Page images
PDF
EPUB

ÉCONOMIE RURALE.

Mûriers et Ronces,

PAR M. LE DOCTEur a. rouget, d'arbois, membre fondateur.

I.

On s'explique difficilement la rareté des mûriers dans nos localités. 1o Le Mûrier noir se recommande par ses baies si succulentes, acidules et sucrées, que l'on mange au dessert ou au commencement des repas. C'est avec elles que l'on prépare, chez les confiseurs et les pharmaciens, cet excellent sirop de mûres d'un usage universel. On en fabrique une sorte de vin, une boisson dont on retire de l'alcool par la distillation (1).

2o Depuis la maladie des vers à soie, le Mûrier blanc, dont les feuilles cessaient d'être utilisées, a été généralement arraché dans un moment de désespoir. Cependant, ses fruits bacciformes donnent un rendement lucratif. Cueillis à maturité, pressés et fermentés, ils produisent à la distillation un alcool pur et franc de goût, pouvant rivaliser avec les meilleurs alcools de vins. Deux propriétaires intelligents du Midi, MM. F. Boyer et G. Flandin (2) ont obtenu de 150 kilog. de mûres un hectolitre de suc, qui a rendu un septième à la distillation, soit environ 14 à 15 litres. Ajouter que les frais de cueillette et de fabrication sont presque insignifiants, c'est appeler sur cet arbre l'attention des agriculteurs vienne enfin à disparaître la maladie des vers à soie, ils auraient à choisir entre l'exploitation de la feuille et celle du fruit. L'écorce du mûrier noir peut être filée; on en fabrique des cordes, du papier, etc. Les racines de ces mûriers sont purgatives et vermifuges. Desbois de Rochefort (3), sous le rapport des propriétés tæniafuges, assimile les racines du mûrier blanc à celles de la fougère måle.

-

II.

On se contente généralement de maudire les nombreuses variétés de ronces qui pullulent dans les haies, les lieux déserts, incultes et les clairières des forêts. On ferait mieux de les utiliser.

1o Le Framboisier (rubus idœus), la seule des plantes de ce genre, de la famille des rosacées, dont la tige est droite, fait exception; on

(1) Pallas, Voyages.

(2) Courrier du Gard, 1865.

(3) Cours élémentaire de matière médicale, tome second, page 197.

le cultive même dans les jardins, où il donne des fruits moins parfumés et plus facilement altérables.

D'après Macquart, les fleurs seraient aussi sudorifiques que celles du

sureau.

Ses grosses baies rouges, sucrées, odorantes, constituent, par l'écrasement dans l'eau, une excellente boisson.

Pour justifier la faveur dont jouit le framboisier, il suffit de rappeler qu'on obtient de ses fruits du sirop, du ratafia, une sorte de vin, de l'hydromel, du vinaigre, des confitures, des glaces, etc.

2° Quant aux ronces proprement dites, les deux variétés principales dans notre climat, sont les ronces à fruits noirs (rubus fruticosus) et celles à fruits bleus (rubus cœsius). Elles jouissent d'ailleurs de propriétés analogues.

Leurs feuilles, légèrement astringentes, sont, comme celles du framboisier, d'un usage populaire dans les angines.

Les Francs-Comtois sont exempts de ce préjugé, qui (1) attribue aux mûres ou framboises sauvages, la production de la fièvre, de la gale, de la teigne, etc. Les baies douces et sucrées de ces rubus sont, pour les habitants des montagnes, une véritable manne tombée des cieux, que les enfants recherchent avidement et que recueillent avec soin les personnes qui ont le loisir de vaguer dans les forêts. On les mange aux repas après qu'elles ont subi un commencement de fermentation, ou fraîches et arrosées de lait ou de vin sucré.

