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ARTICLE XIX.

PRIÈRE POUR DEMANDER A DIEU LE BON USAGE DES MALADIES.

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SEIGNEUR, dont l'esprit est si bon et si doux en toutes choses, et qui êtes tellement miséricordieux, que non-seulement les prospérités, mais les disgrâces mêmes qui arrivent à vos élus sont des effets de votre miséricorde faites-moi la grâce de ne pas agir en païen dans l'état où votre justice m'a réduit; que, comme un vrai Chrétien, je vous reconnoisse pour mon père et pour mon · Dieu en quelque état que je me trouve, puisque le changement de ma condition n'en apporte pas à la vôtre; que vous êtes toujours le même, quoique je sois sujet au changement; et que vous n'êtes pas moins Dieu quand vous affligez et quand vous punissez, que quand vous consolez et que vous usez d'indulgence.

II.

Vous m'aviez donné la santé pour vous servir, et j'en ai fait un usage tout profane. Vous m'envoyez maintenant la maladie pour me corriger; ne permettez pas que j'en use pour vous irriter par mon impatience. J'ai mal usé de ma santé, et ·"vous m'en avez justement puni. Ne souffrez pas que j'use mal de votre punition. Et puisque la

Pensées. 2.

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corruption de ma nature est telle, qu'elle me rend vos faveurs pernicieuses, faites, ô mon Dieu ! que votre grâce toute-puissante me rende vos châtiments salutaires. Si j'ai eu le cœur plein de l'affection du monde pendant qu'il a eu quelque vigueur, anéantissez cette vigueur pour mon salut; et rendez-moi incapable de jouir du monde, soit par foiblesse de zèle de charité, pour corps, soit par

ne jouir que

de vous seul.

III.

O Dieu, devant qui je dois rendre un compte exact de toutes mes actions à la fin de ma vie et à la fin du monde! O Dieu, qui ne laissez subsister le monde et toutes les choses du monde que pour exercer vos élus, ou pour punir les pécheurs! O Dieu, qui laissez les pécheurs endurcis dans l'usage délicieux et criminel du monde! O Dieu, qui faites mourir nos corps, et qui, à l'heure de la mort, détachez notre âme de tout ce qu'elle aimoit au monde! O Dieu, qui m'arracherez, à ce dernier moment de ma vie, de toutes les choses auxquelles je me suis attaché, et où j'ai mis moa cœur! O Dieu, qui devez consumer, au dernier jour, le ciel et la terre, et toutes les créatures qu'ils contiennent, pour montrer à tous les hommes que rien ne subsiste que vous, et qu'ainsi rien n'est digne d'amour que vous, puisque riea n'est durable que vous! O Dieu, qui devez de truire toutes ces vaines idoles et tous ces funestes objets de nos passions! Je vous loue, mon Dieu.

de ce

et je vous bénirai tous les jours de ma vie, qu'il vous a plu prévenir en ma faveur ce jour épouvantable, en détruisant à mon égard toutes choses, dans l'affoiblissement où vous m'avez réduit. Je vous loue, mon Dieu, et je vous bénirai tous les jours de ma vie, de ce qu'il vous a plu me réduire dans l'incapacité de jouir des douceurs de la santé et des plaisirs du monde; et de ce que vous avez anéanti en quelque sorte, pour mon avantage, les idoles trompeuses que vous anéantirez effectivement pour la confusion des méchants au jour de votre colère. Faites, Seigneur, que je me juge moi-même ensuite de cette destruction que vous avez faite à mon égard, afin que vous ne me jugiez pas vous-même ensuite de l'entière destruction que vous ferez de ma vie et du monde. Car, Seigneur, comme à l'instant de ma mort je me trouverai séparé du monde, dénué de toutes choses, seul en votre présence, pour répondre à votre justice de tous les mouvements de 'mon cœur; faites que je me considère en cette maladie comme en une espèce de mort, séparé du monde, dénué de tous les objets de mes attachements, seul en votre présence, pour implorer de votre miséricorde la conversion de mon cœur; et qu'ainsi j'aie une extrême consolation de ce que vous m'envoyez maintenant une espèce de mort pour exercer votre miséricorde, avant que vous m'envoyiez effectivement la mort pour exercer votre jugement. Faites donc, ô mon Dieu, que, comme vous avez prévenu ma mort, je prévienne

la rigueur de votre sentence, et que je m'examine moi-même avant votre jugement, pour trouver miséricorde en votre présence.

IV.

Faites, ô mon Dieu, que j'adore en silence l'ordre de votre providence adorable sur la conduite de ma vie; que votre fléau me console; et qu'ayant vécu dans l'amertume de mes péchés pendant la paix, je goûte les douceurs célestes de votre grâce durant les maux salutaires dont vous m'affligez. Mais je reconois, mon Dieu, que mon cœur est tellement endurci et plein des idées, des soins, des inquiétudes et des attachements du monde, que la maladie non plus que la santé, ni les discours, ni les livres, ni vos Ecritures sacrées, ni votre évangile, ni vos mystères les plus saints, ni les aumônes, ni les jeùnes, ni les mortifications, ni les miracles, ni l'usage des sacrements, ni le sacrifice de votre corps, ni tous mes efforts, ni ceux de tout le monde ensemble, ne peuvent rien du tout pour commencer ma conversion, si vous n'accompagnez toutes ces choses d'une assistance toute extraordinaire de votre grâce. C'est pourquoi, mon Dieu, je m'a dresse à vous, Dieu tout-puissant, pour vous de mander un don que toutes les créatures ensemble ne peuvent m'accorder. Je n'aurois pas la hardiesse de vous adresser mes cris, si quelque autre pouvoit les exaucer. Mais, mon Dieu, comme la conversion de mon cœur que je vous demande est

le

un ouvrage qui passe tous les efforts de la nature, je ne puis m'adresser qu'à l'auteur et au maître tout-puissant de la nature et de mon cœur. A qui crierai-je, Seigneur, à qui aurai-je recours, si ce n'est à vous? Tout ce qui n'est pas Dieu ne peut pas remplir mon attente. C'est Dieu même que je demande et que je cherche; et c'est à vous seul, mon Dieu, que je m'adresse pour vous obtenir. Ouvrez mon cœur, Seigneur; entrez dans cette place rebelle que les vices ont occupée. Ils la tiennent sujette. Entrez-y comme dans la maison du fort; mais liez auparavant le fort et puissant ennemi qui la maîtrise; et prenez ensuite les trésors qui y sont. Seigneur, prenez mes affections que monde avoit volées; volez vous-même ce trésor, ou plutôt reprenez-le, puisque c'est à vous qu'il appartient, comme un tribut que je vous dois, puisque votre image y est empreinte. Vous l'y aviez formée, Seigneur, au moment de mon baptême, qui est ma seconde naissance; mais elle est toute effacée. L'idée du monde y est tellement gravée, que la vôtre n'est plus connoissable. Vous seul avez pu créer mon âme; vous seul pouvez la créer de nouveau; vous seul avez pu y former' votre image, vous seul pouvez la reformer, et y réimprimer votre portrait effacé; c'est-à-dire, JESUS-CHRIST Mon Sauveur, qui est votre image et le caractère de votre substance.

V.

O mon Dieu, qu'un cœur est heureux qui peut

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