J'espérais que du temps la main tardive et sûre Il désobéira, la mort est son partage. (Pendant cette scène on entend des cris, des coups contre les portes, le bruit des armes; on voit des soldats qui se battent, une foule de peuple qui sort du temple.) Eur.-Entendez-vous ces cris dans les airs élancés ? Nar.-C'est le signal du crime. Eur.-Ecoutons. Nar.-Frémissez. Eur. Sans doute qu'au moment d'épouser Polifonte La reine en expirant a prévenu sa honte. Tel était son dessein dans son mortel ennui. Eur.-Ah! ne voyez-vous pas cette cruelle escorte, Ism.-Ah! laissez moi reprendre et la vie et la voix. (En effet elle est pâle, échevelée: ses habits sont teints de sang. Un peuple immense la suit en désordre; quelques fem mes la soutiennent, pendant que Narbas lui parle.) Nar.-Mon fils est-il vivant? Que devient notre reine? İsm.-De mon saisissement je reviens avec peine.. Par les flots de ce peuple entraînée. . . . en ces lieux.... Ism.-(avec force) Il est. . le digne fils des dieux. N'a d'un exploit si rare étonné les humains. Nar.-O mon fils! ô mon roi, qu'ont élevé mes mains ! Polifonte, l'œil fixe, et d'un front inhumain, Le peuple observait tout dans un profond silence. Les éclairs sont moins prompts; je l'ai vu de mes yeux, Meurs, tyran, criait-il; dieux, prenez vos victimes! Erox, qui dans son sang voit ce monstre nager, Un gros de nos amis, que son danger excite, ..... Si le tyran n'est plus.... le trouble, la terreur, (Mérope entre en désordre au milieu du peuple: on voit dans le lointain le corps de Polifonte que des soldats ont traîné hors du temple.) Mer.-Guerriers, prêtres, amis, citoyens de Messène, Au nom des dieux vengeurs, peuples, écoutez-moi. Je vous le jure encore, Egiste est votre roi : Il a puni le crime, il a vengé son père. Celui que vous voyez traîné sur la poussière, C'est un monstre, ennemi des dieux et des humains: (Courant vers Egiste qui arrive la hache à la main) Celui que vous voyez, vainqueur de Polifonte, Regardez ce vieillard; c'est lui dont la prudence Ah! quel autre jamais qu'un descendant d'Alcide, (Euriclès entre suivi d'un graud nombre de citoyens.) Eur.-Ah! montrez-vous, Madame, à la ville calmée : Du retour de son roi la nouvelle semée, Volant de bouche en bouche, a changé les esprits. On veut revoir Narbas; on veut vous rendre hommage. Celui de votre fils, le vôtre est adoré. O roi venez jouir du prix de la victoire; Ce prix est notre amour; il vaut mieux que la gloire. Allons monter au trône, en y plaçant ma mère ! Et vous, mon cher Narbas, soyez toujours mon père. Principales Scènes de Zaïre. Tragédie en cinq Actes, par Voltaire.. Introduction.-La Palestine avait été enlevée aux Princes chrétiens par le conquérant Saladin. Noradin, Tartare d'origine, s'en était rendu maître. Orosmane, fils de Noradin, jeune homme plein de grandeur d'âme, commençait à régner avec gloire à Jérusalem; il méprisait la mollesse des soudans, et traitait avec douceur les esclaves chrétiens dont son sérail et ses états étaient remplis. Parmi ses esclaves, il s'était trouvé un enfant pris au sac de Césarée sous le règne de Noradin. Cet enfant ayant été racheté par des Chrétiens, à l'âge de neuf ans, avait été mené en France, où le Roi, Louis IX, avait daigné prendre soin de son éducation et de sa fortune. Nérestan, c'etait le nom qu'on lui avait donné en France, étant retourné en Syrie, fut fait prisonnier une seconde fois, et enfermé parmi les esclaves d'Orosmane. Il trouva dans la captivité une jeune personne avec qui il avait été fait prisonnier autrefois à Césarée. Cette jeune personne, qu'on nommait Zaïre, était regardée par les autres femmes esclaves comme étant née chrétienne, parce qu'on avait trouvé sur elle un petit ornement qui renfermait une croix, et qu'elle avait conservée. Une de ces esclaves, nommée Fatime, qui avait été enfermée dans le sérail, à l'âge de dix ans, tachait d'instruire Zaïre de ce qu'elle savait de la religion de ses pères. Nérestan, animé du zèle qu'avaient alors les chevaliers français, se proposa de racheter, du bien qu'il avait laissé en France, dix chevaliers et les deux esclaves Zaïre et Fatime, espérant pour elles la protection de la reine dont il était connu. Il eut la hardiesse de demander au soudan Orosmane la permission de retourner en France sur sa parole, et le soudan eut la générosité de le permettre. Nérestan partit et fut plus de deux ans hors de Jérusalem. Pendant ce temps |