Page images
PDF
EPUB

aujourd'hui rendu compte de la géographie, et parcouru tout le Rhin depuis sa source jusques à la mer, tous les États1 qu'il coupe ou qu'il traverse, les villes situées sur ce fleuve, les différentes rivières qui s'y jettent, et les villes qui y sont assises depuis leur source jusques au Rhin, les divers canaux que forme le Rhin, leurs noms, ceux des villes qui sont situées sur ces canaux, et comme ce grand fleuve dégénère en un petit ruisseau au-dessus de Leyden avant de se perdre dans la mer : voilà ce dont il a rendu compte assez bien à mon gré, vu la grande mémoire qu'il faut pour arranger tant de noms et les mettre chacun dans leur ordre. Il aime peu à apprendre par cœur. Il me faut pour le réduire une mutinerie qui ne se comprend pas sans l'avoir vue. Son Altesse a besoin que vous lui déclariez, Monseigneur, que vous voulez très absolument qu'il sache très bien la géographie : cela peut-être me soulagera. Je suis avec un profond respect, Monseigneur,

de Votre Altesse Sérénissime

le très humble et très obéissant serviteur,

DELABRUYÈRE.

:

Au dos A Son Altesse Sérénissime Monseigneur le Prince à Chantilly; et d'une autre main M. de la Bruyère, 27 janvier 1686. Nouvelles de la dernière répétition que Mgr le duc de Bourbon a fait (sic) de la géographie; qu'il est bon que Son Altesse lui témoigne qu'elle veut absolument qu'il sache bien la géographie.

1. Ces trois mots à la place de : « toutes les provinces »>, mots rayés.

XV

LA BRUYÈRE A CONDÉ.

MONSEIGNEUR,

D'autres auront mandé à Votre Altesse Sérénissime que Monsieur le duc de Bourbon se porte fort bien, qu'il va toutes les après-dînées au manége, où il s'exerce fort longtemps pour le carrousel'. Cela diminue un peu le temps destiné aux études, mais il n'y a point de remède : je me réduis à employer utilement auprès de Son Altesse les heures que cet exercice nous laisse, et fais choix des choses dont il a plus besoin d'être instruit, sur lesquelles j'insiste fort et ne lui fais point de quartier. Je l'ai entretenu trois différentes fois des circonstances de la bataille de Pavie, afin qu'il fût plus prêt à vous en rendre compte ; je lui fais revoir le détail des provinces de France, qu'il avoit un peu oubliées, et j'observe la même conduite sur toutes les autres études. Je suis toujours avec le même attachement et avec un profond respect,

Monseigneur,

de Votre Altesse Sérénissime

le très humble et très obéissant serviteur,

DELABRUYÈRE.

Ce mardi 26 mars [1686], à Versailles.

Au dos: A Son Altesse Sérénissime Monseigneur le Prince, à Chantilly; et d'une autre main M. de la Bruyère, 26 mars 1686. Nouvelles des études de Mgr le duc de Bourbon.

1. « Le Roi, avec Monseigneur et Madame la Dauphine, écrit Dangeau à la date du 4 mars (tome I, p. 306), a réglé qu'il y auroit après Pâques un carrousel de quarante hommes et de quarante dames. »

XVI

LA BRUYÈRE A CONDÉ.

Ce mercredi, [24] avril [1686], à Versailles.

MONSEIGNEUR,

Je voudrois aller si vite dans les études de Monsieur le duc de Bourbon qu'il y eût tous les jours quelques nouvelles choses à vous mander sur le progrès qu'il y fait. Elles ont été un peu interrompues par la dévotion des dernières fêtes' et par les répétitions du carrousel. Nous sommes cependant depuis quelques jours dans le bon train, et fort avant dans la vie de François premier, qu'il écoute avec assez d'application. J'apporte tout le soin dont je suis capable pour l'en rendre instruit, et des autres études dont Votre Altesse m'a chargé et dont j'espère lui en rendre compte à l'ordinaire. Je suis avec un profond respect,

Monseigneur,

de Votre Altesse Sérénissime

le très humble et très obéissant serviteur,

DELABRUYÈRE.

Au dos A Son Altesse Sérénissime Monseigneur le Prince, à Chantilly; et d'une autre main: M. de la Bruyère, 24 avril 16863.

