pensé qu'à mener une vie

GROTESQUE POUR BALLETS ET OPÉRAS.

douce, à s'occuper à ses exercices de

dévotion, et avait témoigné une

assez grande indifférence pour toutes
choses.

«Elle était sensible néanmoins

à l'amitié de ses enfants. Elle les avait élevés auprès d'elle avec une tendresse qui lui donnait quelque jalousie des personnes avec lesquelles ils cherchaient leurs plaisirs. Aussi était-elle contente pourvu qu'ils eussent l'attention de la voir.

GROTESQUE POUR BALLETS ET OPÉRAS.

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avait fait en France et les impressions qu'on en avait données avant qu'elle y arrivat était cause qu'on ne la connaissait quasi pas ou que du moins on

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croyait ne la pas connaître. On la voyait tout occupée d'une passion violente pour le roi, attachée dans tout le reste de ses actions à la reine sa belle-mère, sans distinction de personnes ni de divertissements, et sujette à beaucoup de chagrin, à cause de l'extrême jalousie qu'elle avait du roi. Monsieur, frère unique du roi, n'était pas moins.

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ENTRÉE DE LA REINE A PARIS 1660. (Médaille de Molart.)

inclinations étaient aussi

conformes aux occupa

tions des femmes que celles du roi en étaient éloignées. Il était beau et bien fait, mais d'une beauté et d'une taille plus convenables à une princesse qu'à

LOUIS XIV EN 1660. (Médaille de Loir.)

un prince. Aussi avait-il plus songé à faire admirer sa beauté de tout le monde qu'à s'en servir pour se faire aimer des femmes. Son amour-propre semblait ne le rendre capable d'attachement que pour lui-même.

((

Quand le mariage de Monsieur s'acheva, il n'y eut personne qui ne fût surpris de l'agrément, de la civilité et de l'esprit de Madame. Comme la reinemère la tenait fort près de sa personne, on ne la voyait que chez elle. Ce fut une nouvelle découverte de lui trou

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PHILIPPE, FILS DE FRANCE, FRÈRE DU ROI. (D'après Lély.)

ver l'esprit aussi aimable que tout le reste. On ne parlait que d'elle et tout le monde s'empressait à lui donner des louanges.

((

Après quelque séjour à Paris, Monsieur et Madame allèrent à Fontainebleau. Madame y porta la joie et les plaisirs. Le roi connut, en la voyant de près, combien il avait été injuste en ne la trouvant pas la plus belle personne du monde. Il s'attacha fort à elle et lui témoigna une complaisance extrême. Elle disposait de toutes les parties de divertissement. Elles se faisaient toutes pour elle. C'était dans le milieu de l'été : Madame s'allait baigner, tous les jours elle partait en carrosse, à cause de la

chaleur et revenait à cheval suivie de toutes les dames de la cour. Après souper, on montait dans des calèches et au bruit des violons on s'allait promener une partie de la nuit autour du canal.

« Ce fut alors que toute la France se trouva chez Madame. Tous les hommes ne pensaient qu'à lui faire leur cour et toutes les femmes qu'à lui plaire.

« Mme de Valentinois, sœur du comte de Guiche, fut une de celles qu'elle choisit pour être dans ses plaisirs. Depuis, Mme de Montespan avait l'honneur de la voir souvent, aussi bien que d'autres personnes à qui elle avait témoigné de la bonté avant qu'elle fût mariée.

Mlle de La Tremouille et Mme de Lafayette étaient de ce nombre

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