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je vous envoie copie de la réponse que j'en ai reçue. Ne pourriez-vous pas essayer auprès de l'Empereur une tentative pour en obtenir ? Votre Majesté sait combien un secours de cette espèce nous serait nécessaire.

Mes dépêches vous sont portées par les aides de camp du général Domon, qui les appelle auprès de lui. Dans le vif intérêt que m'inspire son état, je n'ai pas cru le refus possible, et j'ai la confiance d'avoir pressenti vos intentions.

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J'ai reçu la dépêche que Votre Majesté m'a fait l'honneur de m'adresser le 23 du mois dernier, et qui est relative à une demande de quinze mille fusils. J'ai soumis cet objet à la décision de S. M. l'Empereur et Roi, qui m'a précédemment prescrit de ne céder des armes aux Puissances alliées que lorsque le prix de celles qui ont été antérieurement fournies aurait été soldé. Votre Majesté est informée qu'il n'a été rien payé sur la valeur des dix mille fusils que j'ai mis, l'année dernière, à Sa disposition.

D'un autre côté, je ne pourrais disposer pour l'armement des troupes des Puissances alliées que de six mille

1 Voir note 1re à la fin du volume.

fusils étrangers de bon service, qui existent à l'île d'Elbe et à Mantoue, et ce sont les seuls que je puisse mettre à la disposition de Votre Majesté.

Je prie Votre Majesté de me faire savoir si, à défaut de fusils français neufs, Elle consentira à prendre ces fusils étrangers, à raison de vingt-et-un francs l'un.

Je suis avec respect,

Madame,

de Votre Majesté,

le très humble et très obéissant serviteur,

Le Ministre de la Guerre,

Signé le Duc DE FELTRE.

ANNEXE IX

Le comte de Mosbourg, Ministre des Finances à Naples, à Sa Majesté le Roi des Deux-Siciles.

Sire,

(Autographe.)

J'attendais avec une vive impatience une occasion sûre pour exprimer à Votre Majesté le chagrin que m'ont causé les premières lignes de Sa lettre du 29 août dernier, de cette lettre dont la suite devait être pour moi un sujet de joie, puisque j'y trouve, Sire, un tableau de Vos nouveaux exploits, un nouveau monument de Votre gloire. Votre Majesté paraît avoir accueilli avec mécontentement ce que je Lui disais dans ma lettre du..., au sujet du parlementaire anglais qui avait porté à Naples trois familles napolitaines venant de Sicile; mais, sans doute, Sire, je m'étais mal expliqué, ou Votre Majesté avait

perdu le souvenir de ce qu'Elle m'avait fait l'honneur de me dire le jour de Son départ. Je Vous prie de Vous rappeler, Sire, que Vous m'aviez manifesté l'intention de prévenir la Reine que peut-être un parlementaire arriverait, parce qu'il avait été accordé à quelques familles de Naples l'autorisation de se rendre dans cette capitale. Vous aviez ajouté qu'afin de prévenir toute intelligence entre les Anglais et leurs agents secrets, Vous recommanderiez à la Reine de choisir un homme de toute confiance qui, exclusivement, serait chargé des communications indispensables avec le parlementaire. Vous aviez même pensé que je pourrais être chargé de cette commission, mais je priai Votre Majesté d'observer qu'elle ne paraissait pas de nature à pouvoir être remplie par un Ministre, et que celui de la Police pourrait être blessé de voir un de ses collègues employé pour un objet de son département. Ce fut là que s'arrêta notre entretien dans ce jour où tant de douleur déchirait mon âme. Je venais d'éprouver le malheur le plus affreux, et je voyais Votre Majesté prête à S'arracher encore du sein de Sa famille et de Ses sujets pour aller affronter de nouveaux dangers.

Lorsque le parlementaire arriva, j'étais persuadé que la Reine avait reçu Vos instructions. Je fus sur le point de Lui en parler; mais ayant rencontré le Ministre de la Police, il me fit entendre qu'il avait des ordres particuliers. Alors je compris que Votre Majesté n'avait pas exécuté le projet dont Elle m'avait fait part, et je gardai le plus profond silence. Cependant, j'eus la certitude que beaucoup de lettres arrivées par le parlementaire avaient été distribuées dans la ville, et le Ministre de la Police m'ayant dit qu'il n'avait pas reçu deux dépêches que je savais avoir été apportées pour lui, je craignis qu'on n'eût employé son nom pour couvrir quelque correspondance illicite.