1. La fête de Pâques avait été, cette année, célébrée le 14 avril. 2. Il y avait eu répétition le 16 et le 21 avril; il y en eut encore le 28, le 1er mai, le 8 et le 13. Le carrousel, plusieurs fois ajourné, eut lieu le 28 mai.

3. C'est le lendemain, 25 avril, que les jeunes époux furent réunis : voyez Dangeau, tome I, p. 325.

1

XVII

LA BRUYÈRE A CONDÉ.

MONSEIGNEUR,

Ce 4 juillet [1686], à Versailles.

Comme nous nous sommes réglés sur l'abrégé de M. de Mezeray1 pour la vie du roi Henri second, qui est d'ailleurs fort courte, cela est cause que nous l'avons déjà achevée; je m'attache présentement à en faire récapitulation à Son Altesse, afin qu'elle le sache plus parfaitement, et j'observerai cette méthode dans toutes les vies qui suivent. Et parce que Monsieur le duc de Bourbon a toujours un peu de peine à s'appliquer, et que cela retarde le projet de ses études, je ne sais autre chose que lui inculquer fortement et souvent les endroits de l'histoire, de la géographie et des généalogies, dont il est tout à fait nécessaire qu'il soit instruit; ainsi je ne sors presque point de l'Allemagne, la Hongrie, l'Italie, la France, les Pays-Bas, qu'il oublieroit dès que je passerois à d'autres connoissances et m'y arrêterois trop longtemps. Je ménage le temps selon que je le dois, et tâche de réparer ses inapplications par mon opiniâtreté et par mille répétitions, car je n'ai rien plus à cœur que de vous contenter. Madame la duchesse de Bourbon étudie régulièrement et avec fruit. Je suis avec un profond respect,

Monseigneur,

de Votre Altesse Sérénissime

le très humble et très obéissant serviteur,

DELABRUYÈRE.

1. Abrégé chronologique ou Extrait de l'histoire de France, publié

en 1667 et très souvent réimprimé.

:

Au dos: A Son Altesse Sérénissime Monseigneur le Prince, à Chantilly; et d'une autre main M. de la Bruyère, 4 juillet 1686.

XVIII

LA BRUYÈRE A MÉNAGE1.

Περί Αδολεσχίας, περὶ Λαλιᾶς, περί Λογοποιΐας. Ges trois chapitres des Caractères de Théophraste paroissent d'abord rentrer les uns dans les autres, et ne laissent pas au fond d'être très différents. J'ai traduit le premier titre du Diseur de rien; le second, du Grand parleur ou du Babil; et le troisième, du Débit des nouvelles. Il est vrai, Monsieur, que dans la traduction que j'ai faite du second de ces trois chapitres, intitulé: du Babil, je n'ai fait aucune mention des Dionysiaques parce qu'il n'en est pas dit un seul mot dans le texte ; j'en parle dans

1. Cette lettre, trouvée, dit-on, parmi les papiers de Ménage, et vendue à Sens, en 1849, parmi les autographes qui avaient formé la collection de M. Th. Tarbé, appartient aujourd'hui à M. le comte d'Hunolstein. M. Destailleur l'a publiée, avec le fac-simile de la signature, dans les deux éditions qu'il a données de la Bruyère (p. xvII et p. xxvII du tome I). Nous voyons dans les notes qu'ont bien voulu nous communiquer sur cette lettre M. d'Hunolstein d'une part, M. Édouard Fournier de l'autre, que la Bruyère a écrit, au commencement et dans le cours de la lettre : άdoλɛxías*, au lieu de ádoλɛoylas, et qu'il a remplacé partout les 0 par des t. Deux fois aussi il a mis, déplaçant l'y, Dyonisiaques. Suivant une annotation manuscrite que porte la lettre, elle a été écrite « en 1690 ou 1691, vers le mois de septembre. >>

2. Voyez tome I, p. 39; p. 48, et note 1; p. 50.

*N'aurait-on pas confondu avec l'abréviation du groupe x, qui ne diffère du x que par une petite boucle initiale? Ou bien est-ce la Bruyère que cette abréviation a trompé ?

« PreviousContinue »