Page images
PDF
EPUB

pulsion donnée par Cuvier, suivie si noblement par MM. Dufrénoy, Croizet, Brongniart, d'Orbigny, Cravard, Jobert, Laurillard, Marcel de Serres, Gervais, Hébert, Lartet, Pomel, etc., en France; le regrettable Schmerling et le laborieux champion de la géologie et de l'anthropologie, d'Omalius d'Halloy, en Belgique; MM. Pictet et Esscher, en Suisse; Nesti, Risso, Savi, Metaxa, La Marmora, Costa, Gemellaro, etc., en Italie; Fischer, Brandt, Eversmann, Keyserling, en Rus. sie; Nilson, etc., en Scandinavie; Buckland, Owen, Bowerbank, Broderip, Wetherell, Mantell, etc., en Angleterre; Karg, Mosler, Germar, van Meyer, Konig, Wagner, Kaup, Nitsch, Giebel, etc., en Allemagne. Consultez, pour l'Asie, les travaux de Pallas, de Blyth, et surtout ceux de Falconer pour l'Inde; pour l'Amérique du Sud, profitez des études de l'infatigable Lund; pour la septentrionale, choisissez, parmi cent autres, les écrits de Deane, Hitchcock, Peale, Godman, Lea, Cooper, Warren, Hays, Morton, etc.

Conseillons surtout au paléontologue ornithologiste de visiter par lui-même les localités les plus intéressantes, parmi lesquelles nous nous permettrons de lui signaler, sans oublier Gibraltar et d'autres points beaucoup moins visités de la Péninsule ibérique, de l'Italie et de la Corse, les brèches de la Sardaigne, et le célebre Monte-Bolca; en Angleterre, les îles Sheppey, Kirkdale, Maidstone, Lawfort, les environs de Torbay et de Norwick, et surtout les terrains argileux de Londres, près de Primrose Hill; en Belgique, Chokier, près de Liége, puis Engis et Remouchamps; en Allemagne, OEningen, Koltennordheim, Ottmuth, dans la Silésie supérieure ; Wechevegeln, près Magdebourg; Neustad (dans le Hartz), Karstoff, etc.; et dans notre belle France, la plus grande partie de l'Auvergne, surtout le Cantal, à Pont-du-Château, à Oergovia et au Puy-en-Velay, les environs de Montpellier, d'Aix, de Cette, de Perpignan, Saint-Antoine, Willane, SaintGilles, Sansan, Bize, Avison, Sallèles, Pondres, près Sommières, et surtout Meudon, et Montmartre, qui, quoique plus rapproché, est peut-être la localité la plus instructive !

Le prince Bonaparte, dans la suite de son mémoire, établit que presque tous les oiseaux dits vulgairement antediluviens paraissent avoir appartenu aux deux ordres Ineptes et Rudipennes. Le tableau comparatif et parallélique réunissant ces deux ordres est l'objet essentiel du

mémoire dont nous venons de reproduire les considérations préliminaires.

[ocr errors]

Mystification antediluvienne.

On connaissait déjà bien des manières d'imiter, de fabriquer avec art, divers objets précieux recherchés par la curiosité des amateurs. On connaissait les antiquités postiches sculptées, les jours de pluie, par les ciceroni de Rome et d'Herculanum, et cédées par eux, à des prix inespérés, aux touristes ravis. On connaissait les médailles grecques et romaines obtenues avec toute sorte de métaux hétérogènes, et marquées de la menteuse empreinte fournie par un plâtre complaisant. Sans parler des Raphaëls suspects et des Titiens apocryphes, on savait encore, par d'habiles supercheries de la lumière et de la couleur, jeter dans l'antre ténébreux des brocanteurs dociles une foule de chefs-d'œuvre controuvés, signés des premiers maîtres de l'art, et destinés à rehausser un jour la magnificence des galeries de nos Turcarets modernes. On savait, en un mot, contrefaire à plaisir tous les produits admirés de l'imagination et de l'art. Mais il restait, en ce genre de supercheries, un dernier pas à accomplir. Contrefaire les œuvres de la mort, imiter, à force de patience et d'industrie, les froids et tristes vestiges façonnés par l'action des siècles, fabriquer de toutes pièces des squelettes d'animaux artificiels, rapprocher d'une main hardie et quelquefois savante mille étranges pièces osseuses, çà et là ramassées, pour en composer des fossiles imaginaires, et tromper, en vue d'un bénéfice de marchand, la confiance et la crédulité des naturalistes, voilà ce qui n'avait pas été essayé jusqu'à ce jour. Cette mystification scientifique, réalisée avec un suc. cès déplorable et couronnée par une impunité prolongée,

s'est accomplie dans la candide Allemagne. Le chirurgien Hoffmann fut l'auteur de ce méfait, et pour peu que le remords ait pu trouver accès dans cette âme perverse, il a dù bien souvent se frapper la poitrine en voyant les conséquences de sa coupable facétie. Les deux Camper et Cuvier, le grand Cuvier lui-même, après avoir reçu des mains perfides d'Hoffmann les fossiles frelatés, après en avoir dessiné et gravé les images dans des livres aujourd'hui célèbres, ont tiré de ces apocryphes débris des conséquences et des déductions scientifiques dont l'erreur vient aujourd'hui briller d'un triste et tardif éclat.

