Page images
PDF
EPUB

D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE

N° 7

17 Février

[ocr errors]

1872

28. DE

Sommaire 25. ENDERIS, Morphologie de la langue osque. 26. PLINE LE JEUNE,
Euvres, p. p. Keil. 27. NONIUS MARCELLUS, p. p. QUICHERAT.
LAMARRE, De la milice romaine. 29. SOHм, La Procédure dans la Loi Salique.
30. CRABB ROBINSON, Souvenirs, tr. p. EITNER. 31. PONT, Le Patois de la
Tarentaise. Variétés Deux lettres inédites de Saint-Évremond.

25..

Versuch einer Formenlehre der oskischen Sprache mit den Inschriften und Glossar. Von Ernst ENDERIS. Zürich, in Commission bei S. Hæhr. 1871. lxxiv-56 p. In-8°. - Prix: 3 fr. 85.

Cet ouvrage fait pendant à celui du D' H. Bruppacher: Versuch einer Lautlere der oskischen Sprache, Zürich, 1869. Il contient : 1o un alphabet et un exercice de lecture (inscr. de 7 1.), 2° un complément du catalogue (bien court) donné par M. Brupp. des ouvrages relatifs à l'osque; 3° la morphologie, divisée en Stammbildung (thèmes verbaux, p. j-viij, nominaux, viij-xxvj) et Wortbildung (conjug. xxvj-xlvj, déclin. xlvj-lxxiv); 4o la reproduction en caractères latins de toutes les inscriptions osques avec trad. latine en regard; 5o un glossaire de tous les mots, qui en donne la décomposition grammaticale, et qui pour chacun renvoie aux inscriptions où il se trouve. La morphologie contient (p. xliv) un paradigme verbal complet avec les formes ombriennes et latines en regard, un tableau de toutes les formes pronominales (p. lxvij), des paradigmes de déclinaison nominale avec comparaison des dialectes italiques, sabin, ombrien, volsque, latin, et même des autres langues, grec, gothique, sanscrit (p. lxx ss.). Bien que l'auteur suive en gros le plan du Compendium de Schleicher, il a supprimé et avec raison l'incommode enchevêtrement des cas du singulier et du pluriel: chacun des deux nombres est étudié dans son ensemble. La distribution des formes nominales par déclinaisons (en o, en ā, etc.), et non plus par cas, est peut-être moins heureuse. — La suppression des majuscules, même après un point (cela dans un ouvrage plein d'abréviations et par suite de points qui ne terminent pas la phrase), est une affectation qui ne sert qu'à gêner la lecture et les recherches. Les doctrines grammaticales sont partout saines et clairement exposées, mais il y a trop peu de renvois aux autres ouvrages sur la matière, de sorte qu'on ne sait presque jamais si l'auteur reproduit les idées de ses devanciers ou émet une idée nouvelle. M. Enderis ne se fait pas d'illusion sur ce qui manque forcément à une œuvre comme la sienne : les quelques restes de l'osque, nous dit-il (p. j), que nous ont conservés les monuments de cette langue ne nous permettent naturellement pas d'entreprendre une morphologie de ce dialecte qui soit seulement à peu près complète. Aussi ne manque-t-il jamais de mettre à profit les vestiges que nous possédons du sabin, l'ombrien et le volsque, le latin et le falisque.

:

Parmi les vues particulières de l'auteur il en est une qui trouvera peu de faveur il fait des masculins comme Eavdias, innéτa, Galba, perfuga, hosticapas, osq. Tanas, Kahas, Mapaç, Santia des noms à thème en a qui n'auraient pas subi l'assourdissement en o (p. ix, xlvij); en réalité ce sont des thèmes en ā (provenant, il est vrai, d'un renforcement de a, mais qui avaient l'a avant la séparation des langues indo-européennes), tout comme les variantes grecques en η-ς, ἱππότης, νεφεληγερέτης; cf. Schleicher, Compendium S 244. - Μ. Ε. adopte l'opinion vulgaire sur les datifs pluriels en úis, úís, ais, aís, qui auraient perdu un bh, mais qu'on pourrait plus simplement rapprocher, avec le latin is, du grec otot, atat et du scr. eshu. M. Savelsberg (Lateinische Partikeln auf d und m, p. 35) explique même d'une manière analogue le dat. pl. en ís de la 2o déclin. - On pourrait relever d'autres affirmations de détail plus ou moins contestables, mais elles n'ôtent à l'ouvrage de M. E. rien de sa valeur. Joint à l'ouvrage de M. Bruppacher, il forme un manuel indispensable de la langue osque.

