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Buon-Servo se trouvait à l'ancre dans la baie d'Armiro, à l'entrée de la mer Adriatique, quand la foudre vint le visiter. Pendant les orages, les mariniers ioniens ont l'habitude, entre autres coutumes superstitieuses, d'attacher un fer à cheval au mât de misaine de leur vaisseau; il y avait donc un fer à cheval attaché au mât du Buon-Servo. Au moment où la foudre éclata, un matelot, Antonio Théodoro de Scarpante, était assis au pied du mât de misaine, occupé à raccommoder sa chemise; il fut tué sur le coup. Son corps ne présentait aucune trace de blessure; seulement, on remarqua sur ses reins l'image parfaitement distincte d'un fer à cheval qui offrait les mêmes dimensions que le fer cloué au mât de misaine.

Vers la même époque, un autre brigantin appartenant au docteur Micalopulo fut frappé par la foudre dans la rade de Zante, une des îles Ioniennes. L'un des mariniers qui dormait à la proue de l'embarcation, fut tué par la décharge atmosphérique. Quand on le déshabilla, on trouva imprimé sur sa poitrine un superbe numéro 44. Tous ses camarades attestèrent n'avoir jamais remarqué une telle empreinte sur le corps du matelot. D'un autre côté, ce numéro 44 était identique par ses dimensions avec un numéro de métal attaché à l'un des agrès du bâtiment et qui se trouvait sur le trajet que la foudre avait suivi. L'empreinte formée sur le corps du marinier était donc la reproduction d'un objet placé dans le voisinage.

Un fait aussi extraordinaire que le précédent a été encore rapporté par Orioli.

Le 9 octobre 1836, un orage épouvantable se manifesta au-dessus de Zante; la foudre éclata sur plusieurs points de la ville et de la campagne; le jeune Spiridione Politi en fut atteint et tué dans une maison située aux Acrotères, sur une éminence entourée de vignes et d'oliviers.

Le soir même, le comte Laudo, magistrat instructeur,

invita le docteur Dicopulo, membre de la Société médicochirurgicale de Zante, à venir avec lui examiner le cadavre et les lieux foudroyés. Ils furent accompagnés par les assesseurs du juge, un notaire et plusieurs témoins; et voici ce qui résulta de l'examen attentif auquel fut soumis le corps de la victime.

Le jeune Politi, couché sur un lit, était revêtu d'une veste de coton de couleur foncée, d'un pantalon de toile, d'un gilet de piqué à fleurs. Il portait une cravate de soie noire, une chaussette blanche au pied gauche; son pied droit était nu, tous ses vêtements, en partie déchirés, semblaient brûlés du côté du dos.

« Ayant dépouillé entièrement le jeune Politi, dit le docteur Dicopulo, nous vîmes autour de ses reins une bande de toile serrée, et dans la doublure de cette ceinture nous trouvâmes quatorze pièces d'or enveloppées de papier, en deux petits paquets; l'un, du côté droit, contenait une pistole d'Espagne, trois guinées et deux demi-guinées; celui qui était à son côté gauche renfermait une autre pistole espagnole, quatre guinées, une demi-guinée et deux sequins de Venise. Ni ces pièces, ni le papier, ni la toile ne présentaient la moindre marque de brûlure.

« Sous le pied droit de Politi, une blessure ou entaille de plus d'un pouce de longueur nous fit présumer que la foudre avait pénétré par cette extrémité, et son passage était tracé tout le long du cadavre; la jambe, la cuisse droites et le dos, jusqu'à la nuque, étaient fortement colorés brun noirâtre, et dans toutes ces parties la peau présentait de petites déchirures ou des scarifications ramifiées. De petites taches brunes, de la forme et de la grandeur d'une lentille, étaient disséminées sur sa face. Enfin, ce qui nous parut à tous bien extraordinaire, le cadavre avait, au milieu de l'épaule droite, six cercles qui conservaient leur couleur de chair et paraissaient d'autant mieux tranchés sur la peau noirâtre. Ces cercles, l'un à la suite de l'autre, se touchant en un point, étaient de trois grandeurs différentes, correspondant exactement à celles des monnaies d'or que le jeune homme avait du côté droit de sa ceinture ce que le juge instructeur et tous les témoins ont certifié, après que la comparaison en fut faite. »

Ainsi, la foudre avait gravé sur l'épaule du jeune homme l'empreinte des monnaies renfermées dans sa poche.

En 1841, un fait du même genre fut constaté dans le département d'Indre-et-Loire. Pendant un orage, deux personnes s'étaient réfugiées sous un peuplier : c'était un garçon meunier et un magistrat dont on ne dit pas le nom. La nuée orageuse vint à se décharger contre l'arbre, et la foudre, qui ne connaît pas les distinctions sociales, imprima également sur la poitrine du magistrat et sur celle du garçon meunier des traces parfaitement semblables à celles d'une feuille de peuplier.