Comment s'est découvert l'affreux pot aux roses scientifique de l'antique Germanie? C'est ce que nous a appris le savant naturaliste Schlegel, dans une lettre adressée au prince Charles Bonaparte et communiquée à l'Institut par cet honorable académicien. M. Schlegel avait été chargé de faire un travail sur le Mosasaurus, ou le monstrueux Saurien fossile des carrières de Maëstricht, l'un de ces gigantesques débris qui ont révélé au génie de notre grand naturaliste toute une série de créations étranges, aujourd'hui ensevelies dans la poudre des premiers âges du monde. Une grande partie des pièces du Mosasaurus, qui ont été rassemblées et décrites par les deux Camper, et dont Cuvier a donné l'explication, se trouvent actuellement déposées au Musée de l'université de Groningue; M. Schlegel a donc commencé par soumettre ces pièces à un nouvel examen1.

Déjà Adrien Camper, en parlant des osselets des extrémités du Mosasaurus, avait reconnu que ces pièces avaient été collées artificiellement par Hoffmann sur un bloc de craie sableuse des carrières de Maëstricht. En examinant ce bloc de plus près, M. Schlegel, non-seulement a reconnu la

1. Le reste du squelette du Mosasaurus est conservé dans les collections du Muséum d'histoire naturelle de Paris, où l'on peut heureusement s'assurer de l'intégrité et de l'authenticité parfaites de ce fossile.

justesse de cette observation de Camper, mais il a constaté que le même artifice avait été employé pour un assez grand nombre d'autres pièces décrites par Camper, et après lui par Cuvier. Hoffman ne s'était pas contenté de creuser des trous dans les blocs de craie, de les remplir de plâtre, et d'y fixer les différents débris qu'il se proposait de vendre; poussant plus loin l'audace, il avait réuni en une seule diverses pièces osseuses, et changé leur aspect en les enfonçant en partie dans le plâtre et les superposant les unes aux autres, pour faire croire aux acheteurs que ces restes avaient été retirés des carrières dans la position qu'il lui avait plu d'inventer. Ces fossiles factices, préparés avec un très-grand soin, avaient acquis l'apparence d'une vétusté si parfaite, qu'aucun doute ne s'était élevé dans l'esprit des trop confiants naturalistes; c'est à peine si l'on osait toucher à ces reliques précieuses, en raison de leur fragilité. Il a fallu à M. Schlegel huit jours d'un travail opiniâtre pour détacher et nettoyer, sans les altérer, toutes les pièces du Mosasaurus.

Voici quelques-uns des exemples les plus frappants, signalés par M. Schlegel, de la confusion à laquelle a donné lieu la supercherie du chirurgien de Maëstricht:

Camper et Georges Cuvier lui-même, dit M. Schlegel dans sa lettre au prince Bonaparte, avaient pris pour l'os tympanique du Mosasauurus une pièce d'une forme très-bizarre et nullement semblable chez les autres Sauriens, et Cuvier, en copiant la figure de cet os donnée par Camper, l'avait placée en sens contraire de son original; d'où il résulta qu'après avoir été tournée de droite à gauche par le graveur des planches de Camper, cette figure fut encore tournée sens dessous dessus par Cuvier. En examinant ce débris, je m'aperçus aussitôt que sa partie principale se trouvait, d'un côté, à moitié recouverte d'une lame osseuse très-mince, qui, à son tour, était terminée par un tubercule d'une grandeur assez considérable. Une pareille disposition d'os étant impossible, je dus naturellement conjecturer que ce tubercule ne se trouvait pas à sa place. J'essayai par conséquent de le détacher, et y ayant

réussi, je vis que c'était tout bonnement une épiphyse collée contre la lame en question, que cette lame n'était autre chose que l'os operculaire de la mâchoire inférieure, et que la partie principale de la pièce se trouvait être l'os coronaire de cette même mâchoire.

M. Schlegel est également parvenu à retirer saine et sauve la grande pièce prise par Cuvier pour les restes d'un frontal principal et de deux frontaux antérieurs, « tous, selon Cuvier, fort mutilés par leurs bords, » et il a pu constater que cette pièce se trouve partagée, au moyen d'une suture longitudinale, en deux parties égales, dont l'une est complète et aucunement endommagée par les bords.

Les osselets des extrémités retirés par le naturaliste allemand de leur couche artificielle de plâtre ont donné lieu à des observations très-curieuses. M. Schlegel a reconnu d'abord que les pièces prises par Camper et Cuvier pour des phalanges onguéales ne sont que de simples phalanges à deux facettes articulaires, et que cette erreur de nos savants provenait de ce que Hoffmann avait donné à ces osselets une apparence de forme conique, en enfonçant un des bouts, et le cachant en partie sous la pâte gypseuse qui servit à fixer ces pièces dans un bloc commun de grès.

En conséquence, dit M. Schlegel, l'osselet figuré par Cuvier (Ossements fossiles, vol. II, pl. xx, fig. 21) ne diffère en rien de celui représenté sur la même planche, fig. 6, et les phalanges onguéales de cet être sont encore à découvrir.

J'ai encore pu, ajoute M. Schlegel, obtenir des éclaircissements sur les os du carpe. Ceux représentés par Cuvier, fig. 5 et 22, et pris par lui, le premier comme appartenant au Mosasaurus, le second à la Chelone de Hoffmann ne proviennent pas seulement de la même espèce, mais probablement d'un même individu du Mosasaurus, attendu que leurs facettes glénoïdales s'adaptent parfaitement l'une contre l'autre; j'ai de même acquis la certitude que tous les osselets des mains et des pieds figurés par Camper et Cuvier sur les planches précitées, pro

[ocr errors]
« PreviousContinue »