26.

Louis HAVET.

C. Plinii Caecilii secundi epistularum libri novem, epistularum ad Traianum liber, Panegyricus, ex recensione H. KEILII, accedit index nominum cum rerum enarratione, auctore Th. MOMMSEN. Lipsiae, Teubner, 1870. In-8°, xlvij et 432 p. Prix: 14 fr. 75.

Il y avait seize ans que M. Keil nous promettait une édition critique des Œuvres de Pline le Jeune. Celle qu'il nous donne aujourd'hui répond à ce qu'on était en droit d'attendre de lui. Sa préface est consacrée à faire l'histoire du texte de Pline, laquelle est relativement assez compliquée. A la renaissance on ne connut d'abord qu'un recueil de cent lettres (livres I-IV, sauf la lettre 27; et les six premières lettres du cinquième livre), qui s'est conservé en plusieurs copies (Codices C epistolarum) dont la plus ancienne est un Florentinus du xe s. M. K. démontre que ce manuscrit est une copie du Riccardianus qui a existé à Florence jusqu'en 1832 et dont on a maintenant perdu la trace; cette démonstration est appuyée sur l'analogie des variantes, peu nombreuses il est vrai, communiquées par Corte dans son édition. Comme d'autre part le Riccardianus, à en juger par l'index des épitres qui est en tête, comprenait autrefois le recueil complet des lettres, on est conduit à penser qu'après la perte des derniers livres il a été la source commune de tous les Codices C epistularum. Les index de ce manuscrit, qui ont heureusement été publiés rendent de grands services pour la restitution des en-têtes des lettres.

Plus tard on retrouva un exemplaire contenant huit livres, le VIII® toutefois avait disparu et était remplacé par le neuvième; en outre dans le cinquième livre et dans le dernier, l'ordre des lettres était interverti. Le plus ancien manuscrit de cette classe (Codices VIII librorum) date de 1429 et se trouve au Mont Cassin; mais ces copies, comme la plupart de celles qui ont été faites en Italie au xve siècle, sont très-fautives, pleines de passages interpolés et parfois l'ordre des lettres y est changé. C'est sur un ms. de ce genre qu'a été faite l'édition princeps de Venise 1471.

Mais, vers la même époque, on semble avoir trouvé et utilisé en partie des manuscrits plus complets et plus anciens; l'édition de Rome (s. 1. et a.) qu'on croit être de 1474 contient déjà une partie du VIII livre, qui y figure il est vrai comme IX®. Enfin, en 1518 parut à Milan l'édition de Catanaeus pour laquelle on se servit du Mediceus de Florence, du x° siècle, manuscrit complet qui est actuellement reconnu comme le meilleur.

Quant à la correspondance avec Trajan dont l'unique ms. a péri, et dont Alde Manuce avait fait un Xe livre des lettres, il faut décidément la séparer du recueil principal, comme l'a fait M. Keil. Le manuscrit archétype du Panégyrique a également disparu, et il n'en reste que des copies du xve siècle dont les meilleures sont celles du Vatican (no 3461) et de Wolfenbüttel, qui ne rendent toutefois point inutiles celles de Vienne (no 48) et de Munich (no 309). Le titre de Panégyrique ne lui a pas été donné par Pline. C'était une gratiarum actio à l'occasion du consulat que le prince avait conféré à Pline, mais M. Keil l'a conservé, vu qu'il remonte à une époque assez ancienne et est consacré par l'usage.

M. Keil donne un texte revu avec beaucoup de circonspection', il préfère souvent conserver des passages peu intelligibles, plutôt que d'accorder trop à des conjectures admises dans les éditions courantes. Les variantes des manuscrits sont placées au bas des pages ainsi que les principales corrections proposées par des éditeurs. M. Mommsen a fourni bon nombre de corrections plausibles, ainsi qu'un index nominum, comprenant tous les noms de personnes avec l'indication des autres auteurs, des inscriptions et des monnaies qui en font mention. Cet index est d'une valeur incomparable, mais nous regrettons qu'il ne comprenne pas les noms géographiques, et ne soit pas accompagné d'un index rerum et d'un index grammatical. Tel qu'il est ce volume doit cependant remplacer toute autre édition pour les travaux vraiment scientifiques.