A tous les faits précédents, M. Boudin ajoute une observation toute semblable, dont il a été lui-même le témoin, et qui l'a conduit à porter son attention sur ces singuliers phénomènes.

Il serait très-prématuré d'admettre, avec l'auteur du Mémoire qui nous occupe, que les impressions produites sur le corps des individus foudroyés sont du même ordre que les phénomènes photographiques et qu'elles peuvent s'expliquer par une action chimique analogue. Mais ce qui donne à ces faits une certaine importance et ce qui leur prête un intérêt tout autre que celui d'une simple curiosité, c'est qu'ils sont peut-être de nature à être un jour invoqués par la médecine légale comme signes propres à caractériser, dans quelques circonstances, la mort par l'action de la foudre.

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Le stéréoscope-omnibus.

M. Faye, savant physicien et astronome, a fait connaître le moyen de remplacer le stéréoscope par une sim

ple feuille de papier percée de deux trous. Ces deux trous sont de 2 millimètres de diamètre, et ils sont placés à une distance l'un de l'autre, à peu près égale à celle des deux yeux de l'observateur. Pour se servir de ce stéréoscope-omnibus, il suffit de le placer d'une main sur le dessin double qu'on tient de l'autre main, et de l'approcher peu à peu des yeux, sans cesser de regarder le dessin à travers les deux trous. Bientôt, ces deux trous semblent se confondre en un seul : alors l'image en relief apparaît entre les deux images planes avec une netteté parfaite. Sans doute, on peut obtenir la sensation du relief sans se servir d'aucun appareil; mais le moyen indiqué par M. Faye facilite la vision stéréoscopique, et s'applique aisément à tous les cas, surtout aux dessins insérés dans des albums ou dans des livres, et qui se rattachent à la cristallographie, à l'histoire naturelle, et qu'on ne peut placer sous le stéréoscope ordinaire. Ce moyen a servi à M. Faye à vulgariser, dans ses cours, des notions qui sont désormais indispensables pour les études scientifiques.

Nous devons faire remarquer à ce sujet que l'on a déjà fait usage d'un moyen analogue à celui qui est conseillé par M. Faye. On sait depuis longtemps que, pour obtenir l'effet stéréoscopique, il suffit de tenir la plaque photographique à une certaine distance des yeux, de regarder, dans le champ extrême de sa surface supérieure, un point parallèle au rayon visuel, et plus eloigné que la plaque, et de rapprocher celle-ci graduellement. On、voit alors, d'abord, trois images qui se confondent peu à peu en une seule, et celle-ci représente enfin l'image stéréoscopique avec les reliefs et la perspective, comme si elle était vue dans le stéréoscope.

Le moyen indiqué par M. Faye pourra servir avec avantage à remplacer les stéréoscopes que vendent nos fabricants : ce sera donc pour le public un clair bénéfice. Nous

prévenons seulement les personnes presbytes qu'elles doivent renoncer à en faire usage, l'image stéréoscopique ne se produisant pas avec cet instrument si la vue est un peu longue.

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La pêche miraculeuse.

Une nouvelle méthode de pêche, empruntant ses moyens à la physique, car elle consiste à éclairer l'intérieur des eaux par la lumière électrique, a été proposée par un chimiste de Paris, M. Scipion Dumoulin.

Nos engins actuels de pêche sont devenus insuffisants, comme l'étaient autrefois pour les transports les pataches et les malles-postes, que la vapeur et l'électricité sont venues remplacer. C'est aussi l'électricité qui fera disparaître tous nos piéges enfantins, tels que la ligne et l'hameçon, qui ne servent à attraper les poissons qu'un à un. A l'aide du stratagème que fournit la physique, on peut faire arriver de très-loin les poissons dans nos filets.

Dans l'Adriatique, on pêche les thons à la lueur d'un brasier allumé sur une grille qui se trouve placée à l'avant des bateaux; les saumons se prennent de la même manière en Écosse. Mais si l'on parvient à accrocher quelques thons à coups de trident barbelé, les autres échappent à ce piége sanglant, de sorte que, sur trois cents curieux, c'est à peine si on en prend une douzaine par nuit, tandis qu'on les prendra peut-être en moins d'une heure avec le moyen nouveau que nous allons décrire.

Ce moyen consiste à associer trois ou quatre barques, et à descendre, avec des cordes, un grand et fort filet, au fond de l'eau. On laisse glisser, au centre de ce filet, un globe de verre épais, dans lequel on a placé l'appareil qui sert à produire la lumière électrique, c'est-à-dire deux char

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