Lorsque l'on réfléchit à l'immense quantité de mûres qui, chaque année, servent de pâture aux oiseaux ou pourrissent sur pied, on éprouve du regret. Ne semble-t-il pas que l'on oublie d'en tirer parti? Par la fermentation, elles donnent une boisson vineuse agréable, que la distillation transformerait en un alcool bien préférable pour la santé à celui de gentiane. Il n'y a qu'à se baisser pour récolter ces vignes qui ne coûtent rien de culture et qui redoutent peu les intempéries.

L'utilisation sur une large échelle de ces mûres sauvages préviendrait peut-être encore une sophistication du vin. On assure, en effet (2), que certains marchands colorent leurs vins avec le suc de la mûre noire (morus nigra) et que, dans certains pays (3), c'est avec celui de la ronce noire que l'on falsifie le vin muscat.

(1 et 2) Mérat et de Leus. Dictionnaire de matière médicale, tome VI. (3) Encycl. méth. Botanique, VI.

CHIMIE VÉGÉTALE.

Analyse du bois de Genevrier,

PAR M. JULES LÉON, PHARMACIEN-CHIMISTE, MEMBRE CORRESPONDANT.

COMPOSITION CHIMIQUE, USAGES.

A. Action de l'eau.

L'eau bouillante dissout un principe amer, peu de résine, mais par l'ébullition prolongée, la liqueur s'est fortement colorée par la dissolution d'un principe colorant rouge rosé plus abondant que le principe amer, dans le bois proprement dit.

L'écorce fournit moins de principe colorant, mais le principe amer et résineux y existe en plus forte quantité et mieux caractérisé par le goût et l'odeur du sassafras dont le genevrier est à coup sûr le succédané, d'après une analyse comparative que nous avons faite de cette dernière écorce exotique.

B. Action de l'alcool.

Le bois de sassafras cède peu de principes à ce véhicule, mais l'écorce colore fortement ce liquide en rouge. On peut conclure de là que la matière colorante du bois diffère capitalement de celle de l'écorce, puisque celle-ci seule se dissout dans l'esprit de vin. La teinture d'écorce de genevrier présente aussi le goût et l'odeur du sassafras.

C. Action de l'acide chlorhydrique.

Les décoctions aqueuses de genevrier sont précipitées en jaune par l'acide chlorhydrique, et la liqueur se décolore. Cette couleur ne résisterait done pas à l'action des acides énergiques.

D. Action de la potasse et des alcalis.

Coloration en violet foncé avec les alcalis en général et le carbonate de soude en particulier.

Nous passons sous silence la composition en centièmes, ces résultats étant purement théoriques, et nous bornons ici ce modeste aperçu de la composition du bois et de l'écorce du genevrier, aperçu suffisant pour indiquer aux praticiens que le bois de genevrier, surtout son écorce, sont susceptibles, comme nous l'avons indiqué déjà (Bulletin No 8, 1864), de rendre des services signalés à la médecine comme tonique et dépuratif, et dans l'industrie de la liquoristerie, comme condiment et adjuvant des propriétés hygiéniques de certaines liqueurs de table.

SÉANCE GÉNÉRALE DU 10 MAI 1866.

La séance est ouverte à 2 heures, sous la présidence de M. ClercOuthier, President.

Le Secrétaire-Général lit le proces-verbal de la dernière séance, qui est adopté.

Correspondance manuscrite: M. Tamiser, médecin-major au 2me régiment de zouaves, nous fait l'honneur de nous adresser une notice du docteur Blancsubé, médecin à Mostaganem, sur l'acclimatation, en Afrique, de la chayote (sechium edule), plante comestible qui peut être appelée à rendre de grands services. Notre honorable compatriote se propose, à la récolte prochaine, de nous en faire parvenir un échantillon. M. Gagneur, de Molain, nous écrit de Montpellier qu'il nous expédie par le chemin de fer une caisse remplie d'objets curieux, venus de l'Afrique et de la Cochinchine.-M. Marminia n'attend qu'une occasion pour nous faire hommage de son dernier ouvrage intitulé: Les Animaux philosophes.-M. Oppepin serait heureux de posséder quelques numéros du Bulletin qui contient son Ode couronnée par l'Académie de Mâcon.