Nous étions dans un moment où l'opinion paraissait

prendre une direction très redoutable. Votre départ avait été pour tous les amis du Gouvernement un signal d'alarme, et pour tous ses ennemis un signal d'espérance. Un grand nombre de personnes, se croyant compromises, semblaient portées à prendre un parti pour leur salut. Toutes ces circonstances me déterminèrent à Vous demander, Sire, d'établir, sur des objets d'un si haut intérêt, une surveillance dont les soins ne pussent jamais en être détournés.

Les choses sont aujourd'hui un peu changées. Les nouvelles des victoires de la Grande Armée, l'éclat de Vos grandes actions personnelles, dont les Napolitains s'enorgueillissent, quelque vague espoir de paix, tout cela a semblé relever et rectifier l'opinion. Mais il ne faut pas s'y tromper; Votre Majesté connaît Ses sujets autant les impressions auxquelles ils se livrent sont vives, autant elles sont passagères. Ils s'exaltent avec enthousiasme; ils s'inquiètent avec facilité. Votre présence leur inspire une telle confiance, que Votre Majesté, quand Elle est dans Ses États, peut, dans tous les événements, compter sur eux; Votre absence les décourage au point qu'ils n'osent pas compter sur eux-mêmes. Il faut donc s'attendre que s'il survenait des changements sur le théâtre de la guerre, il y en aurait dans Votre Royaume comme dans tout le reste de l'Italie. Un grand nombre de braves gens Vous seraient fidèles; mais ils ne le seraient peut-être pas avec assez d'énergie, se voyant privés de l'appui qui fait leur force. Les malintentionnés seraient, au contraire, pleins d'audace; ils seraient excités par les intrigues et par l'or de l'ennemi. C'est pour de tels moments, Sire, que les moyens les plus étendus pour veiller à la sûreté de l'État doivent être dans les mains les plus intéressées à sa conservation. C'est pour de tels moments que la sûreté de Vos enfants doit être confiée à des personnes qui ne veuillent et qui ne

puissent que périr plutôt que de laisser les dangers arriver jusqu'à eux. Je suis persuadé que la victoire accompagnera constamment l'Empereur et Votre Majesté ; mais si le cours des brillants succès qui ont signalé le commencement de la campagne venait à s'interrompre, veuillez, Sire, calculer alors combien Votre situation deviendrait difficile, et ne voyez que le désir de Vous servir dans le désir d'avoir en main les moyens de prévenir tout ce qui pourrait la rendre plus périlleuse encore.

Ce que je disais tout à l'heure à Votre Majesté de la promptitude avec laquelle on voit quelquefois changer ici l'opinion et la disposition des esprits, peut être remarqué dans ce moment. Il y a peu de jours qu'à la nouvelle des événements du 26 et du 27, on montrait le plus grand enthousiasme, on manifestait les plus belles espérances, on s'empressait de se rallier au Gouvernement; mais des nouvelles moins favorables ayant transpiré, on les recueille presque avec autant d'avidité que les bonnes on les exagère, les mauvais discours se multiplient, les malintentionnés montrent de la hardiesse; les gens de bien s'alarment et se taisent; la multitude suit, comme toujours, les mouvements de ceux qui parlent le plus haut. Nous nous flattons que bientôt de nouveaux avantages viendront changer cette fâcheuse direction des esprits, qui n'est pas encore bien marquée, mais que les observateurs attentifs aperçoivent aisément.

La lecture du rapport de Votre Majesté à l'Empereur sur les journées du 26 et du 27 sera un utile moyen de réveiller les sentiments qui attachent les Napolitains à Votre Majesté1. La Reine le reçut avant-hier, Elle l'a déjà fait lire à un grand nombre de personnes; un grand nombre le liront encore; ceux qui ne pourront pas le

1 On n'a pas jugé à propos de publier ce rapport, qui ne se trouve inséré ni dans le Moniteur de Paris, ni dans le Moniteur Napolitain.

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