Ch. M.

27.

Nonii Marcelli peripatetici tubursicensis de compendiosa doctrina ad filium collatis quinque pervetustis codicibus nondum adhibitis cum ceterorum librorum editionumque lectionibus et doctorum suisque notis edidit Lud. QUICHERAT. Parisiis, Hachette, 1872. In-8°, xxxj et 678 p. Prix: 15 fr.

La compilation du philosophe péripatéticien Nonius Marcellus, espèce de lexique disposé dans un ordre systématique (I de proprietate sermonum, II de honestis et nove veterum dictis, III de indiscretis generibus, IV de varia significatione sermonum, V de differentia similium significationum, VI de impropriis, VII de contrariis generibus verborum, VIII de mutata declinatione, IX de numeris et casibus, X de mutatis conjugationibus, XI de indiscretis adverbiis, XII de

1. Pour les lettres la date en est indiquée, toutes les fois qu'elle peut se déterminer, suivant les indications fournies par Mommsen dans son mémoire sur Pline le Jeune (Hermes, III, p. 31 et suiv., dont une traduction française est sous presse.

2. M. Quicherat a remarqué le premier que Nonius avait dû composer un ouvrage de philosophie et qu'il défend (p. 526) la thèse péripatéticienne du libre arbitre, que cette école soutenait contre les stoïciens, comme on le voit par Alexandre d'Aphrodisias.

doctorum indagine, XIII de genere navigiorum, XIV de genere vestimentorum, XV de genere vasorum vel poculorum, XVI de genere calciamentorum, XVII de colore vestimentorum, XVIII de genere ciborum et potuum, XIX de genere armorum, XX de propinquitate), a été éditée quatre fois, par Hadrianus Junius en 1565, par Godefroy en 1585, par Mercier en 1614, par Gerlach et Roth en 1842. Mercier s'est servi d'un manuscrit qui était à l'abbaye de Saint-Victor et qui ne s'est pas retrouvé depuis. Gerlach et Roth ont donné la collation complète d'un manuscrit de Wolfenbüttel et d'un manuscrit de Leyde. M. Quicherat donne dans son édition toutes les leçons et les conjectures les plus importantes de ses devanciers et des savants qui ont traité les citations de Nonius; et il a encore ajouté les variantes de cinq manuscrits, codex Harleianus (1x siècle) du British Museum d'après la collation faite par M. Gustave Masson, et quatre manuscrits du xe siècle qui se trouvent en France, l'un à Montpellier, les autres à la Bibliothèque nationale, sous les numéros 7665, 7666, 7667. Tous ces manuscrits dérivent d'un même exemplaire dont le texte était fort altéré, et paraissent indépendants les uns des autres.

Le texte de Nonius est fort amélioré dans l'édition de M. Quicherat. En voici des exemples. Dans le vers de Novius (p. 4) « O pestifera ponticum (suivant trois manuscrits) ou pontica (suivant quatre mss.) fera, trux tolutiloquentia » l'éditeur restitue avec certitude «< panticum » intestins, ventre. Il rétablit (p. 15) « torrus >> dicitur fax » avec les manuscrits, au lieu de «< torris » que donnent toutes les éditions; et de même dans les vers d'Attius cités en exemple. Les lexiques donnent deux adverbes, qui sont des barbarismes, d'après la leçon des éditions (p. 122) << hinnibunde pro hinnienter. » Mais les manuscrits donnent << equae >> hinnibundae » dans la citation de Claudius Quadrigarius, et un manuscrit donne << hinnibundae pro..... » En voilà plus qu'il ne faut pour autoriser l'éditeur à lire << hinni bundae pro hinnientes. » Tous les manuscrits et toutes les éditions portent dans le vers de Lucilius (p. 196) « nec si ubi Graeci, ubi nunc » Socratici charti, etc. » Mais on n'a pas fait attention que dans tout ce livre il s'agit des changements de genre et non des changements de déclinaison, et que Nonius cite cet exemple pour établir que charta était autrefois du masculin comme le mot grec 8 ápts dont il dérive. L'éditeur lit donc avec raison << Socratici chartae. » Le vers de Lucilius (p. 200) a été fort maltraité, dans les manuscrits où on lit «< caldissime ac bene plena iias olorum ou plenai iasolorum ou » plenaia solorum ou plena iasolorum atque anseri' collus. » L'éditeur pense qu'il s'agit d'un abatis aux choux et lit «< caldissima cyma (petit chou qu'on n'a pas » laissé grossir) ac bene plenum vas olerorum atque etc. » Il s'est rencontré avec Madvig (Adversaria I, 18) dans la substitution de «< perficiam » à «< perei>> ciam » dans le vers de Lucilius (p. 296) « ego enim an pereiciam ut me >> amare expediat. » La leçon des manuscrits « pro» substituée à la vulgate << prae » dans la citation de Cicéron (p. 225) « pro negotiatoribus Achaeis syngraphas quas nostra voluntate conscripsimus » confirme la conjecture de Madvig (p. 155) que les mots << pro neg. Ach. » sont le titre du discours de Cicéron dont Nonius cite les mots qui suivent «< syngraphas etc. >>