[ocr errors]

Correspondance imprimée : Compagnie anonyme d'entrepôts et de magasins généraux de blé, d'avoine, de farine, situés rue Dejean, en face de la gare des marchandises du chemin de fer du Nord à Amiens, joint à la circulaire un exemplaire des tarifs. Au Petit Jardinier, Duvivier, grainier, fleuriste et pépiniériste, quai de la Mégisserie, 2, Paris : graines de fleurs, oignons à fleurs, plantes potagères, fraisiers; - graines de prairies, gazons pour pelouses, plantes diverses. - Etablissement horticole de Liesval, rue de Villiers, 42, quartier des Ternes, à Paris : plantes nouvelles, plantes à feuillage ornemental.― Dounand, rue Cassette, 9: véroniques nouvelles obtenues de semis par Mme Treze. Albertine Varenque. Fleurs qui sont d'un beau violet vif en s'épanouissant et d'un violet lilacé plus tard.—Machines agricoles anglaises de Th. Pitter, agent en France de J. et F. Howard, 9, rue Fénélon. Le Cultivateur agenais publie une circulaire adressée par M. Jaille aux Sociétés d'agriculture, relativement à un projet d'association agricole pour la fabrication et la vente, à prix réduits, des engrais industriels connus sous le nom de guano agenais.- Société centrale d'apiculture: Le succès que la Société centrale d'apiculture a obtenu dans l'exposition des insectes utiles et de leurs produits, des insectes nuisibles et de leurs dégâts, tenue au Palais de l'industrie le 15 avril dernier, l'a engagée à fonder une grande Société internationale

d'insectologie, formée des trois sections suivantes : 1o Société ou section de sériciculture et autres insectes utiles; 2° Société ou section d'apiculture; 3° Société ou section des insectes nuisibles. — Dans la séance du mois de janvier, elle a arrêté les bases de cette vaste Association et organisé les bases de chaque section. Sous peu, les statuts seront imprimés et envoyés aux personnes qui en feront la demande. Les adhésions sont reçues au Secrétariat de la Société d'agriculture, rue Saint-Vic, 67, près le Jardin des Plantes, à Paris.

Lectures à l'ordre du jour : De M. le docteur Blancsubé, médecin à Mostaganem: Notice sur l'acclimatation, en Algérie, du Sechium comestible, nouveau produit alimentaire dont il a fait l'expérience. - De M. le docteur Andrieux, de Brioude: Explication devant l'Académie impériale de médecine, de deux Appareils de sudation dont il est l'inventeur. De M. Gourdon de Genouillac : Symptômes d'une transformation prochaine dramatique et littéraire. - De M. H. Cler: Allégorie : Invocation au Vaisseau de la Patrie, imitation paraphrasée d'une ode d'Horace.

Est nommé membre correspondant de la Société, M. Simonin, Emile, sous-chef de gare de remplacement à Lons-le-Saunier.

AGRICULTURE.

De l'alternance des herbes dans les prés
naturels,

PAR M. VIONNET, VICE-PRÉSIDENT.

De savants sylviculteurs ont reconnu que des essences différentes de bois se succèdent les unes aux autres, dans un même sol, à de longs intervalles. Ainsi, après une longue suite de coupes, soit de sapin, soit de toute autre essence résineuse, si la dernière coupe est à blanc, on verra sur la même place se développer soit du hêtre, soit du charme, etc. Il y a lieu de croire que les graines de ces dernières essences ont conservé toute leur force germinative, et qu'elles n'attendaient qu'un peu plus de lumière et surtout l'absorption possible d'une grande quantité de gaz carbonique dont s'emparaient avidement les hautes futaies des conifères.

Cette alternance se remarque encore plus particulièrement sur les plantes herbacées, parce qu'elles reviennent à de plus courtes périodes.

« PreviousContinue »