Page images
PDF
EPUB

Mais, au fond d'une alcôve obscure,
Se cache une aimable figure
Qui se moque du ton qu'il prend,
Et dit tout bas: Oh! l'ignorant!

SUR MON PORTRAIT.

Si, lorsqu'un seul moment votre œil s'est occupé
Sur ce portrait qui, dit-on, est moi-même,
Il ne vous a pas dit : C'est vous seule que j'aime,
Rigaut ne m'a point attrapé.

LE DUC DE VALOIS.

HISTORIETTE.

Tout dormait dans Paris, la nuit était sans lune,
De nuages épais l'air était occupé,

Quand un jeune seigneur, en secret échappé,
Se dérobant à sa suite importune,

Sortit, d'un gros manteau le nez enveloppé...
Tout cela, direz-vous, sent la bonne fortune :
Vous ne vous êtes pas trompé.

Il était attendu par une jeune dame

Qui de son vieux mari n'allongeait pas les jours. Vous dire ici comment il sut lui toucher l'âme, Ce serait un trop long discours;

Et puis dans ce détail quel besoin qu'on s'engage,
Après qu'on vous a déjà dit

Que l'amant était jeune et le mari sur l'âge?
Cela, ce me semble, suffit.

Mais de savoir leurs noms si vous êtes en peine,

Vous allez les apprendre tous :

Valois était l'amant, la belle était la reine,
Louis douze le vieil époux.

Il n'avait point d'enfants. Lui mort, la loi salique
Adjugeait à Valois ce qu'il avait de bien.

Le reste de ses jours ne tenait plus à rien,
Encore était-ce un reste assez mélancolique,
Et cependant il avait entrepris
D'engendrer un hoir mâle, et cela sans remise.
La reine vint alors de Londres à Paris

Pour l'aider dans cette entreprise.

On ne décide point auquel il tint des deux,

Mais enfin de l'hoir mâle on n'eut point de nouvelles.
Valois aima la reine, et déjà même entre eux
Les unions des cœurs passaient pour bagatelles.
Il sentait approcher l'heure du rendez-vous.

Que de vœux empressés ! que de transports de flamme!
Les plaisirs à venir flattaient si bien son âme,
Que des plaisirs présents ne seraient pas plus doux.
Je ne sais par quelle aventure

Dans ce temps justement il rencontre Boisy.
C'était un homme âgé, d'une sagesse mûre,
Enjoué cependant et sage avec mesure,
De plus, son confident choisi.

Ah! Boisy, lui dit-il, tu vois de tous les hommes
Le plus heureux, le plus content!

Au milieu de la nuit, au moment où nous sommes,
La reine, la reine m'attend.

J'entends, lui dit Boisy; fier de votre vietoire,
Tout transporté d'amour et de joie enivré,
Vous courez chez la reine y recueillir la gloire
Du tendre et doux accueil qui vous est préparé.

C'est un bonheur pour vous plus grand qu'on ne peut croire,
Que pour vous arrêter vous m'ayez rencontré ;

Et si la reine était avec vous plus féconde
Qu'elle ne l'est avec son vieil époux

(Or, cela me semble, entre nous,
Le plus vraisemblable du monde),
Le roi serait enfin au comble du bonheur.
Grâce à vous il se verrait père,

Quoique ce nom fût pour lui trop d'honneur;
Et ce que par lui-même il n'eût jamais su faire,
Vous le feriez en sa faveur.

De là tirez la conséquence:

Vous prévoyez bien, comme moi,

Que vous qui, Louis mort, héritez de la France,
Vous verriez après lui monsieur votre fils roi;
Et puis, seigneur, réduit à recevoir la loi,
Il faudrait prendre patience.

Valois, qui jusqu'alors, plein de sa passion,
Ne songeait qu'aux plaisirs de sa chère conquête,
Se vit assassiné d'une réflexion

Qui vint troubler toute la fête.

Qu'il eût bien mieux aimé, s'exposant au hasard
D'être sujet toute sa vie,

Gaîment et sans scrupule achever sa folie,
Quand il eût dû la connaître trop tard!
Sans doute, le péril de perdre un diademe
Refroidissait l'ardeur de ses empressements;
Mais aussi ce péril avait tant d'agréments,
Qu'il valait la royauté même.

Si l'honneur fiérement lui montrait tant d'États
Que lui devait coûter son aimable faiblesse,
Un autre honneur de différente espèce,
Mais pourtant aussi fort, lui demandait tout bas
Que dira de toi ta maîtresse?

Quand l'amour avait le dessous,

Il trouvait de Boisy la morale assez bonne :

Il jugeait qu'il vaut mieux manquer un rendez-vous, Que de manquer une couronne;

Qu'oser lui préférer de légères douceurs,
C'est d'une viande creuse aisément se repaître,
Et que, de sa maîtresse acceptant les faveurs,
Il jouait à se faire un maître.

A l'amour cependant il n'a pas renoncé.
Quitter une maîtresse et si belle et si chère !
Encor si cet amour était moins avancé,
Ce ne serait pas une affaire;
Mais sur le point d'être récompensé,
La planter là! cela ne se fait guère.

Il sait, de plus, qu'il a le présent dans ses mains;
L'avenir n'est pas sûr, pourquoi s'en mettre en peine,
Et, sur une crainte incertaine,
Refuser des plaisirs certains?
L'irrésolution était d'une nature

A ne prendre pas sitôt fin;

Mais Boisy, de qui l'âme était un peu plus dure,
Le prit et le força de rebrousser chemin.

Sans cela, de longtemps il n'eût pu rien conclure.
Ce sage confident, soulageant son ennui
Par de bonnes raisons morales,

Quoiqu'il se révoltât encor par intervalles.
Le ramena coucher chez lui.

ÉPIGRAMME

CONTRE DESPRÉAUX.

Quand Despréaux fut sifflé sur son ode *,
Ses partisans criaient dans tout Paris :
Pardon, messieurs, le pauvret s'est mépris ;
Plus ne louera, ce n'est pas sa méthode.

* L'ode sur la prise de Namur.

Il va draper le sexe féminin ;

A son grand nom vous verrez s'il déroge
Il a paru, cet ouvrage malin*.

Pis ne vaudrait, quand ce serait éloge.

VERS

POUR LE PORTRAIT DE MADAME DU TORT.

C'est ici madame du Tort.

Qui la voit et ne l'aime a tort;
Mais qui l'entend et ne l'adore
A mille fois plus tort encore.
Pour celui qui fit ces vers-ci,

Il n'eut aucun tort, Dieu merci.

LE ROSSIGNOL, LA FAUVETTE ET LE MOINEAU.

FABLE.

Le tendre rossignol et le galant moineau,
L'un et l'autre amoureux de la jeune fauvette,
Sur les branches d'un jeune ormeau,
Lui parlaient un jour d'amourette.
Le petit chantre ailé, par des airs doucereux,
S'efforçait d'amollir le cœur de cette belle.
Je serai, lui dit-il, toujours tendre et fidèle,
Si vous voulez me rendre heureux.
De mes douces chansons vous savez l'harmonie :

[graphic]

La Satire des femmes.

« PreviousContinue »