UNIV. OF

Malgré tout ce qui a été fait sur Nonius, il reste encore beaucoup à faire; et les conjectures remarquables de Madvig (Adversaria I, 36, 37, 73, 152) le montrent. Dans toutes ces tentatives faites pour améliorer un texte très-gâté mais non partout désespéré, l'édition de M. Quicherat tiendra toujours une place des plus honorables par le soin et la sagacité dont elle offre des preuves multipliées.

28.

De la milice romaine depuis la fondation de Rome jusqu'à Constantin par CL. LAMARRE, docteur ès-lettres, sous-préfet des études à Sainte-Barbe. Deuxième édition. Paris, Hachette, 1870. In-18, 384 p. Prix: 3 fr. 50.

-

Un joli volume, très-bien imprimé, orné de bonnes gravures copiées sur les monuments de Rome et empruntées au Dictionnaire d'archéologie de MM. Ch. Daremberg et E. Saglio actuellement sous presse à la librairie Hachette.

Quant à l'ouvrage même, nous avons le regret de dire qu'il est absolument mauvais. Il fourmille d'erreurs grossières, présente nombre de lacunes, de contradictions, de confusions et n'a même pas le mérite d'une exposition claire et méthodique.

Non-seulement l'auteur ignore complètement les travaux les plus importants. de la science moderne, mais il se sert maladroitement des ouvrages de troisième main, tels que l'inévitable Dezobry (Rome au siècle d'Auguste). Il n'en prétend pas moins dans sa préface avoir «< tenu compte des immenses recherches de » l'érudition et de la critique moderne. » Il assure avoir compulsé tous les auteurs anciens, le Digeste et les inscriptions qu'il dit avoir été pour lui des sources fécondes. Et pourtant il ne semble pas avoir la moindre idée des précieux renseignements fournis par les inscriptions et les auteurs sur l'avancement dans l'armée, sur les cohortes prétoriennes, urbaines et de vigiles', sur la flotte, sur les congés, etc. Dès qu'il arrive à l'époque impériale, pour laquelle on peut dire que maintenant on sait tant de détails précis, il s'embrouille et se perd en déclamations vagues et banales sur la perte de la liberté, le manque de discipline, etc., etc. On peut dire que M. Lamarre ne s'est même pas donné la peine de lire ce qu'on a écrit de plus élémentaire sur cette matière, dont nous sommes loin de méconnaître les difficultés et les obscurités, mais qui présente cependant un nombre si considérable de faits intéressants et acquis à la science.

Si l'auteur avait étudié les travaux modernes, s'il ne citait comme des sources des articles de journaux faits de quatrième ou cinquième main, on pourrait à la rigueur lui pardonner de nous offrir en outre des passages de la brochure du général Trochu sur l'armée française et de la Graziella de Lamartine. Quant aux renvois aux auteurs anciens, on peut se demander s'il les a relus avec attention. Nous sommes persuadés que les personnes qui ne sont pas au courant de la matière trouveront elles-mêmes dans ce livre un manque absolu de précision et auront l'impression que l'auteur ne comprend pas bien ce dont il parle. Ceux qui ont lu d'autres traités élémentaires s'apercevront bien vite que par exemple

1. Il se débarrasse, il est vrai, de ce sujet en assurant que ces cohortes ne faisaient pas partie de l'armée.

« PreviousContinue »